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Auteur: RS WILD
last update Dernière mise à jour: 2025-02-17 16:41:54

Laurie

Je sors de Knight Enterprises, et mes jambes pèsent comme du plomb, comme si j'avais laissé un bout de moi là-dedans. Les portes vitrées claquent derrière moi, un bruit sec qui cogne dans ma tête. Je jette un œil à ma montre – moins de vingt minutes. Vingt putain de minutes pour torpiller mes espoirs. Je savais que ça allait mal se passer, mais aussi rapide, aussi brutal ? Ça me laisse un goût amer, une truc qui gratte la gorge et refuse de partir.

La déception s'infiltre, sournoise, et mes épaules s'affaissent d'un coup. Une brise froide me frôle le visage, mais je la sens à peine, coincée dans ce brouillard de stress et de frustration. Mon souffle s'alourdit, mes yeux piquent – ​​des larmes que je ravile, parce que hors de question de craquer ici, sur ce trottoir glacial. Tant pis. À quoi je m'attendais, franchement ? Un miracle ? Ce poste, c'était trop beau, trop grand. Knight Enterprises, un rêve que je traîne depuis des années, un mirage qui s'éloigne encore plus maintenant que je suis dehors, plantée face à la réalité. Je me fais pas d'illusions, mais j'ai tenté. Parce que sinon quoi ? Rester là, à regarder d'autres me piquer la place ? Je ne suis pas du genre à lâcher, même si au fond, je sais que ça va foirer.

Je chope mon téléphone, mes doigts crispée sur l'écran, juste pour échapper à cette spirale qui me bouffe. Je fais défiler les annonces – marketing, com', des trucs fades. Rien. Rien qui clignote comme Knight, rien qui me fasse vibrer. C'est ça, le problème. Ce job, il me happe, me chante une mélodie que je peux pas ignorer, et pourtant, je me sens à des années-lumière de l'attraper. Un rêve hors de portée, et moi, je suis là, à m'y accrocher comme une idiote.

Le goût du café traîne encore dans ma bouche – amer, fort, pas mon genre. D'habitude, je tire sur des trucs bas de gamme, pas les moyens pour mieux. Mais là, dans ce bureau, il m'a réchauffée, un petit luxe qui m'a tenu debout face à Alexander Knight. Comme un rituel, un clin d'œil du destin pour me dire : T'as le droit de viser plus haut, Laurie. Peut-être. Ou peut-être que je me raconte des conneries pour pas sombrer.

Mon téléphone vibre d'un coup, et je sursaute, l'écran s'allume. Charretier. Mon cœur fait un lien. Carter, mon roc, mon frère de galère. On a grandi ensemble à l'orphelinat, lui et moi, dans ce trou gris où les rêves crevaient plus vite qu'ils naissaient. Lui, il a eu sa chance – adopté par Bruno et Sophie, un couple en or qui l'a sorti de là. Moi, j'ai continué à ramer, à cogner contre le système, mais il m'a jamais laissé tomber. Même après son départ, on s'est accrochés, textos, appels, des fils invisibles qui m'ont empêché de couler.

Je revois son visage, ce gamin maigre aux yeux pleins d'étoiles, qui parlait d'adoption comme d'un conte. Il l'a eue, sa famille. Bruno et Sophie, adorables, m'ouvraient leur porte pour ses anniversaires, me glissaient des parts de gâteau en trop. Une fois, ils ont même voulu m'emmener en vacances avec eux – une semaine au bord de la mer, un rêve de gosse. Mais l'administration a tout bloqué, paperasse et conneries. À 13 ans, t'es trop vieille pour qu'on te veuille, trop abîmée. Et puis Bruno a perdu son boulot, et mes derniers espoirs avec. Qui adopte une ado de 13 ans ? Personne. J'ai vu leurs visages désolées, leurs excuses muettes, et j'ai ravalé ma rancune. C'était pas leur faute.

Je fixe l'écran, le nom de Carter qui clignote. Il doit sentir que je suis au bord du gouffre – il a toujours eu ce sixième sens avec moi. Mes doigts hésitent au-dessus du bouton. Répondre ou pas ? Si je décroche, il va entendre ma voix trembler, capter directement que je me noie dans mes doutes. Mais c'est Carter. Le seul qui me connaît vraiment, qui sait d'où je viens, ce que j'ai traversé. Le seul qui peut me sortir de ce trou, même juste pour cinq minutes. Je ferme les yeux, inspire un grand coup, et glisse mon pouce sur l'écran. Faut que je parle. Faut que je respire.

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