Elias se sentait vivant. Pour la première fois depuis des semaines.L’adrénaline courait dans ses veines, le Souffle reprenant vie. Puis le Souffle se mua en Éclat.—Elias! Ne te précipite pas, bordel!Il entendit ma voix criant au loin, presque étouffée, mais ne ralentit pas une seconde. Propulsé par le flux de lumière jaillissant de ses mains, il zigzaguait entre les Élyséens hilares ou apeurés qui continuaient de monter dans le ciel.Puis il s’arrêta. La perte de la pesanteur semblait limitée à un rayon d’action réduit autour du bâtiment d’Aaron. Son interface visuelle s’activa et un message apparut sous ses yeux.<Elias! Qu’est-ce que tu comptes faire là, tu m’expliques?><Caine, celui qui produit ces variations gravitationnelles… il est dans l’immeuble. Trouve-le!><Et toi, tu vas faire quoi? Des ronds dans le ciel et des jolies couleurs?&nb
—Trois mois, pas un jour de plus.Tom regarda Elias, la boule au ventre. Le bus l’attendait, de même que tous les autres pensionnaires. Il lança une ultime blague pour se donner une contenance. Qu’avait-il dit déjà? Impossible de s’en souvenir. Et il lui tourna le dos.C’est un au revoir, pas un adieu, tenta-t-il de se convaincre.Mû par un pressentiment, Tom se retourna vers Elias. Derrière le garçon aux yeux d’émeraude, une silhouette menaçante apparut. Au regard sanglant. Au visage grave figé dans le plomb et perdu dans les ombres. Il s’approcha d’Elias…—Tom! Attention!Plongé dans ses songes, Tom leva la tête au dernier moment et évita la branche qui manqua de le décapiter. Instinctivement, il fléchit ses jambes, abaissant son centre de gravité. Louvoyant entre les arbres, sa planche magnétique se redressa et réduisit sa vitesse. Une seconde plus tard, une tignasse rousse fonçant à sa poursuite tel un feu fol
Les étages de la Pyramide défilaient, interminables. Le vent giflait le visage de Veil, lui soufflant ses cheveux dans les yeux. Contre toute attente, il faisait preuve d’un calme inébranlable. Une certaine sérénité devant la mort, inévitable, que seul un homme qui se savait condamné pouvait avoir.Toi qui tenais tant à retrouver les Gutters, tu vas avoir que ce que tu voulais. Il était dos au sol, fixant le point de sa fenêtre s’éloigner de plus en plus. La forme sombre, restée assister à son trépas, disparut.Il eut une dernière pensée pour sa mère. Il espérait que Liv puisse lui fournir les moyens de se soigner, c’était la seule à qui il avait confié sa condition.La chute semblait s’éterniser. Il nota certains détails autour de lui. Par exemple, le nuage d’orage qu’il aurait juré être absent quelques secondes plus tôt. Sa main se mit à brûler. Il lâcha un cri et l’ouvrit. Elle contenait le pendentif auquel il s’était accroché avant de basculer dans le v
Une silhouette traversait le grand hall du Concil. Ses cheveux noirs, hérissés à la mode grunge du vingtième siècle, soit trois cents ans de retard, sautaient sur ses épaules. Certaines mèches se démarquaient des autres par les teintes écarlates qui les parsemaient. Ses yeux ne se posaient pas sur les chefs-d’œuvre qui s’étalaient autour d’elle. Pas la moindre lueur d’émerveillement face au fouillis organisé de la Serre, chef-lieu du Subsidium où fleurissaient les plus brillantes idées, tant qu’elles concernaient l’environnement. Non, ils étaient rivés droit devant, déterminés. Elle se mouvait avec aisance entre des groupes agitant les mains avec véhémence pour ponctuer leur discours, évitait sans difficulté le flux humain qui se déversait sans interruption dans les couloirs. Elle se sentait chez elle, à sa place.Au loin, elle aperçut un homme, la cinquantaine avancée, qui semblait tomber du ciel. L’ascenseur le déposa en même temps que deux femmes. Il était presque rabougri, l
Barth frotta ses mains et les rapprocha du feu pour les réchauffer. Un filet de vapeur s’éleva de sa bouche. L’air était particulièrement vif, ce soir. Les premières chutes de neige isotopiques étaient même tombées dans cette région du monde. Quelle qu’elle soit.Il ouvrit son sac et sortit une petite fiole, la regarda, hésitant à la déboucher, et soupira avant de la reposer. Il avait déjà passé suffisamment de temps l’esprit embrumé. Ça faisait un mois qu’il déambulait, sans but, son sabre blanc au dos. Le Sang ressurgit, voilant sa vision, comme à chaque fois, qu’il posait les yeux sur lui. Après le Sang, c’est l’image du corps sans vie de Zane qui revenait toujours hanter sa mémoire. Aujourd’hui, seul le désir de trouver un chemin sans violence lui permettait de continuer à avancer. La nature, sauvage, était loin de lui faciliter la tâche. Il lui avait fallu tuer pour se nourrir, parfois uniquement pour survivre. Mais jamais, il n’avait dégainé le magnifique sabre à son épaul
Des bougies parfumées diffusaient une douce odeur de cannelle dans le salon. Les lumières éteintes, c’étaient une dizaine de cierges et de guirlandes rayonnantes qui se chargeaient d’éclairer la pièce. C’était la première fois que je voyais l’appartement d’Elias ainsi. Cadeau de Lyna, assurément.—Ah, on parlait de ton sujet favori justement, s’exclama l’intéressée, en me sautant au cou.Je lui rendis son baiser. Son odeur était enivrante.—Lequel?—Eh bien, toi!Je ne m’abaissai même pas à répondre. Sans compter qu’elle n’était pas loin de la vérité.—Après la présentation magistrale d’Elias, je pensais que tu pouvais prendre ta retraite, se moqua Richard.—Eh bien, vous avez un style incomparable pour me souhaiter un bon anniversaire!—Je ne vois pas de quoi tu parles, c’est le sien aussi.Lyna déposa un nouveau baiser sur mes lèvres.—C’est mieux?
Inaya sentit un frisson d’excitation courir le long de son échine. Enfin, pensa-t-elle.Elle posa le pied au sol, doucement, savourant chaque seconde. Après avoir passé sa vie entière à Orancia, le simple fait de toucher la terre ferme, était en soi un plaisir. Les rayons du soleil sur sa peau. Respirer de l’air frais, non recyclé. Le voyage pouvait débuter.Elle était suivie par une dizaine de soldats de la garde présidentielle–dont Lharin–et les Élyséens. Plus précisément, Elio et Maya. Tom, quant à lui, avait décidé de rester à Orancia. Enfin décidé, pensa Inaya. Il a surtout suivi sa rouquine. Elle ne connaissait pas l’étendue des liens tissés entre ces Élyséens. Elle avait compris qu’un certain «Elias» était important, puisqu’il était souvent revenu dans la conversation. Mais malgré l’importance de cette relation qu’elle trouvait étrangement fusionnelle, Tom s’était décomposé quand, à la surprise gén
Les jours suivant notre fuite d’Elysia furent une succession de mauvaises idées. Elias et moi n’étions pas particulièrement d’accord sur laquelle fut la première. Pour lui, c’était assurément s’engager dans un road-trip avec un bureaucrate. Même si je m’y attendais, les premiers instants furent durs. Vraiment durs. La nature reprenant ses droits, se développant à une vitesse décuplée. Une myriade d’espèces plus résilientes émergeant pour résister aux modifications du biotope imposées par la concentration radioactive ambiante. Le savoir, c’était bien. Le vivre? C’était autre chose. La première impression que je gardais de notre première nuit était quelque peu… déplaisante. Elias insista pour que nous nous éloignions au maximum d’Elysia «au cas où», disait-il. Ce qui impliqua de s’enfoncer dans une végétation incontrôlée, sans avoir la moindre idée de ce sur quoi nous allions tomber, à l’aide d’Elias comme seule lumière. C’était une sensation purement étouffante. J’avai