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Chapitre 6 – L’Heure des Choix

Author: Déesse
last update Last Updated: 2025-02-25 16:12:25

Gabriel de Montreuil

La brume du matin recouvrait Bellefontaine d’un voile fantomatique lorsque je quittai ma chambre. Mon esprit était agité, tiraillé entre l’ombre menaçante de mon père et l’écho des paroles de la veille.

"Jusqu’où êtes-vous prêt à aller ?"

La question me hantait.

Je traversai la cour, longeant les cabanes où les premiers travailleurs s’activaient déjà. Des silhouettes fatiguées, habituées à l’oppression, s’efforçaient de ne pas croiser mon regard. Pourtant, je sentais leur attention peser sur moi.

Ils attendaient.

Attendaient de voir si mes actes suivraient mes paroles.

☾☾☾

Un domestique vint me chercher en fin de matinée.

— « Monsieur votre père vous demande à son bureau. »

Je savais ce qui m’attendait.

En entrant dans la pièce, je découvris que mon père n’était pas seul.

Charles Beauregard était là, confortablement installé dans un fauteuil, un sourire presque amusé sur les lèvres. À ses côtés, Carter, debout, bras croisés, me jaugeait avec un mépris à peine voilé.

Mon père se tenait derrière son bureau, visage fermé.

— « Entre, Gabriel. »

Je pris une grande inspiration et m’avançai, retenant le frisson d’alerte qui me parcourait l’échine.

— « Messieurs. »

Mon regard croisa celui de Beauregard, et son sourire s’élargit.

— « Vous avez fait beaucoup parler de vous, jeune Montreuil. On raconte que vous avez empêché une punition. »

Je haussai les épaules.

— « C’est exact. »

Carter grogna.

— « Et vous ne regrettez pas votre geste ? »

— « Non. »

Le silence se fit plus dense.

Mon père se massa les tempes, exaspéré.

Beauregard, lui, se pencha légèrement, son regard perçant.

— « Vous êtes un homme intelligent, Gabriel. Vous avez étudié en France. Vous connaissez le monde. Alors dites-moi… Qu’est-ce qui vous fait croire que vous pouvez renverser un système qui fonctionne depuis des siècles ? »

— « Fonctionne pour qui ? » répliquai-je sans détour.

Un silence pesa sur la pièce.

Puis Beauregard rit doucement, mais ses yeux étaient froids.

— « Votre fils est un idéaliste, Auguste. Un rêveur. Et les rêveurs finissent souvent pendus à un arbre. »

Mon père se leva brusquement.

— « Assez ! »

Sa voix claqua dans la pièce, et même Beauregard perdit son sourire.

— « Gabriel, écoute-moi bien. Je t’ai laissé une chance de comprendre comment fonctionne Bellefontaine. Mais au lieu de ça, tu fais preuve d’insubordination. Tu mets en danger l’équilibre de cette plantation. »

Il s’approcha, plantant son regard dans le mien.

— « Tu as un choix à faire. Soit tu acceptes ton rôle, soit tu es mon ennemi. »

Un ultimatum.

Je savais que ce moment arriverait, mais l’entendre de sa bouche donnait à ces mots une gravité nouvelle.

Je sentis le regard de Beauregard et Carter peser sur moi, attendant ma réaction.

Mon père voulait me briser.

Mais il ne comprenait pas que j’avais déjà fait mon choix.

Je redressai les épaules et répondis d’une voix ferme :

— « Alors, nous sommes ennemis. »

Un silence glacial s’abattit dans la pièce.

Mon père me fixa comme si je venais de le trahir de la pire des manières.

Beauregard, lui, secoua la tête avec un sourire narquois.

— « Une bien mauvaise décision, garçon. »

Lorsque je sortis du bureau, je sentis une tension nouvelle peser sur mes épaules.

Carter m’attendait dans le couloir.

— « Je savais que vous étiez stupide, mais pas à ce point. »

Je le contournai sans un mot, mais il attrapa mon bras avec une force brutale.

— « Vous venez de signer votre arrêt de mort, Montreuil. »

Je le repoussai violemment.

— « Et vous, Carter, vous venez de perdre toute mon estime. »

Il ricana.

— « Je vais dormir tranquille malgré ça. »

Je ne lui répondis pas et quittai la maison.

La nuit était lourde lorsque je rejoignis les cabanes des esclaves.

Le groupe m’attendait près de la rivière. Cette fois, ils étaient plus nombreux. Des visages tendus, inquiets.

Samuel me fixa longuement.

— « Vous avez choisi votre camp, Montreuil ? »

Je hochai la tête.

— « Oui. »

Samuel échangea un regard avec Aïda, puis se tourna vers les autres.

— « Alors il est temps d’agir. »

Je pris une grande inspiration.

— « Que devons-nous faire ? »

Samuel s’approcha, sa voix plus basse.

— « Les punitions deviennent plus dures. Carter et ses hommes sont plus violents. Certains d’entre nous veulent fuir. Mais nous avons aussi entendu parler d’une révolte qui s’organise, plus loin vers le nord. »

— « Une révolte ? »

Aïda hocha la tête.

— « Ils disent que dans quelques mois, il y aura un soulèvement. Pas juste quelques fuites isolées. Un vrai combat. »

Je sentis mon cœur accélérer.

C’était un pas de plus dans l’engrenage.

Samuel me jaugea.

— « On pourrait attendre et voir ce qui se passe. Ou bien… on peut commencer à préparer notre propre action ici, à Bellefontaine. »

Je déglutis.

J’étais prêt à défier mon père.

Mais étais-je prêt à prendre les armes ?

Aïda me regarda avec intensité.

— « Vous voulez vraiment aider, Gabriel ? Alors vous devez comprendre une chose : les mots ne suffiront pas. »

Un silence tomba sur le groupe.

Puis Samuel hocha la tête et me tendit un couteau.

— « Il est temps de décider qui vous êtes vraiment. »

Je fixai la lame.

J’avais franchi une ligne en défiant mon père.

Mais cette nuit, je me rendis compte qu’il y avait encore une autre ligne à franchir.

Et qu’une fois

passée, je ne pourrais plus jamais revenir en arrière.

Au loin, dans l’obscurité, le vent s’était levé.

La tempête approchait.

Et cette fois, je serais prêt à la déclencher.

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