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Chapitre 06

Je me sentais comme plongée dans une glacière.

Tout mon sang dans mes veines semblait s'être figé.

Pendant un instant, j'ai même douté d'avoir bien entendu.

Il m'était déjà arrivé de me poser des questions sur leur relation, de soupçonner que quelque chose clochait, mais chaque fois, j'avais fini par me convaincre du contraire.

Bien qu'il n'y ait aucun lien de sang entre eux, ils étaient tous les deux des enfants de la famille des Baudets : le fils et la fille. Aux yeux du monde, ils étaient frère et sœur.

De plus, chacun d'eux était marié.

Cédric Baudet, fils chéri du Ciel, ne pouvait pas se livrer à une chose aussi absurde.

Mais là, à quelques mètres de moi, je voyais Cédric, les yeux injectés de sang, pousser Clémence Baudet contre le mur, et sa voix acérée et moqueuse résonnait clairement.

« Divorcer pour moi ? C'est toi qui as choisi d'épouser un autre. Avec quel droit me demandes-tu cela maintenant ? ! »

« Je... »

Les questions incessantes laissaient Clémence sans voix. Les larmes dévalaient ses joues comme les perles d'un collier brisé, et ses mains agrippaient désespérément les vêtements de Cédric.

« C'est ma faute, Cédric. Pardonne-moi juste une fois, je t'en prie. Je n'avais pas d'autre choix à l'époque... »

«Tu sais, je suis déjà marié. »

« Et alors ? Tu peux divorcer, n'est-ce pas ? »

Clémence était obstinée, son visage empreint de tristesse. À voir son expression, on aurait dit que si Cédric disait non, elle allait s'effondrer.

J'étais surprise qu'elle puisse poser une telle question de manière si directe.

Elle n'avait aucun scrupule, aucune honte de s'être un tiers.

Cédric semblait trouver cela risible, son rire était teinté d'une colère féroce : « Pour toi, le mariage est un enfantillage, mais pas pour moi ! »

Sur ces mots, il a levé les pas pour partir.

Pourtant, Clémence tenait fermement le coin de ses vêtements, refusant obstinément de lâcher prise.

En fait, je connaissais la force de Cédric. S'il le voulait, il aurait pu se débarrasser d'elle.

Je restais figée et observait cette scène pour longtemps, en espérant quelque chose.

Espérant qu'il la repousse.

Espérant qu'il dessine la ligne.

Comme ça, il restait encore un espoir pour notre mariage.

Et c'était exactement ce qu'il a fait.

Il a laissé tomber une phrase : « Nous sommes tous adultes, alors arrête de dire des bêtises. »

À ce stade, la situation semblait sur le point de se calmer.

J’ai poussé un soupir de soulagement.

Et je n'avais plus envie de continuer à espionner.

« Tu l'aimes ? Cédric, regarde-moi dans les yeux. Dis-moi la vérité, l'aimes-tu ? ! »

Clémence a agrippé son bras comme un enfant de trois ans qui voulait des bonbons et ne lâchait pas prise tant qu'il n'a pas obtenu ce qu'il voulait.

Je me suis arrêtée brusquement, mon cœur à nouveau suspendu dans les airs.

Avant que je puisse me retourner, j'ai entendu la voix avec les émotions indéchiffrables de Cédric : « Cela ne te concerne pas. »

« Alors, tu ne m'aimes plus ? Cela, ça me concerne, non ? » demandait Clémence.

Pendant un moment, j'admirais le courage de Clémence de poser ces questions incessantes.

Ce n'était que plus tard que j'ai compris que ce n'était pas du courage, mais de l'assurance.

Ce qui lui donnait cette assurance, c'était le favoritisme.

C'étai quelque chose que je n'avais jamais eu.

La grande silhouette de Cédric s'est figée soudainement, son visage couvert d'un voile de froideur.

Il n'a pas répondu, et Clémence ne le laissait pas partir.

Ils ressemblaient exactement à un couple d'un mélodrame.

Chaque seconde de son silence me rendait étouffée, au point d'oublier de respirer.

« Madame, j'ai trouvé un manteau que vous avez porté au printemps de cette année. Enfilez-le vite, pour ne pas attraper froid. »

La domestique, portant un manteau, s'approchait en élevant la voix à distance.

Non loin de là, Cédric a levé les yeux pour regarder dans notre direction.

Instinctivement, je ressentais la gêne d'avoir découvert un secret, mais aussitôt, j’ai refoulé ce sentiment.

Celui qui devrait donner une explication, c'était lui.

Il a repoussé Clémence et a fait quelques grands pas vers moi. Sa voix a complètement changé de ton glaciel et devenait douce mais désinvolte.

« Tu as tout entendu ? »

« Oui. »

Je ne le cachais pas non plus.

Il n'a rien dit de plus, a pris le manteau des mains de la domestique et le posait sur mes épaules. Il m'entourait les épaules de son bras avec une aisance naturelle et nous nous dirigions vers l'intérieur : « Il fait froid, rentrons. »

Comme si ce que j'avais entendu n'était qu'une conversation des plus ordinaires.

« Cédric. »

La voix obstinée de Clémence retentait encore et encore, « Cédric ! »

Il a fait semblant de ne rien entendre.

Pendant le reste du temps, il semblait quelque peu distrait et regardait fréquemment son téléphone portable.

Enfin, à neuf heures du soir, l'heure habituelle du coucher de papi Baudet, est arrivé.

« Tu es maintenant un adulte avec des responsabilités et un homme de famille, fais les choses avec discernement ! »

Papi Baudet nous a accompagnés jusqu'à la cour, un air sévère sur le visage, et a averti Cédric : « Traite bien Loé, ne pense pas que tu peux la maltraiter parce qu'elle n'a pas de famille pour la soutenir ! »

Mes yeux se sont mouillés involontairement.

Cédric a souri doucement en hochant la tête : « Oui, je ne la maltraiterai pas, et je ne laisserai personne d'autre la maltraiter non plus. Ne vous inquiétez pas, papi. »

« Ma petite, si tu as un problème, viens chercher papi. Je te soutiendra. »

Papi Baudet m'a tapotée la tête avec bienveillance.

J'ai souri, « D'accord, je viendrai vous voir dès que j'aurai du temps. Allez vous reposer bien. »

Sur le chemin du retour, je me suis assise sur le siège passager, somnolente.

Je ne savais pas si c'était dû à la grossesse ou à autre chose, mais ces derniers temps, je ne pouvais m'empêcher de dormir beaucoup.

Cependant, à ce moment précis, je n'arrivais pas à dormir du tout. Mon corps était fatigué, mais mon esprit était incroyablement lucide.

Je comptais attendre d'être rentrés pour qu'il me donne une explication.

Mais c'était trop insupportable.

Je ne pouvais plus attendre et, encore assez rationnelle, je lui demandais : « Toi et Clémence, quelle est exactement votre relation ? »

Était-ce un amour de jeunesse ordinaire ?

Ou était-elle toujours l'élue de son cœur ?

À ces mots, Cédric a ralenti la voiture et parlait avec une sérénité apparente : « Elle et moi, nous avons failli être ensemble avant. »

Je ressentais un blocage dans ma gorge, comme si une éponge imbibée d'eau y était coincée, et il me fallait un moment avant de pouvoir émettre un son.

« C'était pendant tes années universitaires ? »

Des fragments de souvenirs enfouis ont resurgi.

Pour tout dire, Cédric était mon aîné à l'université, une figure de proue sur le campus.

Il avait un visage favorisé par les dieux, était l'héritier du Groupe des Baudet, doté de compétences exceptionnelles et d'une élégance froide.

Aucune fille ne l'appréciait pas.

Son sac à dos était rempli de lettres d'amour glissées par des filles.

Cependant, avant même que je ne puisse lui avouer mes sentiments, j'avais entendu dire qu'il aimait déjà quelqu'un.

Maintenant, je savais que c'était Clémence.

« Comment tu le sais ? »

Cédric me regardait avec étonnement.

Je tournais la tête vers lui, ma voix pleine de difficultés et de lourdeur : « Cédric, tu as l'oublié. Moi aussi, j'étais à l'Université de Ville J. »

« Oh, oui. »

Il a repris son air impassible habituel : « Désolé, ça remonte à si longtemps. »

Était-ce vraiment parce que le temps avait passé ou parce qu'il s'en fichait et n'y prêtait pas attention ?

Je voulais dire quelque chose lorsque son portable a commencé à vibrer.

Sans même jeter un coup d'œil, il a rejeté l'appel.

Et de nouveau, le portable a sonné.

Encore et encore.

Comme si tant qu'il ne répondait pas, cela continuerait jusqu'à la fin du monde.

Cédric a rejeté l'appel une fois de plus, le visage sombre, apparemment agacé. Il a tenté de s'expliquer : « Elle a été gâtée par tante Morel et mon père. »

J'ai souri et j’ai pris son portable. J'effectuais une série de manœuvres pour bloquer et supprimer le contact, avant de le lui rendre.

« Maintenant, c'est tranquille. »

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