CHAPITRE QUATRE
Jamais Gael n’aurait cru passer son vendredi soir à la bibliothèque municipale de Beldecour à feuilleter les vieux articles de journaux datant de cinquante ans. Il tendit une partie des cartables à Saurie et Persy.
—Dès qu’il termine sa pratique de football, Lucas nous rejoindra. Il ne pouvait pas s’absenter ce soir, c’est l’étoile de l’équipe et ils ont une partie demain. C’est la finale de la saison.
Persy haussa une épaule.
—On lui laissera taper nos notes au propre, ce sera sa participation.
Saurie plissa le nez au milieu de sa recherche.
—Même si on veut aider Hélène et retrouver le corps de Gisèle, on ne peut décemment pas laisser de côté nos activités scolaires ou nos études. Nous avons des vies, les morts vont devoir se faire à l’idée.
Persy appuya les coudes sur la table qu’ils monopolisaient.
—Dis-moi, Gael, ta copine ne t’en veut pas que tu passes ton vendredi soir avec deux autres filles ?
Gael lui tira la langue.
—Je ne lui ai pas dit, ce n’est pas la peine de rajouter à sa mauvaise humeur habituelle. Elle sait que je dois étudier pour l’examen de math de lundi prochain.
Il replongea dans les papiers face à lui.
—Je n’ai pas de compte à rendre à Jada. On se fréquente, on se laisse et on reprend toutes les semaines, alors ça lui donnera une raison de plus de vouloir me faire une scène.
Saurie leva les yeux au plafond.
—Après on me demandera pourquoi je considère que le célibat est un état de vie sain et bénéfique pour l’être humain.
Persy pouffa, mais Gael l’ignora. Ils gardèrent le silence pour se concentrer sur les coupures de journaux. Ce fut Perséphone qui sentit la présence la première. Elle se redressa en frissonnant.
—Il y a un fantôme près de nous ?
Gael quitta ses notes des yeux et sursauta. Derrière Persy se trouvait un homme âgé à la mine peu agréable. Maigre, la bouche pincée, il regardait la jeune femme avec un désaccord évident. Saurie tourna la tête vers sa cousine et grimaça :
—C’est Grand-père Gustave et il est vraiment mécontent.
Persy soupira et se pencha sur ce qu’elle lisait. Elle récita :
—Le moulin des MacFlair a été victime de vandalisme. La police a mis la main sur un des ouvriers ayant par le passé voulu faire pression sur le propriétaire du moulin, considérant que les conditions de travail des employés n’étaient pas sécuritaires. Gustave Mannigan a été arrêté et sera jugé pour les actes commis. Il n’a jamais voulu révéler le nom de ses complices.
Saurie regarda le vieil homme.
—On sait tous que tu as fait vingt jours de prison pour une faute que tu n’as pas commise. Tu étais au mauvais endroit au mauvais moment, Grappy.
Persy rajouta :
—Tu ne pouvais pas révéler de noms, Grappy, tu ne savais pas qui avait fait cela. La police de l’époque était vraiment stupide et corrompue.
Il hocha la tête et Gael murmura :
—S’il faisait la gueule comme ça lorsqu’ils l’ont arrêté, je comprends qu’ils l’ont pris pour un vandale.
Gustave le toisa durement et Gael lui fit un petit salut militaire.
—L’injustice est monnaie courante dans l’histoire de l’humanité, monsieur Mannigan. Désolé pour ce qui vous est arrivé et qui a dû propulser votre famille dans la honte, ils ont la réputation d’être bizarres encore aujourd’hui.
Le revenant ne broncha pas. Gael rajouta :
—Enfin, c’est l’opinion publique, pour ma part je commence à apprécier vos petites-filles. Elles ont des personnalités attachantes.
Saurie grommela :
—Lorsque tu fais des compliments, je me demande toujours s’il n’y a pas un serpent caché en dessous.
Gael lui offrit un sourire garnement en échange de cette réflexion. Persy s’arrêta soudain sur un article.
—Hélène Maréchal a remporté le prix de Miss Beldecour à la foire locale.
Gael nota que le grand-père de ses nouvelles amies avait disparu. Il se leva pour regarder la date sur les coupures de presse devant Persy.
—C’était deux mois avant sa disparition.
Saurie fronça les sourcils :
—Regardez la photo, Hélène a l’air épanouie et sereine. C’était l’enfant chéri de Beldecour. Qu’est-ce qui est arrivé pour qu’on mette fin à ses jours ainsi ?
Persy tourna quelques pages et s’arrêta brusquement.
—C’est Hélène, n’est-ce pas ?
Gael contourna la table pour regarder par-dessus son épaule. Saurie rapproche sa chaise de celle de sa cousine.
—Festival qui a failli tourner à la catastrophe lorsqu’une bande de jeunes gens s’est retrouvé prisonnière derrière un rideau en flammes sur la scène d’un spectacle rock.
Persy pointa Hélène parmi les jeunes ébranlés par l’événement.
—Un gars a passé un bras autour de ses épaules et ça ne donne pas l’impression qu’il voulait la réconforter de la peur qu’elle a eue. On dirait plutôt …
Lucas termina pour elle en arrivant près d’eux :
—On dirait qu’il veut la protéger. Son geste est possessif.
Persy pencha la tête vers l’arrière pour regarder le joueur de football derrière-elle.
—Comme un amoureux ?
Gael acquiesça. Saurie constata :
—Hélène fréquentait un fils d’ouvrier, il n’est pas vêtu et peigné comme un enfant de bonne famille auquel les Maréchal devaient penser pour leur fille chérie.
Persy pouffa de rire.
—Hélène Maréchal était éprise et peut-être secrètement en couple avec un gars de basse classe. Il y a cinquante ans, c’était bien plus important pour les parents qu’aujourd’hui.
Lucas posa la main sur l’article en passant le bras par-dessus l’épaule de la fausse rouquine.
—Hélène a été portée disparue le 12 mai ?
Gael s’avança, les quatre têtes se touchaient presque.
—Le feu sur la scène du spectacle rock était le 2 mai. L’article a paru le 5 mai et si la famille Maréchal a aperçu leur fille sur cette photographie avec un vaurien sans avenir, fort probable que la situation a pu dégénérer.
Saurie grimaça :
—Vous pensez que ce serait le père d’Hélène qui aurait tué sa fille ? Son frère était trop jeune, ça n’a aucun sens, il avait douze ans.
Persy pointa l’amoureux possible de la décédée du doigt.
—Ou encore c’est lui.
Gael sorti son téléphone pour prendre une photo, Lucas fit de même avec son appareil.
—On se renseignera sur l’identité de cet adolescent. Il est peut-être encore vivant et vit à Beldecour aujourd’hui. Hélène venait d’avoir dix-sept ans lorsqu’elle est morte.
Lucas s’étira.
—Rangeons tout ça et partons.
Ils portèrent les cartables et les fiches numérisés non utilisés à la bibliothèque pour remettre le tout aux archives, puis sortirent dehors. Il faisait déjà noir, la lumière du réverbère éclairait la voiture classique de Lucas et celle plus sportive de Gael. Lucas fit signe aux cousines.
—Je vous raccompagne, les filles.
Persy fit un sourire digne d’une publicité de dentifrice à Gael.
—Retourne chez-toi et essaie de ne pas trop te disputer avec Jada. Je viens de voir la bagnole de son amie Chloe passer. Si elle était avec elle, c’est certain qu’elle t’a aperçu avec Saurie et moi.
Gael soupira :
—Surtout avec toi. Jada me tue si elle sait qu’on se voit régulièrement.
Pour confirmer sa déduction, un crissement de pneus et la Nissan de Chloe Blais-Champagne fit demi-tour dans une entrée de maison non loin pour revenir sur ses pas et s’arrêter dans le stationnement de la bibliothèque. Lucas plaça les deux sacs à dos de Persy et de Saurie sur le siège arrière. Jada sortie en trompe de la voiture de son amie et entra tout de suite dans le vif du sujet :
—Je savais que tu me cachais quelque chose. Tu fais quoi avec Mikelson ?
Persy ébaucha un sourire de fille comblée.
—À ton avis ?
Jada tapa du pied, ses beaux cheveux brun foncé agrémentés de plusieurs tresses balayèrent l’air dans son mouvement de tête furieux.
—Tu me trompes avec Mikelson ? T’as vraiment un problème d’estime de toi, Gael !
Saurie soupira :
—Il choisi bien son endroit pour batifoler, une bibliothèque publique.
Jada se rendit compte que sa déduction était ridicule. Elle retourna sa colère contre la minuscule jeune fille.
—Tu veux une claque, conasse ! Tu me cherches depuis l’Halloween. De quoi tu te mêles, tu cours après mon copain toi aussi ?
Saurie recula comme la métisse, née d’un père Latino et d’une mère Blanche, avançait vers elle. Lucas se plaça entre Jada et Saurie.
—Si tu descendais de tes grands chevaux, Jada Kerridan, tu te rendrais compte que l’univers ne tourne pas autour de ton nombril et que Gael connait des gens de tous genres sans coucher avec chacun d’eux. Si on sort de la bibliothèque, c’est sans doute parce qu’on y a travaillé, tu ne penses pas ?
Jada rougit sous l’insulte faisant allusion à son manque d’intelligence. Elle frappa du doigt le torse de Lucas.
—Mêles-toi de tes affaires, Mathis, ça te fera du bien. Une fille pourrait bien s’intéresser à toi si tu étais moins con. Oh, j’oubliais, tu préfères les garçons.
Lucas vira au rouge et au blanc en l’espace de quelques secondes. Gael grogna :
—Ne t’attaque pas à Lucas, Jada !
Elle se tourna vers son amoureux avec une mine étonnée.
—Tu deviens Mère Thérèsa, toi ? Depuis quand prends-tu la défense des gais et des souris insignifiantes ?
Lucas serra les poings, Saurie se cacha derrière-lui, mais ce ne fut pas Gael qui réagit. Jada recula, ébranlée, lorsque Perséphone la gifla.
—Mikelson, je vais …
Une seconde claque résonna dans le stationnement désert. Chloe, témoin muet de la scène près de son automobile depuis le début, se racla la gorge.
—Reviens dans la voiture, Jada. Je te ramène chez-toi.
Persy lui en donna une autre et Jada se mordit les lèvres pour refouler les larmes qui perlaient à ses paupières.
—Tu t’avises encore d’insulter mes amis et de manquer de respect à ma cousine et je t’arrache les yeux avec mes ongles, Kerridan. Gael mérite vraiment mieux que toi.
Jada tituba jusqu’à la portière que son amie venait d’ouvrir pour elle. Persy lui cria :
—Si tu ouvres ta grande gueule pour parler mal de Lucas, Gael ou Saurie, je ne vérifierai même pas si les rumeurs viennent de toi, je vais te voir directement ! Fais gaffe, Jada, je ne plaisante jamais quand il est question de mes amis.
Chloe démarra aussitôt assise au volant. Gael enlaça Persy et posa le menton sur son épaule.
—Merci, Persy.
Saurie tira sur la manche de Lucas.
—C’est vrai que tu es gai ?
Lucas secoua négativement la tête.
—Non, c’est la plaisanterie de mauvais goût de Vincent-Anthony Jacques parce que j’ai refusé les avances d’une majorette l’an dernier.
Persy se dégagea doucement de l’étreinte de Gael pour le regarder en face.
—Tu mérites mieux, St-Clair.
—Ouais, je sais.
Saurie haussa les épaules.
—Elle est belle, mais complètement timbrée cette fille.
Ils pouffèrent tous à cette remarque. Lucas leur fit signe d’embarquer et salua Gael qui s’éloigna vers sa Camaro. Plus loin, une silhouette se glissa dans l’ombre d’un arbre pour éviter d’être aperçu et suivit des yeux les deux voitures qui quittaient le stationnement.
*****
Fin novembre, le Cercle des bêtises n’avaient toujours pas mis la main sur l’identité de la fréquentation possible d’Hélène Maréchal. Les recherches de police pour retrouver Gisèle Malonet avaient cessé depuis la fin octobre à cause de la température qui se rafraîchissait, mais les parents de l’adolescente espéraient toujours la retrouver vivante. Lorsque décembre et la première neige pointèrent le bout de leur nez, il n’y avait plus que les quatre amis pour discuter du tueur en série.
Cependant, les examens occupèrent la plupart du temps des jeunes gens et ils se virent peu. Perséphone retourna auprès de sa bande qu’elle avait mis un peu de côté en passant ses temps libres avec Gael, Mathis et Saurie. Mathis se concentra sur ses études, Saurie repris ses habitudes d’éviter autant les vivants que les morts et Gael démarra une nouvelle relation amoureuse avec une rivale de Jada après avoir rompu avec cette dernière dans une scène dramatique durant l’heure du midi à l’école. Le seul contact du quatuor fut de s’offrir une photographie d’eux dans leur toge de finissants. Le Nouvel An les ramena l’un vers l’autre avec une tempête.
*****
Gael était écrasé sur le divan avec Luisa Sainvil. Il aimait les filles aux airs exotiques. Luisa était métissée avec sa peau couleur café et ressemblait à Jada par son style vestimentaire recherché qui lui donnait l’ai un brin plus vieux que son âge, son maquillage prononcé et ses airs supérieurs envers les autres. Luisa et Jada étaient exactement le même genre que Carmen, une Latino, Jen, une asiatique, et Sandra, une métisse à la peau plus sombre, qu’il avait fréquenté par le passé. Ils n’aimaient pas les blondes à la peau pâle et aux yeux clairs. Elles lui foutaient le sang les filles qui lui rappelaient les princesses des contes que son père aimait lui lire lorsqu’il était un garçon qui rêvait de devenir un grand guerrier ou un chevalier au cœur d’or.
Sans porter attention à l’émission qu’il était censé écouter à la télévision avec Luisa, Gael se perdit dans ses pensées. La seule blonde à la peau pâle qu’il aurait voulue pour petite-amie autrefois c’était Sharon Mikelson, la sœur aînée de Perséphone. Elle avait six ans de plus que lui et Persy, elle lui avait offert un stylo lors de son entrée à l’école secondaire pour qu’il puisse remplir un formulaire dans sa classe où elle était bénévole pour la rentrée et il s’était rappelée l’avoir rencontré à l’enterrement de son père. Le jour des funérailles, elle avait douze ans, il en avait six et elle s’était accroupie devant lui pour essuyer d’un mouchoir ses larmes silencieuses. Son sourire compréhensif avait été un baume sur son cœur d’enfant en peine. Elle lui avait dit de sa belle voix douce :
—Je sais ce que ça fait de perdre son papa brusquement. Garde-le en toi et il vivra toujours.
Il aurait aimé écouter son conseil, mais le scandale de l’infidélité de son paternel avait fait rage, sa mère s’était fâchée contre le père de Mathis, les deux familles s’étaient fait la gueule et il avait perdu son meilleur ami en même temps que l’homme qu’il considérait un héros. Oublié avait été la chose la plus simple à faire, surtout lorsqu’il avait commencé à voir les revenants.
Sharon devait avoir vingt-deux ans maintenant. Gael eut un rire ironique, puisque la seule blonde attirante de sa connaissance était la sœur de sa nouvelle et indésirable amie Perséphone. Luisa lui pinça les côtes.
—À quoi penses-tu ?
Gael haussa les épaules.
—Au fait que je suis avec toi et que Jada en rage depuis qu’elle le sait.
Inutile de révéler qu’il pensait à Persy, qui était l’ennemie de toutes les filles de Beauharnois Privilège. Il avait été assez intelligent pour ranger dans un livre caché dans sa chambre les photos de finissants de Persy, Lucas, Saurie et lui. Il n’avait aucune envie de répondre à des questions sur ses amitiés très diversifiées. La relation avec Luisa datait d’à peine un mois, ça aurait été ridicule de la gâcher si tôt. Gael sursauta violemment lorsque Gisèle Malonet passa au travers du mur et s’arrêta devant le divan. Gael déglutie sans pouvoir détourner le regard. Gisèle semblait très triste et extrêmement pâle sous son teint hâlé naturel. Il se leva brusquement et recula derrière le sofa.
—J’ai un appel à faire, Luisa. Continue l’émission sans moi.
Il courut presque à sa chambre pour mettre la main sur son téléphone. Gisèle le suivit. Gael tendit une main pour lui faire signe de ne plus bouger et elle obéit. Il composa le numéro de Persy.
—Yep ? Que veux-tu, St-Clair ?
—Où es-tu, Persy ?
La jeune fille rit.
—Pourquoi ? Tu t’ennuies ? Je suis à la maison.
—Gisèle Malonet est chez-moi et elle vient de mettre un terme à ma soirée coller-coller avec Luisa.
—C’est vrai, tu sors avec Luisa Sainvil maintenant. Tu pourrais changer de style parfois, ce ne serait pas un tort.
—Persy, tu peux venir chez-moi avec Saurie ? J’ai comme l’impression qu’elle veut me dire quelque chose.
Un bref silence.
—Gael, il fait tempête dehors et … une minute.
Il l’entendit parler à quelqu’un et comprit parfaitement sa dernière phrase, puisqu’elle venait de rapprocher l’appareil.
—Pourquoi Saurie serait-elle partie à pied dans ce mauvais temps ?
Gael leva les yeux vers Gisèle et cette dernière hocha la tête. Il eut l’impression qu’un grand froid s’abattait sur lui.
—Persy, je vais te chercher tout de suite. Gisèle m’a dit que Saurie est en danger.
—Je t’attends.
Il activa la composition automatique du numéro de Lucas, mais aucune réponse. Il se précipita dans la cuisine pour chercher dans l’annuaire téléphonique le nom du père de son ami, arracha la page qu’il glissa dans sa poche et enfila son manteau rapidement en sautant sur place pour mettre ses bottes. Luisa quitta le salon pour le rejoindre.
—Tu peux m’expliquer ce que tu fais ?
Il l’embrassa soudain et lui montra son téléphone.
—J’avais un mauvais pressentiment et j’ai vérifié, un de mes potes est pris dans la tempête. Je vais l’aider. Reste ici, je reviens te câliner plus tard.
Luisa ouvrit la bouche, mais n’eut pas le temps d’argumenter, Gael était déjà parti.
*****
Persy sortie dehors dès qu’elle vit la voiture de Gael près de l’entrée enneigée. Elle courut dans le nuage blanc avec ses bottes de poils et s’engouffra dans la voiture en secouant ses cheveux vert pomme. Gael alluma le plafonnier et pouffa de rire en apercevant les mèches de son amie :
—Je me disais que j’avais mal vu, que c’était un reflet du mauvais temps. Mignone, princesse, tu es belle à croquer.
—Tu n’aimerais pas, j’ai un petit goût amer.
Ils échangèrent un sourire amusé, puis Persy plaça sa ceinture de sécurité en informant Gael qui démarrait.
—Oncle Bernard m’a dit que Saurie est partie à pied il y a vingt minutes environ. Elle a regardé par la fenêtre, aurait échappé un chapelet de jurons et se serait habillée chaudement pour sortir ensuite en coup de vent sans explication. Mon oncle a regardé où elle allait aussi pressée et elle aurait pris la direction du centre-ville.
—Je viens de passer par là et je ne l’ai pas vu. En fait, il y a peu de voitures sur la route. À certains endroits il y a des bancs de neige et on n’y voit pas grand-chose.
Persy frissonna.
—Il y a un fantôme derrière.
Gael tourna la tête brièvement, puis se stationna sur le bas-côté car il n’y voyait rien de toute manière avec les rafales de vent. Il inspira profondément et s’adressa à la personne que Persy pouvait sentir, mais qu’elle ne voyait pas.
—Gisèle, tu sais où se trouve Saurie Mannigan ?
Gisèle hocha la tête. Elle articula quelque chose, puis recommença comme il ne pouvait pas l’entendre, phénomène courant lorsque Saurie n’était pas présente.
—Hélène ?
Gisèle acquiesça. Persy devint soudain nerveuse.
—Elle serait allée dans le sous-bois près de la maison des Murray ?
Gisèle secoua négativement la tête et pointa une direction opposée au centre-ville, pas très loin d’où ils se trouvaient. Gael devina et murmura :
—Elle a suivi le fantôme d’Hélène, n’est-ce pas ?
Gisèle sourit et se volatilisa brusquement. Gael sortit des poches de son manteau la page de l’annuaire.
—Essaie de rejoindre Lucas pendant que je cherche une dame blanche dans la tempête.
Il se pencha sur son volant.
—Quelle couleur les vêtements de Saurie ?
Persy composa le numéro du père de Lucas.
—Tuque saumon et blanche, manteau du bonhomme Michelin blanc et elle était en jeans à ma connaissance avec ses bottes noires.
Gael grommela :
—Je vais lui offrir pour sa fête en avril un manteau rouge et une tuque turquoise. Tu parles d’une idée de suivre un fantôme à la robe blanche en portant un manteau blanc dans une tempête de neige où le blanc domine !
Persy l’ignora et s’adressa à la personne qui répondit :
—Bonjour, est-ce que je peux parler à Lucas ? Oui, merci.
Après quelques secondes, elle reprit :
—Lucas, c’est Persy. Saurie a suivi Hélène Maréchal dans la tempête et nous la cherchons présentement. Je te place sur le haut-parleur.
Gael prit la parole :
—Lucas, tu peux prendre ta voiture et sillonner les rues ? Selon Gisèle Malonet, elle serait du côté des vieilles maisons ancestrales et des grands terrains. Ça ne me dit rien de bon.
—Je m’habille et je sors tout de suite. Mon téléphone est mort, je vais demander celui de mon père et je te tiens au courant.
—Parfait.
Lucas raccrocha. Persy serra son téléphone dans ses mains.
—Pourquoi est-ce que cette idiote est partie sans rien dire ?
Gael serra les dents :
—Parce qu’elle ne réfléchit pas, visiblement.
Il roula lentement avec les feux d’urgence durant quelques minutes, Persy regardait sur le bord du chemin au cas où elle verrait une forme dans le fossé. Gael freina brusquement et elle se heurta la tête à la vitre de la portière. Il ne s’expliqua pas, défit sa ceinture et descendit de la voiture. Persy le suivit et fit signe à une voiture qui arrivait en sens inverse. Lucas s’arrêta au milieu de la rue et courut les rejoindre.
*****
Hélène et Gisèle se tenaient debout près d’un grand arbre où un banc de neige s’était créé à la base du tronc. Gisèle pointa du menton l’arbre et les garçons se mirent à creuser. Persy se joignit à eux en comprenant qu’un fantôme leur avait indiqué l’endroit. Le terrain se trouvait entre deux maisons ancestrales aux grands arbres majestueux vierges de tout feuillage en cette période de l’année. Une immense haie de cèdres séparait les deux propriétés et un accident de voiture la semaine précédente avait déraciné un arbre plus jeune et abimé la clôture naturelle.
Une voix les fit sursauter comme ils se débattaient dans la neige près de l’arbre à quelques pas de la palissade de conifères.
—Par ici !
Persy fut la première à se rendre à quatre pattes sous les cèdres qui protégeaient du mauvais temps. Elle aperçut sa cousine au milieu de cette mini forêt qui tenait quelque chose.
—Saurie ! Comment as-tu pu t’éloigner dans la tempête sans nous avertir ? Nous étions morts d’inquiétude ! Gisèle Malonet a averti Gael et …
Le sermon de Perséphone mourut sur ses lèvres lorsqu’elle comprit que ce que Saurie tenait était un poignet qui sortait de la terre gelée malmenée par l’accident de la semaine précédente. Son hurlement résonna dans la caverne de cèdres. Gael la tira par les épaules et elle s’écroula entre ses jambes.
—OK, ça va, Persy. Ça va.
Elle pointa un doigt ganté vers la main nue et figée de la morte toujours ensevelie.
—C’est … c’est … c’est …
Lucas grimaça et téléphona à son père en remerciant le ciel qu’il est gardé un traditionnel téléphone de maison.
—Papa, c’est Lucas. Heu … je suis venu aider Gael St-Clair qui a dérapé exactement au même endroit que Tommy Sweeney et … heu, une des filles avec Gael a aperçu quelque chose près de la haie de cèdres. C’est un bras de morte, je pense que tu devrais venir.
Il s’extirpa de sous le rempart et leur fit signe d’en faire autant. Saurie ne semblait pas disposer à lâcher le poignet comme si elle avait peur que le corps disparaisse. Gael ne lui laissa pas le choix et la tira hors de l’endroit. Il démarra ensuite sa voiture pour la propulser directement vers la haie comme s’il avait perdu le contrôle, histoire d’être crédible dans la découverte du mort sans paraître étrange. Il traversa la rue et se glissa à l’arrière de l’Acura chauffée de Lucas avec Persy. Saurie était assise à l’avant avec le propriétaire de l’auto. Elle leur raconta ce qui l’avait incité à suivre Hélène.
—Je venais de terminer mon livre lorsqu’Hélène s’est mise à frapper sur la fenêtre du salon comme une déchaînée au point que tante Mesra l’entendait et ne savait pas d’où ça venait. Lorsque j’ai regardé dehors, j’ai vu derrière Hélène trois silhouettes. Gisèle d’abord, Marjorie, puis Zoey. Les trois me faisaient des grands signes des bras et je me suis dépêchée de les rejoindre. Elles parlaient toutes les trois en même temps, je ne les comprenais pas. C’est le cri désespéré de Gisèle et le visage grave d’Hélène qui m’attendait pour que je la suive qui m’a fait comprendre que le corps de Gisèle était en danger, qu’on avait une mince chance de le découvrir. J’ai couru pour rattraper Hélène et elle tournait en rond ici, j’ai cherché et j’ai trouvé le bras … de Gisèle, j’imagine.
Persy s’avança pour lui donner une tape sur le dessus de la tête.
—Tu aurais pu croiser son meurtrier aussi, petite idiote ! Si c’est son corps, il a été enterré sous l’arbre et la haie de cèdres il y a près de trois mois, à dix pas environ de la route et personne n’aurait rien vu ? C’est effrayant, le tueur connait les allés et venus des gens pour agir à sa guise ainsi.
Saurie acquiesça.
—Gisèle n’arrêtait pas de demander pour son appareil photo. Je pense qu’elle l’a perdu. D’ailleurs, elle disait tout le temps pendant que je lui tenais le poignet : Ne me lâche pas, je vais tomber. C’était tellement haut, ne me lâche pas.
Lucas s’agita :
—Elle l’a vu ? Elle peut nous guider jusqu’à lui ?
Saurie secoua la tête.
—Je lui ai posé la question et elle répétait toujours qu’il fallait que je trouve son appareil photo, que l’équipe avait besoin de son appareil photo, qu’il ne fallait pas que je la lâche car elle allait tomber. Je ne sais pas si elle a vu son meurtrier, j’ai l’impression qu’il était masqué et qu’aucune d’elle ne l’a vu. Même Marjorie ne parle que de cette sensation d’étouffer, qu’elle ne peut pas crier et que la terre lui tombe dessus.
Persy appuya son front contre le siège passager.
—Merci tous les Dieux de la Terre de ne pas me condamner à voir et entendre ce que les morts errants encore ici-bas ont à dire. Je pense que je deviendrais folle.
Gael lui tapota le dos.
—Lorsque Saurie n’est pas là, je ne les entends pas. Ils m’effraient moins maintenant, je ne sais pas si c’est parce que j’essaie de les aider, mais ils me surprennent de moins en moins.
Lucas retira sa tuque de l’équipe de hockey les Canadiens de Montréal et la secoua pour enlever la neige.
—Moi aussi. Ils me terrorisaient avant, j’avais toujours l’impression qu’ils me sortaient dans la face en hurlant et je n’entendais rien.
Persy fronça les sourcils.
—C’est moi ou il y a quelqu’un dehors près de l’auto de Gael ?
Ils plissèrent tous les yeux pour voir à travers le pare-brise enneigé. Lucas haussa les épaules et ouvrit sa portière pour sortir.
—Un autre qui a bravé la tempête et qui se demande s’il y a des blessés.
Il s’extirpa de la voiture et porta les mains en porte-voix.
—La police est en route, ça va aller. Il n’y a pas de blessé.
La personne se dépêcha de rejoindre son véhicule et démarra rapidement sur le chemin glissant. Lucas se rassit et ferma la porte en se secouant.
—Tu parles d’un comportement ! Il est parti sans même vérifier.
Gael se pencha vers son ami.
—Je trouve ce départ précipité très suspect.
Persy ajouta :
—Je ne suis peut-être pas une voyante de revenant comme vous trois, mais je vous certifie que celui ou celle qui se trouvait là semblait nerveux dans ses gestes.
Saurie appuya sur le verrou de toutes les portières et ils se regardèrent tous les quatre, silencieux brusquement. Lorsque les sirènes de deux voitures de police furent près d’eux, Lucas chuchota :
—Mon père va se demander si on n’est pas damné pour tomber sur les cadavres des disparues ainsi. Je ne pense pas qu’il le prendra au sérieux si je lui raconte que le meurtrier était probablement sur place et qu’il a pris la poudre d’escampette lorsque je lui ai dit que la police était en route.
Gael lui fit signe de déverrouiller les portières.
—L’école recommence dans deux jours. Hors de question que vous repreniez l’autobus, les filles.
Lucas et lui descendirent de la voiture pour rejoindre les officiers. Saurie verrouilla à nouveau pour se sentir plus en sécurité, malgré les quatre policiers et leurs amis à l’extérieur, et se tourna vers sa cousine.
—Il y a une chose que je n’ai pas dite aux garçons.
Persy grimaça, peu encline à entendre ce que Saurie allait lui révéler.
—Hélène Maréchal n’est pas la seule qui est morte le soir de sa disparition il y a cinquante ans.
Perséphone la dévisagea. Saurie poursuivit :
—Son amoureux secret Paul Leblanc est mort aussi ce jour-là.
CHAPITRE CINQ Perséphone dévisagea sa cousine. —De quoi parles-tu ? Saurie extirpa des plis de son manteau une photo ancienne un peu chiffonnée, mais où l’on apercevait Hélène Maréchal avec cinq autres personnes âgées entre dix-sept et dix-huit ans. Persy reconnue leur oncle Bernard, l’aîné des Mannigan parmi la petite bande souriant sur l’image. Elle retourna le cliché et lut à voix haute les noms notés d’une écriture allongée et précise. —10 mai 1966, la bande Rock On ! Malcom Hayes, Paul Leblanc, Hélène Maréchal, Jenny Sansoucis, Salomon MacFlair et moi. Persy ouvrit de grands yeux. —Oncle Bernard était un ami proche d’Hélène Maréchal ? —Je ne savais pas jusqu’à ce soir. Je venais de terminer mon livre lorsqu’en voulant le ranger dans la bibliothèque du salon j’ai fait tomber un vieil album. Il y avait trois photos qui n’étaient pas rentrées sous le plastique et collés dans l’
CHAPITRE SIX Saurie essayait de suivre Persy de son mieux, mais son sac à dos la ralentissait et sa cousine avait décidé de marcher jusqu’à leur domicile, ce qui était une bonne demi-heure d’un pas d’athlète avec leurs bottes dans le froid plus mordant puisque le soleil déclinait graduellement. Il était hors de question que Gael les ramène à la maison et encore moins de voir ce triple idiot ! Saurie préféra ignorer et ne pas commenter cette phrase qui revenait constamment dans le discours sans suite de sa cousine. Persy s’arrêta soudain et se tourna si brusquement vers Saurie qui traînait derrière, que la jeune fille figea, prise en faute de ne pas être aussi en forme qu’elle le voudrait. Pourtant Perséphone ne s’adressa pas à elle, mais à quelqu’un d’autre: —Hey, t’es qui toi ? Saurie se retourna lentement et recula de deux pas devant la silhouette cagoulée qui se cachait dans l’ombre d’une grande capuche d’un ma
CHAPITRE SEPT Le vedettariat du Cercle des bêtises s’éteignit lentement durant le mois de janvier, puis février. À la relâche scolaire de mars, personne n’en parlait plus et aucune disparition de signaler. La fin du mois de mars, c’était le bal de fin d’année qui monopolisait les conversations. Les cousines Mannigan ne prenaient plus l’autobus, Gael allait les chercher le matin et les reconduisait le soir. Il n’était pas question qu’elles tombent à nouveau nez à nez avec la Bête de Beldecour. La police avait arrêté quelques suspects, mais aucun n’avait une blessure par flèche à la cuisse, les hôpitaux n’avaient reçu personne avec cette condition. Les forces de l’ordre ne se relâchaient pas pour autant, trois jeunes femmes avaient perdu la vie et leur meurtrier courait toujours les rues. Le seul détail qui avait circulé dans la population concernait le fait que les victimes étaient enterrées vivantes. Mise à part le coroner et l’équipe policière sur l’enquête
CHAPITRE HUIT Persy et Gael firent le trajet en voiture jusqu’au moulin de bois des MacFlair dans un silence nerveux. L’adolescente tirait sur un fil de ses mitaines qu’elle avait posé sur ses cuisses. Gael stationna la voiture le long de la rue, puisque le terrain était grillagé et qu’il n’avait pas de laissez-passer électronique pour franchir les portes métalliques. Il posa une main sur celles de Persy. —Je te demande pardon. Je ne sais toujours pas où j’avance avec toi et j’avais déjà repris avec Luisa, je … Persy se dégagea et descendit de la voiture en disant: —Oublie ça. C’est du passé et ça ne se reproduira plus. Je n’ai jamais demandé à être ton amie et encore moins à devenir ton encas de fin de soirée lorsque tu as une petite-amie. L’avoir su, crois-moi, ça ne serait jamais arrivé. Ils marchèrent le long du terrain jusqu’aux remises mentionnées par le fantôme. —Je ne veux pas te perdre, Persy. —T
CHAPITRE NEUF Avril rayonna de tous ses feux pour souligner le printemps qui approchait et le Cercle des bêtises souligna les dix-sept ans des aînés de la bande; Gael et Saurie. Fin avril, les gens spéculaient parfois sur le meurtrier qui avait ravi deux adolescentes à leurs familles. Les préparations du bal de fin d’années étaient de plus en plus souvent ponctuées de regrets. Marjorie et Gisèle ne pourraient pas y être et si la Bête de Beldecour avait perdu de sa popularité durant l’hiver, sa notoriété revenait à grands pas avec la fin de l’année scolaire. Mai était le moment idéal pour sortir son vélo et profiter de l’extérieur plus longtemps. Les gens étaient prudents, les adolescentes attendaient leurs parents à la fin des cours ou des entrainements de majorettes. Les joueurs de football veillaient à partir après les filles, pour éviter de perdre encore certaines de leurs pompons girls. Le Cercle des bêtises tournait en rond avec l
CHAPITRE DIX Lucas jeta un œil à l’heure sur son téléphone pour la quatrième fois. Il soupira et se mit à taper du pied. La voiture de Gael se stationna à ses côtés et il glissa son téléphone et ses clés dans ses poches pour sortir de son véhicule. Ses amis l’imitèrent et Lucas fit la moue en apercevant Saurie et sa couette fontaine qui se perdait dans un manteau trop grand pour elle. —C’est une nouvelle mode ? Saurie lui fit la grimace la plus drôle de l’univers et ils pouffèrent tous sauf elle. Lucas toussa pour retrouver son sérieux. —Il y a une nouvelle morte. Tout le monde sembla se transformer en statue. Lucas expliqua: —J’étais en train de me faire un en-cas de milieu de journée lorsque je l’ai vu passer au travers d’une voiture par la fenêtre du salon. Persy se mordilla les lèvres. —Qui est-ce ? Lucas se tourna vers Gael. —Lorsque je l’ai vu dehors, j’ai pens
CHAPITRE ONZE Saurie avait ouvert une porte dissimulée sous l’escalier menant aux chambres de l’étage. L’endroit servait d’entreposage pour les confitures et conserves de Mesra. Lucas coinça son grand corps dans l’espace disponible et Saurie se glissa près de lui en fermant doucement la porte. Ils ne voyaient pas grand-chose, sauf par une légère fente dans le mur mince de l’entrepôt. Une silhouette entra dans leur champ de vision, elle venait du sous-sol. Saurie posa les deux mains sur sa bouche pour ne pas crier. Lucas se maudit de ne pas avoir eu le temps de prendre son téléphone. Emile MacFlair était habillé de noir, il avait un liquide sombre qui tâchait ses vêtements et les yeux rougis de larmes versées. Son chagrin et sa colère se lisait sur ses traits. À la main, cette fois-ci, il n’avait pas un couteau, mais un revolver. Il passa devant la cachette des adolescents sans savoir qu’eux l’avaient vu. ***** Persy se doutait
Perséphone se tourna vers sa cousine après avoir replacé une dernière mèche de ses boucles blondes derrière son oreille où pendait une salamandre aux yeux turquoise. —Tu me trouves comment ? Saurie jouait distraitement avec les torsades dans ses cheveux châtains. —Ma-gni-fi-que. Persy pouffa de rire. —Je me sens toujours bizarre avec ma couleur naturelle. Saurie sourit, amusée. —Je trouve que ça te va super bien. Persy tourna sur elle-même. Elle portait une robe d’un beau bleu royal dont la crinoline terminait au-dessus du genou, rappelant presque son costume d’Alice au Pays des merveilles de l’Halloween, et des souliers à talons hauts de la même couleur. Saurie portait une simple robe sans manche en satin rose très pâle qui lui allait aux chevilles avec de fausses petites roses blanches dans les cheveux et des ballerines fushia. La sonnerie de la porte d’entrée marmonna son discours de film d’horreur et Mesra se dépêch
ÉPILOGUEPersy était grimpée sur un escabeau et tendait les guirlandes de Noël à Gael pour qu’il les ramasse dans un gros contenant de rangement. Le temps des fêtes était terminé, Mesra pouvait bouger sans douleur après quelques semaines de convalescence. Jake était aux petits soins avec elle, au grand découragement de Bernard qui avait dû «accepter» que les Mathis s’installent dans la grande demeure. Mesra avait transformer son ancienne chambre en bureau de travail, c’est-à-dire que tous ses accessoires ésotériques s’y trouvaient. Elle avait pris l’ancienne chambre de Layla pour l’adapter et en faire le lieu privé du couple. Jake avait apprécié l’idée. Ils avaient un coin juste à eux et décoré à deux.Lucas avait adopté sa ch
CHAPITRE TRENTE-QUATRE Lucas dû jouer le jeu et persuader son père qu’il voulait recoller les pots cassés, ce qui n’était pas faux. Il accepta donc un repas avec son paternel et sa nouvelle flamme. L’idée même de passer la soirée avec Valérie Marchant ne l’enchantait guère, il demanda donc à Gael de l’accompagner dans cette démarche. Le soir du repas, Gael et Lucas tenaient à peine en place. Ils avaient préparé le repas tous les deux et attendaient le retour du travail de Jake et Valérie. Ces derniers firent leur entrée en même temps que Jasmin, Raoul et Jimmy. Lucas recula d’un pas devant la présence des spectres et Gael avala de travers, tentant de cacher sa nervosité aux deux humains face à lui. Ce serait le repas le plus perturbant jamais vécu ! ***** Lucas servit son père et Valérie d’une main plus ferme qu’il ne l’aurait pensé. Il n’aurait jamais cru un jour devoir se concentrer autant pour ne pas lever les yeux d
CHAPITRE TRENTE-TROIS À la surprise du Cercle des bêtises, l’inspecteur Mathis envoya une équipe de surveillance vingt-quatre heures sur vingt-quatre pour protéger non seulement Gael, mais également Louis-Vincent Chattreau et Stuart Stevenson. Il annonça dans une conférence de presse que le lien entre toutes les victimes, excepté pour Sébastien Ludovic, était qu’ils avaient été membres de l’ancienne équipe de volleyball de Beldecour. Gael n’avait jamais fait partie de l’équipe, mais Jake sauta ce détail car il refusait de croire que quelqu’un tuait des jeunes gens par vengeance suite à une soirée où le personnel soignant était débordé. Les jours s’écoulèrent et finalement septembre se termina, puis octobre tira à sa fin et la température fraîche accompagna le Cercle de bêtises dans des décorations d’Halloween extérieures, une première chez les Mannigan. La surveillance policière était terminée et aucun mort n’avait eu lieu depuis presq
CHAPITRE TRENTE-DEUXCe que les gens pensaient était le cadet de ses soucis. Personne ne pouvait comprendre sa douleur. Chaque geste était précis, délicat et respectueux. Ce n’était pas des jeunes hommes qu’elle tuait, c’était une douleur similaire à la sienne qu’elle créait. Elle voulait qu’on se torde dans une agonie sans nom comme elle l’avait vécu et le vivait encore chaque matin en ouvrant les yeux.Il y a des blessures de l’âme qui détruisent une personne, qui ne se réparent jamais. C’était d’ailleurs un signe des cieux de découvrir que chacune de ses victimes potentielles n’avaient plus qu’un seul membre de famille dans sa vie. Bien sûr, elle faisait abstraction de l’entourage et de la parenté plus éloignée. C’était moins diff
Le mystère est-il en train de s'éclaircir au sujet de la Folle au Joker après la découverte du corps de Juliette Samuel ? Gael sera-t-il sa prochaine victime ?Les éléments sont nébuleux, les soupçons du Cercle des bêtises ne sont pas ceux de l'enquête menée par l'inspecteur Jake Mathis, le père de Lucas. Les fantômes de Juliette et des anciens joueurs de l'équipe de volleyball de Beldecour ne sont toujours pas en paix. Ce ne sera pas facile de mettre au grand jour la tueuse et ses sombres desseins.La conclusion de la troisième aventure du Cercle des bêtises approche et la fin du livre également. Le Cercle des bêtises vous invite au dénouement de cette nouvelle intrigue dans quelques jours !
CHAPITRE TRENTE ET UNIls contournèrent un lit de roses qui bordait le grand champ d’avoine et s’arrêtèrent devant la récolte agricole qui avait commencé. Une partie du champ vers le haut avait déjà des balles de foin, il manquait à faire celle près des bois où ils se tenaient.Saurie grommela:—Il est où le corps de Juliette dans tout ça ?Lucas parcouru l’horizon mouvante de l’avoine face à eux et haussa les épaules:—Où on peut cacher un corps à la fin de l’été sans attirer l’attention des agriculteurs ou des travailleurs sur les fermes ?Gael passa une main dans ses cheveux et ses yeux se posèrent à nouveau sur les rosiers sauvages. Ils étaient bien fournis.—Sous des rosiers ?Ses amis firent volte
CHAPITRE TRENTELa mort de Francis Jean ne fit de la peine à personne, c’était vraiment un homme désagréable que tout le monde avait fini par détester au fil des ans. Le seul qui semblait l’aimer était son petit-fils Sébastien habitant Nouvelle Marie, mais ce dernier avait été victime de la Folle du Joker et son corps avait été installé à l’endroit précis à Beldecour où le vieux Francis le trouverait. La douleur émotionnelle avait eu raison du détestable personnage.Gael déposa le journal devant lui et regarda sa mère.—La journaliste n’est pas allée de main morte pour décrire monsieur Jean. Il n’était pas aimé du tout pour que sa mort passe pour une «libération pour la population de Beldecour». Elle
CHAPITRE VINGT-NEUFLe Cercle des bêtises avait prévu une soirée végétarienne pour profiter d’un moment ensemble et discuter de la situation. L’estomac bien remplie, Gael continuait de grignoter des petites carottes avec de l’humus lorsqu’il résuma les interrogations de chacun depuis une demi-heure de discussion:—Donc on s’entend qu’il faut trouver le lien entre la mort de Juliette et celles de Jasmin et Raoul ?Lucas se laissa choir sur les coussins répandus autour de la table basse du salon à laquelle ils étaient tous assis.—Jasmin et Raoul étaient dans la même équipe de volleyball autrefois, mais je ne vois pas ton lien ou celui de Li-Jan avec eux ?Saurie termina d’engloutir une biscotte avec du paris pâté végétarien pour spécifier.
CHAPITRE VINGT-HUITSaurie faisait les cent pas dans le couloir de l’hôpital. Elle avait trafiqué la vérité lorsqu’on l’avait interrogé. Son récit était celui-ci: Elle avait croisé Li-Jan la semaine précédente et lorsque le sujet du meurtre de Jasmin et de Raoul était venu dans la conversation, Li-Jan lui avait parlé de sa montre JPS. Comme ils devaient se revoir et qu’elle n’avait pas eu de nouvelles, Saurie expliqua qu’elle s’était rendue avec sa cousine à la boutique médiévale dans l’intention inavouée de «croiser» Li-Jan. Inquiète que personne ne paraissait l’avoir vu récemment, elle avait demandé à Shanna de le retracer grâce à sa montre.Fin de l’histoire et les policiers y avaient cru. D