Naïa
La sueur coule le long de ma nuque, mes muscles tremblent, mais je refuse de flancher. Le regard de Raven est fixé sur moi, calculateur, impitoyable. La dague dans ma main pèse plus lourd que jamais. L’adrénaline pulse dans mes veines, mais cette fois, je ne laisse pas la peur me dominer.
Il attaque.
Son mouvement est fluide, une ombre qui fend l’air. Je pare tant bien que mal, mon corps réagissant avant mon esprit. Le choc des lames résonne dans la nuit, chaque coup une épreuve, une danse mortelle entre nous.
— Mieux, gronde-t-il, mais pas assez.
Il se fond dans les ténèbres, et soudain, je ne le vois plus. Mon souffle s’accélère. Je ferme les yeux.
Écoute.
Le moindre bruissement, le déplacement de l’air…
Il est là.
Je me tourne et frappe.
Sa lame s’arrête juste avant ma gorge.
Raven
Je devrais être en colère. Exiger plus d’elle. Mais un éclat de fierté naît au fond de moi.
Elle apprend vite.
Je recule d’un pas, abaissant ma dague.
— C’est fini pour ce soir.
Naïa titube légèrement, épuisée, mais dans ses yeux, une étincelle brille. Elle n’est plus la jeune femme apeurée qui fuyait il y a quelques jours.
Elle change.
— Demain, on reprend à l’aube, dis-je en lui tendant une gourde.
Elle la prend sans un mot, ses doigts effleurant les miens. Un frisson me traverse, fugace, presque imperceptible.
Presque.
Elle détourne les yeux, mais je vois la rougeur sur ses joues.
Nous sommes en train de franchir une limite.
Je devrais m’arrêter.
Mais je n’en ai pas envie.
Naïa
La fatigue pèse sur moi, mais ce n’est pas elle qui accélère les battements de mon cœur. C’est lui.
Sa présence, son regard, son souffle si proche.
Je devrais me détourner, ignorer ce trouble. Me concentrer sur ce qui compte.
Survivre.
Mais alors qu’il s’éloigne dans l’obscurité, je sais une chose avec certitude :
Il n’est pas seulement mon mentor.
Il est mon plus grand danger.
Raven
L’aube n’a pas encore percé l’horizon que Naïa est déjà en position. Je la regarde, ses épaules tendues, sa respiration mesurée. Quelque chose a changé en elle.
Elle n’est plus seulement une survivante.
Elle devient une guerrière.
— Attaque-moi, ordonné-je.
Elle ne réfléchit pas. Son corps réagit instantanément, et cette fois, je dois esquiver pour éviter la lame qui file droit vers ma gorge. Son regard est dur, concentré. Elle a soif d’apprendre.
Mais elle ne sait pas encore ce que signifie tuer.
Je pare son assaut et la désarme d’un mouvement vif. Sa dague vole à quelques mètres. Elle recule, le souffle court, mais son regard ne vacille pas.
— Encore, dit-elle.
Je hoche la tête.
Le combat reprend, plus intense. Je ne la ménage plus. Chaque coup qu’elle porte est plus rapide, plus précis. Elle anticipe, esquive, riposte. Une nouvelle Naïa est en train de naître sous mes yeux, et cette pensée me trouble.
Naïa
Mon corps est en feu. Mes muscles hurlent, mais je refuse d’abandonner. Chaque échange me rapproche de ce que je dois devenir : forte, implacable.
Mais Raven est un mur. Solide, indéfectible.
Je dois le briser.
Je change de tactique. J’attaque bas, puis remonte brusquement. Il bloque, mais cette fois, c’est plus difficile pour lui. Je le vois dans l’infime tension de ses épaules.
Un éclat de satisfaction pulse en moi.
Puis, soudain, tout bascule.
Il feinte, esquive mon attaque et me plaque au sol en une fraction de seconde. Son poids m’immobilise, sa main fermement serrée sur mon poignet.
Le silence s’étire entre nous.
Sa respiration se mêle à la mienne. Son regard est plus sombre que jamais.
Un frisson me traverse. Pas de peur. Pas cette fois.
— Tu as progressé, murmure-t-il, sa voix rauque.
Mes lèvres s’entrouvrent, mais aucun son n’en sort. Car à cet instant, nous ne sommes plus seulement maître et élève.
Nous sommes deux âmes sur le fil du rasoir, prêtes à basculer dans l’abîme.
Et je ne sais pas si je veux être sauvée.
Naïa
Les jours passent, marqués par la douleur et le fer. Chaque matin, je me réveille avec des muscles en feu, des ecchymoses noircissant ma peau, mais je me relève. Toujours.
Raven ne me ménage pas. Ses coups sont plus rapides, ses parades plus dures. Pourtant, je sens la différence. Mon corps réagit avant que mon esprit n’analyse le danger. Mes mouvements sont plus fluides, mes réflexes affûtés.
Mais une autre douleur s’installe, plus insidieuse. Celle qui brûle sous la peau quand il me frôle, quand son regard s’attarde une seconde de trop.
— Encore, dis-je en haletant après avoir évité un de ses coups.
Il hoche la tête, son regard sombre s’accroche au mien.
Raven
Elle apprend vite. Trop vite.
Chaque jour, elle me surprend, s’adapte à mes techniques, les retourne contre moi. La flamme en elle ne cesse de croître. Et cela m’effraie plus que je ne l’admets.
Parce que je la vois changer.
Parce qu’un jour, elle sera mon égale.
Et ce jour-là, devrai-je la tuer ?
Je chasse cette pensée et attaque. Ma lame siffle dans l’air, mais elle esquive avec une précision déconcertante. Je frappe à nouveau, et elle bloque, ses yeux brillant d’une lueur que je reconnais.
Le goût du combat.
Elle riposte, et pour la première fois, je ressens l’impact. Une onde de choc parcourt mon bras.
Un sourire étire ses lèvres.
— Tu commences enfin à frapper, murmuré-je.
Mais elle ne répond pas. Elle se jette sur moi, sans réfléchir, sans retenue.
Son corps heurte le mien. Nous roulons au sol, sa dague frôlant ma gorge.
Elle tremble. Son souffle court effleure ma peau.
Je pourrais la désarmer. Je le devrais.
Mais je reste là, figé, enchaîné par une force plus puissante que le combat.
Elle relâche sa prise. Se redresse.
— À demain, lâche-t-elle en me jetant un d
ernier regard avant de disparaître dans l’obscurité.
Et moi, je reste là, incapable de bouger. Car à cet instant, je sais.
Elle est devenue ma plus grande faiblesse.
RavenJe devrais dormir. Mon corps le réclame, mais mon esprit refuse de s’éteindre. L’image de Naïa, son regard ardent, sa force brute, hante mes pensées. Chaque jour, elle se rapproche de ce qu’elle doit devenir, de ce que j’ai voulu façonner.Mais il y a quelque chose que je n’ai pas prévu.Moi.Ma propre faiblesse face à elle.Je sors de la tente, l’air nocturne glacial contre ma peau brûlante. Mon regard se pose sur la silhouette assise près du feu. Naïa. Elle est éveillée, ses doigts effleurant le manche de sa dague, perdue dans ses pensées.Je m’approche sans bruit. Mais elle le sent.— Tu ne dors pas, murmuré-je.Elle lève les yeux vers moi, l’ombre des flammes dansant sur son visage.— Toi non plus.NaïaSon regard est différent ce soir. Plus lourd. Plus indéchiffrable.Je devrais détourner les yeux, me lever et partir. Mais je ne bouge pas.— À quoi tu penses ? demande-t-il après un silence.Je serre la dague dans ma main, hésite un instant avant de répondre.— À ce qui nous
RavenLe silence entre nous est un poison lent, un venin qui s’infiltre sous ma peau, brûlant chaque parcelle de ma raison.Naïa ne recule pas. Pas cette fois. Son regard, brillant d’un feu indomptable, s’ancre au mien comme une lame enfoncée trop profondément pour être retirée sans douleur.Je devrais parler, rompre ce lien invisible, cette force qui nous enchaîne l’un à l’autre. Mais mes lèvres restent scellées, et le battement sourd de mon cœur cogne contre ma cage thoracique comme un avertissement inutile.Elle inspire lentement.— Dis-moi la vérité, murmure-t-elle.Sa voix est un fil tendu au bord du vide.Je pourrais mentir. Éviter l’inévitable. Mais il n’y a plus d’issue.— Tu sais déjà, Naïa.Son souffle se bloque une fraction de seconde. Ses doigts se crispent autour de la dague qu’elle ne lève pourtant pas contre moi.— Alors dis-le, Raven.NaïaIl est trop proche.Ses yeux sont des tempêtes, son corps une menace que je ressens jusque dans mes os.Je devrais bouger, rompre c
RavenLe silence après son départ est pire que l’orage qui éclate dehors. La pluie martèle le sol, l’écho sourd d’une réalité que je refuse d’affronter. Naïa est partie. Et cette fois, je sens que ce n’est pas un simple éloignement temporaire. Elle fuit quelque chose d’encore plus profond que nous, une vérité qu’elle n’est pas prête à accepter.Je serre les poings, cherchant un moyen d’apaiser le chaos en moi. Mais tout ce que je touche me rappelle sa présence—l’odeur de son parfum qui imprègne encore l’air, la chaleur fantôme de son corps contre le mien.Je passe une main tremblante sur mon visage, luttant contre l’envie absurde d’aller la chercher. Je sais que ce serait vain. Je ne peux pas la forcer à rester, pas quand elle se bat contre elle-même autant qu’elle se bat contre moi.Mais l’idée de la perdre me ronge.NaïaLes gouttes de pluie glaciales s’écrasent sur ma peau alors que je marche d’un pas rapide dans la nuit. Chaque pas m’éloigne de lui, et pourtant je n’arrive pas à r
NaïaSa main est brûlante contre la mienne, et pourtant, un frisson glacé me parcourt. Chaque battement de mon cœur résonne à mes oreilles, s’accordant au tambourinement de la pluie qui continue de s’abattre sur nous. Raven ne dit rien. Il se contente de me regarder, son regard cherchant à percer la tempête en moi.— Viens, murmure-t-il.Ce n’est pas un ordre. Ce n’est même pas une supplication. C’est une vérité simple, inévitable.Je pourrais partir. Tourner le dos et disparaître dans la nuit. Mais à quoi bon ? Si j’ai fait tout ce chemin jusqu’à lui, ce n’est pas pour reculer maintenant.Alors je serre un peu plus fort sa main. Il m’entraîne à travers les ruelles sombres, son pas rapide, déterminé. Nous ne courons pas, mais il y a dans notre avancée quelque chose d’urgent, d’essentiel.RavenLa porte claque derrière nous.L’appartement est plongé dans l’obscurité, seulement troublée par les éclairs qui zèbrent le ciel au-dehors. Naïa est trempée, les mèches de ses cheveux ruisselant
NaïaLe silence s’étire entre nous, plus pesant que jamais. Mon cœur bat trop fort, trop vite, comme s’il voulait s’échapper de ma poitrine. Je ne devrais pas être là. Je ne devrais pas chercher ce contact, cette chaleur qui me rassure et me consume à la fois.Mais je reste.Raven ne parle pas. Ses doigts glissent lentement sur ma peau, effleurent mon bras, remontent jusqu’à mon épaule. Chaque geste est calculé, précis, comme s’il cherchait à m’ancrer dans l’instant, à empêcher mon esprit de s’éparpiller. Il le sait. Il sait que je suis à deux doigts de fuir.— Tu réfléchis trop, murmure-t-il enfin.Je ferme les yeux. Oui. Toujours trop.Je sens son souffle contre ma tempe, et un frisson me parcourt l’échine. Il ne me force pas. Il attend. Comme toujours.— Dis-moi ce que tu veux, Naïa. Juste une fois.Ma gorge se serre. Les mots restent coincés. Je veux trop de choses. Des choses impossibles.Je pourrais mentir. Lui dire que je ne ressens rien. Que cette nuit n’a rien changé. Mais no
RavenElle est sur le point de fuir. Je le sens dans la tension de ses épaules, dans la façon dont elle évite mon regard. Elle croit encore qu’elle peut m’échapper, que cette nuit ne signifie rien.Je pourrais la laisser partir. Je devrais, même. Mais je suis fatigué de jouer à ce jeu. De la regarder s’éloigner encore et encore.Alors cette fois, je ne recule pas. Je tends la main, attrape son poignet avant qu’elle ne quitte le lit.— Reste.Elle tressaille, comme si ce simple mot la frappait en plein cœur. Son regard vacille, et pendant une seconde, j’y lis une émotion brute, indomptée.Puis, elle secoue la tête.— Je ne peux pas.Je serre les dents.— Ou tu ne veux pas ?Elle ne répond pas. Et c’est là que je comprends. Ce n’est pas une question de vouloir. C’est une question de peur.Et pour la première fois, je me demande si je suis prêt à attendre qu’elle cesse d’avoir peur de moi… ou d’elle-même.Le claquement de la porte résonne dans la pièce vide. Naïa est partie. Encore. La m
NaïaLe silence du musée n’est troublé que par le souffle ténu de la climatisation et le frottement délicat de mon pinceau contre la pierre noire. L’obsidienne repose devant moi, massive et obscure, un éclat de nuit figé dans le verre protecteur. Mes doigts tremblent légèrement lorsque je passe la lumière sur sa surface polie. Quelque chose dans cette pièce me dérange. Ce n’est pas la pierre en elle-même, ni même les gravures effacées qui serpentent le long de ses contours. C’est… autre chose. Une impression viscérale d’être observée.Je m’appelle Naïa Valverde, restauratrice d’œuvres d’art et passionnée d’artefacts anciens. Depuis trois jours, je travaille sur cet étrange bijou – une bague ornée d’une obsidienne d’une noirceur inhabituelle, découverte dans les ruines d’un temple effondré. Les experts n’ont pas su en déterminer l’origine exacte, mais tous s’accordent sur un point : elle ne devrait pas exister. Sa pureté défie la logique géologique. Pourtant, elle est là, posée sous me
RavenLe silence s'étire entre nous, aussi tendu qu'une corde prête à se rompre. Je lis la peur dans ses yeux, mais aussi autre chose. Un trouble plus profond, plus ancien. Elle lutte contre une vérité qu'elle ne veut pas accepter. Je la comprends. Moi aussi, il y a longtemps, j’ai refusé d’y croire.Je garde mes distances. Trop proche, je pourrais déclencher quelque chose d’irréversible. La magie de l’obsidienne ne dort jamais complètement.— Tu as vu quelque chose, n’est-ce pas ?Naïa ne répond pas. Son souffle est court, ses doigts crispés sur le rebord de la table. Son regard oscille entre moi et la bague, comme si elle cherchait un échappatoire.— Ce n’est qu’un rêve… murmure-t-elle, plus pour elle-même que pour moi.— Non.Elle sursaute à la fermeté de ma voix.— Ce sont des souvenirs, Naïa. Des fragments d’un passé que tu as oublié.Elle secoue la tête, recule, trébuche contre une chaise. Son dos heurte la vitrine derrière elle et le verre vibre sous l’impact.— C’est impossibl
RavenElle est sur le point de fuir. Je le sens dans la tension de ses épaules, dans la façon dont elle évite mon regard. Elle croit encore qu’elle peut m’échapper, que cette nuit ne signifie rien.Je pourrais la laisser partir. Je devrais, même. Mais je suis fatigué de jouer à ce jeu. De la regarder s’éloigner encore et encore.Alors cette fois, je ne recule pas. Je tends la main, attrape son poignet avant qu’elle ne quitte le lit.— Reste.Elle tressaille, comme si ce simple mot la frappait en plein cœur. Son regard vacille, et pendant une seconde, j’y lis une émotion brute, indomptée.Puis, elle secoue la tête.— Je ne peux pas.Je serre les dents.— Ou tu ne veux pas ?Elle ne répond pas. Et c’est là que je comprends. Ce n’est pas une question de vouloir. C’est une question de peur.Et pour la première fois, je me demande si je suis prêt à attendre qu’elle cesse d’avoir peur de moi… ou d’elle-même.Le claquement de la porte résonne dans la pièce vide. Naïa est partie. Encore. La m
NaïaLe silence s’étire entre nous, plus pesant que jamais. Mon cœur bat trop fort, trop vite, comme s’il voulait s’échapper de ma poitrine. Je ne devrais pas être là. Je ne devrais pas chercher ce contact, cette chaleur qui me rassure et me consume à la fois.Mais je reste.Raven ne parle pas. Ses doigts glissent lentement sur ma peau, effleurent mon bras, remontent jusqu’à mon épaule. Chaque geste est calculé, précis, comme s’il cherchait à m’ancrer dans l’instant, à empêcher mon esprit de s’éparpiller. Il le sait. Il sait que je suis à deux doigts de fuir.— Tu réfléchis trop, murmure-t-il enfin.Je ferme les yeux. Oui. Toujours trop.Je sens son souffle contre ma tempe, et un frisson me parcourt l’échine. Il ne me force pas. Il attend. Comme toujours.— Dis-moi ce que tu veux, Naïa. Juste une fois.Ma gorge se serre. Les mots restent coincés. Je veux trop de choses. Des choses impossibles.Je pourrais mentir. Lui dire que je ne ressens rien. Que cette nuit n’a rien changé. Mais no
NaïaSa main est brûlante contre la mienne, et pourtant, un frisson glacé me parcourt. Chaque battement de mon cœur résonne à mes oreilles, s’accordant au tambourinement de la pluie qui continue de s’abattre sur nous. Raven ne dit rien. Il se contente de me regarder, son regard cherchant à percer la tempête en moi.— Viens, murmure-t-il.Ce n’est pas un ordre. Ce n’est même pas une supplication. C’est une vérité simple, inévitable.Je pourrais partir. Tourner le dos et disparaître dans la nuit. Mais à quoi bon ? Si j’ai fait tout ce chemin jusqu’à lui, ce n’est pas pour reculer maintenant.Alors je serre un peu plus fort sa main. Il m’entraîne à travers les ruelles sombres, son pas rapide, déterminé. Nous ne courons pas, mais il y a dans notre avancée quelque chose d’urgent, d’essentiel.RavenLa porte claque derrière nous.L’appartement est plongé dans l’obscurité, seulement troublée par les éclairs qui zèbrent le ciel au-dehors. Naïa est trempée, les mèches de ses cheveux ruisselant
RavenLe silence après son départ est pire que l’orage qui éclate dehors. La pluie martèle le sol, l’écho sourd d’une réalité que je refuse d’affronter. Naïa est partie. Et cette fois, je sens que ce n’est pas un simple éloignement temporaire. Elle fuit quelque chose d’encore plus profond que nous, une vérité qu’elle n’est pas prête à accepter.Je serre les poings, cherchant un moyen d’apaiser le chaos en moi. Mais tout ce que je touche me rappelle sa présence—l’odeur de son parfum qui imprègne encore l’air, la chaleur fantôme de son corps contre le mien.Je passe une main tremblante sur mon visage, luttant contre l’envie absurde d’aller la chercher. Je sais que ce serait vain. Je ne peux pas la forcer à rester, pas quand elle se bat contre elle-même autant qu’elle se bat contre moi.Mais l’idée de la perdre me ronge.NaïaLes gouttes de pluie glaciales s’écrasent sur ma peau alors que je marche d’un pas rapide dans la nuit. Chaque pas m’éloigne de lui, et pourtant je n’arrive pas à r
RavenLe silence entre nous est un poison lent, un venin qui s’infiltre sous ma peau, brûlant chaque parcelle de ma raison.Naïa ne recule pas. Pas cette fois. Son regard, brillant d’un feu indomptable, s’ancre au mien comme une lame enfoncée trop profondément pour être retirée sans douleur.Je devrais parler, rompre ce lien invisible, cette force qui nous enchaîne l’un à l’autre. Mais mes lèvres restent scellées, et le battement sourd de mon cœur cogne contre ma cage thoracique comme un avertissement inutile.Elle inspire lentement.— Dis-moi la vérité, murmure-t-elle.Sa voix est un fil tendu au bord du vide.Je pourrais mentir. Éviter l’inévitable. Mais il n’y a plus d’issue.— Tu sais déjà, Naïa.Son souffle se bloque une fraction de seconde. Ses doigts se crispent autour de la dague qu’elle ne lève pourtant pas contre moi.— Alors dis-le, Raven.NaïaIl est trop proche.Ses yeux sont des tempêtes, son corps une menace que je ressens jusque dans mes os.Je devrais bouger, rompre c
RavenJe devrais dormir. Mon corps le réclame, mais mon esprit refuse de s’éteindre. L’image de Naïa, son regard ardent, sa force brute, hante mes pensées. Chaque jour, elle se rapproche de ce qu’elle doit devenir, de ce que j’ai voulu façonner.Mais il y a quelque chose que je n’ai pas prévu.Moi.Ma propre faiblesse face à elle.Je sors de la tente, l’air nocturne glacial contre ma peau brûlante. Mon regard se pose sur la silhouette assise près du feu. Naïa. Elle est éveillée, ses doigts effleurant le manche de sa dague, perdue dans ses pensées.Je m’approche sans bruit. Mais elle le sent.— Tu ne dors pas, murmuré-je.Elle lève les yeux vers moi, l’ombre des flammes dansant sur son visage.— Toi non plus.NaïaSon regard est différent ce soir. Plus lourd. Plus indéchiffrable.Je devrais détourner les yeux, me lever et partir. Mais je ne bouge pas.— À quoi tu penses ? demande-t-il après un silence.Je serre la dague dans ma main, hésite un instant avant de répondre.— À ce qui nous
NaïaLa sueur coule le long de ma nuque, mes muscles tremblent, mais je refuse de flancher. Le regard de Raven est fixé sur moi, calculateur, impitoyable. La dague dans ma main pèse plus lourd que jamais. L’adrénaline pulse dans mes veines, mais cette fois, je ne laisse pas la peur me dominer.Il attaque.Son mouvement est fluide, une ombre qui fend l’air. Je pare tant bien que mal, mon corps réagissant avant mon esprit. Le choc des lames résonne dans la nuit, chaque coup une épreuve, une danse mortelle entre nous.— Mieux, gronde-t-il, mais pas assez.Il se fond dans les ténèbres, et soudain, je ne le vois plus. Mon souffle s’accélère. Je ferme les yeux.Écoute.Le moindre bruissement, le déplacement de l’air…Il est là.Je me tourne et frappe.Sa lame s’arrête juste avant ma gorge.RavenJe devrais être en colère. Exiger plus d’elle. Mais un éclat de fierté naît au fond de moi.Elle apprend vite.Je recule d’un pas, abaissant ma dague.— C’est fini pour ce soir.Naïa titube légèreme
RavenL’obscurité nous pourchasse, une bête affamée qui ne lâche jamais sa proie. Nos pas résonnent sur les pavés mouillés, martèlement frénétique dans une ville qui nous trahit à chaque détour. Je serre la main de Naïa, ses doigts brûlants de cette énergie qu’elle ne comprend pas encore. Chaque respiration est un combat, chaque battement de cœur une prière silencieuse.Une ruelle s’ouvre à notre droite. Je la tire avec moi, nous enfonçant dans l’ombre épaisse. L’odeur de la pluie et de la pierre humide emplit mes narines. Derrière nous, des murmures sifflent, des ombres glissent entre les murs comme des serpents affamés.— Ils sont trop nombreux, souffle-t-elle.Je sais.NaïaMa gorge est sèche, mon corps trop léger, vidé par l’énergie que j’ai invoquée. Mais la peur est un fouet qui me pousse en avant. Raven serre ma main si fort que ses ongles s’enfoncent dans ma peau. Il ne veut pas me perdre. Moi non plus.Un croisement. Une impasse à gauche. Des voix derrière nous, trop proches.
NaïaL’air est épais, saturé d’une énergie invisible qui fait vibrer ma peau. Mes jambes peinent à suivre Raven, mais il ne me lâche pas. Ses doigts sont solides, une ancre dans ce chaos qui menace de nous engloutir.Nous traversons les couloirs du musée comme des ombres fugitives, glissant entre les statues figées qui semblent nous observer. Chaque battement de mon cœur résonne dans mes tempes, un tambour de guerre pressentant l’inévitable.Soudain, un craquement.Raven s’arrête net. Je le percute presque, haletante, avant de voir ce qui l’a figé. Devant nous, l’obscurité prend forme. Une silhouette se détache de la pénombre, ses contours fluctuants, mouvants, comme si elle n’existait qu’à moitié dans notre réalité.Une voix chuchotée s’élève, glaciale :— Vous ne pouvez pas fuir.RavenJe me place devant Naïa, mon bras tendu pour la garder en arrière. La créature est là, un vestige du passé que je connais trop bien. Ils nous ont trouvés bien plus vite que je ne l’avais prévu.— Rest