Chapitre 02

Mon regard était fixé sur l’écran de télévision alors que j’essayais d’absorber tous les détails possibles de mon ex-petit ami.

Dans les trois ans depuis que je l’avais vu pour la dernière fois, Nicholas avait mûri, remplissant sa silhouette d’adolescent auparavant élancée. Ses bras maigres s’étaient élargis avec des muscles. Son large torse s’affinait en une taille étroite.

Il avait perdu la largeur juvénile de son visage. Ses pommettes avaient toujours été hautes, mais maintenant sa mâchoire était assez tranchante pour couper du verre.

Il avait été beau quand nous sortions ensemble.

Mais en le regardant maintenant, l’homme qu’il était devenu...

Il était à couper le souffle.

Et apparemment... un prince ?

Je savais qu’il était noble, mais je n’avais aucune idée qu’il était si haut dans la succession royale.

« Élève le son », ai-je dit.

Anna a augmenté le volume, jusqu’à ce que nous puissions entendre la voix du présentateur.

« Avec les frontières instables et l’économie en déclin, le public a exprimé sa crainte pour son avenir et celui de la prochaine génération déclinante. À travers ce jeu de choix, la famille royale espère inspirer le public... »

« C’est une bonne distraction », ai-je dit. Tout le monde que j’avais rencontré aujourd’hui en parlait, au lieu de leurs malheurs et inquiétudes habituels.

Anna a dit : « Je suis inspirée. » Quand je lui ai lancé un regard incrédule, elle a haussé les épaules. « Ça montre que la famille royale essaie vraiment, au lieu de rester assise dans leurs hautes tours, en nous ignorant. Ça me donne de l’espoir. »

La voix à la télévision a continué : « En plus de fournir du divertissement et du réconfort à la population quotidienne, la sélection offre une opportunité unique aux princes, qui n’ont pas encore trouvé leurs compagnes. Selon la loi, un prince a besoin d’une compagne pour hériter du trône. »

Logiquement, en voyant Nicholas pour la sélection, je savais qu’il n’avait pas de compagne, pourtant mon cerveau avait du mal à en comprendre le sens.

Quand nous sortions ensemble, Nicholas avait été gentil et généreux, talentueux, beau. Comment quelqu’un comme ça avait-il pu échouer à trouver sa moitié ?

« Tu peux croire ça ? » m’a demandé Anna. « Ils sont tous si beaux ! »

Les images des trois princes passaient en boucle. Cette fois, j’ai pu voir plus que juste Nicholas. Comme la personne à côté de lui. Un de ses frères.

Julian ?

Nicholas et Julian avaient tous deux été mes camarades de classe à l’Académie Royale, mais ils se détestaient. Tout le monde les voyait comme des ennemis jurés. Ils étaient en fait frères ?

« La famille royale exige que toutes les femmes célibataires âgées de 18 à 22 ans posent leur candidature », a poursuivi le présentateur. « La date limite est dans deux jours. »

Le segment d’information s’est terminé, et une autre histoire a commencé. Anna a de nouveau baissé le volume.

Anna a bougé sur le canapé, levant une jambe sur le coussin pour pouvoir me faire face. « Quand vas-tu soumettre ta candidature ? »

J’ai secoué la tête. « Je suis une mère célibataire, Anna. Je ne pense pas que ça réponde aux critères. »

« Elva est le bébé de ta sœur, pas le tien. Combien de temps vas-tu te laisser souffrir pour ça ? »

« Elva n’est pas un fardeau. »

« Je ne voulais pas dire ça comme ça. Ce que j’essaie de dire, c’est que tu te retiens. Tu ne devrais pas être coincée ici comme serveuse dans un travail sans issue avec un patron aux mains baladeuses. Tu mérites plus. Tu n’appartiens pas ici. »

Elva était plus importante pour moi que tout au monde. Je n’avais aucune intention de la laisser derrière moi pour poursuivre aveuglément une couronne.

« Et toi ? » ai-je détourné. « Tu n’appartiens pas ici non plus. »

Anna m’a fait un triste sourire. « Je suis trop vieille pour postuler. » Elle a haussé les épaules. « Allez, Piper. Il n’y a aucun mal à postuler. Tu devrais soumettre le formulaire. Je m’occuperai d’Elva si tu es sélectionnée. En plus, tu n’auras plus à t’inquiéter de ton patron au restaurant. »

« Seulement si je suis sélectionnée, et c’est pas très possible. »

Je ne pouvais pas nier la tentation. Mon temps avec Nicholas avait été... spécial. L’opportunité de le revoir faisait battre mon cœur. Mais c’était un problème en soi.

Ce que Nicholas et moi avions eu s’était terminé il y a longtemps.

« Je suis une mère célibataire, je ne serais jamais choisie. Et même si je l’étais, je ne laisserais jamais Elva pour quoi que ce soit, pas même pour devenir Luna. »

Anna a soupiré, long et lent. « Si j’étais toi, je ne laisserais jamais passer cette opportunité. »

Avant que je puisse répondre, la vidéo des princes a été à nouveau montrée. Anna a immédiatement remis le son de la télévision.

« Le processus de sélection des candidats sera diffusé pendant la cérémonie de consort royal. Nous rappelons à nos téléspectateurs que cette cérémonie traditionnelle n’a pas été menée depuis un demi-siècle. »

« Wow », a haleté Anna.

« Durant cette cérémonie, la famille royale utilisera son ancien pouvoir pour sélectionner 25 finalistes parmi des milliers de candidats. Le processus devrait prendre une demi-heure. Vous pouvez regarder toute la cérémonie ici même sur cette chaîne. »

« Oh, je regarderai certainement », a dit Anna.

Je n’avais aucune intention de regarder, moi-même. Nicholas était un fantôme de mon passé.

Nous nous étions dit au revoir il y a trois longues années, mais cela ne signifiait pas que je voulais regarder d’autres femmes rivaliser pour ses affections. L’idée de le voir tomber amoureux en temps réel de quelqu’un d’autre faisait se tordre mon estomac, c’est très inconfortable.

« J’ai besoin de dormir », ai-je dit, poussant mon corps fatigué hors du canapé.

« S’il te plaît, n-ne fais pas ça ! » ai-je crié, ma voix se brisant en un sanglot. « Au secours ! »

Nicholas, où es-tu ? Sauve-moi. S’il te plaît ! Sauve-moi !

« Souviens-toi », a dit une voix cruelle à mon oreille. « C’est toi qui as demandé ça. »

Non !

« Non ! » ai-je crié, me redressant dans mon lit. La sueur s’accrochait à mon front. Mes respirations étaient lourdes et saccadées.

Mais j’étais vivante. J’étais en sécurité.

En regardant autour, j’ai reconnu ma chambre. J’ai reconnu –

« Maman ? »

Elva se tenait à côté de mon lit. Elle me regardait avec de grands yeux.

« Pourquoi tu pleures, Maman ? »

J’ai touché mes joues, essuyant les larmes. J’ai essayé de contrôler ma respiration et de ralentir les battements de mon cœur. Je ne voulais pas qu’Elva s’inquiète.

« C’était juste un mauvais rêve, ma chérie. Je vais bien. »

« Un cauchemar ? » a demandé Elva.

J’ai hoché la tête.

Dans un élan, Elva a quitté mon chevet pour aller vers le sien. Elle est revenue avec un de ses ours en peluche. Elle me l’a tendu.

« La maîtresse a dit que les jouets aident à combattre les cauchemars. M. Peluche va te pro... protéger. »

Elle tenait le vieil ours avec ses yeux de boutons usés et sa fourrure duveteuse si sincèrement que mon cœur entier a fondu. Je l’ai rapidement accepté.

« M. Peluche n’est pas un de tes préférés ? »

« Oui ! C’est le meilleur. Comme ça Maman ne pleurera plus. »

J’ai posé M. Peluche à côté de moi sur le lit, puis j’ai tendu les bras et attiré Elva contre moi.

Elle a gloussé quand j’ai couvert son visage de baisers. Le son a apaisé la douleur restante qui persistait dans ma poitrine.

Je ferais n’importe quoi pour cette petite fille.

Elva s’est endormie peu après. Je l’ai ramenée dans son lit et je l’ai bordée.

La chaîne d’information avait monté un aperçu de la cérémonie de sélection des consorts. Les flashs de Nicholas faisaient mal à mon cœur.

« Qui sera sélectionné comme candidate pour le Jeu de Choix de la Luna ? » disait une voix sur les images de la famille royale. « N’importe quelle femme du royaume pourrait être sélectionnée. Ça pourrait être votre amie ou votre voisine. Ou, ça pourrait être vous. »

Je n’avais pas le temps pour de tels rêves insensés dans ma vie. Ce serait une perte de temps pour moi d’envisager même la possibilité d’être sélectionnée. Les mères célibataires sans loup ne devenaient pas Luna.

Mais, qui serait l’heureuse élue ?