Alba Ricci
Je déteste cette sensation.
L’impression d’être acculée, enfermée dans une cage dont je ne vois pas encore les barreaux, mais dont je devine la forme.
Gabriel Moretti se tient devant moi, imposant, imperturbable. Son regard brûle d’une intensité qui me cloue sur place, comme s’il avait déjà scellé mon sort avant même que je n’ouvre la bouche.
— Pourquoi Carlo Ricci te cherche ?
Son ton est calme, presque indifférent. Mais je ne suis pas idiote. Derrière cette façade impassible, il analyse chaque battement de mes cils, chaque tressaillement de mes doigts.
Je croise les bras, me forçant à soutenir son regard.
— Ça ne te regarde pas.
Un silence. Puis un rictus étire ses lèvres.
— Mauvaise réponse.
Il fait un pas vers moi. Instinctivement, je recule d’un cran, mais je me heurte à la table derrière moi. Erreur. Son sourire s’élargit, comme un prédateur sentant la panique de sa proie.
— Tu es dans ma ville, Alba.
Sa voix est basse, menaçante.
— Et tu es sous mon toit.
Il pose une main sur le bord de la table, se penchant légèrement vers moi.
— Ce qui signifie que tout ce qui te concerne… me concerne aussi.
Mon cœur cogne contre mes côtes.
— Je ne suis pas à toi.
Je le vois, ce léger éclat dans son regard. Un mélange d’amusement et de défi.
— Tu répètes ça souvent.
Il se redresse, me laissant un semblant d’espace. Mais le piège est déjà refermé.
— Pourquoi Carlo te cherche ?
Sa patience s’effrite.
Je pourrais mentir. Lui inventer une histoire. Mais Gabriel Moretti n’est pas un idiot. Il a déjà deviné une partie de la vérité.
Alors je soupire, croise les bras.
— Mon père veut me récupérer.
Un silence. Son regard se fait plus perçant.
— Pourquoi maintenant ?
Je détourne les yeux.
— Je l’ignore.
Je mens. Je sais exactement pourquoi. Mais lui dire, c’est lui donner une arme contre moi. Et je ne peux pas me permettre d’être vulnérable face à un homme comme lui.
Gabriel m’observe un long moment. Puis, il lâche simplement :
— D’accord.
Je fronce les sourcils.
— D’accord ?
— Oui.
Il s’éloigne, attrape un verre d’alcool posé sur la table et le porte à ses lèvres.
— Si ton père veut te récupérer, c’est qu’il a quelque chose en tête. Et je n’aime pas qu’on fasse des plans sur mon territoire sans mon accord.
Il pose son verre, puis me fixe à nouveau.
— Tu vas rester ici.
Je cligne des yeux.
— Pardon ?
— Ici. Sous ma protection.
Un rire nerveux m’échappe.
— Hors de question.
Gabriel hausse un sourcil, l’ombre d’un sourire jouant sur ses lèvres.
— Tu crois que tu as le choix ?
Sa voix est douce, mais tranchante comme une lame.
Je le fixe avec défi.
— Tu ne peux pas me garder ici de force.
Il s’avance, lentement, dangereusement, jusqu’à ce que nos visages ne soient plus qu’à quelques centimètres.
— Essaye de partir, Alba.
Un frisson me parcourt.
Je me déteste pour ça.
Je me déteste pour ce que son regard éveille en moi.
Mais je me déteste encore plus de savoir qu’il a raison.
Parce que, au fond, je sais que je suis déjà prise au piège.
Et cette fois, ce n’est pas seulement mon père qui menace de me détruire.
C’est lui.
Gabriel Moretti – Les règles du jeu
Je la regarde.
Elle est belle quand elle se bat.
Ses yeux lancent des éclairs, son corps tout entier tendu dans une posture défensive. Mais derrière cette façade de force, je vois la peur. La méfiance.
Et je veux la briser.
Pas pour la soumettre. Pas seulement.
Je veux qu’elle comprenne qu’elle ne peut pas me fuir.
Qu’elle est à moi, qu’elle le veuille ou non.
Je me détourne, laissant le silence peser sur ses épaules.
— Tu ne quitteras pas cet endroit.
— Et si j’essaie ?
Je souris légèrement.
— Alors tu comprendras pourquoi personne ne me désobéit.
Elle tremble. Pas de peur. De rage.
Elle veut me haïr.
Mais je vois le feu dans son regard, ce même feu qui brûle en moi.
Elle est à moi.
Elle le sait.
Elle refuse de l’accepter.
Mais ça viendra.
Je ferai en sorte que ça vienne.
Alba
Le silence s’étire comme une lame effilée.
Je le fixe, lui, cet homme qui croit pouvoir dicter ma vie comme il dicte ses guerres.
Gabriel Moretti n’a jamais connu de résistance qu’il ne pouvait écraser. Il pense que je vais céder, comme tous les autres avant moi.
Mais je ne suis pas n’importe qui.
Je serre les poings, plantée au milieu de cette chambre qui n’est pas la mienne. L’odeur de son parfum flotte encore dans l’air, mélange envoûtant et suffocant à la fois. Je devrais avoir peur. Je devrais trembler. Mais tout ce que je ressens, c’est une colère sourde, brûlante.
— Tu ne peux pas me retenir ici.
Ma voix claque dans la pièce. Il ne cille pas.
Gabriel est assis sur un fauteuil en cuir, une jambe nonchalamment posée sur l’autre, un verre d’alcool à la main. Son calme est une provocation en soi.
— Je viens de te prouver le contraire.
Son ton est tranquille, comme s’il énonçait une évidence.
Je serre les dents.
— Ce n’est pas parce que tu m’enfermes que je vais t’obéir.
Alba RicciIl esquisse un sourire.— Je n’ai jamais dit que je voulais ton obéissance, Alba.Il se lève lentement, son regard sombre rivé au mien.— Je veux ta coopération.Un ricanement m’échappe.— C’est la même chose.Il secoue la tête.— Non.Il s’approche, réduit la distance entre nous.— L’obéissance, c’est suivre sans réfléchir. Toi, tu es trop fière pour ça. Trop têtue.Sa main frôle mon bras, un contact presque imperceptible, mais suffisant pour envoyer une onde électrique dans mon corps.— Mais la coopération… Il se penche légèrement, son souffle effleurant ma peau. C’est choisir de rester, de marcher à mes côtés.Un frisson me parcourt, et je me hais pour ça.Je me hais de sentir cette attraction me tirer vers lui, comme une force gravitationnelle que je ne peux ignorer.Je me recule brusquement, brisant le contact.— Si tu crois que je vais travailler pour toi, tu es encore plus fou que je ne le pensais.Il ne se fâche pas. Il ne s’énerve jamais.Il analyse. Il attend.— T
Gabriel MorettiLe cuir brûlé, l’odeur du sang, la fumée noire qui s’élève dans la nuit.J’ai mal. Une douleur sourde me vrille l’épaule, chaude et poisseuse. Je n’ai pas besoin de baisser les yeux pour savoir : la balle est entrée. Trop propre pour être un simple règlement de comptes, trop précis pour être un avertissement. On voulait me tuer.Je plaque une main contre la blessure et me redresse contre la carcasse éventrée de ma voiture. Le métal est encore tiède, déformé par l’impact de l’explosion. Tout est allé trop vite. Un instant, nous roulions dans la nuit, Matteo au volant, trois de mes hommes en renfort. L’instant d’après, une gerbe de feu, la détonation, le crissement des pneus déchirant l’asphalte. Une embuscade. Millimétrée. Ils attendaient.Mon souffle est court. Mes doigts tremblants glissent sur le cuir de ma veste, poisseux de sang. Je sens le liquide chaud couler lentement le long de mon bras, s’infiltrer sous le tissu. Je serre les dents. Pas maintenant. Pas ici.Ma
Alba Bien sûr. Monsieur est trop fier pour avouer qu’il souffre. Je récupère une pince, approche la plaie. Il serre les dents quand je touche la peau, mais ne bouge pas. Lentement, méthodiquement, je sonde la blessure. La balle est profonde. Mon regard remonte vers son visage. Son front est perlé de sueur, mais il ne détourne pas les yeux.— Tu peux encore faire marche arrière, Moretti.— Et me traîner jusqu’à un hôpital pour qu’on me finisse ? Non merci.Je soupire et pince les lèvres. Il ne me facilitera pas la tâche.D’un geste précis, je fais glisser la pince et accroche le projectile. Gabriel se tend, ses muscles se contractent sous ma main. Il respire lentement, profondément, contrôlant la douleur. Je tire. Un frisson le parcourt, un son rauque s’échappe de sa gorge, mais il ne crie pas.La balle tombe dans le plateau en métal dans un tintement sourd.Je prends des compresses, nettoie le sang. Mon esprit me hurle de ne pas m’attarder sur sa peau brûlante sous mes doigts. Ce n’e
Alba RicciJe referme la porte derrière lui.Mes doigts restent crispés sur la poignée, les jointures blanchies par la tension. Je ferme les yeux un instant, inspire profondément. L’air de mon appartement est chargé d’un mélange de désinfectant et de sang séché. L’odeur s’accroche à ma peau, à mes vêtements, à mes pensées.Gabriel Moretti.Il est venu ici, blessé, vulnérable, et pourtant, il a réussi à prendre le contrôle. Toujours lui. Toujours ce fichu pouvoir qu’il exerce sans même essayer.Je relâche lentement la poignée et me détourne. Mon appartement est minuscule, un refuge sans luxe, sans attache. Juste un lit, une table d’examen, une étagère surchargée de fournitures médicales volées ou achetées sur le marché noir. Ce n’est pas une maison. Ce n’est qu’un abri.Mais ce soir, il est devenu quelque chose d’autre. Un champ de bataille invisible, où les mots ont tranché plus profondément que n’importe quelle lame.Je m’approche du lavabo, tourne le robinet et laisse l’eau couler s
Alba RicciJe me dirige vers la porte, enfile ma veste en cuir et récupère mon arme sous l’oreiller. Un simple Glock, léger, fiable. Je ne sors jamais sans.Les rues sont désertes à cette heure. Juste quelques âmes errantes, des ombres silencieuses qui ne cherchent pas d’ennuis.Je marche sans destination.Jusqu’à ce que je sente un frisson dans mon dos.Un instinct, une alerte viscérale. Quelqu’un me suit.Je ralentis légèrement, tendant l’oreille.Les pas sont feutrés, discrets, mais je les entends.Je m’engage dans une ruelle plus sombre, resserre ma prise sur mon arme.Puis je me retourne d’un coup, le canon pointé droit sur l’inconnu.L’homme s’arrête net. Un sourire narquois se dessine sur son visage.— Toujours aussi réactive, Ricci.Je reconnais immédiatement la voix.Mon sang se glace.— Toi.L’homme fait un pas en avant, son sourire s’élargit.— Ça faisait longtemps.Son ombre s’étire sous les réverbères.Je ne m’attendais pas à le revoir.Pas si tôt.Et surtout pas ici.La
Alba RicciIl esquisse un sourire.— Je n’ai jamais dit que je voulais ton obéissance, Alba.Il se lève lentement, son regard sombre rivé au mien.— Je veux ta coopération.Un ricanement m’échappe.— C’est la même chose.Il secoue la tête.— Non.Il s’approche, réduit la distance entre nous.— L’obéissance, c’est suivre sans réfléchir. Toi, tu es trop fière pour ça. Trop têtue.Sa main frôle mon bras, un contact presque imperceptible, mais suffisant pour envoyer une onde électrique dans mon corps.— Mais la coopération… Il se penche légèrement, son souffle effleurant ma peau. C’est choisir de rester, de marcher à mes côtés.Un frisson me parcourt, et je me hais pour ça.Je me hais de sentir cette attraction me tirer vers lui, comme une force gravitationnelle que je ne peux ignorer.Je me recule brusquement, brisant le contact.— Si tu crois que je vais travailler pour toi, tu es encore plus fou que je ne le pensais.Il ne se fâche pas. Il ne s’énerve jamais.Il analyse. Il attend.— T
Alba RicciJe déteste cette sensation.L’impression d’être acculée, enfermée dans une cage dont je ne vois pas encore les barreaux, mais dont je devine la forme.Gabriel Moretti se tient devant moi, imposant, imperturbable. Son regard brûle d’une intensité qui me cloue sur place, comme s’il avait déjà scellé mon sort avant même que je n’ouvre la bouche.— Pourquoi Carlo Ricci te cherche ?Son ton est calme, presque indifférent. Mais je ne suis pas idiote. Derrière cette façade impassible, il analyse chaque battement de mes cils, chaque tressaillement de mes doigts.Je croise les bras, me forçant à soutenir son regard.— Ça ne te regarde pas.Un silence. Puis un rictus étire ses lèvres.— Mauvaise réponse.Il fait un pas vers moi. Instinctivement, je recule d’un cran, mais je me heurte à la table derrière moi. Erreur. Son sourire s’élargit, comme un prédateur sentant la panique de sa proie.— Tu es dans ma ville, Alba.Sa voix est basse, menaçante.— Et tu es sous mon toit.Il pose une
Alba RicciJe me dirige vers la porte, enfile ma veste en cuir et récupère mon arme sous l’oreiller. Un simple Glock, léger, fiable. Je ne sors jamais sans.Les rues sont désertes à cette heure. Juste quelques âmes errantes, des ombres silencieuses qui ne cherchent pas d’ennuis.Je marche sans destination.Jusqu’à ce que je sente un frisson dans mon dos.Un instinct, une alerte viscérale. Quelqu’un me suit.Je ralentis légèrement, tendant l’oreille.Les pas sont feutrés, discrets, mais je les entends.Je m’engage dans une ruelle plus sombre, resserre ma prise sur mon arme.Puis je me retourne d’un coup, le canon pointé droit sur l’inconnu.L’homme s’arrête net. Un sourire narquois se dessine sur son visage.— Toujours aussi réactive, Ricci.Je reconnais immédiatement la voix.Mon sang se glace.— Toi.L’homme fait un pas en avant, son sourire s’élargit.— Ça faisait longtemps.Son ombre s’étire sous les réverbères.Je ne m’attendais pas à le revoir.Pas si tôt.Et surtout pas ici.La
Alba RicciJe referme la porte derrière lui.Mes doigts restent crispés sur la poignée, les jointures blanchies par la tension. Je ferme les yeux un instant, inspire profondément. L’air de mon appartement est chargé d’un mélange de désinfectant et de sang séché. L’odeur s’accroche à ma peau, à mes vêtements, à mes pensées.Gabriel Moretti.Il est venu ici, blessé, vulnérable, et pourtant, il a réussi à prendre le contrôle. Toujours lui. Toujours ce fichu pouvoir qu’il exerce sans même essayer.Je relâche lentement la poignée et me détourne. Mon appartement est minuscule, un refuge sans luxe, sans attache. Juste un lit, une table d’examen, une étagère surchargée de fournitures médicales volées ou achetées sur le marché noir. Ce n’est pas une maison. Ce n’est qu’un abri.Mais ce soir, il est devenu quelque chose d’autre. Un champ de bataille invisible, où les mots ont tranché plus profondément que n’importe quelle lame.Je m’approche du lavabo, tourne le robinet et laisse l’eau couler s
Alba Bien sûr. Monsieur est trop fier pour avouer qu’il souffre. Je récupère une pince, approche la plaie. Il serre les dents quand je touche la peau, mais ne bouge pas. Lentement, méthodiquement, je sonde la blessure. La balle est profonde. Mon regard remonte vers son visage. Son front est perlé de sueur, mais il ne détourne pas les yeux.— Tu peux encore faire marche arrière, Moretti.— Et me traîner jusqu’à un hôpital pour qu’on me finisse ? Non merci.Je soupire et pince les lèvres. Il ne me facilitera pas la tâche.D’un geste précis, je fais glisser la pince et accroche le projectile. Gabriel se tend, ses muscles se contractent sous ma main. Il respire lentement, profondément, contrôlant la douleur. Je tire. Un frisson le parcourt, un son rauque s’échappe de sa gorge, mais il ne crie pas.La balle tombe dans le plateau en métal dans un tintement sourd.Je prends des compresses, nettoie le sang. Mon esprit me hurle de ne pas m’attarder sur sa peau brûlante sous mes doigts. Ce n’e
Gabriel MorettiLe cuir brûlé, l’odeur du sang, la fumée noire qui s’élève dans la nuit.J’ai mal. Une douleur sourde me vrille l’épaule, chaude et poisseuse. Je n’ai pas besoin de baisser les yeux pour savoir : la balle est entrée. Trop propre pour être un simple règlement de comptes, trop précis pour être un avertissement. On voulait me tuer.Je plaque une main contre la blessure et me redresse contre la carcasse éventrée de ma voiture. Le métal est encore tiède, déformé par l’impact de l’explosion. Tout est allé trop vite. Un instant, nous roulions dans la nuit, Matteo au volant, trois de mes hommes en renfort. L’instant d’après, une gerbe de feu, la détonation, le crissement des pneus déchirant l’asphalte. Une embuscade. Millimétrée. Ils attendaient.Mon souffle est court. Mes doigts tremblants glissent sur le cuir de ma veste, poisseux de sang. Je sens le liquide chaud couler lentement le long de mon bras, s’infiltrer sous le tissu. Je serre les dents. Pas maintenant. Pas ici.Ma