Chapitre 3

Le lendemain matin, Ava se leva tôt, le soleil à peine levé, laissant une douce lumière filtrer à travers les rideaux en soie de la chambre. Elle se regarda dans le miroir, nerveuse mais déterminée. Après une nuit agitée, pleine de questions et d’anticipation, elle avait une mission à accomplir : rencontrer Lucas, le fils de Nolan. Elle espérait que cette première rencontre poserait les bases de leur relation, mais elle ne savait pas encore à quoi s’attendre. Le petit garçon, après tout, était un mystère.

Après un rapide petit-déjeuner où elle se força à avaler quelques bouchées, elle se dirigea vers le salon. Geoffrey, le majordome, l’attendait là, un air habituel de calme posé sur son visage.

— Prête pour ta première rencontre avec Lucas ?" demanda Geoffrey, son ton à la fois chaleureux et distant, comme si cette scène se déroulait pour lui dans une routine bien établie.

Ava hocha la tête, son cœur battant un peu plus vite.

— Oui, j’espère bien.

Geoffrey sourit légèrement et l’invita à le suivre à travers la maison. Les vastes couloirs semblaient interminables, chaque porte derrière laquelle se cachait un univers plus luxueux et secret que le précédent. Ava observait tout avec des yeux émerveillés mais aussi un peu perdus, chaque détail de la maison était d’une élégance discrète, mais imposante.

Finalement, Geoffrey s’arrêta devant une porte située au fond d'un couloir. Il frappa doucement avant de pousser l’huis. La pièce qui s’offrit à elle était lumineuse, mais dans un ordre presque angoissant. Tout semblait parfaitement rangé, chaque objet à sa place, comme une scène de théâtre figée. Au centre, un petit garçon était assis par terre, en train de jouer seul. Il avait des cheveux bruns en bataille, et ses yeux sombres étaient fixés sur une petite collection de figurines qu’il alignait méthodiquement.

Geoffrey s’approcha doucement et, de sa voix mesurée, dit :

— Lucas, voici Miss Ava, ta nouvelle nourrice.

Le garçon leva lentement les yeux, ses iris d'un noir profond semblant transpercer l'air autour d’eux. Il observa Ava pendant un moment sans bouger, comme s’il l’évaluait, son regard neutre et insondable.

Ava sentit une légère pression dans sa poitrine à ce moment-là. Ce n’était pas un regard d’enfant curieux ou enthousiaste, mais celui d'un petit garçon qui semblait si… distant. Si déconnecté de tout.

Elle s’agenouilla doucement devant lui, essayant de ne pas effrayer ce petit être qui semblait bien plus vieux que son âge.

— Bonjour Lucas, je suis Ava. Comment vas-tu ?

Il ne répondit pas immédiatement. Il continua à faire glisser une figurine de cheval sur le tapis, sans aucune attention particulière à son entourage. Il y avait quelque chose de presque mécanique dans ses gestes, comme si le monde extérieur ne l’intéressait pas. Mais Ava, loin de se laisser décourager, sourit et dit :

— J’aime beaucoup les chevaux aussi. C’est mon animal préféré. Tu veux que je t’aide à aligner tes figurines ?

Lucas ne répondit toujours pas, mais il tendit une main vers une autre figurine, la saisissant délicatement et la posant avec une précision parfaite à côté de la première. Ava observa son geste et s’installa lentement à ses côtés, sans chercher à le toucher. Elle savait qu'il fallait lui laisser de l’espace. Elle commença à poser ses propres figurines près des siennes, dans un silence respectueux.

La pièce, bien que grande et décorée avec goût, semblait d’une froideur inhabituelle. Les rideaux en velours noir se balançaient légèrement au gré du vent, ajoutant une touche de mélancolie à l’ambiance. Tout dans cette pièce semblait figé, comme si rien ne pouvait perturber l'ordre précis dans lequel Lucas vivait.

Les minutes passèrent dans un silence étrange. Puis, presque comme une surprise, Lucas tourna légèrement la tête et, d'une voix basse mais claire, murmura :

— Tu sais bien les aligner.

Ava sourit, ravie de voir qu'il avait fait un effort pour lui parler. Elle répondit doucement :

— Merci, Lucas. C’est comme ça que j’aime les organiser aussi. Chaque cheval a sa propre place, tu ne trouves pas ?

Lucas la regarda un instant, ses yeux sombres toujours aussi impénétrables, avant de se replonger dans son jeu. Un petit sourire effleura ses lèvres, presque imperceptible, mais suffisant pour qu'Ava sente qu'elle avait franchi une petite étape.

Geoffrey, qui observait la scène depuis l'entrée, s’approcha avec un léger sourire satisfait.

— C’est un bon début, murmura-t-il. Il n’a jamais réagi aussi vite avec quelqu’un. Habituellement, il reste assez distant pendant les premiers jours.

Ava hocha la tête, bien que légèrement préoccupée.

— Il est… différent, non ?

Geoffrey répondit avec une froideur inattendue dans sa voix :

— Lucas a toujours été un enfant calme, mais il est plus réservé que la plupart. Nolan est souvent absent, et l’enfant grandit dans un monde où les émotions sont souvent réprimées. Il faudra du temps pour qu'il s’habitue à vous.

Ava observa Lucas à nouveau. Ce n’était pas un enfant difficile, mais un enfant marqué par une certaine solitude. Elle se sentait presque liée à lui, comme si, d’une manière ou d’une autre, elle pouvait lui offrir un peu de chaleur, un peu d’humanité. Elle décida de rester près de lui, tout en lui donnant de l’espace, espérant que cette connexion fragile se renforcerait au fil des jours.

Elle retourna son regard vers Geoffrey et répondit :

— J’espère qu’avec le temps, il se sentira plus à l’aise.

Geoffrey hocha la tête, un regard presque insaisissable dans les yeux.

— Avec toi, je n'en doute pas.

Ava sentit une légère satisfaction à ces mots. Mais elle savait que la route serait longue et semée d’embûches. Néanmoins, elle était prête à tout donner pour établir un lien avec Lucas. Ce petit garçon avait quelque chose en lui qu’elle ne comprenait pas encore, mais qu'elle voulait profondément connaître. Et cela, elle le savait au fond d’elle, valait bien tous les défis à venir.