Share

2

Author: RS WILD
last update Last Updated: 2025-04-10 23:30:34

Deborah sentit une chaleur envahir son visage, ses joues s’empourprant sous l’effet de la gêne. Ses mains tremblaient légèrement alors qu’elle tentait de reprendre contenance, mais l’agitation à l’intérieur d’elle restait vive. Le regard de JonathanCarter, ce prétentieux de 27 ans, la frôlait à peine, mais elle le ressentait comme une brûlure. Grand, musclé, avec des cheveux châtains coupés court et des yeux bleu acier, il était sans doute l’un des hommes les plus beaux qu’elle ait jamais croisés. Et pourtant, chaque fois qu’elle le voyait, ce n’était pas son physique qui captait son attention, mais son arrogance, cette façon de toujours la mettre mal à l’aise ou de la provoquer, comme s’il se nourrissait de sa gêne.

Cela faisait des années qu’il avait ce pouvoir sur elle, depuis l’incident qu’elle aurait préféré oublier. Elle n’avait que 15 ans à l’époque, naïve et pleine de confiance en ses premiers amours. Elle n’aurait jamais cru que ce moment intime, cette première expérience, se terminerait ainsi. Mais Jonathan l’avait trouvée, en pleine situation embarrassante, à l’arrière d’une voiture, avec son petit ami de l’époque. Le garçon, plus vieux de trois ans, s’était enfui, et elle s’était retrouvée, rouge de honte, face à Dean. Il avait ouvert la porte avec cette nonchalance qu’il savait si bien avoir, et elle s’était précipitée hors du véhicule, furieuse, se demandant ce qu’il venait faire dans cette histoire.

La gifle qu’elle lui avait donnée, son cœur battant la chamade, n’avait été qu’une réaction impulsive. Mais Dean, d’un calme glacial, lui avait rendu la monnaie de sa pièce, avec une brutalité qui l’avait laissée sans voix. Elle n’oublierait jamais la colère dans ses yeux, ni la menace qu’il lui avait lancée, à bout portant.

— Je vais aller voir ton frère. Après tout, c’est mon meilleur ami, pas vrai ?

Elle n’avait pas eu de nouvelles pendant tout le week-end, mais l’angoisse de cette menace l’avait rongée. Le silence était resté pesant, sans réponse, et elle n’avait jamais su si Jonathan avait vraiment parlé à son frère. Si ce dernier savait quoi que ce soit de ce qui s’était passé, ou si cette menace n’était qu’un autre de ses jeux cruels. En attendant, son petit ami l’avait lâchée, sans explication, par un simple message : “Tout est fini !”

Depuis ce jour, chaque rencontre avec Jonathan l’avait poussée à l’éviter encore plus. À chaque fois, elle longeait les murs, fuyant son regard, se cachant derrière ses pensées. Même lors de l’enterrement de son parrain, un homme qu’elle avait aimé, elle était restée loin de lui, préférant garder sa distance plutôt que de se retrouver face à cet homme qu’elle n’avait jamais su comment appréhender.

Ils n’avaient rien en commun. Rien. Pas même un semblant d’affinité. Elle le détestait profondément, et ce n’était un secret pour personne.

Elle avait l’impression de s’égarer dans ses pensées lorsque la secrétaire les appela.

– Monsieur Carter, Mademoiselle Miller.

Jonathan lui offrit un sourire poli et la salua avant de s’installer à ses côtés. Elle s’assit d’un air presque figé, ignorant délibérément la présence de Jonathan à côté d’elle. Le notaire entama alors les formalités, expliquant que l’héritage en question était assez conséquent. Elle toucherait une première partie à la signature, puis une seconde dans cinq ans. Deborah sentit alors le regard de Jonathan se poser sur elle, et un léger sourire se dessiner sur ses lèvres. Quelque chose dans son attitude la perturba. Pourquoi ne semblait-il pas plus affecté par cette situation ? Pourquoi acceptait-il aussi calmement de partager cet héritage avec elle, une simple filleule, sans lien familial direct ?

Elle se demanda s’il comprenait réellement la situation, ou s’il était juste indifférent. Elle avait du mal à saisir son calme. Lui, qui n’avait jamais accepté quoi que ce soit de ses proches, qui semblait toujours si imbu de lui-même.

– Bon, je signe où ? lança-t-elle sèchement, les yeux toujours rivés sur le document, espérant que la conversation s’arrête là.

Deborah jeta un coup d’œil à sa montre, un malaise grandissant à mesure que le regard de Jonathan pesait sur elle. Il affichait le même air satisfait que ce jour-là, lorsqu’il l’avait giflée. Cette pensée raviva sa gêne, et elle n’eut qu’une seule envie : quitter ce bureau au plus vite. Après tout, elle n’avait aucune emprise sur ce que le père de Jonathan voulait faire. Elle avait suffisamment pris soin de lui durant sa maladie, sans rien attendre en retour.

Elle l'avait tant aimée aussi.

Elle prit un stylo et commença à parapher les feuilles, signant sans lire, sous l’œil perplexe du notaire.

– Vous ne lisez pas les termes du contrat ? demanda-t-il, étonné.

– Non, je vous fais confiance. Et puis, je n’ai pas trop le temps non plus ! répliqua-t-elle.

– Mais je ne vous ai rien dit encore, Mademoiselle. Vous ne devriez pas vous emballer à tout signer comme ça. On ne peut pas revenir en arrière, et…

– Je vais être en retard au travail aussi, coupa-t-elle net.

– Laissez faire, Maître ! répondit Jonathan d’une voix presque moqueuse.

Elle lui lança un regard noir, mais il lui répondit par un large sourire.

Une fois tout signé, elle tendit les papiers au notaire, qui la regarda avec étonnement               et ajouta :

– Vous ne lisez pas les termes ? Vous savez que vous venez d’accepter de vous marier à Monsieur Carter Jonathan ici présent et de lui faire un descendant ?

Elle éclata de rire.

– J’adore votre humour !

Mais soudain, elle réalisa que le notaire ne riait pas. Elle tourna la tête vers Dean, qui semblait étrangement détendu. Il prit les papiers et signa à son tour.

– C’est une stupidité ? demanda-t-elle, stupéfaite.

– De signer sans lire, oui, répondit Dean, un sourire en coin tout en continuant de signé.

Le notaire, lui, ne souriait pas. Deborah commença à se sentir mal.

Continue to read this book for free
Scan code to download App

Related chapters

  • UN CONTRAT DE MARIAGE EN HERITAGE   3

    Jonathan rendit le dossier au notaire, qui regardait Deborah avec un air consterné.Le notaire apposa son sceau, appela sa secrétaire pour faire des copies et enregistrer le contrat. Deborah, figée, était à peine consciente de ce qui se passait autour d’elle. Ce n’était pas possible. Cela devait être une blague. Mais lorsqu’on lui apporta la copie, elle enfila précipitamment ses lunettes et se jeta sur le paragraphe en question.“Mademoiselle Miller Deborah s’engage pour une durée de cinq ans avec obligation de donner un descendant à Monsieur Carter. Passé ces cinq ans, elle sera libre de partir et touchera la seconde partie de l’héritage, la somme dite plus haut, mais elle pourra faire le choix de rester auprès de son mari et de son enfant. L’enfant restant avec le père si la mère prend la décision de partir. Si Mademoiselle Miller revient sur sa décision avant les cinq ans, elle devra verser à Monsieur Carter l’équivalent de trois fois l’héritage perçu à la date de la signature.”–

    Last Updated : 2025-04-10
  • UN CONTRAT DE MARIAGE EN HERITAGE   4

    Elle retira délicatement ses bottines, qui faisaient un bruit de plus en plus insupportable. Elle entendit les pas de Jonathan descendre, et elle se remit en mouvement, collée aux marches glissantes. Il ne manquerait plus que ça, qu’elle tombe. Elle jeta un coup d’œil à sa montre, inquiète d’être en retard. C’est alors qu’elle perdit l’équilibre, manqua la dernière marche et s’écrasa violemment au sol.Elle se redressa avec difficulté, le visage rougi par la douleur et la honte. En jetant un coup d’œil à son collant, elle remarqua qu’il avait filé. Alors qu’elle se préparait à redescendre, une main se saisit brutalement de son bras.– Hé, je t’avais dit de m’attendre, faut qu’on parle !– Je n’ai pas le temps, je suis déjà en retard, et enlève tes mains de sur moi !– Je te dépose, mais on doit parler, trouver une date rapidement.Elle plongea son regard dans le sien, ses yeux bleus, plus glacés que jamais. Il n’allait pas la déposer, elle avait sa propre voiture qui l’attendait sur l

    Last Updated : 2025-04-10
  • UN CONTRAT DE MARIAGE EN HERITAGE   5

    La voix autoritaire de Jonathan résonna dans la cage d’escalier, un écho grave et tranchant qui semblait vibrer contre les murs froids. Elle sentit ses jambes trembler sous l’effet de cette intonation impérieuse, comme si le son seul avait le pouvoir de la clouer sur place. Elle s’immobilisa instantanément, la mâchoire serrée si fort qu’elle en ressentit une douleur sourde dans les tempes. Une bouffée de frustration monta en elle, chaude et suffocante, comme une vague qui menaçait de la submerger. Ses poings se crispèrent instinctivement, ses ongles s’enfonçant dans ses paumes, tandis qu’elle luttait pour reprendre le contrôle de son souffle, court et irrégulier.Elle baissa les yeux sur ses bottines, ces maudites bottines dont les talons claquaient à chaque pas, amplifiant le bruit dans cet espace étroit et résonnant. Le son, de plus en plus insupportable, semblait trahir sa présence à chaque mouvement, comme une alarme qu’elle ne pouvait éteindre. Lentement, avec des gestes presque

    Last Updated : 2025-04-10
  • UN CONTRAT DE MARIAGE EN HERITAGE   6

    – Tu préviens tes parents ou j’appelle ton père pour m’inviter ? lança Jonathan depuis le seuil, sa voix joyeuse perçant le silence oppressant, presque criarde dans son assurance insolente.– Va chier ! répliqua-t-elle sèchement, les mots jaillissant de sa gorge comme un venin, sans même se retourner. Des larmes brûlantes commencèrent à couler sur ses joues, traçant des sillons chauds dans la peau gelée de son visage. Elle accéléra le pas, trébuchant presque, ses mains tremblantes cherchant à tâtons la poignée de sa petite Twingo bleue. Elle se glissa à l’intérieur en claquant la porte derrière elle, verrouillant immédiatement les portières comme pour ériger une barrière entre elle et le monde extérieur. Elle était terriblement en retard, et cette pensée tournait en boucle dans son esprit, amplifiant son désespoir. Épuisée, elle se laissa tomber contre le volant, son front appuyé sur le plastique froid, son visage noyé dans un flot de larmes qu’elle ne pouvait plus retenir.Elle se se

    Last Updated : 2025-04-10
  • UN CONTRAT DE MARIAGE EN HERITAGE   7

    Deborah rentra chez elle vers 18 heures après avoir terminé sa journée et rattrapé son retard du matin. Depuis sa sortie du notaire, elle n’avait presque pas desserré la mâchoire. Elle entra comme une tornade chez elle et crut mourir en voyant Jonathan Carter dans le salon en train de boire un verre avec son père.– Ah, la voilà, ma petite cachottière ! s’exclama son père.Son père, un homme qui approchait les 55 ans mais en paraissait facilement 5 de moins, avec des cheveux grisonnants et un début de barbe lié à la crise de la cinquantaine qu’il avait attrapée tardivement, se jeta presque sur elle et la prit dans ses bras. Elle jeta un regard rempli de haine à Dean, qui lui répondit par un grand sourire. Son père la serrait si fort qu’elle crut qu’il allait l’écraser.– Je suis tellement content pour toi, Jonathan en gendre, j’ai cru que tu allais épouser cette andouille de David, déclara-t-il.Sa mère arriva à ce moment-là et se jeta dans ses bras. Sa mère, comme son père, ne faisai

    Last Updated : 2025-04-10
  • UN CONTRAT DE MARIAGE EN HERITAGE   8

    Jonathan se redressa légèrement, son sourire s’effaçant pour laisser place à un ton plus grave.— Ce genre d’insultes, il va falloir que tu les oublies quand on sera mariés. Il marqua une pause, ses yeux ne la quittant pas. D’ailleurs, j’ai fixé la date au 20 janvier… à moins que tu veuilles qu’on fasse ça plus tôt.Elle soupira en levant les yeux au ciel, puis reprit son téléphone, décidée à couper court à la conversation.— Écoute, chéri, je te rappelle plus tard. J’ai un truc urgent à régler.Jonathan la fixait toujours, son regard perçant ne la quittant pas. Elle raccrocha, sans un mot, mais elle sentait sa présence pesante derrière elle.— C’est aussi quelque chose que tu devras oublier une fois que nous serons mariés, dit-il, d’un ton ferme. Je ne partage pas.Un sourire moqueur étira ses lèvres alors qu’elle s’approchait de lui.— Je n’ai pas vu de clause sur la fidélité dans ce contrat, répliqua-t-elle, provocante.Son sourire s’effaça aussitôt. D’un geste brusque, il lui sais

    Last Updated : 2025-04-10
  • UN CONTRAT DE MARIAGE EN HERITAGE   9

    Deborah serra les dents, ne répondant pas. Elle tenta de passer, mais Dean, dans son éternel jeu de provocation, la saisit par la taille et la plaqua contre lui, un sourire satisfait aux lèvres.— Ah bon, tu me détestes ? dit-il en se moquant d’elle, rapprochant sa joue de ses cheveux. On dirait que tu caches bien ton jeu !Deborah réprima l’envie irrésistible de lui envoyer un coup de tête bien mérité. Mais, avec sa taille imposante, c’est son torse qui aurait pris le choc. Ludovic, amusé, se contenta de sourire.— Eh, j’espère que je serai ton témoin, Jonathan ! lança-t-il, tout excité.— Bien sûr, Ludo ! répondit Jonathan avec un clin d’œil complice.Mais Deborah, incapable de contenir sa rancœur, murmura avec un venin calculé :— En tout cas, tu n’auras pas pleuré ton pauvre père longtemps. Ça fait quoi ? Deux jours que tu l’as enterré ?Jonathan se figea, ses yeux se durcirent, et il murmura entre ses dents serrées :— Petite saleté.Il la lâcha immédiatement, la tristesse envahi

    Last Updated : 2025-04-11
  • UN CONTRAT DE MARIAGE EN HERITAGE   10

    Ce soir-là, le froid s’intensifiait, la neige tombait de plus en plus épaisse, et le chasse-neige n’était toujours pas passé. Deborah, les mains crispées sur le volant, roula prudemment jusqu’à chez sa meilleure amie, Alicia Rocher. À peine arrivée, Alicia la regarda, surprise de la voir si tard. Elle la fit entrer rapidement, l’invitant à s’installer dans son salon.Alicia était une jeune femme d’une beauté naturelle, dotée d’une allure à la fois énergique et chaleureuse. Ses cheveux bruns, denses et très frisés, tombaient en boucles serrées autour de son visage, encadrant son teint clair et lumineux. Ses yeux marron étaient pétillants, pleins de vivacité et d’intelligence, avec une étincelle malicieuse qui trahissait son esprit affûté.Sa meilleure amie était déjà en pyjama polaire, avec la tête d’un ours brodée sur le devant.— Qu’est-ce qui t’arrive ? demanda-t-elle, son regard inquiet la scrutant alors qu’elle remarquait sa pâleur.Deborah s’effondra sur le canapé, les mains trem

    Last Updated : 2025-04-11

Latest chapter

  • UN CONTRAT DE MARIAGE EN HERITAGE   74

    Après ce moment tendu, ils se retrouvèrent dans un silence pesant. Flocon, sentant le malaise, s’assit entre eux, ses yeux ronds allant de l’un à l’autre, ses oreilles soyeuses légèrement inclinées comme s’il tentait de décrypter l’atmosphère. Sa queue, habituellement frétillante, reposait immobile sur le sol, trahissant son incertitude. Deborah fixait le sol, ses doigts crispés autour de la tasse vide, ses jointures blanchissant sous la pression. Chaque inspiration lui semblait lourde, comme si l’air de la cuisine s’était épaissi. Elle se mordilla la lèvre, un geste inconscient, tandis que son esprit s’emballait, oscillant entre la colère et une étrange vulnérabilité qu’elle refusait d’admettre. Le souvenir du baiser de Jonathan, ardent et insistant, lui brûlait encore les lèvres, et elle serra les dents pour chasser cette sensation.Jonathan, de son côté, s’appuya contre le comptoir, ses bras croisés sur son torse nu. Son visage, d’ordinaire si assuré, laissait entrevoir une ombre d

  • UN CONTRAT DE MARIAGE EN HERITAGE   73

    — Je suis juste en face de toi. Regarde-moi.Sa voix claqua doucement dans le silence, une injonction sans colère mais pleine d'attente. Deborah leva les yeux, lentement, comme si son regard pesait une tonne. Il était là, tout près, trop près. Elle sentit son souffle sur sa peau. Un frisson la traversa, aussi imperceptible qu’inattendu.Flocon, qui s’était roulé en boule non loin d’eux, redressa la tête, les oreilles frémissantes. Il s’approcha à pas feutrés, posant son museau contre le genou de Deborah, l'air inquiet.— Alors, tu n’es pas obligée de mentir. Si je ne te plais pas, dis-le.Elle cligna des yeux, la gorge sèche.— Je ne sais pas.— Tu hésites ?Elle secoua légèrement la tête, puis la redressa, le menton plus haut cette fois.— Non… Je me dis qu’au final, tu ressembles beaucoup à John. Ton père.Elle vit son expression changer. Subtilement. Juste un battement de cil un peu plus long, une tension au coin des lèvres. Elle savait que ça piquerait. Et pourtant, elle ne retira

  • UN CONTRAT DE MARIAGE EN HERITAGE   72

    De toute façon, il était plutôt sans filtres. Elle ne répondit pas et but son café d’un trait.— Je vais me doucher ! lui dit-elle en posant sa tasse dans l’évier.Flocon, sentant son départ, trottina derrière elle, mais elle lui fit signe de rester. Le chiot s’assit, la regardant partir avec un air plaintif. Elle prit soin de verrouiller les deux portes à clé.Elle se déshabilla, prit sa douche, se sécha et alla s’habiller dans la chambre. La maison semblait vide, et le silence n’était pas quelque chose qu’elle appréciait. Flocon, qui avait réussi à la suivre discrètement, s’assit au pied du lit, ses yeux suivant ses moindres gestes. Elle refit le lit ; la journée allait être très longue.Elle sortit de la maison et se rendit dans le jardin ; marcher un peu lui fit du bien. Flocon gambadait à ses côtés, reniflant l’herbe et poursuivant une feuille volante. Il ne faisait ni chaud ni froid. Le chiot, plein d’énergie, rapporta un petit bâton qu’il déposa fièrement à ses pieds, espérant

  • UN CONTRAT DE MARIAGE EN HERITAGE   71

    — On a quand même passé des jours ensemble quand tu étais jeune. Tu n’avais aucun avis sur moi ?— Aucun, je te l’ai dit. Tu n’existais pas pour moi !— Je pensais que tu m’évitais car je te plaisais !— Je ne t’évitais pas. Si tu m’avais plu, je ne t’aurais pas évité, crois-moi. Je n’ai jamais évité un homme qui me plaisait.— D’accord, je comprends. Dis-moi, est-ce que tu me trouves attirant physiquement ?— Je ne sais pas, je ne te juge pas vraiment sur ton apparence !— Toi, tu m’attires, Deborah Miller, mais ton caractère un peu moins. On travaillera là-dessus ensemble !Il lui caressa les fesses, et elle crut comprendre le message qu’il essayait de lui faire passer. Flocon, sentant un changement d’humeur, s’assit et les regarda tour à tour, comme s’il attendait une explication.— Tu m’as aussi fait mal, crois-moi, je ne pourrai pas dormir sur le dos ce soir ! Allez, je te laisse dormir.Il déposa un baiser sur sa joue avant de glisser ses lèvres dans son cou. Elle sentit des fri

  • UN CONTRAT DE MARIAGE EN HERITAGE   70

    Dans la nuit, Deborah sursauta. Une main la secouait doucement. Elle ouvrit les yeux, clignant un peu face à la pénombre, et reconnut le visage de Jonathan penché sur elle.À ses pieds, Flocon, petit chiot cocker aux oreilles soyeuses et au pelage crème, battait frénétiquement de la queue. Ses yeux ronds, pleins de lumière, brillaient dans l’obscurité. Il poussa un petit couinement, sautillant d’une patte à l’autre comme s’il sentait qu’il se passait quelque chose d’important.— Il t’est impossible de passer toutes tes nuits ici à dormir, viens ! souffla Jonathan, un demi-sourire aux lèvres.Déborah cligna encore, les yeux mi-clos, la bouche entrouverte, confuse. Elle se redressa lentement, comme tirée de la vase. Flocon trottina joyeusement derrière eux, ses petites pattes martelant le parquet dans un clic-clic discret mais régulier.Elle suivait Jonathan, les sourcils froncés, les bras croisés sous sa poitrine comme pour se protéger du froid... ou de lui. Le chiot la frôla, truffe f

  • UN CONTRAT DE MARIAGE EN HERITAGE   69

    — Taie-toi, Miller ! On a de la compagnie. Merci de ne pas me causer d’embarras.Il la plaqua contre le mur et murmura à son oreille :— Je pourrais recommencer ce qu’il y a eu tout à l’heure !Elle en eut le souffle coupé, un poids au cœur. Parfois, il lui faisait peur, mais cette fois, elle ne ressentait pas seulement de la peur.— Tu as compris ? demanda-t-il.Elle répondit timidement par un petit « oui ».— Je n’ai pas entendu, insista-t-il.— Oui, d’accord, je ne vais pas te mettre dans l’embarras.Il s’écarta d’elle et lui caressa le visage.— Merci, et tant qu’à faire, essaie d’avoir l’air amoureuse !— Ne m’en demande pas trop non plus !— Comment ?Il l’avait recollée contre le mur.— D’accord, mais recule, tu me fais mal ! lui dit-elle.Il recula et la regarda de la tête aux pieds, puis rit.— Ah oui, ton cul qui touche le mur, pardon !Elle eut envie de l’insulter, mais déjà il lui prenait la main pour l’entraîner vers la sortie pour retourner auprès de ses amis.Léa demand

  • UN CONTRAT DE MARIAGE EN HERITAGE   68

    Comme Jonathan lui avait dit, « On n’insulte pas les morts. »— Deborah, qu’est-ce qu’il y a ?Le visage plongé dans l’album photo, elle comprit soudain que les autres étaient revenus.Jonathans’accroupit à côté d’elle et tenta de récupérer l’album photo, mais elle refusait de le lâcher, d’autant plus qu’elle était restée à la page du baiser volé. Il tira plus fort qu’elle, regarda la photo et sembla surpris. Elle n’osa pas lever les yeux vers lui.Elle se releva brusquement, lui prit des mains.— Excuse-moi, dit-elle, j’ai eu un petit coup de blues. Revoir ton père m’a rappelé des souvenirs !Elle avait repris un ton neutre, rangeant l’album à sa place.— Ce n’est pas un problème, déclara Romuald. Il est normal de ressentir de la peine, tu étais proche de lui, c’était presque comme un second père, non ?— Certainement pas ! Pardonnez-moi, je vais juste me rafraîchir le visage un instant !Jonathanla regardait froidement, apparemment, il n’avait plus envie de jouer les copains.La phot

  • UN CONTRAT DE MARIAGE EN HERITAGE   67

    À peine partie, elle se leva et se dirigea vers la grande bibliothèque, cette fameuse bibliothèque qui l’avait toujours fascinée avec tous ses livres. Elle l’ouvrit. C’est sûr que son parrain, là, devait se retourner dans sa tombe, mais bon, c’était quand elle était petite.Elle vit un album photo et l’attrapa, l’ouvrit et tomba sur une photo de la mère de Dean, une femme d’une grande beauté, une brune aux yeux bleus. Elle n’avait pas trop compris leur histoire, mais sa femme l’avait quitté lorsque leur fils était petit ; elle n’avait en fait aucun souvenir de cette femme. Elle tourna la page : il y avait des photos de leur mariage. La mariée avait l’air renfrogné et soudain, elle se demanda si le mariage n’aurait pas été arrangé également. La femme avait l’air tellement triste sur les photos ! Elle continua à tourner les pages, toujours le mariage, toujours le même visage attristé. Ensuite, ce furent des photos de la naissance de leur fils. Elle ne souriait toujours pas. Elle avait à

  • UN CONTRAT DE MARIAGE EN HERITAGE   66

    Deborah était ailleurs, perdue dans un océan de pensées. Flocon, blotti sur ses genoux, ronflait doucement, son pelage chaud un refuge contre la tempête intérieure. Elle avait failli parler, dire ce qui la consumait : son art, ce besoin vital que son père balayait d’un revers de main, un « hobby » indigne de sa lignée. Mais à quoi bon ? Léa, Romuald, Jonathan – ils ne comprendraient pas. Ils voyaient une Deborah sage, celle qui suivait les règles, pas celle qui rêvait en couleurs.— Tu quoi ? demanda Léa, un sourire espiègle.— Rien, murmura Deborah, ravalant ses mots. Laisse tomber.Romuald, intarissable, enchaîna :— T’as entendu ? Diego est de retour ! Il a une boutique d’art en ville. J’y suis passé, il a demandé de tes nouvelles. Il hallucinait qu’on se voie plus !Diego. Le nom claqua comme un coup de fouet. Diego, son premier amour, celui qui lui parlait de Paris, de toiles infinies, de vie sans chaînes. Elle soupira, et Jonathan, sentant son trouble, glissa derrière elle, ses b

Explore and read good novels for free
Free access to a vast number of good novels on GoodNovel app. Download the books you like and read anywhere & anytime.
Read books for free on the app
SCAN CODE TO READ ON APP
DMCA.com Protection Status