Cendrillon
En arrivant à destination, je pris une profonde inspiration pour me ressaisir. L’adresse indiquée était celle d’un grand manoir, imposant et sombre, entouré de jardins magnifiques mais étrangement silencieux, comme figés dans une perfection irréelle. Les haies taillées avec soin et les roses rouges qui bordaient l’allée semblaient presque trop belles, trop artificielles. Je me demandai ce que ma belle-mère avait en tête en m’envoyant ici. Était-ce un piège tordu, une de ses manigances habituelles, ou une véritable opportunité ? Avec elle, on ne savait jamais à quoi s’attendre. Elle avait ce don pour transformer les situations les plus banales en cauchemars imprévisibles.
Je n’avais d’autre choix que de le découvrir.
Je descendis de mon vieux vélo rouillé, les jambes encore tremblantes de la longue route, et m’approchai de la porte d’entrée massive en bois sculpté. Mon cœur battait la chamade, un tambour désordonné dans ma poitrine, mais je me forçai à rester calme, à respirer lentement. Je frappai à la porte avec une assurance que je ne ressentais pas vraiment. Le son résonna dans l’air frais, amplifié par le silence oppressant du domaine. Après un moment , la porte s’ouvrit pour révéler un majordome élégant. Grand, mince, vêtu d’un uniforme noir impeccable, il me regarda en me jaugeant de haut en bas.
— Bonjour, mademoiselle. Vous êtes attendue, dit-il avec une voix posée, avant de me faire signe d’entrer d’un geste gracieux.
Le majordome me conduisit à travers un couloir interminable jusqu’à un grand salon où un homme élégant m’attendait. Il se leva , et je pus l’observer attentivement. Il était grand, avec une posture droite et assurée, presque militaire. Ses cheveux gris, soigneusement coiffés en arrière, encadraient un visage anguleux, marqué par des rides profondes qui lui donnaient un air sévère. Ses yeux, d’un bleu glacial, semblaient percer à travers moi, me mettant immédiatement mal à l’aise. Il portait un costume sombre, parfaitement taillé, qui accentuait sa silhouette élancée. Une montre en or brillait à son poignet gauche, et ses mains, ornées de bagues précieuses aux pierres scintillantes, trahissaient une vie de luxe et de pouvoir. Tout en lui respirait l’autorité, mais aussi quelque chose de plus sombre, de plus inquiétant.
Il me salua avec un sourire énigmatique, ses lèvres fines s’étirant sans jamais atteindre ses yeux, qui restaient froids et calculateurs. Une aura de danger et de manipulation émanait de lui, si palpable que je sentis un frisson me parcourir l’échine. Malgré son apparence raffinée, il y avait dans son regard une lueur qui me terrifiait, une promesse muette de menace. Je ne savais pas ce qui m’attendait, mais une chose était sûre : je devais rester forte, vigilante, ne pas lui montrer la peur qui montait en moi comme une marée.
— Bonjour, mademoiselle. Je suis le Comte de Montaigne. Vous devez être Cendrillon, n’est-ce pas ? dit-il d’une voix grave, légèrement rauque, qui résonna dans la pièce.
Je hochai la tête, essayant de dissimuler ma nervosité, mes mains moites serrées derrière mon dos.
— Oui, c’est moi. Ma belle-mère m’a envoyée ici. Elle m’a dit que vous aviez une proposition à me faire, un travail à me proposer, articulai-je, ma voix plus faible que je ne l’aurais voulu.
Le Comte de Montaigne m’invita à m’asseoir sur un canapé en velours rouge, doux mais inconfortable sous mes doigts crispés. Il prit place en face de moi dans un fauteuil imposant, ses yeux perçants me scrutant attentivement, comme un prédateur évaluant sa proie. L’air entre nous semblait chargé, lourd d’une tension que je ne comprenais pas encore.
— En effet, mademoiselle. Votre belle-mère m’a parlé de votre situation difficile. Avec votre maman, nous avons trouvé une solution qui la sort de l’embarras ! annonça-t-il avec une satisfaction malsaine dans la voix.
— De quoi s’agit-il ? demandai-je, la gorge sèche, la voix tremblante malgré mes efforts pour la stabiliser.
Le Comte de Montaigne se pencha en avant, ses mains jointes sur ses genoux, ses bagues cliquetant légèrement l’une contre l’autre.
— J’ai payé une somme considérable pour... votre virginité et tout le reste ! lâcha-t-il sans détour, son ton aussi froid que ses yeux.
Mon cœur se serra violemment. Je savais que ma belle-mère était capable de tout pour sauver sa situation, mais ça ? Me vendre comme une vulgaire marchandise ? Je restai incapable de croire ce que je venais d’entendre. Mon estomac se noua, une vague de nausée me submergea, et je sentis les larmes monter, brûlantes, au coin de mes yeux.
— Je... je ne peux pas accepter cela, balbutiai-je, la voix brisée, les larmes roulant déjà sur mes joues.
Le Comte de Montaigne se leva brusquement, son visage se durcissant, son sourire s’effaçant pour laisser place à une expression implacable.
— Vous n’avez pas le choix, mademoiselle. Votre belle-mère a déjà accepté l’offre. L’argent a été viré sur son compte. Vous êtes à moi maintenant. Jamais je ne vous laisserais repartir ! gronda-t-il, sa voix montant d’un ton, autoritaire et menaçante.
Je me levai à mon tour, tremblante de peur et de colère, mes jambes vacillantes sous moi.
— Non, je ne suis à personne. Je ne suis pas une marchandise que l’on peut acheter ou vendre, rétorquai-je, ma voix gagnant en force malgré les sanglots qui menaçaient de m’étouffer.
Le Comte fit un pas vers moi, rapide, déterminé. Je reculai précipitamment, mais il me barra le passage, sa silhouette imposante bloquant la sortie. Cherchant désespérément une issue, je trébuchai dans ma hâte, perdant l’équilibre, et tombai lourdement sur le canapé. Il ne perdit pas une seconde pour se jeter sur moi, son poids me clouant contre les coussins.
Je pleurais, protestais, mes mains frappant son torse, mais il ne semblait pas s’en soucier, ses yeux brillant d’une lueur perverse.
— Tais-toi, ordonna-t-il d’une voix froide, tranchante comme une lame. J’ai déjà donné la somme à ta belle-mère. Tu es à moi maintenant. Allez, ma jolie, laisse-toi faire. Ça va être agréable pour tout le monde.
— Non, monsieur, s’il vous plaît ! suppliai-je, les larmes coulant à flots, ma voix rauque de désespoir.
Il me prit par le menton et serra si fort que je crus qu’il allait m’étrangler, ses doigts s’enfonçant dans ma peau. Tandis que sa main libre se glissait dans mon pantalon, je pleurais, hurlais, suffoquais, me débattant de toutes mes forces pour me libérer de son emprise. Mais il était implacable. Avec une violence inouïe, il commença à arracher mes vêtements, le tissu se déchirant sous ses gestes brutaux. Je frappais, griffais, mais il était trop fort, trop déterminé. Il se déshabilla partiellement, son souffle lourd et irrégulier trahissant ses intentions malveillantes.
— Arrête de te débattre ou je t’attache, petite salope ! cracha-t-il.
Choquée, je le regardai, les yeux écarquillés, tandis qu’il tentait de forcer sa langue dans ma bouche. Un haut-le-cœur me secoua, et il s’écarta juste assez pour me gifler violemment, ma joue brûlant sous l’impact.
— Tu vas voir si ma langue te donne des haut-le-cœur, ce que je vais te mettre tout à l’heure ! grogna-t-il, furieux.
Je pleurais, le suppliais, mais il restait sourd à mes cris, ses mains continuant leur assaut. Lorsqu’il glissa une main dans ma culotte, il grogna, un son guttural et répugnant.
— C’est bien sec par ici, tant pis pour toi !
Je ne comprenais pas ses paroles, mon esprit embrouillé par la panique et la douleur, mais je continuais de me débattre, mes ongles s’enfonçant dans ses avant-bras. Plutôt mourir que céder !
ETHANMon frère jumeau Micah et moi, sur nos motos, roulions à toute allure en direction du château du comte de Montaigne. Le vent fouettait nos visages, et le grondement des moteurs se mêlait à l'écho des roues frappant le pavé. La route sinueuse semblait interminable, mais nous savions que chaque seconde nous rapprochait du but, chaque accélération était un pas de plus vers notre objectif.Les paysages défilaient à une vitesse folle, mais nos esprits étaient concentrés sur ce qui nous attendait. Le château se dessinait à l'horizon, imposant et majestueux, mais à la fois menaçant. Nous n'avions pas le luxe de nous y rendre à un rythme plus calme. Ce soir-là, tout devait être parfait.Micah, à mes côtés, ne disait rien, ses yeux fixés sur la route, mais je pouvais sentir son intensité à travers chaque mouvement qu'il faisait. Il savait, comme moi, que cette mission était cruciale. Nos vies, et peut-être même plus, en dépendaient.Le message que nous avions reçu était clair et précis :
Ethan En arrivant près du château, nous avons garé nos motos à l’abri des regards indiscrets, dans un bosquet dense où les branches basses formaient une voûte naturelle. Le ronronnement des moteurs s’est tu, remplacé par le bruissement des feuilles mortes sous nos bottes. Nous avons enfilé nos tenues de camouflage avec des gestes précis : masques blancs anonymes, casques de moto noirs, gants en cuir usés par des années d’usage. Nous étions prêts à nous fondre dans l’ombre. La fin d’automne approchait, et le ciel virait déjà au gris profond, annonçant une nuit précoce. Au loin, les lumières du château scintillaient comme des étoiles tombées sur terre, projetant des ombres mouvantes qui allaient devenir nos alliées.Nous avons contourné le bâtiment par l’arrière, longeant les murs de pierre froide, évitant soigneusement les flaques de lumière des projecteurs et les yeux perçants des caméras de surveillance. Chaque pas était calculé, chaque souffle retenu. Une fois à l’intérieur, nous av
EthanJe plongeai mon regard dans celui de mon frère. Ses yeux brillaient d'une fierté qu'il tentait toujours de dissimuler, mais que je savais reconnaître. Il acquiesça d’un léger mouvement de tête, confirmant ce que nous devions faire. Je me retournai, attrapant fermement la fille par le bras.Elle se débattit, son corps se tordant sous l'emprise de la panique. Ses cris, ses tentatives désespérées de s'échapper, n'avaient aucun sens pour nous. Tout ce que nous voulions, c'était la sortir de là. Lui offrir une chance de s'en aller et de reprendre le cours de sa vie. Après tout, elle n'était rien de plus qu'une victime dans ce jeu morbide. Rien de plus qu'une simple fille prise dans un conflit qui la dépassait.— Calme-toi, lâchai-je d'une voix basse et grondante, serrant un peu plus son bras pour qu'elle cesse de se débattre. Mais, dans un mouvement brusque, elle arracha mon masque d'un coup sec.Mon visage, maintenant découvert, se retrouva exposé à ses yeux terrifiés. Ce fut l’insta
Je la tenais fermement contre moi, son corps frêle tremblant sous la pression de mes mains. Son souffle était rapide, irrégulier, comme si chaque respiration pouvait être la dernière. Le comte, ce salaud, avait été neutralisé, mais je sentais qu’elle n’était pas prête à comprendre la gravité de la situation. Ses yeux, agrandis par la peur, se fixaient tour à tour sur moi et Mica, cherchant une échappatoire dans cette pièce où il n’y en avait aucune.Le comte avait toujours été un homme dangereux, mais son pouvoir ne venait pas seulement de lui. Il avait des alliés, des hommes impitoyables, prêts à tout pour maintenir l'ordre qu’il avait instauré. Sa mort n’allait rien changer pour elle, au contraire, elle venait de se plonger dans un cauchemar encore plus profond. Ce n’était plus une question de fuir. La question était de survivre. « Ils te traqueront. » Les mots résonnaient dans ma tête, prononcés par Mica quelques minutes plus tôt.Soudain, un bruit sourd derrière moi me fit lever le
ETHANFinalement, nous atteignions une porte de service qui donnait sur les jardins, ses gonds rouillés grinçant dans la nuit silencieuse. Nous courions jusqu’à nos motos, la jeune femme entre nous deux, son souffle court résonnant dans l’air frais.— Tu avais déjà fait de la moto ? demandais-je en la regardant, mes yeux scrutant son visage pâle sous la lumière blafarde de la lune.— Non, répondait-elle d’une voix tremblante, à peine audible.— Alors écoutais bien, disais-je en lui tendant un casque usé, son plastique rayé reflétant les ombres. Tu devais t’accrocher et suivre les mouvements de mon corps. Si tu ne le faisais pas, tant pis pour toi.Elle hochait la tête, les yeux remplis de peur mais déterminée à obéir, ses doigts hésitants effleurant le casque.Nous enfilions nos casques, le cliquetis des attaches brisant le silence. Je montais sur ma moto, le cuir de la selle craquant sous mon poids, et Mica l’aidait à grimper derrière moi, ses mains fermes la guidant. Elle me prenait
ETHANJe me suis dirigé vers la salle de bain, enlevant mes vêtements en chemin. J’ai toujours été à l’aise avec mon corps, et je n’ai jamais prêté attention à la gêne des autres.La jeune femme, assise sur un vieux canapé, détourna le regard, visiblement mal à l’aise.— Je vais prendre une douche, dis-je à Mica. J’ai du sang du comte sur moi.— Ok, répondit mon frère, il regarda la fille et rit de sa gêne.— T’as jamais vu un homme nu ou quoi ?Elle rougit si violemment que le contraste entre sa peau et la blondeur de ses cheveux devint encore plus frappant. Elle détourna le regard, visiblement mal à l’aise, tandis que je me dirigeais vers la salle de bain pour prendre une douche.Le garage avait une petite salle de bain, juste une douche, un lavabo et des toilettes, pas de luxe, plutôt rudimentaire, mais c’était suffisant !Après une douche rapide, je suis sorti de la salle de bain, toujours nu, et je me suis dirigé vers mon coffre pour prendre des vêtements propres que j’avais empor
Cendrillon💋Lorsque l’individu ferma la porte à clé, je me dirigeais discrètement derrière et j’entendais :— On devait trouver un moyen de la faire disparaître complètement, me dit-il d’une voix basse, presque un murmure. J’avais peur qu’elle nous attire des ennuis. Je ne la sentais pas, cette fille.— J’étais d’accord, répondis-je, mes mots pesés avec prudence. Mais pour l’instant, on n’avait pas le choix que d’attendre. Après tout, elle ne pouvait pas vraiment faire grand-chose contre nous dans sa situation. Allez, viens, allons bosser un peu. Nous réfléchirons plus tard à ce que nous pouvions faire !— Oui, tu avais raison, Ethan, il ne fallait pas non plus se précipiter ! Ce n’était pas tout, mais le travail nous attendait, et j’avais une de ces soifs aussi !Ils voulaient se débarrasser de moi, me tuer très certainement. Mon cœur battait à tout rompre, et je sentais une sueur froide couler le long de mon dos, trempant le tissu léger de ma chemise. Je tendais de nouveau l’oreille
Cendrillon 💋Je me levais et décidais de regarder dans l’armoire, ses portes grinçantes révélant un vide poussiéreux, puis dans la table de chevet, tout aussi déserte. Je regardais même en dessous, au cas où, soulevant un coin du tapis usé, mais je ne voyais rien, pas même une trace d’objets oubliés.J’entendais de nouveau le plancher grincer, un son aigu qui me faisait frissonner. Je me redressais précipitamment et me mettais sur le lit, le matelas s’affaissant sous mon poids. La porte s’ouvrait, et ils étaient là tous les deux, leurs silhouettes imposantes emplissant l’encadrement.— Bouge, on avait loué la chambre ! disait l’un d’eux, sa voix rauque tranchant l’air.Je me levais, les regardais sans trop comprendre ce qu’ils me disaient, mon esprit embrouillé par la peur.— Bouge ! criait le second d’une voix menaçante, ses mots résonnant comme un ordre brutal.J’obéissais et m’approchais d’eux, mes pas hésitants sur le sol irrégulier. Ça se trouvait, c’était une ruse pour que je le
CENDRILLONOn arriva au bar-hôtel au petit matin, le ciel gris perlant de pluie fine. Les planches sur les fenêtres donnaient à l’endroit un air de bunker, mais c’était toujours debout, toujours à nous. Marie gara la voiture en travers du parking, et on sortit péniblement, comme des soldats rentrant d’une guerre qu’on avait pas vraiment voulue. Ethan boitait, soutenu par Roland. Mica grognait en tenant son épaule, refusant l’aide de quiconque. Moi, je guidai mon père, son bras autour de mes épaules, son poids léger mais pesant sur mon cœur.À l’intérieur, ça sentait encore la bière et le bois, mais y’avait une odeur de cendres aussi, un souvenir de l’incendie qu’on avait éteint avant de partir. On s’effondra tous autour d’une table, un tas de corps cassés mais vivants. Marie sortit une bouteille de whisky de sous le comptoir et servit des verres sans demander, même à mon père, qui trembla en prenant le sien.— À nous, dit-elle, levant son verre. Les emmerdeurs qui survivent.On trinqu
MICAHLes premiers hommes arrivèrent, armes dégainées, et le chaos explosa. Je tirai, visant la tête, et un type s’effondra. Ethan plongea sur un autre, son couteau trouvant une gorge. Cendrillon couvrit son père, tirant maladroitement mais touchant un bras. Le bruit des balles et des cris remplit la cave, et moi, je riais presque – c’était ma guerre, ma putain de danse.Mais y’en avait trop. Un coup me frappa à l’épaule, et je grognai, le sang chaud coulant sous ma veste. Ethan prit une balle dans la jambe, tombant à moitié. Cendrillon cria, et son père la poussa derrière lui, frappant un type avec son bout de métal. On était foutus, mais je voyais pas encore la fin.Et puis, une détonation plus forte éclata dehors, suivie d’un hurlement. Les hommes de Darius hésitèrent, et une silhouette descendit l’escalier, un revolver fumant à la main. Marie. Putain, Marie, avec Roland derrière elle, une carabine dans les mains tremblantes.— Bougez vos culs ! cria-t-elle, abattant un autre type.
MicahLe sous-sol du pub puait la peur et le sang, un mélange qui me rappelait trop de nuits où j’avais dû jouer les bêtes pour survivre. Darius était là, dos au mur, mon flingue collé à sa tempe, son sourire de serpent toujours vissé à sa gueule. Autour de nous, ses hommes gisaient dans leur propre merde – morts pour les chanceux, gémissants pour les autres. Ethan saignait d’une entaille au bras, mais il tenait debout, son couteau dégoulinant dans sa main. Cendrillon, elle, serrait sa bouteille brisée comme une arme, ses yeux brûlant d’une rage que je connaissais bien. On avait gagné cette manche, mais ce connard de Darius avait encore un as dans sa manche, je le sentais.— Parle, ordonna-t-elle, sa voix claquant comme un fouet.Putain, j’étais fier d’elle. Elle tremblait plus, ma princesse. Elle avançait vers lui, et moi, je reculai juste assez pour le garder en joue, laissant Ethan l’attraper par le col pour le tenir en place. Darius ricana, un son qui me donnait envie de lui explo
On débarqua à l’aube, et putain, cette ville puait la pluie et le désespoir. Le ciel était gris, lourd, comme s’il allait nous tomber sur la tronche. Marie nous avait filé une adresse – un entrepôt pourri dans l’est, près des docks. Je garai la bagnole le long d’un mur tagué, à l’abri des curieux, et on sortit dans l’air froid qui vous mordait la gueule. Cendrillon resserra son manteau, Ethan planqua son flingue dans sa ceinture, et moi, je scrutai les environs.— Ça pue la merde, marmonnai-je. Trop calme.— C’est les docks, répondit Ethan, toujours calme comme un moine. C’est toujours mort à cette heure.Je grognai, pas convaincu. Les docks, ouais, mais y’avait un truc qui clochait. Trop de silence, trop d’ombres. L’entrepôt se dressait là, une ruine de ferraille avec des fenêtres explosées qui vous fixaient comme des yeux crevés. La porte grinçait dans le vent, et je vis Cendrillon serrer les poings. Elle avança d’un coup, sans attendre.— Allons-y, dit-elle, et elle fila vers l’entr
CENDRILLONOn passa l’après-midi à préparer nos affaires. Quelques vêtements, des armes que les jumeaux avaient gardées de leur passé, et un plan griffonné sur une serviette en papier. Londres. Darius. Le serpent et la couronne. Chaque mot pesait comme une pierre dans ma poitrine, mais je refusais de flancher. Pas avec Ethan et Mica à mes côtés. Pas avec ce bébé qui me donnait une raison de plus de me battre.Vers le soir, alors qu’on chargeait la voiture, je pris une seconde pour regarder le bar. Notre refuge, notre rêve. Les planches sur les fenêtres lui donnaient l’air d’une forteresse, mais il restait debout. Comme nous.— Prête ? demanda Ethan, sa voix douce derrière moi.— Ouais, murmurai-je. Prête.Mica klaxonna depuis le volant, un sourire sauvage aux lèvres.— Alors bouge, princesse. On a un roi à décapiter.Je montai dans la voiture, le cœur battant, et alors qu’on s’éloignait dans la nuit, je sentis une étrange certitude s’installer. Peu importe ce qui nous attendait, on af
CENDRILLON— Et nous ? demanda Ethan, ses yeux sombres fixés sur elle.— Vous sécurisez cet endroit, répondit-elle. Barricadez les fenêtres, vérifiez les clients. Si les hommes de Valerian veulent jouer, ils viendront ici. C’est votre château, protégez-le.Roland releva enfin la tête, ses mains agrippant sa canne comme s’il puisait sa force dans le bois usé.— Je reste avec vous, murmura-t-il. Si c’est ma faute, je vais pas vous laisser seuls.— T’es sûr que t’es en état ? lâcha Mica, sans filtre. T’as l’air d’un mort qui marche, Roland.— Mica ! sifflai-je, mais il me coupa d’un regard.— Quoi ? C’est vrai. On a besoin de combattants, pas de poids morts.Roland esquissa un sourire triste, presque amer.— T’as raison, petit. Mais j’ai encore un ou deux tours dans mon sac. Laissez-moi une chance de me racheter.Le silence revint, lourd, chargé de tout ce qu’on ne disait pas. Marie écrasa sa cigarette à moitié fumée et se leva.— Reposez-vous ce soir, ordonna-t-elle. Demain, on entre en
Marie et Roland arrivèrent deux heures plus tard, la vieille camionnette de Marie crachant une fumée noire sur le parking. Roland descendit en premier, le visage creusé par la fatigue, une canne dans la main droite. Il avait l’air d’un homme qui portait le poids du monde sur ses épaules. Marie suivit, une cigarette au coin des lèvres, ses cheveux gris en bataille. Elle avait cette allure de guerrière usée mais indomptable qui me fascinait toujours.— Montrez-moi ça, dit-elle en jetant son mégot par terre.Ethan lui tendit la photo et le mot. Elle les examina en silence, ses yeux plissés comme si elle lisait un code invisible. Roland s’assit lourdement sur une chaise, son regard fixé sur la table.— Ça te dit quelque chose ? demanda Mica, croisant les bras.Marie releva la tête, son expression sombre.— Ouais, dit-elle enfin. Ça pue la pègre à plein nez. Ces messages cryptiques, ces vieilles photos… c’est leur façon de dire qu’ils vous ont dans le viseur.— Mais qui ? insistai-je. Mon
Cendrillon— Cendrillon… murmura Ethan, ses doigts effleurant mon épaule.Je ne répondis pas. Mes yeux étaient rivés sur le papier plié que Mica déplia lentement. Quelques mots griffonnés à l’encre noire, d’une écriture tremblante mais lisible : « Les contes finissent mal quand on oublie les dettes. »Un silence glacial s’abattit sur nous. Le bar, pourtant encore bruyant, sembla s’effacer autour de moi. Je sentis une sueur froide couler dans mon dos, et mes jambes vacillèrent. Mica froissa le papier dans son poing, ses jointures blanchissant sous la pression.— C’est quoi cette merde ? grogna-t-il, ses yeux lançant des éclairs.Ethan, plus calme mais tout aussi tendu, ramassa la photo et l’examina de près.— Quelqu’un sait que t’es ici, dit-il doucement. Quelqu’un qui connaît ton passé.— Mon père est mort, articulai-je, la voix tremblante. Et ma belle-mère… Marie l’a vendue à des mafieux après ses aveux. Qui pourrait…Je m’interrompis, incapable de finir ma phrase. Les dettes. Ce mot
CendrillonLe bar-hôtel de Roland bourdonnait comme un essaim d’abeilles en pleine saison. Les rires des clients ricochaient sur les murs en bois, les verres s’entrechoquaient dans un tintement joyeux, et l’odeur de bière fraîche se mêlait à celle des frites tout juste sorties de la friteuse. C’était une soirée comme je les aimais : bruyante, vivante, un chaos organisé où je me sentais enfin chez moi. Un an s’était écoulé depuis ce jour où Ethan et Mica avaient scellé notre union sous les étoiles, un an depuis que j’avais dit oui à deux hommes qui avaient transformé ma vie de cendres en quelque chose de lumineux. Et pourtant, ce soir-là, alors que je servais une pinte à un habitué, une sensation étrange me nouait l’estomac.Je posai la main sur mon ventre, instinctivement. Rien ne se voyait encore – pas de courbe, pas de rondeur – mais je savais. Depuis quelques jours, un pressentiment grandissait en moi, confirmé ce matin par un test discret acheté à la pharmacie du coin. Deux petites