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Chapitre 2 : L’Hospice et les Ombres du Passé

Penulis: Déesse
last update Terakhir Diperbarui: 2025-02-26 03:27:07

Raphaël

Elle part.

Mais elle a déjà laissé une empreinte dans cet endroit qui ne pardonne rien.

Ses pas sont fermes, déterminés, mais je n’ai pas besoin de voir son visage pour savoir qu’elle est troublée.

Une nonne. Une foutue nonne, avec des yeux trop clairs et une présence trop forte pour être ignorée.

J’aurais dû la laisser partir, tourner la tête et retourner à mes affaires.

Mais non.

Je la regarde disparaître dans la brume du village, et une pensée me traverse.

Elle ne tiendra pas.

Poudain-Bassé va l’engloutir.

Et si ce n’est pas ce maudit endroit qui le fait… ce sera moi.

Clara

L’hospice est plus délabré que je ne l’imaginais.

Une bâtisse austère, aux murs rongés par l’humidité, aux fenêtres ternies par le temps. L’air y est épais, chargé d’odeurs de plantes médicinales et de misère. Une lourde croix de fer est clouée au-dessus de l’entrée, mais ici, la foi semble bien fragile face à la souffrance.

Lorsque je franchis le seuil, un silence pesant m’accueille.

Une femme en habit de sœur m’aperçoit et s’approche. Son visage est marqué par la fatigue, ses yeux cernés d’une lassitude profonde.

« Vous êtes la nouvelle venue ? » Sa voix est rauque, comme si elle n’avait plus parlé avec douceur depuis longtemps.

Je hoche la tête.

« Sœur Clara. »

Elle m’observe, jauge ma présence avec un mélange de curiosité et d’incrédulité.

« Je suis Sœur Agnès. Nous avons besoin d’aide… mais vous n’êtes pas prête pour ce que vous allez voir ici. »

Une étrange appréhension me noue l’estomac.

Mais je me reprends.

« J’ai passé des années à soigner les malades, à panser les plaies et à accompagner les âmes en détresse. Rien ne peut me surprendre. »

Elle esquisse un sourire triste.

« C’est ce que je pensais aussi. Suivez-moi. »

Je la suis à travers un couloir sombre, où des silhouettes chuchotent dans l’ombre. L’hospice est rempli d’âmes en peine, des hommes et des femmes brisés, blessés, abandonnés.

Et en filigrane, une présence invisible, oppressante.

Quelque chose de non-dit.

Quelque chose qui ronge cet endroit de l’intérieur.

Quelque chose qui a un lien avec Raphaël.

Raphaël

Je la regarde de loin.

Elle n’a pas peur. Pas encore.

Mais elle comprendra bientôt que l’hospice n’est qu’une façade, une illusion de charité dans un endroit où la miséricorde est un luxe que personne ne peut se permettre.

Clara.

Un nom trop pur pour ce lieu.

Je devrais l’ignorer. L’oublier. Me contenter de la laisser à son destin, comme j’ai laissé tant d’autres âmes s’égarer ici.

Mais elle me rappelle quelqu’un.

Quelqu’un que j’ai perdu.

Une autre femme, aux yeux clairs et à la voix douce.

Ma mère.

J’avais dix ans quand elle est morte. Assassinée sous mes yeux par ceux qui voulaient se venger de mon père. Ils ne l’ont pas juste tuée. Ils ont fait pire. Ils ont détruit tout ce qui faisait d’elle un être humain.

J’ai grandi dans cette douleur. Dans cette rage.

J’ai appris à survivre dans le sang et la violence.

Et aujourd’hui, je suis devenu le monstre que mon père était avant moi.

Mais cette nonne…

Elle ravive quelque chose en moi que j’ai enterré il y a longtemps.

Une faiblesse.

Un souvenir que je ne peux pas me permettre d’avoir.

Parce qu’ici, l’humanité est une arme qui se retourne toujours contre vous.

Et je refuse d’être désarmé.

Clara

Les jours s’étirent à l’hospice, rythmés par la souffrance et les prières. Pourtant, derrière l’odeur âcre des potions médicinales et le chuchotement des mourants, une tension invisible s’infiltre peu à peu dans mon esprit.

Elle n’a rien à voir avec la misère qui m’entoure. Elle a tout à voir avec lui.

Raphaël.

Son nom résonne dans les conversations murmurées des sœurs. On parle de lui avec prudence, avec crainte. Son influence est partout. Certains le considèrent comme un protecteur, d’autres comme une menace. Mais personne ne l’ignore.

Moi non plus.

Je ressens sa présence même lorsqu’il n’est pas là. Chaque soir, lorsque je traverse la cour silencieuse, mon regard est attiré par l’ombre qui plane sur le village. Et parfois, il est là, appuyé contre un mur, m’observant sans un mot.

C’est un duel silencieux.

Il m’attend. Il me teste.

Et moi, malgré la sévérité de ma foi, malgré l’austérité de mon existence, je ne peux m’empêcher de répondre à cet appel tacite.

Pourquoi ?

Parce que, sous son regard, je ne suis plus seulement une sœur.

Je suis une femme.

Raphaël

Je devrais détourner les yeux.

L’ignorer.

Elle finira par partir, comme tous ceux qui ne sont pas faits pour cet endroit. Mais quelque chose me retient.

Clara n’a rien à faire ici. Elle est trop droite, trop pure. Mais surtout, elle ne baisse pas les yeux devant moi.

Je n’ai pas l’habitude qu’on me tienne tête sans crainte. Ceux qui me défient finissent à genoux, de gré ou de force.

Mais elle, elle se tient là, le dos droit, les yeux clairs levés vers moi, et elle me défie d’un simple regard.

Ce n’est pas une provocation. C’est autre chose.

Je la veux à genoux, oui. Mais pas comme les autres.

Je veux la voir vaciller, l’entendre murmurer mon nom avec la même ferveur qu’elle réserve à ses prières.

Et je sais que, tôt ou tard, elle cédera.

Parce que Poudain-Bassé consume tout.

Et moi, je suis le feu.

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