Dans le salon paisible de la maison située au cœur du Pays C, tout semblait calme.La grande baie vitrée laissait passer les dernières lueurs dorées du jour. Eva, Yvan, Evan et Kate s’étaient installés ensemble pour le dîner, comme ils en avaient pris l’habitude. Peter leur avait proposé un jeu de société, mais Eva avait insisté :— On regarde les infos d’abord. Juste les titres.Kate, bien que distraite, avait accepté. Un léger malaise persistait en elle depuis une heure. Un pincement inexpliqué au cœur. Quelque chose n’allait pas. Elle le sentait.Elle posa sa main sur son ventre, caressant doucement les vies qui y grandissaient.Puis l’écran s’alluma. Le journal de 20 heures venait de commencer.« Ce soir, drame dans le quartier ultra-sécurisé de Greenlake, au Pays B. Le milliardaire Dave Hopkins, héritier de l’empire Hopkins Industries, a été retrouvé gravement blessé dans sa résidence de luxe. L’attaque, menée par un commando inconnu, a failli lui coûter la vie… »L’image de Dave
Monica tourna en rond dans son immense salon, le téléphone à la main, nerveuse. Elle avait tout orchestré. Chaque détail. Chaque trajectoire. Chaque homme. Ils devaient être morts.Elle avait joué la scène à la perfection. Une larme bien placée. Une égratignure soigneusement infligée à son bras par son propre homme de main. Une panique feinte pendant l’appel aux secours. Elle avait même prié devant les caméras.Mais quelque chose clochait.Depuis trois heures, elle n’avait reçu aucune nouvelle concrète. Aucun rapport final. Pas même un faux certificat de décès.Puis, enfin, son téléphone vibra. Elle décrocha aussitôt.— Alors ? dit-elle sèchement.— Ils sont en vie, répondit la voix à l’autre bout, froide.Le silence tomba comme une chape de plomb.— Quoi ?! explosa Monica.— On a entendu les urgentistes. Ils ont dit qu’ils respiraient encore quand ils les ont emmenés. On a perdu leur trace ensuite. Ils ont été transférés dans un hôpital militaire sous haute sécurité. Même les nôtres
Le silence pesait dans la chambre adjacente à celle de Dave. Les moniteurs diffusaient leurs bips rythmés, comme un battement de cœur artificiel. Greg reposait là, paisible, plongé dans un coma artificiel, maintenu sous sédation depuis l’attaque.À son chevet, Johanne n’avait pas bougé depuis des heures. Ses mains enlaçaient les doigts froids de son frère, et ses yeux, rougis par la fatigue, restaient fixés sur son visage.Soudain, les paupières de Greg frémirent.— Greg… ? Greg ! souffla-t-elle avec espoir.Ses yeux s’ouvrirent lentement, comme s’il luttait contre un poids invisible. Il cligna plusieurs fois, fixant le plafond, puis tourna faiblement la tête vers Johanne.— …Jo ? murmura-t-il, la voix pâteuse.Elle éclata en sanglots de soulagement et se jeta doucement contre lui, l’enlaçant sans lui faire mal.— Tu es revenu, Greg… Mon Dieu, tu es revenu…Greg fronça les sourcils, visiblement déboussolé.— Qu’est-ce que… qu’est-ce que je fais là ? Où est-ce qu’on est ?— À l’hôpital
Un mois s'était écoulé depuis la tragique attaque. Dave Hopkins avait repris le travail avec une détermination impressionnante. Dès l’aube, il était au siège des entreprises Greatwall, et ne quittait son bureau que tard le soir. Il ne ménageait ni ses efforts, ni son énergie. À ses côtés, Greg avait lui aussi retrouvé son poste, malgré le flou complet sur les événements de la dernière année. Les deux hommes étaient performants… mais vides de souvenirs.Chaque soir, Dave rentrait à la villa qu’il partageait avec Monica. Elle l’y attendait, douce et attentionnée, avec un dîner chaud, un sourire rassurant, et un poison blanc dissimulé dans ses plats et ses boissons. Un produit rare, indétectable, qu’elle faisait importer au compte-gouttes, et qui, administré quotidiennement, bloquait durablement les connexions mnésiques du cerveau.Greg les rejoignait souvent pour dîner. Monica, toujours généreuse, insistait pour qu’il reste dormir. Elle leur racontait des souvenirs inventés, des anecdot
La préparation du gala de charité dans le Pays E battait son plein. Entre robes haute couture, plan de table diplomatique, orchestres, invitations royales et discussions sur la teinte exacte du champagne à servir, Sarah Hopkins était dans son élément.Mais une chose la préoccupait plus que tout : faire monter Monica dans cet avion.Un après-midi ensoleillé, Sarah invita Monica pour un thé dans les jardins Hopkins. Anna, la sœur de Dave, les rejoignit avec des magazines de mode et des photos du lieu du gala, un somptueux palais vénitien transformé pour l’occasion.— Monica, imagine-toi dans une robe Dior, tous les projecteurs sur toi, les médias du monde entier prenant des photos de "Madame Hopkins", radieuse, enceinte, sublime…Monica haussa un sourcil, jouant l’indifférente, mais son regard brillait.— C’est flatteur… mais je préfère rester auprès de Dave. Ma grossesse est fragile.Sarah, sans se démonter :— Monica, soyons honnêtes. Tu es une figure publique maintenant. Ce gala n’es
La Villa se réveillait doucement. Une brume légère planait encore sur les jardins lorsque Henry Hopkins arriva, bien avant l’aube. Il avait prétexté une réunion de travail de dernière minute, mais son regard alerte et ses gestes rapides ne laissaient aucun doute : il était en mission.Dans la grande cuisine baignée de lumière dorée, Dave et Greg riaient déjà autour d’un café et de croissants. Malgré leur amnésie, leur complicité était toujours là, instinctive, naturelle. Sven, le nouveau "soignant" envoyé par Monica, entrait discrètement par la porte de service. Une mallette à la main, il s’approcha d’eux avec un sourire poli, presque effacé.— Messieurs, vos médicaments du matin, dit-il, posant deux petits gobelets contenant chacun trois comprimés blancs.Henry observait la scène depuis le salon attenant, l'air tranquille mais les nerfs tendus comme un fil. Il attendit que Sven dépose les pilules sur la table et s’éloigne brièvement vers la cuisine pour demander un verre d’eau.C’étai
Cela faisait quarante-huit heures depuis l’administration de l’antidote par Henry. Dave et Greg semblaient en apparence les mêmes hommes… mais à l’intérieur, quelque chose s’agitait.Des rêves devenaient plus fréquents. Des flashs de visages, de lieux, de voix.Une femme riait, quelque part entre deux vagues de mémoire. Une voix douce, familière. Et ce regard… qui n’était pas celui de Monica.Le matin, Dave se réveillait en sueur, le cœur battant. Il ne comprenait pas. Son corps semblait connaître quelqu’un que son esprit avait oublié.Greg aussi devenait nerveux. Il avait tenté de recontacter Johanne, sa sœur, pour lui poser des questions, mais elle était en déplacement et ne répondait pas. Alors il restait là, seul avec ses doutes… et ce malaise croissant dès qu’il croisait le regard de Monica dans les photos accrochées dans la villa.Pendant ce temps, au Pays E…Monica, radieuse dans sa robe de gala, enchaînait les coupes de champagne et les sourires mondains. Le gala de charité ét
Le salon de la maison Hopkins était silencieux.Dave et Greg, assis côte à côte, avaient encore l’air sonné. Henry leur servait du café pendant qu’Ylias, adossé au mur, croisait les bras. L’air grave.— Alors… tout ça était vrai, souffla Dave, encore en état de choc.— Oui, Dave. Cette nuit-là… Monica a tenté de vous tuer, répondit Henry.Greg secoua lentement la tête, les poings serrés.— Je me souviens maintenant… les tirs, la panique. Et elle qui descend l’escalier comme dans un film. Elle nous croyait morts.— Elle vous croyait morts parce qu’elle vous voulait morts, ajouta Ylias, d’un ton sec. Et pendant que vous étiez plongés dans le coma, elle a soudoyé un infirmier pour vous droguer. Le "poison blanc".— Mais pourquoi ?, demanda Greg, incrédule.— Pour garder le contrôle sur vous deux. Et reprendre Greatwall.Ylias sortit un dossier épais de son sac. Charles et Monica prévoient une prise de contrôle totale. Elle voulait que vous soyez dociles, oublieux… et amoureux d’elle.Dav
Le soleil se couchait doucement sur les jardins de la villa, teignant le ciel d’un rose orangé. Les familles, réunies pour un dîner en extérieur, savouraient les derniers instants d’une journée parfaite. Tandis que les bébés dormaient paisiblement à l’étage, bercés par les soins experts de leurs grands-parents, les jeunes mariés profitaient d’un rare moment de calme.Dave, accoudé à la rambarde de la terrasse, sirotait un jus de citron frais, le regard perdu dans l’horizon. À ses côtés, Greg sirotait un soda glacé, les pieds posés sur une chaise vide.Soudain, Dave tourna la tête vers lui, un sourire malicieux au coin des lèvres.— Tu te souviens du pari qu’on avait fait, il y a un an ? Juste après que j’ai rencontré Kate ?Greg haussa un sourcil, l’air intrigué… puis éclata de rire en recrachant presque sa gorgée.— Comment oublier ça ! J’avais parié que tu finirais par tomber fou amoureux d’elle, et que tu l’épouserais !— Et moi j’avais dit que c’était impossible… répondit Dave, fa
Le grand jour était enfin arrivé.Sous un ciel bleu limpide et une brise douce parfumée de jasmin, la grande villa des Hopkins avait été transformée en un jardin de conte de fées. Guirlandes suspendues entre les arbres, pétales de roses jonchant l’allée, arche florale majestueuse… tout semblait tout droit sorti d’un rêve.Mais comme dans tout rêve parfait, il y avait... quelques imprévus.Evan courait partout avec une cravate de travers.— Quelqu’un a vu les chaussures de Greg ?! Mathias a bavé sur mes fichues notes de discours ! Et Christiana vient de faire pipi sur la robe de Joy. CATASTROPHE !Kate sortit de la chambre, rayonnante dans sa robe ivoire. Elle attrapa Evan par les épaules :— Respire. Tout va bien.— Je vais m’évanouir avant vous !Greg arriva au même moment, torse nu, une chaussette sur la tête au lieu du pied.— Je suis prêt ? Non ? Trop de pression. Dave respire comme Dark Vador dans le dressing. Joy pleure parce qu’elle a marché sur sa traîne. Et Mathias veut un bib
La villa de Kate et Dave bourdonnait d’une effervescence douce et joyeuse. Depuis l’annonce de leur double mariage, les familles Kitson, Hopkins, Jensen et Hanson ne parlaient plus que de ça : le grand jour. Ou plutôt... les deux grands jours réunis en un seul.Car oui, l’amour avait frappé fort et d’un coup : Kate et Dave, les âmes reconnectées après mille tempêtes, allaient dire oui... en même temps que Joy et Greg, les cœurs nouveaux, surpris mais sincèrement liés.La première à fondre en larmes en voyant les robes de mariées alignées sur les portants, ce fut Eva, la maman de Kate et Joy.— Mes bébés vont se marier... et le même jour en plus !— Tu veux que je te dise, maman ? lança Joy en souriant. J’ai toujours su qu’on ferait tout ensemble. Même tomber amoureuse au même moment.— On va vous voler la vedette, ajouta Kate en riant, les yeux fixés sur sa sœur.Pendant ce temps, Greg et Dave, eux, testaient leurs costumes devant un miroir géant.— Je crois que j’ai un air de prince
Le lendemain matin, la nouvelle s'était répandue comme une traînée de poudre. Greg et Joy étaient ensemble. Ou, selon les rumeurs des plus enthousiastes : "ils s'aiment comme des fous et élèvent déjà Mathias ensemble dans une villa pleine de fleurs et de biberons."C'était Henry Hopkins qui avait lancé les festivités. Assis avec Eva Kitson sur un banc au jardin, il tapota son téléphone, lut le message de Greg… et explosa de rire :— Mais alors c’est vrai ?! Ma future belle-fille, c’est la petite Joy ? Ha ! J’aurais dû m’en douter !Eva fronça les sourcils avec un sourire en coin.— Qu’est-ce qui te fait rire, Henry ?— Notre Greg est amoureux de de votre Joy, et moi, je trouve ça parfait ! On devrait faire un arbre généalogique en spirale, tiens, ça ira plus vite !Dans le salon de Kate, Yvan Kitson – toujours très sérieux – était en train de lire le journal quand Dave entra, hilare :— Papa Yvan, tu savais que Joy et Greg sont ensemble ?Yvan leva un sourcil, très calme.— Oui. Et j’
Quelques semaines après le procès, la vie reprenait lentement son cours. Dave et Greg avaient un besoin urgent de tourner la page, de construire quelque chose de nouveau – de solide – pour leurs familles respectives. Et cela passait, d’abord, par un nouveau foyer.Dave tomba amoureux d’un domaine immense situé à flanc de colline, une villa de 2000m² avec un jardin luxuriant, une piscine naturelle, une serre, et même une petite forêt en bordure. Lorsqu’il emmena Kate la visiter, elle n’en revenait pas.— Dave… tu es fou ! C’est gigantesque.— Fou de toi, surtout, répondit-il avec un sourire espiègle. Il nous faut de l’espace pour les triplés. Et pour toi. Je veux que tu te sentes libre ici.Kate avait les larmes aux yeux en découvrant la chambre des bébés, déjà décorée. Son cœur battait à tout rompre.De son côté, Greg avait opté pour une villa plus discrète mais pleine de charme, avec un jardin fleuri, des baies vitrées, une terrasse en bois et une chambre spécialement conçue pour Mat
La nuit était tombée à l’Escala. Les rires s’étaient tus, les berceaux bercés, les familles reparties. Le calme régnait enfin, un calme doux et feutré, comme si le monde entier retenait son souffle pour ne pas déranger ce moment.Dans la chambre principale devenue leur cocon, Dave et Kate étaient enfin seuls. Les triplés dormaient à quelques mètres d’eux, paisibles. Leurs petits soupirs étaient les seuls sons qui brisaient le silence.Kate, encore vêtue d’une robe légère, se tenait debout face à la fenêtre, contemplant le jardin nocturne. Dave, adossé au chambranle de la porte, la regardait en silence. Il n’y avait plus Monica, plus de poison, plus de secrets — juste elle et lui. Et le poids insupportable de toutes ces mois à se désirer sans se retrouver.— Tu comptes rester là toute la nuit ? demanda Kate d’un ton doux mais chargé de sous-entendus.Dave sourit. Ce sourire. Celui qu’elle avait aimé dès le premier jour.— Je n’ose pas m’approcher. Tu es… comme un mirage.Kate se retourn
La nouvelle de la naissance de Mathias Hanson s’était répandue aussi vite qu’un éclair dans un ciel d’été. À peine quelques heures après l’accouchement, la salle de repos de la maternité était remplie de visages rayonnants, curieux, parfois émus jusqu’aux larmes.Greg, blême de fatigue mais souriant jusqu’aux oreilles, tenait son fils dans ses bras avec la maladresse d’un homme qui apprend encore à respirer en même temps que son bébé.— Il est là… souffla-t-il, les yeux brillants, en voyant les premiers invités arriver.La grand-mère de Greg, une dame élégante au regard perçant, entra en tête du petit groupe, suivie des parents de Greg et de sa sœur Johanne. Tous s'arrêtèrent en le voyant.— Greg… mon dieu… c’est ton fils ? souffla sa mère, les larmes aux yeux.— Oui, maman. Je vous présente Mathias.Sa grand-mère, d’ordinaire un roc d’austérité, dut sortir un mouchoir. Son père s’éclaircit bruyamment la gorge pour contenir l’émotion, tandis que Johanne fondait carrément en larmes.—
Le van noir fonça jusqu’à l’hôpital à une vitesse qui aurait fait pâlir un pilote de Formule 1. Dave klaxonnait à chaque virage.— Dave ! Tu vas nous tuer !— T’as crié « elle accouche » ! C’est soit ça, soit tu coupes le cordon toi-même dans le salon, Greg !Ils freinèrent net devant les urgences maternité, Greg sauta hors de la voiture... et se tordit la cheville en atterrissant.— Aïe ! Aïe ! Je suis foutu ! J’arriverai jamais !Dave, hilare, le soutint sous l’épaule.— Allez papounet, debout ! Si t’es pas là pour couper le cordon, c’est moi qui le fais, et je te promets que je le ferai avec les dents.Greg hurla un "NOOONNNNNN", qui fit se retourner toute la salle d’attente.Une infirmière, alertée, accourut.— Vous êtes monsieur Greg ? Vite, suivez-moi, elle est en salle de naissance, vous avez juste le temps d’enfiler la blouse !Greg attrapa la blouse, se trompa de sens, s’emmêla dedans, manqua de tomber sur un brancard, puis… enfin, entra.Monica était pâle, en sueur, exténuée
La douleur frappa Monica comme un éclair dans la colonne. Brutale. Sèche. Elle tomba à genoux sur le sol glacé de sa cellule. Ses cris résonnèrent dans les couloirs bétonnés de l’aile d’isolement.— Aaaahhh… oh mon Dieu… AAHHH !Le gardien accourut, alerté par l’alarme déclenchée dans la cellule.— Elle perd les eaux ! URGENCE MÉDICALE !Monica, haletante, transpirante, hurla :— Appelez Greg ! Je veux Greg ! Appelez-le maintenant !Deux gardes la hissèrent sur une civière, sous le regard figé d’une infirmière carcérale. Monica agrippa l’un d’eux par le col, les yeux fous :— Appelez Greg, je vous en supplie ! Dites-lui que je… que je vais accoucher !Son regard n’avait plus rien de froid ou stratégique. Il n’y avait plus de manipulation. Plus de contrôle. Juste une femme terrifiée par l’inconnu, acculée par la douleur, le ventre en feu, un bébé prêt à naître dans un monde qui la rejetait.— Hôpital central, maternité haute sécurité ! hurla l’un des gardes dans son talkie.— Prévenez