Le mois d'août, après avoir offert ses nombreux rayons de soleil, prenait congé. La lumière du jour se cachait derrière les nuages qui trônaient fièrement sur la capitale. Judith, fidèle à ses habitudes les observait de la fenêtre de sa chambre, cachée derrière les rideaux rouges. Imperturbables, ils dessinaient des personnages à l'âme souriante. Judith se sentait protégée des regards inquisiteurs de la rue. Elle n'ouvrait la fenêtre qu'à moitié. Coincée dans l'embrasure, elle respirait l'air frais que le vent laissait échapper. Le mois de septembre, celui de sa naissance, s'ouvrait timidement. Elle se mit à rêver, les yeux grands ouverts sur la beauté que le paysage offrait.
Son portable sonna et vint perturber sa tranquillité. Éric ! C'est lui !
Une fine lueur d'espoir put se lire sur son visage. Mais, rapidement, un regard à ce numéro étranger à son répertoire eut raison de son sourire.
À l'autre bout du fil, une voix féminine claironnait.
— Allô ?
— Judith à l'appareil, j'écoute. Vous êtes ?
— Bonjour, je suis Pénélope et je...
— Je veux vous rencontrer. Je suis journaliste et souhaite écrire un papier sur vous. J'adore votre dernier tube !
— Mon seul et unique tube, vous voulez dire, fit Pénélope en riant. Il faut dire que d'habitude on me fait plutôt jouer les mannequins dans les clips au lieu de me laisser le micro. Il faut croire que ma voix irrite certains, déclara-t-elle avec sincérité.
— Que diriez-vous de nous rencontrer là, maintenant, tout de suite ? proposa Judith, impatiente de mettre un visage sur cette voix.
***
Judith commanda un café à La pantoufle de verre, regarda tous ces gens autour d'elle qui s'inventaient une vie, quand, elle entendit claquer une paire de talons sur le trottoir d'en face. Son attention fut aussitôt attirée par cette jeune femme qui savait attraper les regards avec son mètre 78 de charme et ses cheveux ondulés qui dansaient dans son dos. Une femme qui ne doit pas connaître la souffrance sentimentale, marmonna Judith. Elle voulait avoir ce regard plein d'assurance qui n'offre aucune place au doute, et cette taille aussi fine qu'après deux semaines de jeûne.
Gênée d'abriter de telles pensées, elle baissa la tête et avala une gorgée de café avant de croquer dans un carré de chocolat. Un anti malheur naturel, se disait-elle avant de voir la silhouette s'approcher d'elle.
— Judith ?
— Comment connaissez-vous mon prénom ?
— C'est moi, Pénélope. Je peux m'asseoir ? demanda-t-elle.
Judith avait mené de nombreuses interviews malgré sa timide carrière de journaliste. Elle avait inlassablement écouté des peintres lui parler de leur muse au cœur insaisissable, essuyé les larmes d'écrivains à la solitude subie, mais jamais elle n'avait eu de chanteuse à sa table. Elle ignorait tout de ce monde qu'elle imaginait impénétrable. Les bouquets de fleurs qui vous attendent dans la loge, les lettres d'anonymes qui vous jurent un amour éternel, les fans qui vous attendent en bas de votre hôtel dans l'espoir d'un regard. Elle admirait le courage de ces artistes osant coucher leurs maux sur une partition.
— Qu'est-ce qui vous a inspiré oublie-moi ?
— Oh, une de ces célèbres ruptures qui vous laissent de méchantes cicatrices irrécupérables en chirurgie esthétique.
— Je vois très bien. Je sors d'une histoire malheureuse. On m'a injustement sortie du beau décor que nous étions en train de dessiner, enfin..., dit-elle avant de regarder Pénélope, comme dans l'attente d'un soutien féminin.
— Je suis célibataire aussi, confia-t-elle. À vrai dire, je ne m'en plains pas, c'est d'ailleurs ce qui me donne de l'inspiration. Les ruptures, les blessures me font avancer, j'ai besoin d'elles pour créer. Je veux qu'elles restent dans mon quotidien, qu'elles m'aident à composer pour mieux séduire mon public. Chaque matin, je me lève et me dis que si mon cœur était à quelqu'un, je ne serais pas aussi écorchée que je le suis derrière le micro. Vous voyez ?
Judith voyait très bien. Elle ne put qu'acquiescer avec la surprise de quelqu'un qui vient de remporter le jackpot sans même avoir le ticket gagnant. Pénélope présentait les qualités idéales de l'amie créée sur mesure.
— Les blessures de la vie ont leur rôle. Il faut les accepter et aller de l'avant. C'est ce que je fais dans mes chansons et...
Judith n'écoutait plus. Aller de l'avant. Cette perspective l'enchantait. Elle se demandait comment parvenir à la sérénité. Elle regarda Pénélope et, séduite par son idée du bonheur, comprit qu'il fallait abandonner tout souhait de renouer avec Éric. D'un geste décidé, elle attrapa son portable et effaça les dix chiffres qui menaient à sa voix. Plus d'Éric. Plus jamais. Les portes de mon cœur lui étaient désormais fermées. À ces paroles, Pénélope et Judith comprirent, qu'à l'aide de leurs déboires avec la gent masculine, elles signaient le début de leur amitié.
Le patron de La pantoufle de verre, un homme d'une soixantaine d'années, les cheveux grisonnants et l'estomac visiblement bien rempli, les observait, amusé, et leur dit que pour aujourd'hui, exceptionnellement, c'était la maison qui offrait.
Un jour d'hiver, L'automne avait filé à la vitesse d'une voiture de course, emportant avec lui les dernières feuilles des arbres. La ville accueillait à présent, non sans réticence, le grand froid hivernal. Les passants, comme pris au dépourvu, avaient regagné la chaleur de leurs manteaux. Les décorations dans les rues annonçant l'arrivée des fêtes de fin d'année rendaient Judith aussi mélancolique qu'envieuse. Elle pensait à toutes ces familles nombreuses qui se partageaient la saveur d'un chapon. Elle s'imaginait les coupes de Champagne échangées au coin du feu entre amis. Les photos prises pour immortaliser c
Quatre mois plus tardMamie Jocelyne était partie, mais sa demeure retrouvait son souffle de vie. Judith, sirotant une limonade sur le canapé du salon, attendait avec impatience Lara, Garance et Pénélope. Au premier regard, les trois jeunes femmes avaient été conquises par le charme des lieux.La sonnette du portail de la Casa Bella fit bondir Judith du sofa. Elle traversa à grandes enjambées l'allée en gravillon blanc pour accueillir ses amies.—&n
Les portes de la Casa Bella s'ouvrent à notre nouvelle colocataire. La Casa Bella, c'est 245 mètres carrés de beauté en plein Vincennes, une grande véranda s'ouvrant sur un jardin avec cabane, un facteur sympa qui oublie de vous livrer vos factures, quatre amies qui, insatisfaites de leur vie tentent de s'en inventer une autre. Vous avez moins de 30 ans? Vous êtes positive et savez tenir une maison?
— Allô? Fit Pénélope d'une voix chantante.— Oui, bonjour. Voilà, j'ai trouvé votre annonce et je voudrais visiter la Casa Bella, annonça une jeune voix.— Votre prénom?— Annabelle, vingt-sept ans.— Vous &e
Le soleil venait de quitter le ciel après plusieurs semaines de chaleur écrasante. Adoptant une certaine modération, il ne se jetait plus sur la ville de manière aussi déterminée. Une farandole de nuages s'était regroupée et dessinait à présent des visages joyeux au-dessus des arbres qui balayaient l’horizon d'un simple frémissement de branches. Un léger vent tant attendu encourageait les familles à profiter de l’air frais que cette matinée était en mesure d'offrir. Bien loin des préoccupations de la rentrée et des cartables à alourdir de nouveaux manuels scolaires, les enfants jouaient au ballon dans le parc. Leurs parents, remplis d'insouciance, ne les surveillaient que d'un œil distrait. Égarés dans leurs pensées
Judith, à demi consciente, observait les blouses blanches se bousculer dans les services du centre hospitalier. Une odeur de détresse valsait dans la salle d'attente. Elle put apercevoir des femmes au bord de la crise de nerfs s'arracher les cheveux. D'autres se tapaient la tête contre les murs comme si elles cherchaient à être en rythme avec un rappeur invisible. Une jeune fille, Kleenex à la main, racontait sa vie à une vieille dame qui nourrissait ses oreilles des confidences malheureuses. Une histoire de cœur, très certainement, pensa Judith. Un autre type empestant l'alcool et le tabac froid souffrait de terribles céphalées. Égarée au milieu de tous ces êtres en souffrance, Judith se demandait quel beau docteur allait venir la sortir de cet état léthargique dans lequel el
Judith, encore un peu nauséeuse par le breuvage ingurgité jugea, finalement, que l'eau de Cologne était bien meilleure sur soi que dans un verre d'eau. Elle s'en voulait d'avoir gaspillé cet effluve ainsi, et surtout pour un chagrin d'amour. Elle devait renouer avec son odeur pour définitivement en oublier son goût. Son regard s'était d'abord posé sur un Chanel, par réminiscence. Elle ouvrit le flacon et, aussitôt, un parfum enivrant se répandit sous ses narines amusées. Elle savoura l'instant, s'observa dans la glace et se trouva presque séduisante. Un homme à la calvitie très engagée lui tapa sur l'épaule, mais Judith, apeurée, sursauta et le flacon lui échappa des mains. Sans se
Quelques mèches éparpillées sur le sol plus tard, Judith se sentait allégée. Les cheveux lui arrivant aux épaules, elle se trouvait rayonnante et tournait dans le salon tel un mannequin devant un parterre de photographes de mode.— Alors?— J'adore, tout simplement, dit-elle en laissant un copieux pourboire. Vous êtes une artiste, vous avez de l'or dans les doigts, vous...— N'exagérez rien, j’avais juste un très bon mod&egr
— Allô? Fit Pénélope d'une voix chantante.— Oui, bonjour. Voilà, j'ai trouvé votre annonce et je voudrais visiter la Casa Bella, annonça une jeune voix.— Votre prénom?— Annabelle, vingt-sept ans.— Vous &e
Les portes de la Casa Bella s'ouvrent à notre nouvelle colocataire. La Casa Bella, c'est 245 mètres carrés de beauté en plein Vincennes, une grande véranda s'ouvrant sur un jardin avec cabane, un facteur sympa qui oublie de vous livrer vos factures, quatre amies qui, insatisfaites de leur vie tentent de s'en inventer une autre. Vous avez moins de 30 ans? Vous êtes positive et savez tenir une maison?
Quatre mois plus tardMamie Jocelyne était partie, mais sa demeure retrouvait son souffle de vie. Judith, sirotant une limonade sur le canapé du salon, attendait avec impatience Lara, Garance et Pénélope. Au premier regard, les trois jeunes femmes avaient été conquises par le charme des lieux.La sonnette du portail de la Casa Bella fit bondir Judith du sofa. Elle traversa à grandes enjambées l'allée en gravillon blanc pour accueillir ses amies.—&n
Un jour d'hiver, L'automne avait filé à la vitesse d'une voiture de course, emportant avec lui les dernières feuilles des arbres. La ville accueillait à présent, non sans réticence, le grand froid hivernal. Les passants, comme pris au dépourvu, avaient regagné la chaleur de leurs manteaux. Les décorations dans les rues annonçant l'arrivée des fêtes de fin d'année rendaient Judith aussi mélancolique qu'envieuse. Elle pensait à toutes ces familles nombreuses qui se partageaient la saveur d'un chapon. Elle s'imaginait les coupes de Champagne échangées au coin du feu entre amis. Les photos prises pour immortaliser c
Le mois d'août, après avoir offert ses nombreux rayons de soleil, prenait congé. La lumière du jour se cachait derrière les nuages qui trônaient fièrement sur la capitale. Judith, fidèle à ses habitudes les observait de la fenêtre de sa chambre, cachée derrière les rideaux rouges. Imperturbables, ils dessinaient des personnages à l'âme souriante. Judith se sentait protégée des regards inquisiteurs de la rue. Elle n'ouvrait la fenêtre qu'à moitié. Coincée dans l'embrasure, elle respirait l'air frais que le vent laissait échapper. Le mois de septembre, celui de sa naissance, s'ouvrait timidement. Elle se mit à rêver, les yeux grands ouverts sur la beauté que le paysage offrait.
Quelques mèches éparpillées sur le sol plus tard, Judith se sentait allégée. Les cheveux lui arrivant aux épaules, elle se trouvait rayonnante et tournait dans le salon tel un mannequin devant un parterre de photographes de mode.— Alors?— J'adore, tout simplement, dit-elle en laissant un copieux pourboire. Vous êtes une artiste, vous avez de l'or dans les doigts, vous...— N'exagérez rien, j’avais juste un très bon mod&egr
Judith, encore un peu nauséeuse par le breuvage ingurgité jugea, finalement, que l'eau de Cologne était bien meilleure sur soi que dans un verre d'eau. Elle s'en voulait d'avoir gaspillé cet effluve ainsi, et surtout pour un chagrin d'amour. Elle devait renouer avec son odeur pour définitivement en oublier son goût. Son regard s'était d'abord posé sur un Chanel, par réminiscence. Elle ouvrit le flacon et, aussitôt, un parfum enivrant se répandit sous ses narines amusées. Elle savoura l'instant, s'observa dans la glace et se trouva presque séduisante. Un homme à la calvitie très engagée lui tapa sur l'épaule, mais Judith, apeurée, sursauta et le flacon lui échappa des mains. Sans se
Judith, à demi consciente, observait les blouses blanches se bousculer dans les services du centre hospitalier. Une odeur de détresse valsait dans la salle d'attente. Elle put apercevoir des femmes au bord de la crise de nerfs s'arracher les cheveux. D'autres se tapaient la tête contre les murs comme si elles cherchaient à être en rythme avec un rappeur invisible. Une jeune fille, Kleenex à la main, racontait sa vie à une vieille dame qui nourrissait ses oreilles des confidences malheureuses. Une histoire de cœur, très certainement, pensa Judith. Un autre type empestant l'alcool et le tabac froid souffrait de terribles céphalées. Égarée au milieu de tous ces êtres en souffrance, Judith se demandait quel beau docteur allait venir la sortir de cet état léthargique dans lequel el
Le soleil venait de quitter le ciel après plusieurs semaines de chaleur écrasante. Adoptant une certaine modération, il ne se jetait plus sur la ville de manière aussi déterminée. Une farandole de nuages s'était regroupée et dessinait à présent des visages joyeux au-dessus des arbres qui balayaient l’horizon d'un simple frémissement de branches. Un léger vent tant attendu encourageait les familles à profiter de l’air frais que cette matinée était en mesure d'offrir. Bien loin des préoccupations de la rentrée et des cartables à alourdir de nouveaux manuels scolaires, les enfants jouaient au ballon dans le parc. Leurs parents, remplis d'insouciance, ne les surveillaient que d'un œil distrait. Égarés dans leurs pensées