lundi 15 octobre 2108Les premières lueurs du jour caressent doucement mon visage. Je m’étire avec paresse dans les draps de soie qui glissent sous ma peau. La soirée a été délicieuse, la nuit torride. Mon corps se rappelle encore des violents assauts de mon amant, de ses mains explorant la moindre parcelle de mon anatomie, de sa bouche me dévorant avec une ardeur non retenue.Un soupir d’extase s’échappe entre mes lèvres et je me tourne vers celui qui partage mes nuits depuis peu. Jusqu’à présent, il me présentait son dos, mais mon agitation l’a sorti de son sommeil. Lentement, il se redresse sur un coude et m’attrape par la taille pour me faire rouler sur son torse à la puissante musculature. Je souris et dépose mes lèvres sur les siennes.Nos regards se croisent et mes yeux se plantent dans les siens. Pâles. Brillants de mille éclats. Mon sourire se fige. Mon cœur s’arrête de battre une fraction de seconde. Puis, comme si je venais de me prendre u
«—Tu vas t’arrêter sur chaque cadavre que tu croises?—Ferme-la, Éric. Sans ça tu pourrais pas débiter tes conneries à longueur de journée. Alors laisse-moi gérer, tu veux?—C’est toi qui vois. Tamo va encore pousser une gueulante, c’est tout.—Eh ben il gueulera s’il veut. J’en ai rien à foutre.Une main me palpe l’abdomen et je pousse un grognement qui n’a rien d’humain.— Merde, elle est vivante!—Ouais, alors viens m’aider.L’homme qui s’appelle Éric, semble se rapprocher et à deux ils me basculent sur le côté. Je cligne des yeux, mais je n’arrive pas à distinguer clairement leurs visages. Une main me tapote doucement la joue. Je crois que c’est celle de la femme.—Hé, toi, comment tu t’appelles?Ma voix gargouille quelque chose d’inaudible. La femme insiste, mais je n’ai pas la force de réitérer mon exploit. Mes paupières se referment.—&
mercredi 17 octobre 2108Je commence déjà à ressentir les premiers effets d’une fatigue extrême. Ma première nuit de liberté, je l’ai passée à explorer les appartements et bâtiments alentour à la recherche de ces fichus badges que tout le monde porte. J’ai dû prendre des risques inconsidérés en m’introduisant chez un couple d’une quarantaine d’années pour fouiner dans leurs placards. Et c’est dans leurs tables de chevet que j’ai trouvé les précieux accessoires.Au moment de refermer le tiroir du côté de la femme, cette dernière s’est retournée dans son sommeil, a marmonné quelque chose en rapport avec un drapeau, puis s’est mise à ronfler bruyamment. Très sexy. J’espère que je ne suis pas comme ça quand je dors.Je me ressaisis en secouant la tête. Qu’est-ce qui me prend de penser à ce genre de chose maintenant?Après avoir glissé mon précieux butin dans la poche de mon manteau, j’ai ensuite filé dans leur cuisine pour fouiller le frigo.
samedi 20 octobre 2108Ça fait déjà trois jours que nous avons quitté la forêt de Saint-Germain-en-Laye. Car c’est bien là que Cha et Éric nous ont laissés et non au sud de Paris comme je l’espérais. Enfin. C’est mieux que rien. Au moins nous avons réussi à franchir les deux couronnes sans trop d’encombres.Le premier jour, nous avons marché dix heures. Dix putains d’heures, entrecoupées de longues pauses pour faire manger Willy et le changer. Dan a fait preuve de beaucoup de ténacité. Depuis que je le connais, il ne s’est pas plaint une seule fois. Il a avancé comme un automate, jusqu’à ce que ses jambes ne puissent plus le porter et qu’il s’écroule au sol. Je me suis alors injecté ma deuxième demi-dose d’Énergisium et j’ai repris notre route, chargée d’une quarantaine de kilos supplémentaires. Mes pieds nous ont portés aussi loin que je le pouvais et quand mon corps a décidé à son tour qu’il était temps de se mettre en veille, Énergisium ou non dans le sa
mardi 23 octobre 2108Je marche mécaniquement. Mes jambes me portent encore. Je ne sais plus par quel miracle. L’Énergisium. Ah oui.J’ai les bras raides, le dos endolori, la tête sur le point d’exploser. Ma main gauche passe sur mon visage fatigué, creusé. Je sens les cernes sous mes yeux qui deviennent chaque jour plus profonds, plus noirs. Les os de mes pommettes saillent. De mon nez coule une substance visqueuse. Je retire ma main et regarde mes doigts; ils sont couverts de sang. Encore. J’ai pris ma dernière demi-dose ce matin. La dernière. Je vais crever.Mes doigts se resserrent sur les poignets du vélo que je pousse à mes côtés. Dan a maigri. Sa pâleur morbide me fait peur. Et Willy… la fièvre ne le quitte plus. Il n’a rien mangé hier. Ni aujourd’hui. À peine une gorgée de lait qu’il a aussitôt vomi. Nous allons crever.Pourtant je continue d’avancer. Un pied devant l’autre. Encore. Une poussée pour faire rouler la roue dégonflée
lundi 29 octobre 2108Le cocon qui m’enveloppe se distord légèrement. Elle est là. Sa main trouve la mienne, la presse. Mon regard quitte la brume blanche pour se poser sur ses doigts délicats. Sa peau douce me rassure. Ses effluves fleuris m’entêtent. Je lui rends une petite pression pour lui signifier que j’apprécie sa présence.—Tu sais que je n’aime pas que tu passes trop de temps ici.Sa voix est douce comme une caresse. Un vent qui ne m’atteint pas balaye ses cheveux sur ses épaules. Elle s’accroupit à mes côtés, le visage toujours tourné vers l’horizon invisible. Je me tourne dans la même direction. Une sensation de bien-être m’envahit.—Qui es-tu?Sa deuxième main vient entourer la mienne.—Je crois que tu l’as toujours su, je me trompe?Je penche la tête sur le côté. Oui, au fond de moi, j’ai toujours su qui elle est et pourquoi elle vient à moi quand j’en ai besoin.—Je
jeudi 1 novembre 2108Mon pouce appuie une nouvelle fois sur le bouton. Mon rythme cardiaque s’accélère, tout comme mes foulées s’allongent. De la sueur me coule sur le front, le long des tempes, entre les omoplates. Je sens que j’atteins bientôt mes limites, mais je continue. Encore un peu. Pour me prouver que je suis capable de faire autre chose que rester allongée à longueur de journée dans ce foutu lit d’hôpital.Tout à coup, une grosse main se pose sur mon épaule et une deuxième stoppe la machine sur laquelle je cours depuis une bonne demi-heure. Surprise, je dérape sur le tapis de course et me rattrape tant bien que mal aux barres de fer, ce qui finit par arracher les écouteurs qui diffusaient de la musique à un volume sonore élevé dans mes oreilles.Le juron que je m’apprêtais à lâcher n’a pas le temps de sortir de ma gorge, qu’un colosse en uniforme de la Résistance m’attrape par un bras pour me relever et m’envoyer valser contre le mur le pl
dimanche 4 novembre 2108J’essuie le bord de mon bol, bien décidée à ne pas gaspiller cette merveilleuse compote de pomme chimique qui a su ravir mes papilles. Bon, d’accord, ça ne vaut pas un vrai fruit, mais on s’approche de plus en plus de quelque chose qui a du goût. Enfin! Pendant des mois, mes menus se sont composés uniquement de gelées, de soupes ou de pâtes dures infâmes, ultra enrichies en compléments alimentaires. Alors mon estomac est content de pouvoir ingurgiter autre chose, d’autant plus si ça a du goût, chimique ou pas.Avec un brin de nostalgie, je repense à mes envies furieuses de glace au schtroumpf au début de ma captivité. Je m’étais toujours dit que les envies de femmes enceintes faisaient partie de ces légendes urbaines qui persistent à travers le temps. Eh bien non. J’avais tout le temps envie de manger une glace au schtroumpf, c’était une véritable obsession. Obsession qui a disparu aussitôt après l’opération.D’y repens