Besançon2010Irina souriait devant son ordinateur, ravie du mauvais tour qu’elle s’apprêtait à jouer à Clara Zhilliet, sa copine.«Tu vas voir ma vieille, tu vas regretter de m’avoir tapé la honte ce matin. Faut pas me chercher.»Elle connaissait de longue date les identifiants Facebook de sa meilleure amie, tout comme Clara savait les siens. Ce matin-là, tout avait dérapé, Clara était arrivée d’humeur massacrante. Pour partie, à cause de la colle qu’elle devrait effectuer le soir même, après les cours: Rangement du matériel et nettoyage du gymnase à partir de dix-huitheures. Elle était énervée aussi suite à une énième confrontation avec son idiot de beau-père. Dès qu’Irina était apparue, elles s’étaient pris le bec toutes les deux. Oh, elles ne devaient même plus savoir pourquoi elles s’étaient disputées. L’important, c’est qu’elles l’avaient fait en public et qu’elles s’étaient dit des choses que deux amies ne devaient pas se dire !
St Gaudens2018Deux heures du matin… marre de consulter le réveil toutes les troisminutes ! Yannis ralluma son pc: connexion Facebook, et ce fut parti pour une bonne séance d’archéologie, façon hacker ! Quand il regarda à nouveau la pendule, il avait les yeux qui piquaient. Il avait du être happé par une faille spatio-temporelle, il était cinq heures quinze... Il lui semblait n’avoir passé qu’un quart d’heure, ou au pire trente minutes. Il était tout de même satisfait de sa pioche. Il mit un peu de clair dans ses notes et retourna au lit pour deuxpetites heures de repos bien mérité.Lorsque le téléphone sonna, il tâtonna du bout des doigts sur la table de nuit, attrapa son Smartphone et au moment de décrocher, eut une décharge d’adrénaline en voyant l’heure… huit heures vingt.–Allo, dit-il, essayant de masquer un relent de voix pâteuse.–Bon sang ! Yannis, tu dormais ? Qu’est-ce que tu fous ?Sandrine était furax !
Besançon2010Clara se dirigeait vers le gymnase comme une automate. Cette histoire de colle, ça la gavait sévère ! Quelle punition de naze, pestait-elle ! Ce n’était que la consécration d’une journée calamiteuse, elle ne voyait pas bien ce qu’il pourrait bien lui arriver de pire ! Déjà, ce matin, elle s’était pris la tête avec sa copine, ensuite, son téléphone s’était déchargé et, pour couronner le tout, il lui fallait aller ranger ces trucs qui puent la sueur et la testostérone !Et allez, ça continue, elle avait oublié les travaux! Il lui fallut faire le tour complet pour pouvoir entrer ! Quand elle arriva de l’autre côté… Oh non ! pensa-t-elle « Décidément, une journée de merde, c’est une journée de merde jusqu’au bout ». Kevin et Jules étaient assis sur la murette attenante au gymnase. Les idiots du village, « qu’est-ce qu’ils foutent là, bordel ? Faut vraiment que je les bloque de mon Facebook. » pensa-t-elle.–Salut, beauté.Clara lev
2° PartieLe déplacement de l'enquête à BesançonCommissariat de Saint-Gaudens2018.Sandrine luttait pour ne pas s’endormir pendant l’interminable discours de fin de mission. Un truc dont Pichery avait le secret… l’art de meubler le vide. Parler pendant un quart d’heure d’un non-événement devait relever d’un talent certain. Elle se souvint de Frédo, qui lui avait glissé à l’oreille lors du dernier débrief avec le commissaire:–On dirait une émission de déco sur M6: du clinquant et du tape à l’œil, mais en regardant de près, c’est à chier !La digression lui permit de sourire et d’éviter de sombrer définitivement.Damien, de son côté, venait de prendre connaissance des avancées nocturnes de Yannis. Il appela le procureur. Il argumenta un lien possible avec la disparition de Clara Zhilliet, à Besançon, ainsi que la curieuse perte de toutes les pièces du dossier. En mettant tous les éléments en vis-à-vis, on a
Besançon2010–Allo Boris ? C’est Georges.Le commissaire Karpof laissa passer la surprise. Un appel de son ami ne présageait rien de bon, surtout à sept heures du matin.–Boris, il faut que tu viennes. Maintenant !La dernière fois que le préfet Bergeron avait requis la présence de son ami d’enfance, c’était à la mort de son père. Jamais il ne l’aurait fait pour quelque futilité. Georges Bergeron était une vieille bête solitaire, il n’avait dans son entourage que son fils Anthony et quelque personnel de maison.En premier, il y avait Paul, son chauffeur-infirmier, un type effacé, indispensable et transparent. Il devait y avoir aussi une femme de chambre et une cuisinière, à moins que ce ne soit la même. Il ne le savait pas et n’avait aucune envie de le savoir. Leurs liens affectifs s’étaient distendus au point qu’il ignorait tout, à présent, de ce genre de détails privés. Le commissaire monta dans sa voiture et, vingt minutes plus ta
2018 Autoroute A20La 307 roulait depuis trois heures. Damien aimait bien conduire, surtout sur de longs trajets. Il avait proposé de prendre le premier relais. Frédo, à son côté, regardait le paysage en silence. Dans la mégane derrière eux, Sandrine et Yannis suivaient le même train de sénateur !La monotonie du paysage se déroulant avec lenteur, le ronronnement régulier de l’auto, le silence entre eux rendait l’air un peu plus épais à chaque kilomètre. La distance entre les deux sièges de la Peugeot semblait augmenter à mesure qu’ils se rapprochaient de leur objectif.Étonnamment, ce fut Frédo qui parla le premier.–Elle me manque !–Je sais… Enfin, j’imagine !–Si elle était là, elle saurait comment faire, avec le petit.–Il va falloir que tu arrêtes un peu de l’appeler le petit… il a quoi ? Quatorze ans ?–Quinze ans. Presque seize, mais c’est encore un con de gosse !–Difficile ?
Besançon2010Anka avait jeté un coup d’œil rapide dans la chambre de sa sœur. Vide. Pourtant, il lui avait semblé avoir entendu un bruit. Une plainte, peut être un sanglot ? Elle aurait mis sa main au feu. Cependant, il lui fallait se rendre à l’évidence: il n’y avait rien, elle avait rêvé, voilà tout. Elle tira la porte pour la refermer quand, elle l’entendit à nouveau. Ça venait bien de la chambre. Elle entra sans bruit. La pièce était exiguë, une déco girly, hétéroclite, en recherche de personnalité et d’identité. Plus franchement petite fille, avec ce grand poster de Stromae face à face avec Maître Gims. Mais pas tout à fait adolescente, avec ces peluches omniprésentes et son affiche géante d’un bisounours les bras ouverts, semblant vouloir faire un câlin aux chanteurs…À côté de la porte, il n’y avait que le placard. Rien ne pouvait venir de là. Face à elle, le lit une place était vide. Cela recommença. Cette fois-ci, elle l’entendit très nettement:
2018Aire de repos autoroute A20Le repas arrivait à sa fin, Frédo n’avait pas dit grand-chose, ce qui ne lui ressemblait guère. Les conversations étaient assez banales, météo, voiture, faits divers. Frédo se leva pour aller chercher les cafés et en se rasseyant, il prit la parole:–J’ai un truc à vous dire.Il avait posé ses avant-bras devant lui, mains jointes, en prière. Le ton était grave. Ses yeux regardaient un point imaginaire, fixe, sur la table, entre ses coudes. Ses collègues étaient attentifs, Frédo n’était pas coutumier de ce genre d’intervention, les chichis et les manières l’emmerdaient, on voyait bien qu’il prenait un élan intérieur…–Je vis seul. Vous le savez, ça n’a pas toujours été le cas. J’ai un fils de quinzeans, Nathan, vous pouvez vous douter… on a été deux pour le faire.Il eut un petit rire nerveux, la tentative d’humour essayait de masquer le fond… Sandrine faillit sortir une bêtise, elle se