Après le départ d'Élise, Julien s'est dirigé d'un pas lourd vers le toit de l'Immeuble Valdor. La nuit, glaciale et impitoyable, hurlait sous l'assaut d'un vent déchaîné. Les bourrasques fouettaient les visages et faisaient voler les manteaux sombres des deux hommes, donnant à leurs silhouettes l'allure menaçante de rapaces nocturnes s'apprêtant à fondre sur leur proie.Sous ce ciel d'un noir d'encre, Julien a allumé une cigarette d'un blanc immaculé. La flamme de son briquet vacillait sous le souffle du vent, mais il en a tiré une longue bouffée avec une détermination froide. Son visage mince se creusait encore davantage sous l'effort, ses pommettes saillaient durement, rendant ses traits à la fois inquiétants et fascinants.Silencieux d'abord, il a fumé la moitié de sa clope avant de planter son regard, aussi acéré qu'une lame, dans les yeux de Gaston. Sa voix, glaciale comme la nuit environnante, a fendu l'air : « Annule la coopération. Quant au divorce entre Élise et moi… Laisse
Mariés depuis quatre ans – bien avant que la grande crise conjugale ne soit venue frapper à leur porte – Julien Courtois menait, tel un funambule oscillant entre deux mondes, une existence à doubles visages, dissimulée derrière le masque des apparences respectables.Dans les faubourgs de Paris, devant une villa, Élise Charmaine, silencieuse dans le siège arrière de leur caravane luxueuse, observait le cœur serré son époux filer en douce vers une autre femme. La jeune demoiselle, vêtue d'une robe immaculée – à la fois pure et empreinte d'une douleur indicible – resplendissait telle une étoile lointaine, impossible à atteindre.Julien, dans un élan presque irrévérencieux, serrait alors la main de la jeune fille avec l'ardeur de deux amants perdus dans leur passion. La tendresse qu'il lui prodiguait faisait fondre les cœurs même les plus endurcis.La jeune fille, grimaçant d'un air à la fois espiègle et suppliant, lançait d'un ton familier : « Julien, mes pieds me tuent, porte-moi, hei
Élise Charmaine serrait le drap d'une main crispée, y laissant des plis anarchiques.Même dans ce moment de désarroi, ses pensées fusaient, tranchantes et implacables : « Mais pourquoi, cette fille qui traînait dehors – celle que Julien Courtois chantait comme un môme de comptoir – ne faisait-elle pas son boulot ? Aujourd'hui, il se contentant de m'embrasser comme un adolescent en chaleur ! »Son visage affichait un calme glacé, dissimulant un dégoût profond ; étendue comme un poisson mort sur le drap, elle observait Julien exécuter ses caprices, convaincue qu'en dépit de tous ses efforts, il ne parviendrait jamais à la pousser à concevoir un enfant.Au début, Julien, amusé par les piques douces-amères de son épouse, se laissait aller à une excitation timide. Mais maintenant, Élise restait immobile, aussi inerte qu'un bout de bois dérivant dans la rivière.Un spectacle qui finirait par écœurer n'importe quel homme. Entre des mèches de sueur perlantes sur ses cheveux corbeaux et son
Julien inclinait imperceptiblement la tête tandis que Gaston, l'air nonchalant et le sourire en biais, se retirait, laissant à ces deux amants — qui partageaient, dans un même lit, des songes dissociés — l'espace nécessaire à leur duel silencieux.Aussitôt l'ombre de Gaston envolée, Julien a parcouru d'un regard acéré la tenue d'Élise, puis, le sourcil froncé, lui a lancé d'un ton glacial : « Pourquoi t'es habillée comme ça, Élise ? File te changer, on va dîner dans l'ancienne maison familiale ce soir. »Élise savait pertinemment qu'à ses yeux, « dîner » rimait avec mise en scène, il fallait afficher un couple aimant sous le regard accusateur du foyer, tout ça pour ménager les parts qui se partageaient entre les mains de son vieux paternel.Ironiquement, derrière cette façade de gentleman irréprochable, elle sentait en lui l'âme d'un mercenaire, froid et calculateur, plus à l'aise dans l'univers impitoyable des paillettes et des billets rapides.Résignée à jouer le jeu jusqu'à la ré
À neuf heures du soir, ils ont quitté la résidence des Courtois sans un bruit superflu. Julien, avec la gestuelle automatique d'un habitué, a bouclé sa ceinture avant de lâcher, d'un ton à la fois nonchalant et caustique : « Alors, c'était quoi ce délire que tu as sorti à Olivier tout à l'heure ? On aurait juré que vous vous éclatiez grave ! »Élise, le regard fuyant et la gorge serrée, fredonnait machinalement : « Ouais, juste en train de papoter de ta petite chérie. » Sans se retourner, Julien glissait sa réponse, comme s'il enjolivait une routine usée.Peu après, Julien s'était permis de prendre délicatement la main d'Élise, affichant une douceur qui détonnait : « Je n'ai jamais couché avec elle. » Pourtant, alors qu'une larme menaçait de trahir son humeur dans le coin de ses yeux, Élise savait pertinemment que ce murmure n'était qu'un subterfuge—un caprice hormonal destiné à lui faire croire au miracle d'un enfant. Ce n'était ni de l'amour véritable, ni pour elle, Élise !La pen
Élise savait pertinemment qu'à l'instant où elle dévoilerait la vérité, il n'existerait plus de retour en arrière ni pour elle ni pour Julien. Pour elle, quand la déception avait atteint son paroxysme, elle pouvait tout envoyé valser sans même broncher.Elle scrutait son mari adoré du regard et, sans ambages, a laissé échapper la blessure qu'elle portait en elle. Tandis que ses mots se déversaient, son cœur s'est littéralement fondu de douleur, l'engourdissant presque. « Julien, ne t'en fais pas pour le titre, laisse béton ! Je ne veux pas être Madame Courtois… parce que je ne peux pas… donner… »Elle a chancelé sur le mot « donner », sa voix se brisant sous le poids de l'atroce souffrance qui l'accablait. Ce qui aurait pu être un instant suspendu avait été brutalement interrompu par la sonnerie du téléphone de Julien. Il fixait le visage d'Élise, a hésité une fraction de seconde, puis a décroché.Au bout du fil, l'angoisse se lisait dans la voix du secrétaire Louise qui a lancé, la
Par une froide nuit d'automne, une berline exhalait avec une insolente chaleur les effluves d'un printemps révolu, tandis qu'Élise se laissait bercer par une atmosphère feutrée et énigmatique. À peine fermait-elle les yeux qu'elle s'imprégnait de la fraîcheur entêtante du tabac qui émanait de l'homme assis à côté d'elle.Ce même parfum de clope – à la Gaston, exactement comme celle qui flottait autour de Julien – faisait vaciller son présent, brouillant en un souffle incertain la mémoire et l'instant.Doucement, elle se tournait vers lui, saisissait sa main d'un geste presque irréel, et laissait échapper en murmurant : « Julien… » Comme si le temps se figeait, elle se trouvait happée par le labyrinthe d'un passé voilé, celui qu'elle partageait autrefois avec Julien.Gaston, quant à lui, restait silencieux, ses yeux perdus dans l'obscurité dense de la nuit, aussi épaisse que la soie humide d'une averse discrète. Habitué à des conquêtes éphémères, où tout se calculait en intérêts et c
Au petit matin, Élise s'était réveillée en proie à un mal de tête lancinant.Dès l'aube, les domestiques, toujours aux petits soins, s'étaient rués dans sa chambre et avaient déposé en trombe un comprimé sur sa table de nuit.Après l'avoir englouti d'un trait, elle s'était aussitôt sentie renaître. Alors même qu'elle s'apprêtait à prendre son bain, elle avait entendu, dans l'encadrement de la porte, l'un des domestiques fulminer avec un franc-parler qui ne laissait aucun doute : « Le maître s'est encore fait avoir par cette foutue ensorceleuse dehors ! Hier soir, en revenant, il vous a croisée dans cet état-là et, sans plus attendre, il est reparti. »Visiblement irrité, il avait baissé son ton : « Tenez, madame, le maître nous a même demandé d'envoyer la veste de Monsieur Durand au pressing. Au moins, il lui reste un brin de bon sens pour vous. »Les domestiques, eux, prenaient ça pour de la prévenance. Mais, Élise avait compris aussitôt que Julien était revenu la veille, rongé pa
Après le départ d'Élise, Julien s'est dirigé d'un pas lourd vers le toit de l'Immeuble Valdor. La nuit, glaciale et impitoyable, hurlait sous l'assaut d'un vent déchaîné. Les bourrasques fouettaient les visages et faisaient voler les manteaux sombres des deux hommes, donnant à leurs silhouettes l'allure menaçante de rapaces nocturnes s'apprêtant à fondre sur leur proie.Sous ce ciel d'un noir d'encre, Julien a allumé une cigarette d'un blanc immaculé. La flamme de son briquet vacillait sous le souffle du vent, mais il en a tiré une longue bouffée avec une détermination froide. Son visage mince se creusait encore davantage sous l'effort, ses pommettes saillaient durement, rendant ses traits à la fois inquiétants et fascinants.Silencieux d'abord, il a fumé la moitié de sa clope avant de planter son regard, aussi acéré qu'une lame, dans les yeux de Gaston. Sa voix, glaciale comme la nuit environnante, a fendu l'air : « Annule la coopération. Quant au divorce entre Élise et moi… Laisse
Élise savait pertinemment ce qui se tramait. Quand Julien avait mis cette proposition sur la table, elle n'avait pas dit un « non » catégorique. Sérieusement, qui refuserait une telle somme d'argent ? Mais de là à se jeter tête baissée…Élise n'était pas née de la dernière pluie. Le fric chez Julien, ce n'était jamais gratuit. Avec ce petit sourire en coin qu'elle maîtrisait à la perfection, elle s'est penchée légèrement vers lui et a osé : « Et qu'est-ce que tu attends en retour ? »Julien a soutenu son regard quelques secondes avant de lâcher brutalement : « Tu travailles sur le projet Méga… et tu couches avec moi. »Élise a cillé à peine. Pourtant, l'impact de cette phrase était bien réel. Elle a rétorqué d'une voix légèrement tremblante : « Julien, tu as perdu l'esprit ! »Mais lui, imperturbable, a haussé simplement les épaules avant de répondre, comme s'il discutait d'un contrat sans importance : « J'ai des besoins d'homme, Élise. »Un silence s'est installé. Elle n'a donné
Julien a entraîné Élise jusqu'à la suite de l'hôtel et a ouvert la lourde porte d'un geste vif. C'était la première fois qu'ils séjournaient dans un hôtel, où chaque détail respirait une opulence presque étrangère à leur quotidien.À l'intérieur, les lumières tamisées étaient éteintes, laissant l'obscurité envahir chaque recoin. Et dans cette pénombre étouffante, leurs sens semblaient s'être soudain aiguisés.Avant même qu'Élise n'ait eu le temps de reprendre son souffle, elle s'est retrouvée plaquée contre la porte, incapable de résister au baiser impérieux de Julien. L'odeur mêlée de tabac frais et d'après-rasage est devenue presque un étau invisible, s'insinuant en elle avec une intensité brutale. Étourdie par l'ardeur de cet échange, elle a chancelé, ses jambes tremblantes peinant à la maintenir debout.Ils ont trébuché maladroitement jusqu'au canapé. Julien, sans une once d'hésitation, a retiré son pardessus d'un geste sec et a glissé ses mains habiles sur les bas d'Élise, les
Ce jour-là, Gaston avait eu l'envie irrépressible de serrer une femme dans ses bras pour la toute première fois.— Pas par amour.Non. Il voulait simplement la réconforter, essuyer ses larmes, peut-être même effleurer ses lèvres rouges qui tremblaient, juste pour y mettre fin.Dans le silence, Gaston a murmuré à nouveau, sa voix calme : « Pourquoi veux-tu divorcer ? »Près de la porte, Julien s'est retourné avec Élise à ses côtés. Son regard, glacé comme une lame, a fusillé son ancien ami.Quand sa voix tranchante a résonné, elle semblait pouvoir découper le silence en morceaux : « Gaston, tu sais vraiment ce que tu fais ? Si t'es perdu dans ta tête, tu ferais mieux d'aller à l'hôpital, histoire de te remettre les ides en place. »Gaston s'est levé lentement, méthodiquement. Il a planté ses yeux dans ceux de Julien, pas une trace d'hésitation : « Je suis parfaitement lucide... Je l'ai toujours été. Et toi, t'es lucide, Jules ? Parce que, si c'est le cas, tu devrais savoir qu'Élise
Dans un coin tamisé de la pièce, Julien a écrasé nonchalamment le reste de sa cigarette dans un cendrier de cristal. Une élégance rare émanait de son profil acéré, sublimée par ses doigts longs et précis qui réalisaient ce geste banal avec une grâce presque déroutante.Il s'est redressé avec assurance, et d'un pas calculé, est allé vers Élise. Sa silhouette imposante projetait une ombre longue dans la lumière diffuse. Arrivé à hauteur de la jeune femme, il a posé sa main sur son épaule, le geste teinté d'une douceur feinte : « Élise, on rentre. »Le salon privé, jusque-là animé d'une insouciance mondaine, est tombé dans un silence pesant. Personne n'avait anticipé ce brusque élan de possessivité. Julien, homme réputé pour son détachement envers Élise, venait soudain de briser les codes tacites de leur cercle. N'était-il pas censé être indifférent à Élise ?Gaston, avec sa légèreté habituelle, n'avait pourtant fait qu'une plaisanterie à demi-mot. Rien qui justifierait l'attitude glac
Julien s'est réfugié dans le salon privé, adossé au canapé dans un recoin sombre. Vêtu tout de noir, il semblait se fondre à l'obscurité qui l'enveloppait.Pourtant, même dans ce cadre quasi spectral, il émanait de lui une aura étonnamment noble, presque irréelle, comme s'il appartenait à un autre univers, bien éloigné du vacarme ambiant.Ses yeux, insondables et pleins de mystère, se fixèrent sur Élise, qui venait de franchir la porte avec une grâce désarmante.Élise portait une robe en soie gris-bleu, légère et vaporeuse. Une fine ceinture dessinait sa taille avec subtilité, tandis qu'un long collier de nacre blanche se déposait sur sa poitrine comme une vague délicate.À ses oreilles, de discrètes pampilles en diamant se balançaient au rythme de ses mouvements, captant la lumière et les regards. Elle était tout simplement étincelante. Son sac à main et sa montre parfaitement assortis ajoutaient une touche raffinée à cette image presque irréelle.Mais plus que son allure, c'étai
Une semaine plus tard, Élise a finalement décroché la devanture qu'elle convoitait tant. Avec un emplacement rêvé et un loyer plutôt raisonnable dans un contexte économique morose, elle a saisi l'opportunité sans hésiter.En quelques signatures bien alignées sur le bail de cinq ans et une liasse de chèques remis, c'était fait. Le propriétaire, rayonnant d'avoir sécurisé un locataire fiable, paraissait soulagé de ce coup de chance.Cependant, une « urgence » imprévue l'a amené à partir précipitamment, marmonnant quelques excuses au passage. Élise est alors restée seule, son café tiédissait devant elle, comme souvent. Elle avait pris l'habitude de laisser ses pensées vagabonder en ces moments de calme, le regard perdu dans les nervures de la table.Soudain, une voix claire et pétillante l'a fait sursauter : « Élise ! »Surprise, elle a levé les yeux. Là, devant elle, se tenait Jade Durand, la jeune sœur de Gaston. Jade, fraîchement sortie des amphis de l'université, affichait cet ent
Élise est rentrée de l'hôpital, et Julien, comme une ombre, l'a suivie jusqu'à son immeuble. Elle a garé sa petite voiture à côté du grand platane, sa ramure imposante projetant des ombres capricieuses sous la lumière blafarde du soir. Mais lui, il était déjà là, adossé à sa berline sombre.Lorsqu'elle est sortie du véhicule, il s'est approché d'un pas décidé et lui a barré le chemin : « Faut qu'on parle », a-t-il annoncé d'une voix grave, son regard planté dans le sien, presque suppliant.Élise a esquissé une moue, a contourné ses épaules sans hésitation et s'est dirigée vers l'entrée de l'ascenseur, son sac à la main.« Julien, sérieusement... y'a rien à dire. On se verra au tribunal », a-t-elle lancé sèchement, à peine en tournant la tête.Il l'a suivie. Jusqu'à son étage, il a insisté. Mais une fois derrière la porte de son appartement, elle lui a claqué l'accès au nez sans une concession. Lâchant un soupir tremblé, Élise s'est adossée contre le battant, son cœur battant à tout
Élise n'avait absolument pas envie de se retrouver nez à nez avec lui. Faisant mine d'avoir un besoin urgent, elle se réfugia dans les toilettes. Appuyée contre le mur, elle espérait de tout cœur que Julien finirait par se lasser et repartir seul.Après une dizaine de minutes, la porte grinçait, laissant passer un filet de lumière blafarde. Puis Julien entrait, glissant doucement à l'intérieur.Dans la pénombre presque silencieuse, ils se retrouvaient seuls, liés pourtant par le mariage. Élise maintenait la tête baissée, refusant tout échange de regards. Julien avançait vers elle, son imposante stature semblant la cerner.Il tendait doucement la main et effleurait sa joue, sa voix grave et tendre résonnant : « Ça te fait encore mal ? »Élise tournait aussitôt la tête. Elle exécrait ce contact et ne s'en cachait pas. Julien, toutefois, n'était pas du genre à céder si facilement. Il se rapprochait, s'interposant entre ses jambes, lui pinçant le menton d'une main tout en caressant sa