Le calme d’Elias était presque palpable, une aura de maîtrise qui coupait toute communication autour de lui. Même sous l’humiliation publique, il demeurait implacable, presque serein, comme si tout ce qui se passait autour de lui n’avait aucune prise sur son esprit. Ce qu’il ressentait à l’intérieur n’était pas visible pour les autres. Il ne se permettait pas d’exprimer sa colère, de montrer son malaise. Chaque moquerie qu’il subissait était méticuleusement enfouie, stockée, accumulée, pour être utilisée plus tard.
La réunion avait pris une tournure attendue. Elias savait que cette convocation n’était qu’un prétexte pour l’humilier, pour faire de lui le centre de toutes les moqueries. Mais tout ce qui se passait dans cette pièce, chaque mouvement d’Adrien, chaque rire étouffé des actionnaires, était un détail qu’il enregistrait avec une précision froide. Ils ne comprenaient pas que le plus grand pouvoir qu’il avait était justement de ne rien montrer, de ne pas réagir à leur manipulation. Ne rien dire, ne rien faire, c’était sa manière de reprendre le contrôle de la situation.
Lorsque le classeur lui fut posé devant lui, imposant et dégradant, il le prit d’une manière totalement dénuée d'émotion, feuilletant les pages avec une lenteur calculée. Son regard se posa sur chaque mot, mais son esprit n’était pas véritablement dans ce dossier. Ce moment n’était qu’un prétexte, un artifice pour faire diversion, un outil pour faire passer un message : il restait inaltérable.
Les rires fusaient de toute part. Les yeux des actionnaires brillaient de comédie, ils se réjouissaient de la scène, mais Elias savait que dans cette salle, personne ne comprenait ce qui se passait véritablement. Aucun d’eux ne voyait l’éclat dans ses yeux, ce regard glacé qui ne cédait pas un pouce de terrain. La moquerie d’Adrien, son commentaire sur le handicap d’Elias, était une tentative de le rendre invisible, de le réduire à une personne sans voix, mais c’était dans ce silence qu’Elias puisait sa force. Plus il était humilié, plus son calme devenait une arme. Ils ne pouvaient pas comprendre à quel point cette humiliation nourrissait son désir de vengeance.
Les regards condescendants qu’il recevait étaient des symboles du pouvoir qu’Adrien exerçait sur lui, mais en eux-mêmes, ils étaient aussi des maillons dans la chaîne qui le conduirait à son évolution. Il était l'objet de leurs rire moqueurs, mais il savait que chaque injuste attaque le rendait plus fort. Un jour, la situation se renverserait, et ce seraient eux qui se retrouveraient à subir le poids de leur arrivée.
Un actionnaire, remarquant la tension palpable, tenta une intervention timide, comme pour sauver ce qui restait de dignité dans cette réunion. Il proposa une idée, une alternative à l’humiliation à laquelle Elias était soumis.
— Peut-être pourrions-nous envisager un rôle plus stratégique pour lui...
Mais Adrien, fidèle à son rôle de tyran, balaya cette suggestion d’un revers de main.
— Oh, vous avez raison, mais diriger une entreprise, ça ne s’improvise pas, mes amis. Certaines compétences… ne se limitent pas à ce qu’on voit à l’extérieur, dit-il, un sourire mielleux aux lèvres.
Elias écoutait, mais il n’entendait pas vraiment les mots. Il observait les mouvements de chacun, cherchant à décrypter les détails, à comprendre comment tout cela fonctionnerait pour lui, un jour, dans un futur proche. Chaque regard moqueur, chaque geste d'Adrien, était une clé, une brique de son plan de reconquête.
Le silence d’Elias devenait lourd de sens. Il savait que ce n’était pas le moment de réagir. Dans ce monde où l’arrogance se cachait derrière des sourires polis, il n’avait qu’une option : attendre. Les faiblesses d’Adrien, les erreurs stratégiques, seraient ses alliées dans les jours à venir.
La réunion se termina, mais pour Elias, tout n’était qu’une préparation, un entraînement pour la bataille à venir. Il savait qu’il devait être patient, que chaque geste posé aujourd’hui serait un pas vers sa victoire future.
Elias sortit de la salle de réunion sans prononcer un seul mot, le classeur fermement serré sous le bras. Son visage restait une impassible façade, mais à l'intérieur, une rage glaciale bouillonnait, prête à éclater. Chaque pas résonnait dans les couloirs immaculés de Moreau Industries, mais aucun bruit ne semblait briser le silence lourd qui l’entourait.
Les employés qu’il croisait évitaient soigneusement son regard. Certains faisaient mine d’être absorbés par leurs écrans ou leurs dossiers, d’autres se détournaient brusquement comme s’il était invisible.
Un groupe d’assistants chuchotait à voix basse près de la machine à café. Lorsque l’un d’eux remarqua Elias, il tapota rapidement le bras de son collègue, et tous se turent, comme si sa présence les dérangeait.
— Tu crois qu’il va vraiment s’occuper des biscuits et du café ? glissa finalement une voix moqueuse.
— Qui sait ? répondit un autre en haussant les épaules. De toute façon, il ne peut pas se plaindre.
Des ricanements suivirent, mais Elias ne ralentit pas son pas. Il avait l’habitude. Pourtant, aujourd’hui, chaque remarque lui semblait plus lourde, plus acide.
Il se dirigea vers l’ascenseur et appuya sur le bouton. Les portes s’ouvrirent aussitôt, et il s’y engouffra, seul. L’acier poli reflétait son visage, calme en apparence, mais ses yeux sombres brillaient d’une détermination glaciale.
Elias referma doucement la porte de son bureau, isolant ainsi l’espace du reste de l’entreprise. Loin des regards moqueurs et des chuchotements méprisants, il pouvait enfin souffler, même si la tension ne quittait jamais vraiment son corps.
À peine avait-il déposé le classeur sur son bureau qu’un mouvement à sa gauche attira son attention. Une silhouette massive se détacha de l’ombre, adossée au mur près de la bibliothèque en acajou.
Gabriel était là.
Grand, imposant, vêtu d’un costume sombre qui accentuait son allure intimidante, il observait Elias de son regard perçant, une lueur de frustration brillant dans ses iris d’un bleu glacé. Ses mâchoires étaient serrées, et ses poings crispés trahissaient son agacement.
— Encore une humiliation publique, lâcha-t-il d’un ton tranchant.
Sa voix grave résonna dans la pièce comme une lame qui fendait l’air.
Elias, toujours impassible, s’assit calmement dans son fauteuil en cuir. Il croisa les jambes et ouvrit le classeur d’un geste mesuré, feuilletant distraitement les documents qu’Adrien lui avait jetés à la figure un peu plus tôt.
— Je m’y attendais, répondit-il simplement.
Gabriel gronda, un rictus de colère crispant ses lèvres.
— Et tu laisses faire ? Tu laisses cet incapable te traîner dans la boue devant tout le monde ?!
Son ton monta légèrement, son irritation palpable. Il détestait cette posture d’impuissance que son patron adoptait. Il n’avait jamais compris pourquoi Elias supportait tout cela sans réagir, pourquoi il se laissait piétiner par Adrien et sa clique.
Elias ferma doucement le classeur et leva un regard calme vers lui.
— Je laisse Adrien croire qu’il contrôle la partie.
Gabriel serra les poings.
— Ça fait des années que tu joues à ce jeu. Mais jusqu’à quand ?
Un silence pesa entre eux. Gabriel n’avait pas tort. Chaque humiliation publique était une pierre supplémentaire posée sur les fondations d’une colère qu’Elias gardait soigneusement enfouie. Chaque rire moqueur, chaque regard condescendant, chaque mot venimeux... Il les engrangeait, les mémorisait.
Mais il savait une chose que Gabriel semblait oublier : la vengeance ne se précipitait pas. Elle se construisait dans l’ombre, patiemment, méthodiquement.
Il inspira profondément avant de répondre, sa voix basse et maîtrisée :
— La patience est une arme. Adrien ne se méfie pas d’un homme qu’il croit faible.
Gabriel grinça des dents, mais finit par hocher la tête, à contrecœur.
— Peut-être. Mais moi, je le vois pour ce qu’il est : un rat qui a pris un trône qui ne lui appartient pas.
Elias esquissa un léger sourire.
— Et un rat finit toujours par tomber dans un piège.
Il tapota du doigt le classeur posé sur son bureau.
— Adrien pense m’avoir humilié en me donnant ça, mais il ne réalise pas qu’il vient de me donner accès à des informations qu’il considère comme insignifiantes.
Gabriel haussa un sourcil, intrigué.
— Des informations ? Tu crois que ce dossier cache quelque chose d’utile ?
Elias ouvrit à nouveau le classeur et parcourut les premières pages.
— Chaque tâche anodine dans une entreprise laisse des traces. Des failles. Des faiblesses. Il suffit de les repérer.
Il releva les yeux vers Gabriel.
— Ce n’est pas seulement du café et des biscuits, c’est un réseau de fournisseurs, de budgets, de transactions. Et où il y a de l’argent, il y a des failles.
Gabriel recula légèrement, croisant les bras, son regard s’adoucissant d’une lueur d’appréciation.
— Tu as toujours un plan, hein ?
Elias soutint son regard.
— Toujours.
Gabriel soupira, secouant la tête avec un demi-sourire.
— Très bien. Mais le jour où on frappera, je veux être celui qui mettra Adrien à genoux.
Un silence s’installa, chargé de promesses.
— Tu auras ta revanche, murmura Elias.
Il le savait.
Et ce jour-là, ce serait Adrien qui supplierait pour sa dignité.
Gabriel resta silencieux un instant, le regard plongé dans celui d’Elias. Il connaissait cet homme mieux que quiconque. Derrière son apparente tranquillité, il voyait l’orage qui grondait, la tempête qui se préparait. Elias n’était pas faible. Non, il était un stratège, un joueur d’échecs qui ne bougeait ses pièces qu’au moment opportun.Mais cela n’empêchait pas Gabriel de s’inquiéter.Il soupira et se redressa, décroisant les bras. Son regard bleu s’assombrit légèrement.— J’espère que tu sais ce que tu fais, murmura-t-il.Elias ne répondit pas immédiatement. Il referma le classeur et le posa sur le côté du bureau, avant de relever calmement les yeux vers Gabriel.— Toujours.Un silence pesa entre eux, lourd de sous-entendus. Gabriel savait qu’il n’obtiendrait pas plus d’explications. Elias était ainsi : il ne révélait ses cartes que lorsqu’il l’avait décidé.Gabriel fit un pas vers la porte, posa la main sur la poignée, puis s’arrêta. Sans se retourner, il laissa tomber d’une voix
La salle de réception du Ritz resplendissait sous la lueur des immenses lustres en cristal. Les tables couvertes de nappes en satin blanc regorgeaient de mets raffinés, et les serveurs circulaient avec des coupes de champagne pétillant sous les lumières tamisées.Les plus grands noms de la finance, des actionnaires influents et des familles puissantes échangeaient des politesses feintes, riant à des plaisanteries superficielles.Dans le grand hall du Ritz, la musique suave des violons remplissait l’air, accompagnée des éclats de rires et des murmures des invités. Les chandeliers suspendus au plafond diffusaient une lumière dorée, créant une atmosphère feutrée et presque irréelle. Les invités, tous impeccablement habillés, formaient des groupes autour de petites tables élégantes, dégustant des cocktails raffinés et échangeant des sourires forcés.Au milieu de cette scène, Elias se sentait comme un intrus. Les autres invités, vêtus de leurs tenues sophistiquées et de leurs sourires assu
Margaux n’en avait pas fini. Elle s’approcha de lui, délibérément lente, un sourire plus large que jamais se dessinant sur son visage. Elle leva son verre de champagne, le tenant à hauteur de son épaule, et le vida sur l’épaule d’Elias avec un geste théâtral.Un silence de mort s'abattit immédiatement sur la salle. Les invités, qui avaient ri si fort quelques instants plus tôt, se figèrent, choqués par le geste. Les murmures circulèrent rapidement, comme des étincelles dans une prairie sèche.Certains invités se regardèrent, choqués, tandis que d’autres attendaient avec impatience la réaction d’Elias, observant avidement, cherchant à voir si la pression finirait par l’emporter. Les plus cyniques savouraient déjà l'humiliation, certains se retenant de sourire ouvertement.Les regards des puissants semblaient chercher à lire la moindre faille dans le comportement d’Elias. Les regards des femmes se faisaient curieux, presque victorieux, tandis que les hommes paraissaient fascinés par la
Elias se détourna lentement de la scène. Ses pas résonnaient dans la grande salle, mais l'écho de l'humiliation semblait avoir perdu sa portée. Il traversa la foule, sans se presser, sans chercher à éviter les regards qui continuaient de l'assaillir. Il s’enfonça dans le hall, cherchant la sortie discrète qui le mènerait aux toilettes, loin des regards curieux et des rires étouffés.Il poussa la porte des toilettes d’un coup de pied et s'engouffra à l’intérieur. L’atmosphère était plus calme, mais son esprit tourbillonnait encore. Il n’avait pas réagi comme on l’attendait. Pas de colère, pas de faiblesse, juste un silence glacé. Et c’était peut-être là sa plus grande victoire. Mais cela ne suffirait pas.Un léger bruit de tissu fit écho dans la pièce. Elias se figea, le regard se braquant sur l’ombre qui se dessina dans le coin des toilettes. Gabriel, le fidèle assistant de la famille, se tenait là, une silhouette imposante, un sourire presque imperceptible sur les lèvres.— Tu n'as p
Qand Elias tourna la tête, leurs regards se croisèrent. Un instant suspendu, où le bruit du gala sembla se dissiper autour d’eux, laissant place à une intensité palpable entre les deux. Les yeux d’Alix restèrent fixés sur lui, sans détourner le regard. Elle n’était pas du genre à se dérober, à fuir un défi silencieux. Elle l’observait, sans dissimulation, sans la moindre gêne, un demi-sourire amusé flottant sur ses lèvres.Elle s'attendait à ce qu'il agisse comme il le faisait avec tous les autres : ignorer, feindre l'indifférence, se fondre dans l'ombre, disparaître une fois de plus derrière son masque de calme. C’était ce qu’il faisait toujours. Ce qui le rendait si… prévisible.Mais cette fois, quelque chose avait changé. Elias la fixa en retour, sans fuir, sans cacher ses yeux glacés dans les ténèbres de la pièce. Un regard ferme, implacable. Il ne cherchait pas à se cacher. Il ne cherchait pas à fuir la confrontation. Il l'affrontait. C’était un regard sans compromis, comme s'il
L'air du matin était encore frais lorsque les premiers employés arrivèrent au siège de Moreau & Co. L’imposant immeuble de verre et d’acier, symbole du prestige familial, dominait le quartier des affaires. Tout ici respirait le luxe et l’élégance : les ascenseurs silencieux, les bureaux en bois précieux, les œuvres d’art soigneusement disposées dans les couloirs.Mais pour Elias Moreau, ces murs n’avaient rien d’accueillant. Ils étaient une prison dorée dans laquelle il évoluait sans bruit, sans éclat, toujours en marge.Il traversa le vaste open-space sous les regards furtifs des employés, qui s’écartèrent sur son passage avec cette politesse feinte qu’on réserve aux parias. Ici, il était invisible. Et pourtant, tout le monde savait qu’il était là.Sur son bureau l’attendait une pile de documents. Un détail qui, en soi, n’avait rien d’étonnant. Mais Elias savait reconnaître une anomalie quand il en voyait une.Les tâches qu’on lui confiait étaient d’ordinaire plus administratives. Or
Les premiers jours furent durs. Chaque matin, Elias se levait tôt, ses muscles endoloris par les efforts physiques de la veille. Les contremaîtres, toujours sceptiques, lui donnaient des tâches supplémentaires, le poussant à ses limites. Le bruit incessant des machines, les odeurs d’huile et de métal, tout cela aurait pu le décourager. Mais Elias tenait bon. Il savait qu'il n'avait pas le droit d'échouer. Pas seulement pour lui-même, mais aussi pour ce que cette épreuve représentait.Les ouvriers, eux, le regardaient de loin, leurs yeux emplis de doute et de moquerie. Ils espéraient qu’il abandonnerait, qu’il se retirerait dans son monde confortable de privilégié. Mais chaque jour, ils le voyaient revenir, encore et encore, sans jamais fléchir, sans jamais se laisser abattre. Petit à petit, quelque chose changea dans leur regard.Un jour alors qu'il travaillait, il ajusta le volant du chariot élévateur avec une précision presque militaire, ses yeux fixés sur les rangées de palettes em
Le manoir Moreau se dressait fièrement, imposant, sur une colline qui dominait la vallée, comme une sentinelle surveillant les moindres mouvements autour de lui. La demeure, magnifique mais froide, semblait personnifier la richesse et l’arrogance de la famille Moreau, une dynastie qui avait fait fortune dans les affaires, et dont le nom résonnait dans les salons les plus prestigieux. Pour l’extérieur, c’était un symbole d’influence et de prestige. Pour Elias, c’était un cage dorée, un piège qu’il ne pouvait fuir, une prison où les chaînes étaient invisibles mais bien réelles.Depuis la mort brutale de son père, Elias n’avait cessé de se retrouver dans l’ombre, éclipsé par la nouvelle matriarche, Madeleine Moreau, et ses deux demi-siblings, Adrien et Margaux. Leurs sourires mesquins, leurs moqueries et leur mépris constant étaient des attaques invisibles qui l’écrasaient à chaque respiration. Bien qu’il eût l'avantage d'être l’héritier légitime du nom et des biens familiaux, son existe
Les premiers jours furent durs. Chaque matin, Elias se levait tôt, ses muscles endoloris par les efforts physiques de la veille. Les contremaîtres, toujours sceptiques, lui donnaient des tâches supplémentaires, le poussant à ses limites. Le bruit incessant des machines, les odeurs d’huile et de métal, tout cela aurait pu le décourager. Mais Elias tenait bon. Il savait qu'il n'avait pas le droit d'échouer. Pas seulement pour lui-même, mais aussi pour ce que cette épreuve représentait.Les ouvriers, eux, le regardaient de loin, leurs yeux emplis de doute et de moquerie. Ils espéraient qu’il abandonnerait, qu’il se retirerait dans son monde confortable de privilégié. Mais chaque jour, ils le voyaient revenir, encore et encore, sans jamais fléchir, sans jamais se laisser abattre. Petit à petit, quelque chose changea dans leur regard.Un jour alors qu'il travaillait, il ajusta le volant du chariot élévateur avec une précision presque militaire, ses yeux fixés sur les rangées de palettes em
L'air du matin était encore frais lorsque les premiers employés arrivèrent au siège de Moreau & Co. L’imposant immeuble de verre et d’acier, symbole du prestige familial, dominait le quartier des affaires. Tout ici respirait le luxe et l’élégance : les ascenseurs silencieux, les bureaux en bois précieux, les œuvres d’art soigneusement disposées dans les couloirs.Mais pour Elias Moreau, ces murs n’avaient rien d’accueillant. Ils étaient une prison dorée dans laquelle il évoluait sans bruit, sans éclat, toujours en marge.Il traversa le vaste open-space sous les regards furtifs des employés, qui s’écartèrent sur son passage avec cette politesse feinte qu’on réserve aux parias. Ici, il était invisible. Et pourtant, tout le monde savait qu’il était là.Sur son bureau l’attendait une pile de documents. Un détail qui, en soi, n’avait rien d’étonnant. Mais Elias savait reconnaître une anomalie quand il en voyait une.Les tâches qu’on lui confiait étaient d’ordinaire plus administratives. Or
Qand Elias tourna la tête, leurs regards se croisèrent. Un instant suspendu, où le bruit du gala sembla se dissiper autour d’eux, laissant place à une intensité palpable entre les deux. Les yeux d’Alix restèrent fixés sur lui, sans détourner le regard. Elle n’était pas du genre à se dérober, à fuir un défi silencieux. Elle l’observait, sans dissimulation, sans la moindre gêne, un demi-sourire amusé flottant sur ses lèvres.Elle s'attendait à ce qu'il agisse comme il le faisait avec tous les autres : ignorer, feindre l'indifférence, se fondre dans l'ombre, disparaître une fois de plus derrière son masque de calme. C’était ce qu’il faisait toujours. Ce qui le rendait si… prévisible.Mais cette fois, quelque chose avait changé. Elias la fixa en retour, sans fuir, sans cacher ses yeux glacés dans les ténèbres de la pièce. Un regard ferme, implacable. Il ne cherchait pas à se cacher. Il ne cherchait pas à fuir la confrontation. Il l'affrontait. C’était un regard sans compromis, comme s'il
Elias se détourna lentement de la scène. Ses pas résonnaient dans la grande salle, mais l'écho de l'humiliation semblait avoir perdu sa portée. Il traversa la foule, sans se presser, sans chercher à éviter les regards qui continuaient de l'assaillir. Il s’enfonça dans le hall, cherchant la sortie discrète qui le mènerait aux toilettes, loin des regards curieux et des rires étouffés.Il poussa la porte des toilettes d’un coup de pied et s'engouffra à l’intérieur. L’atmosphère était plus calme, mais son esprit tourbillonnait encore. Il n’avait pas réagi comme on l’attendait. Pas de colère, pas de faiblesse, juste un silence glacé. Et c’était peut-être là sa plus grande victoire. Mais cela ne suffirait pas.Un léger bruit de tissu fit écho dans la pièce. Elias se figea, le regard se braquant sur l’ombre qui se dessina dans le coin des toilettes. Gabriel, le fidèle assistant de la famille, se tenait là, une silhouette imposante, un sourire presque imperceptible sur les lèvres.— Tu n'as p
Margaux n’en avait pas fini. Elle s’approcha de lui, délibérément lente, un sourire plus large que jamais se dessinant sur son visage. Elle leva son verre de champagne, le tenant à hauteur de son épaule, et le vida sur l’épaule d’Elias avec un geste théâtral.Un silence de mort s'abattit immédiatement sur la salle. Les invités, qui avaient ri si fort quelques instants plus tôt, se figèrent, choqués par le geste. Les murmures circulèrent rapidement, comme des étincelles dans une prairie sèche.Certains invités se regardèrent, choqués, tandis que d’autres attendaient avec impatience la réaction d’Elias, observant avidement, cherchant à voir si la pression finirait par l’emporter. Les plus cyniques savouraient déjà l'humiliation, certains se retenant de sourire ouvertement.Les regards des puissants semblaient chercher à lire la moindre faille dans le comportement d’Elias. Les regards des femmes se faisaient curieux, presque victorieux, tandis que les hommes paraissaient fascinés par la
La salle de réception du Ritz resplendissait sous la lueur des immenses lustres en cristal. Les tables couvertes de nappes en satin blanc regorgeaient de mets raffinés, et les serveurs circulaient avec des coupes de champagne pétillant sous les lumières tamisées.Les plus grands noms de la finance, des actionnaires influents et des familles puissantes échangeaient des politesses feintes, riant à des plaisanteries superficielles.Dans le grand hall du Ritz, la musique suave des violons remplissait l’air, accompagnée des éclats de rires et des murmures des invités. Les chandeliers suspendus au plafond diffusaient une lumière dorée, créant une atmosphère feutrée et presque irréelle. Les invités, tous impeccablement habillés, formaient des groupes autour de petites tables élégantes, dégustant des cocktails raffinés et échangeant des sourires forcés.Au milieu de cette scène, Elias se sentait comme un intrus. Les autres invités, vêtus de leurs tenues sophistiquées et de leurs sourires assu
Gabriel resta silencieux un instant, le regard plongé dans celui d’Elias. Il connaissait cet homme mieux que quiconque. Derrière son apparente tranquillité, il voyait l’orage qui grondait, la tempête qui se préparait. Elias n’était pas faible. Non, il était un stratège, un joueur d’échecs qui ne bougeait ses pièces qu’au moment opportun.Mais cela n’empêchait pas Gabriel de s’inquiéter.Il soupira et se redressa, décroisant les bras. Son regard bleu s’assombrit légèrement.— J’espère que tu sais ce que tu fais, murmura-t-il.Elias ne répondit pas immédiatement. Il referma le classeur et le posa sur le côté du bureau, avant de relever calmement les yeux vers Gabriel.— Toujours.Un silence pesa entre eux, lourd de sous-entendus. Gabriel savait qu’il n’obtiendrait pas plus d’explications. Elias était ainsi : il ne révélait ses cartes que lorsqu’il l’avait décidé.Gabriel fit un pas vers la porte, posa la main sur la poignée, puis s’arrêta. Sans se retourner, il laissa tomber d’une voix
Le calme d’Elias était presque palpable, une aura de maîtrise qui coupait toute communication autour de lui. Même sous l’humiliation publique, il demeurait implacable, presque serein, comme si tout ce qui se passait autour de lui n’avait aucune prise sur son esprit. Ce qu’il ressentait à l’intérieur n’était pas visible pour les autres. Il ne se permettait pas d’exprimer sa colère, de montrer son malaise. Chaque moquerie qu’il subissait était méticuleusement enfouie, stockée, accumulée, pour être utilisée plus tard.La réunion avait pris une tournure attendue. Elias savait que cette convocation n’était qu’un prétexte pour l’humilier, pour faire de lui le centre de toutes les moqueries. Mais tout ce qui se passait dans cette pièce, chaque mouvement d’Adrien, chaque rire étouffé des actionnaires, était un détail qu’il enregistrait avec une précision froide. Ils ne comprenaient pas que le plus grand pouvoir qu’il avait était justement de ne rien montrer, de ne pas réagir à leur manipulati
Le matin suivant, Elias avait trouvé une enveloppe déposée sur son bureau dans le service des archives. L'enveloppe, simple mais formelle, portait l’inscription de l’entreprise et un cachet qui ne laissait aucune place à l’incertitude : "Convocation officielle." À l’intérieur, une lettre soigneusement pliée révélait l’invitation, signée de la main du PDG par intérim, Adrien Moreau. Le contenu était simple et direct : "Réunion de stratégie à 10h00, salle de conférence, bâtiment principal."Bien qu'il fût bien conscient de l’ironie de la situation, Elias avait décidé d’y aller. Il savait que cela ne signifiait rien de bon, mais il ne pouvait pas se permettre de paraître faible. Si Adrien voulait l’humilier, il lui en donnerait l’occasion. Mais il ne serait pas le jouet silencieux qu’on attendait de lui.La salle de réunion était imposante, comme un temple du pouvoir. Les murs de verre permettaient de contempler la ville étendue en contrebas, mais aussi d’être observé depuis l’extérieur,