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La Sorcière et l'Inquisiteur
La Sorcière et l'Inquisiteur
Penulis: Anantana

Diane - Le cadavre

Penulis: Anantana
last update Terakhir Diperbarui: 2025-03-15 16:37:06

Diane tordit nerveusement ses cheveux et inspira profondément. Elle était d’une nature bien trop sensible et cette situation ne lui convenait absolument pas. Habituée à être mutique, à raser les murs, ignorant les autres humains qui avaient le malheur de l’entourer, se retrouver face à Madame Duchaux lui était insoutenable. D’autant plus que Madame Duchaux était effondrée en bas des escaliers, du sang luisant derrière son crâne, tachant le faux marbre de l’immeuble des années cinquante où elles habitaient. Au téléphone, la voix de l’opératrice lui répétait les mêmes instructions mais le cerveau de la jeune femme semblait ne plus vouloir fonctionner, entièrement plongé dans un état de sidération. Péniblement, elle réussit à articuler quelque chose, sa voix lui procurant une drôle de sensation, comme si ce n’était pas elle qui parlait, mais une étrangère. 

- Non, je ne sais pas si elle respire…

Prendre le pouls, prendre le pouls. Comment pouvait-elle s’approcher de ça ? Madame Duchaux avait toujours eu la délicatesse de ne pas lui adresser la parole, préférant renifler sur son passage en serrant son yorkshire dans ses bras grêles. Cela convenait à Diane. Un vague mépris réciproque et une tranquillité pour les deux parties. La vieille avait rompu son contrat ce midi, en chutant violemment dans les escaliers. Diane devait s’occuper d’elle et cela la répugnait. Ce n’était pas le sang qui la perturbait, c’était le fait d’être au centre de cette scène. Elle avait l’impression de tenir le destin de Madame Duchaux entre ses mains, et que la survie de cette voisine dépendait uniquement des réponses qu’elle donnerait à l’opératrice. Déglutissant, Diane avança et tendit la main vers le cou décharné de la dame, et posa ses doigts tremblants là où elle supposait que le pouls devait battre. Une drôle de sensation l’envahit alors, comme si une pierre venait de chuter lourdement à l’intérieur de ses entrailles. Son front se couvrit d’une froide moiteur et elle se mordit les joues nerveusement. Bon sang, était-elle en train de faire un malaise ? Diane imaginait déjà les pompiers qui arriveraient sur place, certainement bien surpris en la voyant évanouie à côté de la personne qu’il fallait sauver. Malheureusement pour elle, elle ne tourna pas de l'œil. Non, ce fut bien pire. 

Elle se retrouva au sommet des marches, tenant d’une main tremblante son cabas bleu marine, veillant à ne pas se prendre les pieds dans le long gilet que lui avait offert sa fille. Il était chaud et ne grattait pas trop, mais elle avait tendance à marcher dessus en montant et descendant les marches, ce qui n’était pas très pratique. La main gauche posée sur la rampe en fer, elle releva la tête et vit que la porte du hall d’entrée venait de s’ouvrir. Tiens, c’était la petite du troisième, cette enfant bizarre qui passait son temps à faire mourir ses plantes. Et puis d’un désagréable ! Pas un bonjour, pas un merci. Jamais l’instinct de proposer un coup de main. Les jeunes devenaient de plus en plus stupides et fainéants de toute manière. Distraite par ses pensées, elle marcha alors sur le pan de tissu traînant sur le sol et se retrouva déséquilibrée. Vacillant un moment, elle dû lâcher le cabba qui bascula vers l’avant, entraînant ses dernières courses dans un crash imminent. Horrifiée, elle tendit les bras pour rattraper son bien et tomba en avant, la bouche ouverte dans une expression de surprise presque comique, le regard encore un peu noir. 

Sursautant, Diane lâcha le cou de Madame Duchaux et eut l’irrépressible envie de fondre en larmes. La vision qu’elle venait d’avoir était si réaliste qu’elle se demanda un moment si elle n’avait pas ingéré une substance psychotrope à son insu. Que s’était-il passé ? L’espace de quelques instants, Diane avait vécu le drame à travers les yeux de la femme qui gisait sur le sol. Comment était-ce possible ? Le cœur battant, elle inspira profondément, tentant de calmer ses nerfs. Ce fut l’opératrice qui la ramena sur Terre, sa voix neutre et professionnelle lui permettant de s’ancrer dans la réalité. Ne cherchant plus un quelconque signe de vie, Diane déglutit bruyamment et lâcha la sombre vérité.

- Elle est morte. J’en suis certaine.

***

C’était un drame comme il y en avait tant d’autres. Des personnes allaient devoir s’occuper de l’enterrement, certains verseraient des larmes. Une petite tragédie parmi des milliers de destins brusquement éteints. En temps normal, cela n’aurait pas affecté Diane. Après tout, c’était la mort d’une simple vieille dame, cela ne choquait jamais personne, c’était dans l’ordre naturel des choses. Mais la vision qu’elle avait eu ne cessait de tourmenter la jeune femme, elle qui était de nature si rationnelle. Une fois que les secours étaient arrivés sur les lieux, elle avait du raconter sa version des faits, devant bien trop de monde à son goût. Outre les pompiers, certains voisins avaient fini par s'agglutiner dans le hall d’entrée, ainsi que plusieurs passants, emplis d’une curiosité morbide. Lorsque Diana avait enfin reçu l’autorisation de quitter le lieux, elle s’était précipitée dans son minuscule appartement, claquant avec force la porte, ce qui la conduit à se retrouver bêtement avec la poignée dans la main. Soupirant, elle était partie chercher un tournevis et s’était absorbée dans cette réparation de longues minutes. Mais, en reposant l’outil à sa place, ses yeux avaient glissé vers le rebord de la fenêtre, et Diane avait contemplé son dernier protégé Francky, totalement brûlé. Il faisait triste mine désormais, ce fier cactus. Pourtant, sa mère lui avait assuré qu’il était impossible de faire mourir Francky. C’est alors que les dernières pensées de Madame Lacheaux refirent surface dans son esprit. La vieille dame avait pensé aux plantes malheureuses de Diane juste avant de chuter. Du moins, Diane était persuadée d’avoir fait une espèce d’expérience paranormale, où elle serait entrée dans la tête de la pauvre victime, juste avant sa mort. Se roulant en boule dans son lit une place, Diane sortit son téléphone portable et ouvrit son navigateur avec fébrilité. Une heure plus tard, elle avait abandonné, dégoûtée par des dizaines d’articles, de blogs, de vidéos, qui ne lui apprenaient strictement rien, si ce n’est que Marie-Thérèse, médium de sa fonction, prétendait elle aussi communiquer avec les morts. 

Attablée devant son chai latte, Diane était désormais plongée dans un déni typiquement humain. Elle était maintenant convaincue qu’elle avait halluciné, à cause de la fatigue ou du stress causé par les partiels. Chloé, sa meilleure amie, lui lança un regard soucieux derrière ces grandes lunettes carrées. Elles étaient si différentes, l’une n’aimant rien de plus que la tranquillité de son treize mètres carrés, l’autre adorant être au centre de l’attention. Ses longues mains se balançaient avec animation au dessus de sa tasse à café, tandis que sa voix surexcitée et sonore résonnait dans le salon de thé.

- Bien sûr que tu as rêvé ! Comment veux-tu qu’il soit possible de revivre les derniers instants d’un défunt ? Tu imagines comme ce serait cool n’empêche ? Les policiers auraient juste à toucher le cadavre et hop, le tueur serait attrapé !

Des têtes se tournèrent vers elle, et Diane essaya tant bien que mal de se fondre dans le bois de sa chaise, en glissant le long de cette dernière comme une flaque boueuse. 

- Chloé ! Doucement s’il te plait. 

Supplia-t-elle apeurée, surprenant le regard insondable de la patronne du salon de thé, qui avait visiblement entendu une bonne partie des propos délirants qu’elles tenaient toutes les deux. Rapidement, les deux filles changèrent de sujet, mais une sensation de malaise continuait de travailler Diane. A chaque fois qu’elle arrêtait de fixer son interlocutrice, elle avait l’impression tenace que la gérante la fixait derrière son comptoir. Au bout de quelques dizaines de minutes, Chloé se leva et lui dit au revoir, partant dans un nuage de parfum et d’énergie qui donnèrent le tournis à la jeune femme. Parfois, le tempérament bien trop extravertie de son amie était pour elle comme un coup de massue sur le crâne. Mais, c’était une des rares humaines qu’elle arrivait à supporter, malgré leurs différences. Toutefois, son départ avait eu un effet imprévu, celui de donner assez de courage à la patronne pour qu’elle se glisse vers sa table, avec le prétexte ingénu de nettoyer les alentours. Il n’y avait plus grand monde dans la salle, et Diane se sentit prise au piège. 

- Dis moi,  jeune fille, tu voudrais travailler ici ? Lança subitement la quinquagénaire.

- Pardon ? Répondit Diane, totalement étonnée par ce surprenant dénouement. Pourquoi moi ? Vous recrutez ?

Elle venait souvent ici et n’avait pas vu la moindre annonce pour un contrat étudiant. Le salon de thé était petit et confortable, la patronne gérait l’établissement seule, avec efficacité. 

- C’est récent, j’ai besoin d’aide en cuisine, les gens réclament de plus en plus de pâtisseries, je ne peux plus gérer ça toute seule. Tu viens souvent ici non et tu es étudiante ? Je ne peux pas te promettre le meilleur salaire de Paris, mais c’est un travail assez sympa et je ne suis pas de trop mauvaise compagnie, enfin je crois.

La méfiance de Diane s’était envolée, face à la promesse de mettre un peu de beurre dans les épinards. La vie à la capitale était terriblement chère et, même si ses parents l’aidaient, la jeune femme imaginait déjà tout ce qu’elle pourrait faire de plus avec un emploi à temps partiel. Aller au restaurant avec des copines, s’acheter cette jupe qui lui faisait de l'œil depuis une semaine, changer le tapis de la salle de bain… Les perspectives étaient illimitées. C’est donc avec joie qu’elle accepta, sans se douter un seul instant que cette décision allait changer sa vie à jamais.

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