Chapitre 1

Le ciel d’avril était obscurci par une pluie torrentielle, créant une atmosphère mélancolique. La délicate Chloé Moreau se tenait devant l’hôpital, sa main fine crispée autour du rapport de test de grossesse de l’établissement, où deux mots résonnaient clairement : pas enceinte !

« Trois ans de mariage, et tu n’es toujours pas enceinte ? »

« Pourquoi es-tu si impuissante ? Si tu ne conçois pas, tu seras expulsée par la famille Bégonia ! Et à ce moment-là, qu’adviendra-t-il de notre famille Moreau ? »

La personne élégamment vêtue n’était autre que la mère de Chloé. Elle s’est avancée avec grâce sur ses talons hauts, pointant son doigt vers Chloé, le visage empreint de déception.

Les yeux de Chloé étaient vides, et bien qu’elle ait mille mots à exprimer, elle n’en a articulé que trois : « Je suis désolée. »

« Je ne veux pas de tes excuses. Je veux que tu donnes un enfant à Dominique, tu comprends ? »

Chloé avait une boule dans la gorge et ne savait pas quoi lui dire.

Après trois ans de mariage, son mari Dominique Bégonia ne l’avait jamais approchée, comment auraient-ils pu concevoir un enfant ?

Julie, observant sa fille dans cet état de vulnérabilité et d’impuissance, a pensé que la personnalité de Chloé n’avait rien à voir avec la sienne. Elle s’est contentée finalement d’une remarque cinglante :

« Si tu ne peux vraiment pas avoir d’enfants, aide Dominique à trouver une amante. Peut-être qu’il t’en sera reconnaissant. »

Chloé fixait le dos de Julie qui s’éloignait, un regard incrédule dans les yeux. Sa propre mère lui suggérait de chercher une maîtresse pour son mari ! En un instant, elle s’est sentie plongée dans une cave de glace, son corps enveloppé d’une froideur glaçante.

…

Elle s’est installée dans la voiture, prête à regagner son chez-soi, les mots de Julie résonnant dans son esprit tels une mélodie poignante. En parallèle, un grondement inattendu a résonné soudainement dans ses oreilles, signe que sa condition physique s’est une fois de plus détériorée.

À cet instant précis, son téléphone portable a émis une notification, un SMS provenant de Dominique. Une phrase qui, pendant les trois années de mariage, s’était installée presque quotidiennement : « Je ne rentre pas à la maison ce soir. »

Après leur union, Dominique avait cessé de passer la nuit à la maison, évitant tout contact avec Chloé. Elle s’est rappelée leur nuit de noces trois ans plus tôt, quand il lui avait déclaré : « Puisque ta famille Moreau ose jouer de tels tours, n’imagine pas dans ta vie que je te donnerai de l’amour ! Tu finiras seule ! »

Finir seule…

Trois ans auparavant, les familles Moreau et Bégonia avaient consenti à leur mariage dans le cadre d’une collaboration commerciale. Initialement, les deux parties avaient convenu d’un consensus sur la coopération et ses avantages. Cependant, le jour du mariage, la famille Moreau avait changé subitement d’avis, transférant tous ses actifs, y compris le milliard d’euros que Dominique avait offert pour épouser Chloé…

En repensant à ces événements, Chloé a baissé les yeux. Son regard s’est assombri progressivement, mais elle a répondu néanmoins à Dominique par un simple « OK. »

Le test de grossesse qu’elle tenait délicatement dans sa main était inconsciemment serré dans une boule de papier.

De retour à la maison, elle l’a relégué négligemment à la poubelle. À ce stade du mois, la fatigue s’était emparée d’elle, l’enveloppant de son voile pesant.

Au lieu de s’atteler à la préparation du dîner, elle s’est laissée choir sur le canapé, s’abandonnant à un état de demi-sommeil. Dans cette semi-lucidité, un grondement persistant persistait dans ses oreilles.

C’était un aspect que Dominique déplorait chez elle. Son ouïe faible, perçue comme un handicap au sein de cette famille puissante. Comment Dominique a-t-il pu permettre qu’une telle personne conçoive son enfant ?

Cinq heures du matin.

La pendule de style médiéval a émis un son sourd, marquant le temps qui s’écoulait inexorablement.

Dans une heure, Dominique serait de retour.

Avec le recul, elle a réalisé qu’elle avait passé toute la nuit à somnoler sur le canapé. Se levant précipitamment, elle s’est affairée à préparer le petit déjeuner pour Dominique, redoutant la moindre possibilité de retard.

Dominique se montrait méticuleux dans son travail, accentuant davantage sa minutie en ce qui concernait son emploi du temps et son entourage.

À six heures, il a fait son entrée, ponctuel comme à son habitude. Revêtu d’un costume italien impeccable, son allure élancée et son tempérament introverti ne ternissait en rien sa virilité.

Cependant, pour Chloé, l’homme était froid et distant.

Il l’a ignorée complètement, la contournant avec indifférence, ses yeux jetant un regard sarcastique sur la table du petit déjeuner.

« Chaque jour, tu répètes cela. Quelle distinction y a-t-il entre toi et une nounou ? »

Chloé, fidèle à ses habitudes depuis trois ans, enfilait les mêmes vêtements gris clair, répondant même aux textos avec la monotonie du mot « OK. »

Pour être franc, sans la coopération commerciale et la tromperie de la famille Moreau, il n’aurait jamais envisagé d’épouser une femme telle qu’elle !

« Nounou ? »

Un grondement a résonné à nouveau dans les oreilles de Chloé. Elle a avalé difficilement et, sans savoir d’où elle tirait le courage, elle a ouvert la bouche pour demander : « Aimes-tu une femme ? »

Cette remarque soudaine a provoqué un changement dans l’expression de Dominique : « Comment ça ? »

Penchant la tête, elle le fixait, réprimant le ressentiment qui montait de sa gorge alors qu’elle parlait lentement : « Si tu aimes quelqu’un, tu peux être avec elle… »

Avant qu’elle ne puisse finir ses mots, Dominique l’a interrompue brusquement. « Tu es folle ! »

…

Après le départ de l’homme, Chloé s’est installée seule sur le balcon, perdue dans ses pensées, observant la pluie tomber misérablement.

Le son de la pluie était tantôt clair, tantôt étouffé.

Elle a retiré son appareil auditif, se plongeant ainsi dans un silence qui englobait le monde entier.

Il y a un mois, le médecin lui avait annoncé : « Mme Moreau, vos nerfs auditifs et vos centres nerveux à tous les niveaux ont été affectés, et votre audition continue donc à se détériorer. Si la situation persiste ainsi, vous risquez de devenir complètement sourde. »

Elle n’était pas accoutumée à un monde aussi silencieux.

En pénétrant dans le salon, elle a allumé la télévision et a augmenté le volume au maximum. Malgré cela, elle ne parvenait qu’à peine à distinguer les sons.

Que ce soit une coïncidence ou non, une interview de Fiona Thomas, réputée comme la Reine des chansons d’amour internationales, s’affichait à l’écran. Elle était de retour ?

La main tenant la télécommande tremblait, car cette Fiona était nulle autre que le premier amour de Dominique !

Après de nombreuses années sans la voir, elle conservait toujours sa beauté, même devant la caméra, elle était désormais une femme élégante et à l’aise, loin de la Cendrillon modeste et dépendante qu’elle avait été lorsqu’elle sollicitait le soutien financier de la famille Moreau.

Lorsque le journaliste lui a posé la question sur la raison de son retour, Fiona a répondu avec assurance et audace : « Je suis revenue pour retrouver mon premier amour. »

À ces mots, la télécommande que Chloé tenait a glissé de sa main pour venir heurter le sol, et son cœur semblait suivre le même chemin.

À l’extérieur, la pluie semblait redoubler d’intensité.

Prise de panique, elle a éteint la télévision. Puis, elle s’est dirigée vers la cuisine pour enlever le petit déjeuner resté intact. Ce n’est qu’en atteignant la cuisine qu’elle a réalisé que Dominique avait oublié son téléphone portable. Elle s’en est emparée juste à temps pour découvrir un SMS non lu sur l’écran.

« Dominique, ces dernières années ont dû être éprouvantes pour toi. »

« Je sais que tu ne l’aimes pas, on se voit ce soir, tu me manques. »

Chloé ne s’est retournée pas avant que l’écran ne s’éteigne automatiquement.

Elle a pris un taxi pour se rendre au bureau de Dominique. En chemin, elle observait la pluie qui ne semblait jamais vouloir cesser à travers la fenêtre.

Dominique n’appréciait pas qu’elle vienne dans son entreprise, alors chaque fois qu’elle le cherchait, elle empruntait la porte arrière et le monte-charge.

En apercevant Chloé arriver, Lucas Pelle, l’assistant de Dominique, s’est contenté de l’appeler froidement : « Bonjour, Mme Moreau. »

Dans le cercle intime de Dominique, personne ne l’appelait Mme Bégonia.

Elle semblait juste être un être dont personne ne se souciait…

Dominique a froncé les sourcils en découvrant son téléphone portable remis par Chloé.

Qu’il s’agisse d’un déjeuner, d’un dossier, d’un vêtement ou d’un parapluie, elle était toujours là pour lui fournir ce qu’il avait oublié.

« Je ne te l’ai pas dit ? Tu n’as pas besoin de me l’envoyer. »

Chloé s’est figée.

« Je suis désolée, j’ai oublié. »

Depuis quand sa mémoire lui faisait-elle défaut de la sorte ? Probablement à cause du message de Fiona, elle avait momentanément craint que Dominique ne disparaisse soudainement…

Avant de partir, elle s’est tournée vers Dominique et lui a demandé involontairement : « Dominique, tu aimes toujours Fiona ? »

Dominique a trouvé que Chloé agissait de manière étrange ces derniers temps. Non seulement elle oubliait tout, mais en plus, elle posait des questions étranges.

Méritait-elle vraiment d’être sa Mme Bégonia ainsi ?

Il était si impatient qu’il a repris : « Si tu t’ennuies trop, va chercher quelque chose à faire. »

Chloé s’était déjà lancée dans la quête d’un emploi, mais les mots sans détour de la mère de Dominique, Nathalie Richard, l’avaient renvoyée à sa situation :

« Veux-tu exposer au monde entier le fait que notre Dominique est marié à une femme handicapée, souffrant de problèmes auditifs ? »

En fin de compte, elle avait dû renoncer à son travail pour se consacrer à demeurer dans la villa, jouant le rôle de la célèbre mais fictive Madame Bégonia.

De retour chez elle, elle se retrouvait seule jusqu’au crépuscule. L’insomnie la tenaillait. Son téléphone portable, posé sur la table de chevet, a retenti avec insistance, annonçant un appel urgent d’un numéro inconnu.

Elle a appuyé sur le bouton pour répondre et a entendu une voix féminine douce mais paniquée, qui l’a mise dans un état de stress.

C’était Fiona !

« C’est Chloé, Dominique est ivre, tu pourrais venir le chercher ? »

Le Clubhouse de St. Holly,

Chloé s’est élancée vers la salle privée alors qu’elle a perçu une agitation parmi la foule de jeunes hommes fortunés à l’intérieur.

« Fiona, ne serais-tu pas revenue cette fois pour récupérer notre président Bégonia ? C’est le moment idéal pour lui déclarer ton amour. »

Fiona, douce et gracieuse, extravertie et loquace, était le premier amour de Dominique. Tous ces jeunes de la classe supérieure étaient solidaires d’elle.

Sans hésiter, Fiona s’est tournée vers Dominique et a déclaré : « Dominique, je tiens à toi, reprenons notre relation. »

Chloé a atteint la porte de la boîte juste à temps pour entendre ces mots.

À l’intérieur, les encouragements ont fusé, notamment de la part du meilleur ami de Dominique, Jules Masson :

« Dominique, tu l’as attendue pendant trois ans, et maintenant qu’elle est enfin de retour, saisis cette opportunité. »

Chloé s’est figée dans l’encadrement de la porte, le cœur battant, au moment même où un homme a ouvert la porte du compartiment.

« Mme Moreau ? »