Chapitre 3
– Sienna
Je serre ma coupe de champagne si fort que mes doigts commencent à engourdir. Si quelqu’un me regarde de loin, il doit penser que je suis parfaitement à l’aise. Robe noire ajustée, cheveux tirés en un chignon parfait, sourire poli vissé sur les lèvres. L’héritière modèle.
Mais à l’intérieur, je bouillonne.
— Sienna, darling, tu es resplendissante ce soir.
Je me retourne à moitié, découvrant le visage poudré de Marianne Langford, une amie de ma mère et surtout une commère professionnelle. Elle m’embrasse sur les deux joues comme si nous étions les meilleures amies du monde.
— Merci, Marianne. Tu es ravissante également.
Hypocrisie, quand tu nous tiens.
Elle jette un coup d’œil vers l’autre bout de la salle, où une silhouette familière attire déjà tous les regards.
— Et ce fiancé… comment résister à ce regard de braise, hm ?
Je manque de m’étouffer avec mon champagne.
— Ce n’est pas encore officiel.
Elle sourit, faussement innocente.
— Mais ça ne saurait tarder, n’est-ce pas ? Ce genre d’union, c’est du sérieux. Vos pères doivent être fous de joie.
Ils sont surtout fous de pouvoir, oui.
Je me libère poliment et m’éloigne dans la foule. La salle est bondée. Lustres dorés, musique douce, rires feutrés, tenues hors de prix. Tout le monde ici veut voir le nouveau couple vedette des sphères économiques. Ils veulent des regards complices, des gestes tendres, des rumeurs à colporter. Et moi, je veux vomir.
Il est là.
Adrian.
Adossé au bar comme s’il possédait l’endroit, un verre à la main, entouré d’un petit groupe de financiers et de journalistes. Il sourit. Il charme. Il joue son rôle.
Puis son regard croise le mien.
Un frisson me traverse, contre ma volonté.
Il s’excuse poliment auprès de son public et se dirige vers moi, chaque pas parfaitement mesuré. Je me redresse, relève le menton. Hors de question de fuir.
— Tu t’es surpassée ce soir, murmure-t-il en arrivant à ma hauteur. Belle, glaciale, méprisante… le trio gagnant.
— Je t’en prie, continue à flatter mon ego. Je pourrais presque croire que tu me supportes.
— Te supporter, c’est devenu ma mission de vie. Quelle noble cause, n’est-ce pas ?
Je ris, sèche.
— Ne me cherche pas ce soir, De Luca. Pas ici. Pas maintenant.
— Pourquoi ? Parce que tu veux garder ta dignité devant la presse ? Trop tard, White. Ils parlent déjà de nous comme du couple de l’année.
— Ils se trompent.
— Peut-être. Mais ils adorent les erreurs romantiques.
Il me tend une flûte de champagne. Je ne bouge pas.
— J’ai déjà ce qu’il me faut, je réponds.
— Tu veux dire cette rage contenue que tu déguises en élégance ? Oui, elle te va très bien.
Je serre les dents.
Il s’approche d’un pas. Trop près.
— Détends-toi. Ce soir, on est censés briller. Faire croire qu’on est fous l’un de l’autre. Alors fais un effort.
— J’en fais un. Je ne t’ai pas encore giflé.
Son sourire s’élargit.
— Tu m’as manqué, Sienna.
Il le dit trop doucement. Comme si c’était vrai. Comme s’il n’y avait pas derrière cette phrase une montagne de provocations, de défis, d’années d’humiliation déguisée en rivalité.
Je plante mes yeux dans les siens. Il ne recule pas. Il aime ça. Ce petit jeu tordu entre nous.
Et moi, je devrais le haïr pour ça.
Mais une part de moi – infime, silencieuse, coupable – aime aussi ce terrain brûlant où il m’entraîne.
— Qu’est-ce que tu veux vraiment, Adrian ? je souffle.
— Je veux qu’on leur donne ce qu’ils attendent.
— Une histoire d’amour ? Tu rêves.
— Non. Une illusion bien emballée. Jusqu’à ce que le contrat soit rempli.
Je hoche lentement la tête.
— Très bien. Alors faisons notre petite illusion.
Je lui tends la main. Il la prend sans hésiter. Et devant tous ces vautours en robe de soirée, je souris.
Nous sommes parfaits. Froids. Élégants. Menteurs.
Et personne ne devine à quel point je le hais.
Ou peut-être que si.
Parce qu’au fond de moi, quelque chose me dit qu’il n’est pas venu ce soir juste pour briller.
Il est venu pour me tester.
Et je déteste admettre que… je suis entrée dans le jeu.
Chapitre 4 – AdrianJe sens encore la chaleur de sa main dans la mienne.Elle tremblait légèrement. Presque imperceptiblement. N’importe qui d’autre aurait cru à un frisson passager, une réaction au contact, ou au froid de la salle. Mais moi, je sais.Sienna White tremble rarement.Et quand elle le fait, ce n’est jamais à cause du froid.Elle s’est tenue à mes côtés pendant dix minutes exactement. Assez longtemps pour alimenter les rumeurs, capturer quelques regards, faire naître les premiers articles de blog. J’ai vu les flashs crépiter autour de nous, entendu les murmures dans les coins. Et elle, elle souriait. Un sourire coupant comme une lame bien aiguisée.Parfaitement maîtrisé. Comme tout ce qu’elle fait.Mais son regard, lui… il disait autre chose.Elle me hait.Et c’est parfait.Parce qu’on ne peut pas haïr sans passion.Je me penche contre le mur du balcon, ma coupe de champagne à moitié vide dans la main. La réception continue à l’intérieur. Rires, musique, discours creux.
Chapitre 5 – SiennaJ’arrache mes talons dès que la porte de mon appartement se referme derrière moi.Je les laisse tomber avec un bruit sec sur le sol en marbre, puis j’avance à grands pas vers la cuisine, le cœur encore en vrac. Une fois devant le frigo, je l’ouvre d’un geste brusque et attrape la première bouteille de vin rouge qui me tombe sous la main.J’ai besoin d’un verre.Ou deux.Ou toute la foutue bouteille.La soirée me colle encore à la peau. Le satin de ma robe me gratte, mes boucles d’oreilles me tirent les lobes, et mes joues me brûlent à force de sourire pour les photographes. Tout dans mon corps me hurle de me débarrasser de cette soirée, de cette façade, de **lui**.Je remplis un grand verre à ras bord, puis m’affale sur le canapé, robe toujours sur le dos, chignon toujours tiré, maquillage intact. Parfaitement figée dans cette version de moi que je déteste.La Sienna White mondaine. La femme qu’ils veulent que je sois.Je prends une longue gorgée de vin et ferme l
Chapitre 6 – AdrianElle ne parle pas.Elle ne m’a pas encore mis dehors non plus, ce qui, venant de Sienna White, est pratiquement un miracle.Je suis debout, à deux pas d’elle, dans ce salon immaculé qui lui ressemble. Chaque détail est précis, chaque objet à sa place. Une beauté froide, calculée, contrôlée. Comme elle.Mais je sais que sous cette surface, ça bouillonne.Je le vois dans sa posture tendue, dans la façon dont ses doigts se crispent légèrement contre le tissu de son peignoir. Et surtout dans son silence. Sienna ne se tait jamais sans raison. Quand elle ne parle pas, c’est qu’elle lutte.Je décide d’attendre. De lui laisser l’espace de répondre. Je n’ai pas besoin de précipiter les choses. Pas avec elle.Et puis, elle souffle, les yeux plantés dans les miens :— Pourquoi maintenant ?Je hausse un sourcil.— Pourquoi je viens te proposer une alliance ce soir ?Elle hoche lentement la tête, méfiante.— Parce que ce soir, tu m’as prouvé que tu étais prête à faire ce qu’il
Chapitre 7 – SiennaLe bourdonnement incessant de mon téléphone me tire du sommeil.Je grogne, aveuglée par la lumière du matin, puis je tends la main à tâtons jusqu’à l’attraper sur la table de nuit. Quinze notifications. Dix messages. Trois appels manqués.Je cligne des yeux.Maman Julia (assistante)Bureau de presse White Corp. Et surtout…Une alerte Google News.Je me redresse d’un coup dans le lit, le cœur déjà en alerte. Mon instinct ne me trompe jamais, surtout quand il s’agit de mauvaises nouvelles. Je clique."Sienna White et Adrian De Luca fiancés en secret ?""L’empire White fusionne avec la dynastie De Luca : le mariage de l’année confirmé ?""Rumeurs d’un contrat de mariage entre deux héritiers ennemis"Mon souffle se bloque.Putain.Je bondis hors du lit, pieds nus sur le parquet, robe de chambre à moitié ouverte. Mon téléphone sonne. Encore.C’est Julia, ma fidèle assistante. Elle sait que je ne réponds jamais à la première sonnerie. Mais là, je décroche à la deuxiè
Chapitre 1 – Le piègeSienna White Je sens encore le goût du champagne sur ma langue quand mon monde s’effondre.Assise dans le salon glacé de mon père, entourée de murs de marbre et de silence, je regarde fixement le contrat que l’on vient de poser devant moi. C’est un document officiel, imprimé sur un papier si épais qu’on pourrait s’en servir comme arme. Chaque ligne est une menace. Chaque mot, une trahison.— C’est une blague, je murmure, le regard figé sur la dernière clause.Et pourtant, personne ne rit.Mon père est debout, le dos droit, les bras croisés. Il a ce regard froid, impénétrable, celui qu’il réserve aux conseils d’administration et aux situations de crise. À sa droite, ma mère évite soigneusement mon regard, ses doigts crispés sur sa coupe de vin blanc. Elle sait. Elle savait. Et elle ne m’a rien dit.— Tu es sérieusement en train de me dire que je dois épouser Adrian De Luca ? Ce... ce requin en costard ?!Ma voix monte, trahit la panique qui m’envahit. Je me lève
Chapitre 2 – L’ennemie parfaiteAdrian De Luca Je l’ai vue trembler. Rien qu’un instant. Un battement de cils. Une hésitation infime. Mais c’était là.Sienna White.Toujours aussi féroce. Toujours aussi fière. Toujours aussi magnifique dans sa rage.Je descends les escaliers de la villa White en silence, un sourire discret aux lèvres. J’entends encore le claquement de ses talons sur le marbre, sa voix pleine de colère et de mépris. Elle croit que c’est moi qui ai gagné.Mais ce n’est pas un jeu. Pas encore.C’est un test.Et je vais le réussir, comme toujours.Le chauffeur m’attend devant la voiture. Je monte à l’arrière sans un mot. Je déteste cette ville. Trop de souvenirs, trop d’odeurs étouffantes, trop de visages qui veulent vous poignarder avec un sourire. Mais je suis ici pour une raison. Et elle commence par un nom : White Industries.Mon père pense qu’il m’a piégé. Il croit que ce mariage arrangé va me forcer à rentrer dans les rangs, à jouer au bon héritier, à m’assagir. Il
Chapitre 7 – SiennaLe bourdonnement incessant de mon téléphone me tire du sommeil.Je grogne, aveuglée par la lumière du matin, puis je tends la main à tâtons jusqu’à l’attraper sur la table de nuit. Quinze notifications. Dix messages. Trois appels manqués.Je cligne des yeux.Maman Julia (assistante)Bureau de presse White Corp. Et surtout…Une alerte Google News.Je me redresse d’un coup dans le lit, le cœur déjà en alerte. Mon instinct ne me trompe jamais, surtout quand il s’agit de mauvaises nouvelles. Je clique."Sienna White et Adrian De Luca fiancés en secret ?""L’empire White fusionne avec la dynastie De Luca : le mariage de l’année confirmé ?""Rumeurs d’un contrat de mariage entre deux héritiers ennemis"Mon souffle se bloque.Putain.Je bondis hors du lit, pieds nus sur le parquet, robe de chambre à moitié ouverte. Mon téléphone sonne. Encore.C’est Julia, ma fidèle assistante. Elle sait que je ne réponds jamais à la première sonnerie. Mais là, je décroche à la deuxiè
Chapitre 6 – AdrianElle ne parle pas.Elle ne m’a pas encore mis dehors non plus, ce qui, venant de Sienna White, est pratiquement un miracle.Je suis debout, à deux pas d’elle, dans ce salon immaculé qui lui ressemble. Chaque détail est précis, chaque objet à sa place. Une beauté froide, calculée, contrôlée. Comme elle.Mais je sais que sous cette surface, ça bouillonne.Je le vois dans sa posture tendue, dans la façon dont ses doigts se crispent légèrement contre le tissu de son peignoir. Et surtout dans son silence. Sienna ne se tait jamais sans raison. Quand elle ne parle pas, c’est qu’elle lutte.Je décide d’attendre. De lui laisser l’espace de répondre. Je n’ai pas besoin de précipiter les choses. Pas avec elle.Et puis, elle souffle, les yeux plantés dans les miens :— Pourquoi maintenant ?Je hausse un sourcil.— Pourquoi je viens te proposer une alliance ce soir ?Elle hoche lentement la tête, méfiante.— Parce que ce soir, tu m’as prouvé que tu étais prête à faire ce qu’il
Chapitre 5 – SiennaJ’arrache mes talons dès que la porte de mon appartement se referme derrière moi.Je les laisse tomber avec un bruit sec sur le sol en marbre, puis j’avance à grands pas vers la cuisine, le cœur encore en vrac. Une fois devant le frigo, je l’ouvre d’un geste brusque et attrape la première bouteille de vin rouge qui me tombe sous la main.J’ai besoin d’un verre.Ou deux.Ou toute la foutue bouteille.La soirée me colle encore à la peau. Le satin de ma robe me gratte, mes boucles d’oreilles me tirent les lobes, et mes joues me brûlent à force de sourire pour les photographes. Tout dans mon corps me hurle de me débarrasser de cette soirée, de cette façade, de **lui**.Je remplis un grand verre à ras bord, puis m’affale sur le canapé, robe toujours sur le dos, chignon toujours tiré, maquillage intact. Parfaitement figée dans cette version de moi que je déteste.La Sienna White mondaine. La femme qu’ils veulent que je sois.Je prends une longue gorgée de vin et ferme l
Chapitre 4 – AdrianJe sens encore la chaleur de sa main dans la mienne.Elle tremblait légèrement. Presque imperceptiblement. N’importe qui d’autre aurait cru à un frisson passager, une réaction au contact, ou au froid de la salle. Mais moi, je sais.Sienna White tremble rarement.Et quand elle le fait, ce n’est jamais à cause du froid.Elle s’est tenue à mes côtés pendant dix minutes exactement. Assez longtemps pour alimenter les rumeurs, capturer quelques regards, faire naître les premiers articles de blog. J’ai vu les flashs crépiter autour de nous, entendu les murmures dans les coins. Et elle, elle souriait. Un sourire coupant comme une lame bien aiguisée.Parfaitement maîtrisé. Comme tout ce qu’elle fait.Mais son regard, lui… il disait autre chose.Elle me hait.Et c’est parfait.Parce qu’on ne peut pas haïr sans passion.Je me penche contre le mur du balcon, ma coupe de champagne à moitié vide dans la main. La réception continue à l’intérieur. Rires, musique, discours creux.
Chapitre 3 – SiennaJe serre ma coupe de champagne si fort que mes doigts commencent à engourdir. Si quelqu’un me regarde de loin, il doit penser que je suis parfaitement à l’aise. Robe noire ajustée, cheveux tirés en un chignon parfait, sourire poli vissé sur les lèvres. L’héritière modèle.Mais à l’intérieur, je bouillonne.— Sienna, darling, tu es resplendissante ce soir.Je me retourne à moitié, découvrant le visage poudré de Marianne Langford, une amie de ma mère et surtout une commère professionnelle. Elle m’embrasse sur les deux joues comme si nous étions les meilleures amies du monde.— Merci, Marianne. Tu es ravissante également.Hypocrisie, quand tu nous tiens.Elle jette un coup d’œil vers l’autre bout de la salle, où une silhouette familière attire déjà tous les regards.— Et ce fiancé… comment résister à ce regard de braise, hm ?Je manque de m’étouffer avec mon champagne.— Ce n’est pas encore officiel.Elle sourit, faussement innocente.— Mais ça ne saurait tarder, n’e
Chapitre 2 – L’ennemie parfaiteAdrian De Luca Je l’ai vue trembler. Rien qu’un instant. Un battement de cils. Une hésitation infime. Mais c’était là.Sienna White.Toujours aussi féroce. Toujours aussi fière. Toujours aussi magnifique dans sa rage.Je descends les escaliers de la villa White en silence, un sourire discret aux lèvres. J’entends encore le claquement de ses talons sur le marbre, sa voix pleine de colère et de mépris. Elle croit que c’est moi qui ai gagné.Mais ce n’est pas un jeu. Pas encore.C’est un test.Et je vais le réussir, comme toujours.Le chauffeur m’attend devant la voiture. Je monte à l’arrière sans un mot. Je déteste cette ville. Trop de souvenirs, trop d’odeurs étouffantes, trop de visages qui veulent vous poignarder avec un sourire. Mais je suis ici pour une raison. Et elle commence par un nom : White Industries.Mon père pense qu’il m’a piégé. Il croit que ce mariage arrangé va me forcer à rentrer dans les rangs, à jouer au bon héritier, à m’assagir. Il
Chapitre 1 – Le piègeSienna White Je sens encore le goût du champagne sur ma langue quand mon monde s’effondre.Assise dans le salon glacé de mon père, entourée de murs de marbre et de silence, je regarde fixement le contrat que l’on vient de poser devant moi. C’est un document officiel, imprimé sur un papier si épais qu’on pourrait s’en servir comme arme. Chaque ligne est une menace. Chaque mot, une trahison.— C’est une blague, je murmure, le regard figé sur la dernière clause.Et pourtant, personne ne rit.Mon père est debout, le dos droit, les bras croisés. Il a ce regard froid, impénétrable, celui qu’il réserve aux conseils d’administration et aux situations de crise. À sa droite, ma mère évite soigneusement mon regard, ses doigts crispés sur sa coupe de vin blanc. Elle sait. Elle savait. Et elle ne m’a rien dit.— Tu es sérieusement en train de me dire que je dois épouser Adrian De Luca ? Ce... ce requin en costard ?!Ma voix monte, trahit la panique qui m’envahit. Je me lève