J'avais une dizaine d'années la première fois que j'avais rencontré le Prince Blanc. Il était le même qu'aujourd'hui. Paré de blanc, dentelles à ses manches, et longs cheveux roux. Oui, exactement le même. Ces mêmes yeux troublants, d'un rouge profond, posés sur moi.
"Toi, tu n'es pas ordinaire." avait-il déclaré lorsqu'il était allé se servir sur le buffet vers lequel je me cachais.
Le buffet était majestueux, royal, et préparé spécialement pour sa venue. La venue du fils de l'Alpha Abraham II. Je savais qu'un traité était en jeu pour nous aider à prendre un avantage dans cette guerre. C'était là toutes les victuailles d'une année pour cent des nôtres. Je n'avais jamais vu autant de nourriture, de richesse que ce jour-là. Je fis une mou
Ulrys était en grande conversation au téléphone avec le Bêta Ralph, n'ayant pas l'intention de l'interrompre, je retournai silencieusement dans la chambre. J'étais convaincue que cette vie, les dîners et tout, n'était pas pour moi. J'étais faite pour les champs de bataille pas pour les négociations.La chambre était impeccablement rangée, pas comme le matin-même où Mary avait étalé partout ses œuvres vestimentaires. Sans ménagement, je jetai mes escarpins au loin afin de me masser les pieds, j'enlevai aussi quelques épingles de ma tête afin de libérer mes cheveux, puis je vins m'allonger sur le lit, le regard tourné vers le plafond. J'avais ce sentiment de creux, de vide qui ne pouvait être comblé par la présence de mon compagnon. Avec un sourire, j'accueillis Ulrys qui entrait dans la chambre. Il ne m'avait pas rejoin
Le liquide chaud, presque brûlant, coulait à travers ma gueule pour se déverser sur ma poitrine, poisseux, puant. Le goût du sang me rendait nauséeuse. C'était presque insoutenable de sentir les pulsations du cœur de ma victime s'éteindre sous mes crocs. C'était pourtant mon quotidien depuis près de six ans. Je ne connaissais mon loup que sous sa forme de guerrier. Et il me semblait que ma forme humaine n'était que secondaire depuis tout ce temps.Je relâchai ma victime, la laissant tomber mollement sur le sol, tandis que je m'extirpais à temps d'une attaque ennemie. Des griffes frôlèrent ma fourrure, arrachant ici et là quelques uns de mes poils gris. Je l'évitai, mon corps lupin se mouvant sans même que je n'eusse à y penser. Il s'agissait d'un instinct animal précieux. Un loup guerrier imposant, au pelage ondoyant d'or, attaqua mon ennemi au flanc, le déchirant avec ses crocs acérés. Son dernier souffle se perdit au milieu des gémissements et grognements environnant. Les yeux verts
Les prunelles d'ambre d'un loup noir majestueux me fixaient avec une once d'incompréhension. Son pelage foncé tendu par des muscles façonnés, sa stature imposante, sa puissance, tout indiquait qu'il s'agissait d'un alpha. L'alpha de la meute ennemie.C'était une évidence à présent. Cette sensation était celle d'un lien d'âmes. Ce loup magnifique était mon compagnon, mon âme sœur.Je me sentais trahie par les Dieux. Qu'avaient-ils fait en nous liant ainsi ? Encore combien de temps allaient-ils jouer avec moi ?Aussi soudainement qu'ils avaient disparu, tous les sons environnant réapparurent. Si bien que je trébuchai sur mes propres pattes, manquant de m'étaler au sol. Alors que je me rattrapais, un jeune loup me défia, ses crocs me manquant de peu lors de ma maladresse. Me dressant contre lui, je pus voir que ce jeune loup au pelage sombre et aux reflets chocolat, était à peine sorti de l'adolescence. Je n'aimais pas tuer, et encore moins un si jeune garçon.Nous nous jetâmes l'un sur
Quand mes lourdes paupières s'ouvrirent de nouveau, je ne reconnu pas l'endroit où je m'éveillais. Il faisait sombre et le temps que ma vision s'adapte à mon nouvel environnement, je ne pus rien discerner de plus que l'obscurité. J'inspirais profondément, cherchant à renifler la présence d'ennemis aux alentours. Il n'y avait personne. Pourtant, mon ouïe m'indiquait que c'était faux. Au loin, au-delà des murs qui semblaient m'entourer, il y avait au moins quatre personnes qui échangeaient quelques paroles indistinctes.Mes yeux s'étant habitués à la lumière, je remarquais que j'étais allongée sur un simple matelas, à même le sol. Une sorte de long tee-shirt blanc unisexe attendait plié près de ma couche. Apparemment, quelqu'un s'attendait à me voir sous forme humaine. Un grognement s'échappa de ma gorge, écho à mon mécontentement. Cela faisait si longtemps que je n'avais pas repris ma forme d'origine que je me sentais vulnérable d'être contrainte à le faire. La seule chose qui me pouss
La louve en moi était plus excitée que jamais. Elle voulait bondir joyeusement sur son compagnon, l'enlacer, l'embrasser, le... Je me forçai à abandonner ces idées loufoques, tandis que les trois vieillards sortaient sans un mot de plus de la pièce lugubre.Le bel homme prit place sur une chaise qui attendait dans un des quatre coins de la pièce. Il s'assit juste face à moi et resta silencieux. Nous nous murâmes dans le silence le plus complet, figés tels des statues de pierre. Nous nous contemplâmes minutieusement l'un l'autre.Même sans le lien d'âmes, je savais qu'il était magnifique. Il aurait pu faire la couverture de n'importe quel magazine. Il avait un carrure parfaitement taillée, des épaules droites et un maintient exemplaire. Son visage avait des traits fins comme ceux de certains mannequins, des pommettes discrètes et une ligne de mâchoire qui menait à un menton étroit et imberbe. Sans parler de ses yeux étranges et envoûtants.J'eus souda
Ulrys, fils de l'Alpha Kain qui était sans aucun doute l'un des trois Alphas les plus puissants au monde. et sans doute celui qui avait l'avantage dans cette guerre interminable.La Guerre des Cent Meutes avait commencé des dizaines et des dizaines d'années avant ma naissance et son origine aujourd'hui était plus qu'incertaine. Il relevait d'avantage de récits légendaires que de faits réels. Nous nous racontions tantôt que les clans s'étaient battus pour avoir les faveurs d'un alpha puissant, tantôt que ce même alpha avait levé les clans les uns contre les autres afin de détenir seul le pouvoir. Qu'importait puisqu'au final, le résultat était le même. Aujourd'hui, les cent meutes qui avaient autrefois existé, avait été réduites au nombre de quinze ces dix dernières années. Tout cela par la faute de trois alphas ambitieux : Abraham, Syrius et Kain. Abraham était discret depuis quelques années et tentait d'extirper son épingle du jeu en signant des traités provisoires ici et là. Nous n'
Maggie, une louve maigrichonne comme moi, et Glenn, à l'endurance infinie, réussirent aussi à échapper astucieusement à leurs poursuivants. Cela me rassura assez pour que je quitte les liens mentaux que j'avais avec ma meute. Avec Ryan pour la guider, je n'avais plus aucune crainte. J'ouvris de nouveau les yeux dans ma cage de verre et poussai malgré moi un soupir. Je ne voyais pas d'issu immédiate à ma captivité. Mes hommes ne pouvaient pas venir dans la gueule du loup pour me sauver, il faudrait que je parvienne à sortir d'ici par mes propres moyens. Je n'avais pas de solution actuellement. Mais j'étais prête à affronter toutes les épreuves possible afin de mener mes hommes à une vie paisible. Une vie à laquelle j'aspirais également. Mais à cet instant, j'étais plus proche de me faire torturer et tuer, que de couler une vie heureuse dans la paix et la joie. Je tentai de dormir, afin de récupérer quelques forces, mais ne parvins pas à trouver le sommeil. Mon âme appelait cet autre
Pour la première fois de ma vie, je me sentis entière. Mon âme était satisfaite, pleine comme elle ne l'avait jamais été. C'était une sensation unique. Dans notre étreinte, le corps d'Ulrys était brûlant contre le mien. Son souffle chaud contre mon cou faisait naître des frissons de désir sur tout mon corps. Il était sur moi, son poids me maîtrisant totalement, ses jambes entremêlées aux miennes. Malgré mes bras autour de son cou, j'étais entièrement à sa merci. Il pouvait me tuer à tout moment. Mais, je m'en fichais royalement. C'était la meilleure sensation que je n'avais jamais connu. Ma louve se réjouissait d'être enfin avec son partenaire et de voir approcher l'heure de notre union. Ne faire qu'un semblait plus que l'enjouer. Si plus qu'un loup, j'avais été un chat, je me serais mise à ronronner de plaisir. Il redressa la tête, faisant glisser mes bras le long de ses épaules. Son regard si particulier me sondait. L'ambre semblait entrer en fusion dans ses yeux, mélangée à ses é
Ulrys était en grande conversation au téléphone avec le Bêta Ralph, n'ayant pas l'intention de l'interrompre, je retournai silencieusement dans la chambre. J'étais convaincue que cette vie, les dîners et tout, n'était pas pour moi. J'étais faite pour les champs de bataille pas pour les négociations.La chambre était impeccablement rangée, pas comme le matin-même où Mary avait étalé partout ses œuvres vestimentaires. Sans ménagement, je jetai mes escarpins au loin afin de me masser les pieds, j'enlevai aussi quelques épingles de ma tête afin de libérer mes cheveux, puis je vins m'allonger sur le lit, le regard tourné vers le plafond. J'avais ce sentiment de creux, de vide qui ne pouvait être comblé par la présence de mon compagnon. Avec un sourire, j'accueillis Ulrys qui entrait dans la chambre. Il ne m'avait pas rejoin
J'avais une dizaine d'années la première fois que j'avais rencontré le Prince Blanc. Il était le même qu'aujourd'hui. Paré de blanc, dentelles à ses manches, et longs cheveux roux. Oui, exactement le même. Ces mêmes yeux troublants, d'un rouge profond, posés sur moi."Toi, tu n'es pas ordinaire." avait-il déclaré lorsqu'il était allé se servir sur le buffet vers lequel je me cachais.Le buffet était majestueux, royal, et préparé spécialement pour sa venue. La venue du fils de l'Alpha Abraham II. Je savais qu'un traité était en jeu pour nous aider à prendre un avantage dans cette guerre. C'était là toutes les victuailles d'une année pour cent des nôtres. Je n'avais jamais vu autant de nourriture, de richesse que ce jour-là. Je fis une mou
Je n'avais pas pensé à Owen depuis longtemps, ni à son visage suppliant. Ni à Ryan hurlant de détresse de ne pas avoir été là pour nous protéger. Toutes ses images, j'aurais aimé les oublier définitivement. Je les repoussai néanmoins, m'obligeant à me concentrer sur l'instant présent, car il était bien trop important pour que je sois déconnectée de cette réalité. Le Prince Blanc était sur le point de débarquer. Ulrys était à mes côtés, une main dans la mienne. Il semblait un poil tendu, comme si tout cela l'agaçait. Mais ses doigts entrelacés aux miens étaient d'une douceur incomparable. Je n'avais qu'une envie, s'était d'être enlacée en sécurité dans ses bras chauds. J'étais heureuse de porter la belle robe de Mary et qu'elle ait offert de dompter ma tignasse en un joli chignon comme elle savait les faire, cela m'avait offert le plaisir de voir un regard brillant de désir de la part d'Ulrys.Pour la vingtième fois au moins, Ralph annonça que le Prince Blanc allait arriver, qu'il ne
J'étais si près du but. J'étais désormais parmi les plus proches combattants de Syrius. J'avais fait de nombreux choix sans doute discutables tout au long de ces années d'horreurs pour parvenir à mon rang actuel. Mais tout semblait figé depuis ma rencontre avec Urlys. Je ne pouvais pas me dérober à l'impératif du lien et peut-être devais-je accepter qu'il s'agissait du chemin à emprunter pour me mener à mon destin.Toute la surface de la chambre était occupée par des dizaines et des dizaines de robes en tout genre. Pas un seul uniforme noir à l'horizon, mais des froufrous, de la tulle et de la dentelle, si. Mary, la vieille styliste, farfouillait dans son bazar habituel tout en m'enjoignant d'en revêtir une. Chose que je me refusais de faire. "Dépêche-toi un peu, t'as pas toute la journée !" râla la petite femme dans sa tenue couleur pêche.Je poussai un grognement de protestation, elle se retourna vivement en me fusillant du regard. Il était toujours hors de question de que mette ce
Ryan ne m'embêta plus autant par la suite. D'ailleurs, je finis même par gagner sa confiance, voire même son respect. Cela ne se fit pas en un jour, mais plutôt en plusieurs semaines, voire en plusieurs mois. La faible petite oméga que j'étais à ses yeux, relevait tous les défis imbéciles qu'il me lançait. Le dépasser à la course ? Le mettre à terre lors d'un combat d’entraînement ? Grimper sur le mur d'escalade plus haut que lui ? Je tentais à chaque fois ma chance. Parfois je réussissais, parfois je me ridiculisais. Il arrivait même que nous finissions par courir des heures après le coucher du soleil pour tenter de gagner une course improvisée l'un contre l'autre. C'était grâce à lui si j'évoluai aussi bien malgré mes faibles capacités.Durant toute cette
Propre, mes cheveux et mes dents brossés, je retournai dans la chambre vêtue d'un peignoir confortable. Je ne savais combien de temps cela m'avait pris mais assez pour qu'Ulrys s'endorme profondément. Même lorsque je revins m'installer auprès de lui, il ne broncha pas d'un millimètre. Ce n'était pas dans mes habitudes de m'allonger près d'une personne que je ne connaissais pas, néanmoins, j'avais confiance en lui. Je rabattis les couvertures sur Ulrys en premier, tentant de les soustraire à son poids, puis sur moi-même alors que je prenais une place confortable. Instinctivement, je me plaçai au plus proche d'Ulrys, me logeant contre lui. En levant les yeux vers lui, je pouvais voir son visage et je fus étonnée par ce que j'y voyais. Il avait des traits juvéniles et détendus. On aurait dit un tout jeune homme, dénué des soucis ou des obligations liés &agra
Couper aussi brusquement le lien entre Ryan et moi me déclencha une brusque migraine. Autant que le regard blessé d'Ulrys. Il était assis sur le rebord de mon lit, les poings serrés et tremblants. ça ne faisait aucun doute qu'il était aussi en colère que troublé. "Alors... Tu leur as dit." déclara-t-il d'une voix morne.Je mis quelques secondes avant de rassembler mes pensées, entre les nouvelles informations communiquées par Ryan et mes propres sentiments troublés par la présence de mon compagnon."Non." répondis-je calmement en me redressant dans le lit.Plus rapidement que je ne pus réellement le voir. Ulrys se retrouva sur moi, me maintenant fermement sur le dos."Ne me mens pas." souffla-t-il, son visage transfiguré par la douleur que cette idée ouvrait en lui. Cela me désarçonna. J'avais envie de prendre son visage dans mes mains, de le caresser, de le soulager de toutes ses peines. Un instinct que je n'avais jamais eu. Alors, d'une voix rassurante, je lui expliquai :"Je n'ai
Je n'avais jamais fuit une bataille, c'était une chose dont je pouvais être fière. Malheureusement, je ne pouvais pas en dire de même pour les petites tailleuses au chignon volumineux. Son ensemble élégant mauve et ses énormes lunettes me sortaient par les yeux. Ulrys ne revenant pas, je prétextai une envie urgente pour m'extraire de ses doigts tordus. Évidemment, elle était loin d'être dupe."Eh bien... C'est capable de tuer et d'éviscérer des loups, mais pas d'enfiler une robe ?"J'ignorai la remarque, préférant faire comme si je n'avais rien entendu, et poursuivis mon chemin à travers les couloirs à la moquette bleue. Ce n'était pas un château, même pas un gros manoir, à vrai dire. Ce n'était certes pas une maison ordinaire, mais de ce que j'avais pu voir, ce n'était pas si immense. Au rez-de-chaussé
À mon grand désespoir, Ulrys m'abandonna aux mains expertes et ridées de la vieille styliste. J'aurais aimé protester. Pas seulement pour le fait de me laisser seule, mais pour tout ce qui était en train de se passer. Je n'avais pas porté autre chose que ma fourrure ou mon uniforme noir depuis mon treizième anniversaire... Et je n'étais pas vraiment sûre de vouloir que cela change. C'était... Trop rapide ? Trop étrange ? De plus, dès qu'il se détacha de moi, le manque se fit sentir, alors même qu'il devait être dans une pièce adjacente. Était-ce à cela que se résumerait ma vie désormais ? À rester agripper à l'Alpha Ulrys chaque jour où le soleil se lève ? Que devais-je faire pour mener à bien ma quête principale ? Comment sauver mes hommes du péril de la guerre ? Ou ma propre sœur ? Et une autre question encore plus urgente me torturait : que devais-je faire de l'information du Prince Blanc venant faire une visite diplomatique à la Meute Obscure ? Devais-je garder cela sous silence a