Plus tôt dans la journée, après l'entretien avec les nouveaux techniciens de surface, Liliane rend son rapport auprès de son supérieur. Ils s'apprêtent à enregistrer définitivement des informations concernant les nouvelles recrues et c'est à ce moment qu'ils détectent une incohérence.
Le fait est qu'en République du Congo, l'usage du mail ne l'a pas encore emporté sur les demandes manuscrites. Ainsi, la majorité des postulants ont préalablement déposé auprès de Liliane leur demande écrite à la main. Et parmi ces derniers, il y a une certaine OBISSI Véronique qui avait aussi soumis au service des RH des documents comme son certificat médical étant donné son âge assez avancé ainsi que deux photos d'identité. « J'ai reçu aujourd'hui une certaine Véronique... Et elle ne ressemblait pas à cette dame. » remarqua Liliane en triant les documents. « Tu as donné le poste à une parfaite inconnue ? » « Elle était avec les autres dans la salle d'attente. Et elle comme vous aviez déjà enregistré leurs dossiers, je me suis contentée de faire l'appel et de finaliser... Je suis confuse. » « Quoi qu'il en soit, ce qui est fait est fait. Demain, je saurai ce que je ferai de son cas. » « Bien, monsieur. » *** ** *21 heures* Alors que Blévie prend sa douche, Véronique sort acheter du papier administratif afin de rédiger une lettre de démission à l'attention de ses employeurs. En effet, bien que sa cousine lui ait expliquée ce que c'est que d'être technicien de surface, elle a choisi de saisir sa chance. « Cet endroit dégage quelque chose de spécial et j'aurais fait n'importe quoi pour y rester de façon permanente, de toute manière. » avait-elle confié à sa cousine. Au bout d'une heure, elle termine son manuscrit et le présente à Blévie qui a l'air sceptique car, plus elle en sait, plus ses doutes s'agrandissent. « Tu as une idée sur la façon dont ton nom s'est retrouvé sur la liste de la dame ? À tous les coups, il s'agissait d'une autre Véronique. » La jeune paysanne ne sait quoi avancer et se laisse submerger par des appréhensions. Sa nuit sera faite de raisonnements. ... Le jour se lève et les filles s'apprêtent pour leur travail respectif. Pour information, Blévie est la fille unique du défunt oncle paternel de Véronique. Les deux cousines ont grandi ensemble comme des sœurs et après le baccalauréat, elles ont été contraintes de se séparer. Blévie est arrivée en ville à l'âge de 20 ans grâce à une bourse d'étude dans une université publique où elle devait faire sa dernière année en Transport et Logistique. Malheureusement après quelques mois d'études seulement, elle a dû abandonner et chercher un emploi. Et Véronique qui avait aussi bénéficié de cette bourse l'année suivante était motivée à l'idée d'obtenir son diplôme dans la capitale. Helas, elle s'est retrouvée dans la même situation que sa cousine. Néanmoins, les deux forment une bonne équipe. Ambitieuses et déterminées, elles ont fait face à beaucoup de situations difficiles et persévèrent pour faire la fierté de leur famille. Leur objectif commun est de sortir de la dépendance vis-à-vis de leurs parents — car ces derniers les soutiennent financièrement lorsque le besoin se fait ressentir —. Les filles se séparent donc à l'arrêt de bus étant donné que leur itinéraire est différent. Véronique se rend à l'ESSET légèrement angoissée. Le hall est vide et peu éclairé. Elle ne sait trop quoi faire et avance en traînant les pas vers l'escalier lorsqu'une personne l'interpelle. « Tu fais partie des nouvelles recrues ? » La jeune femme se retourne et répond par la positive. Ensuite, la dame lui demande de la suivre. En gros, il s'agit de la superviseure du service des techniciens de surface. Véronique est conduite dans une pièce où elle trouve ses nouveaux collègues dont ceux qui avaient passés avec elle l'entretien. La superviseure leur donne des instructions, leur présente les vestiaires respectifs des hommes et des femmes, le placard contenant les matériels de travail ainsi que toutes les informations supplémentaires en rapport avec leurs tâches, le règlement intérieur, etc. C'est un nouveau monde que Véronique découvre et ça tombe bien, puisque qu'elle apprécie la nouveauté. Elle est tellement excitée à l'idée de commencer à faire le ménage — eh oui, à faire le ménage — qu'elle oublie ses peurs antérieures. La journée se passe bien jusqu'au moment où la superviseure se rapproche de la nouvelle recrue pour lui annoncer qu'elle est demandée dans le bureau du DRH. Aventureuse, la vingtenaire prend l'ascenseur. Au septième niveau, l'appareil s'arrête pour accueillir un nouveau passager. Et par coïncidence, les deux se rendent exactement au même endroit. Véronique se précipite vers la porte pour frapper alors que le monsieur l'ouvre directement. « Les gens qui ont l'argent ne respectent vraiment rien. » « Je t'ai entendu, tu sais ? Allez, entre ! » Véronique ne se fait pas prier bien que gênée. L'homme de l'ascenseur ferme la porte après elle et va s'installer sur un canapé. ~ VÉRONIQUE ~ Je me poste en face du bureau et le DRH pose sur moi son regard sans accorder la moindre attention à celui qui a pris place sans permission. Bien, sachant qu'une convocation n'est jamais bon signe — d'après mon expérience —, autant être polie pour calmer les tensions. « Bonjour monsieur. » Il répond à ma salutation avant de m'inviter à prendre place. « C'est donc vous l'intruse. » reprend-il en posant ses mains entrecroisées sur la table. « Je ne comprends pas. » Oui, le mieux c'est de jouer la carte de l'ignorance. Je suis énormément gênée surtout parce qu'il y a une personne en trop dans cette pièce. C'est lui l'intrus ! « Hier madame, vous vous êtes faufilée parmi ceux qui ont postulé pour le travail de technicien de surface... » Ils auraient dit "hommes et femmes de ménage" et ceci ne se serait jamais passé. Mais eux, ils emploient des français compliqués et on est poussé à rêver grand. À aucun moment je pensais quitter mon métier de domestique. Pourtant lorsque l'occasion de travailler dans ce beau bâtiment s'est présentée, je l'ai juste saisi. Même si j'ai découvert bien après que ce serait juste pour nettoyer le sol. En plus, ce n'était pas de ma faute puisque c'est l'assistante qui m'avait appelée par mon prénom et demandé de suivre les autres. Le monsieur raconte entre-temps un long bla bla alors que mes pensées convergent vers ma lettre de démission. Heureusement que je ne l'ai pas déposée ce matin. Si je ne suis pas retenue à l'ESSET, je retournerai auprès de la famille MONKA. Il faut d'ailleurs que j'invente un mensonge pour excuser mon absence. Je n'imagine pas le nombre d'appels en absence dans mon téléphone. « ... Quelles ont été vos intentions à ce moment-là ? » termina-t-il. « Monsieur, je n'avais aucune intention. » Je suis moi-même gênée par ma réponse. C'est à ce moment que j'entends un rire étouffé venant de l'autre homme. Tiens, je l'avais oublié. Avec ses cheveux on dirait un loup-garou ! « Qu'est-ce que vous cherchiez exactement ? » Ainsi, je lui explique comment tout s'est passé. Le monsieur a une expression sérieuse et je suis tout de même heureuse qu'il daigne m'écouter sans m'interrompre. S'il m'arrive un jour l'opportunité de diriger, je serai aussi attentive que lui. « Donc si j'ai bien compris, tu t'appelles Véronique et tu as cru que c'était de toi que Liliane parlait ? » intervient l'homme de l'ascenseur qui vient se placer près du bureau. Son rictus me met hors de moi. Malgré cela, je prends la peine de répondre. Et comme si ce n'est pas tout, il me demande mon nom complet. « SAMBA Chouchou Véronique. » Et il éclate de rire, ce couillon.« Dom, arrête de nous distraire ! S'il te plaît. »« Excusez-moi, monsieur le DRH. » dit sarcastiquement le concerné en quittant le bureau.Le directeur des ressources humaines se reconcentre sur l'affaire de Véronique, y réfléchit longuement, lui pose des questions auxquelles elle répond correctement et prend la décision finale de la retenir jusqu'à l'arrivée de la Véronique qui avait postulée. « Comprenez que c'est pour éviter le surnombre. D'ici d'un mois si elle ne se présente pas, vous serez définitivement engagée. »Cette dernière le remercie pour sa gentillesse puis s'excuse d'avoir causé des soucis dans son service avant de sortir gaiement de la pièce. Alors qu'elle se dirige vers l'ascenseur, elle passe près d'un escalator. Il faut dire que tous les niveaux de cet immeuble en contiennent ! Hésitante et prise de vertige, elle le dévisage longuement puis préfère passer son chemin. Pourtant quelqu'un la retient par le bras.« On a peur des escalators, madame Chouchou ? »En ef
Le jour se lève et les cousines se séparent, prêtes à affronter une journée de plus sous l'écrasante chaleur de la ville de Brazzaville. C'est surtout le cas pour Blévie qui va errer pendant des heures dans les quartiers de la capitale, soumettant par-ci par-là ses documents. Véronique quand à elle, par son nouvel emploi sera bien à l'abri pendant un bon moment avant de retourner à son ancien lieu de travail.*****Les heures passent, il est 10 heures et à l'ESSET, les techniciens de surface en pause vont s'alimenter dans le réfectoire situé au rez-de-chaussée. Pendant le goûter, leur superviseure les rejoint pour leur annoncer que la salle de réunion du 5ème niveau aurait besoin de rangement et d'un coup de serpillière.« J'aimerais que le premier d'entre vous à finir s'y rende pour s'en charger, d'accord ? »« Je peux y aller maintenant ! » s'écrie la benjamine du groupe.Les regards se posent sur Véronique qui a sa maitoujours levée. Vaillante et confiante, elle demande à l'assemb
~ VÉRONIQUE ~Des jours sont passés, des semaines à vrai dire, et me voici en train de toucher mon premier salaire. Enfin ! Je suis devant Madame Liliane qui me tend une enveloppe assez bombée. Ô mon Dieu, combien de billets violets y a-t-il à l'intérieur ?Vous l'aurez compris, la Véronique qui avait postulé pour le travail n'est jamais venue pour la raison de son décès le jour suivant le dépôt de ses dossiers. Paix à son âme ! J'ai donc été retenue à son poste, j'ai aussi eu un badge et mon emploi du temps a été ajusté selon mes aptitudes physiques. Dans l'ensemble, je me plais bien à l'ESSET et la plupart de mes collègues de travail sont très aimables.Il est 14 heures et le temps est beau. Je quitte mon lieu de travail pour rentrer à la maison. Depuis deux semaines, je ne travaille plus chez les MONKA et j'avoue que je m'ennuie beaucoup. Blévie qui s'est récemment trouvée un stage dans une entreprise de logistique et transport ne rentre qu'à 17 heures et la seule chose qui me rend
Au cours de la semaine précédant le jour-j, l'ambiance festive se fait déjà ressentir à l'ESSET. Des groupes se forment peu à peu pour ce qui est du shopping et certains employés mettent en pratique leur talent de vendeur : ce qui est sûr c'est que tous attendent impatiemment la soirée du gala. Tous exceptée Véronique. Peu à l'aise dans les fêtes, la jeune femme reste sur son idée de prétendre d'être malade pour excuser son absence. Ayant finalement oublié son nouvel ami, sa frustration s'est estompée, la laissant profiter de ses journées. Plus que deux jours avant l'évènement. Veronique qui a travaillé de 14 à 22 heures rentre chez elle fatiguée. Aussitôt arrivée, la pauvre se jette sur son lit. Heureusement Blévie par bonne foi lui prépare un sceau pour qu'elle aille se doucher. Bien que ses paupières s'alourdissent de plus en plus avec le temps, Véronique troque ses vêtements contre sa serviette pour aller se rafraichir et faire sa toilette. À son retour, son plat est servi et sa
~ VÉRONIQUE ~Tout le monde se mettra donc à la tâche et j'imagine que chacun va juste gérer son département. En y réfléchissant justement, je pense qu'on sera trop nombreux. Mais je n'ose pas demander comment se fera le travail, car de toute façon il n'y aura pas assez de matériel pour 70 personnes.Pourtant, la superviseure prend à ma grande satisfaction le soin de préciser que les tâches restantes étant encore nombreuses, on se divisera en deux groupes : le premier pour le ménage ainsi que le second pour les courses. Cette dernière équipe est sous-groupée par ceux qui se chargeront des achats pour la restauration et d'autres pour la décoration. Là dessus, elle nous présente une feuille sur laquelle est dessiné un tableau et nous demande de faire correspondre nos noms par rapport au groupe que nous voulons intégrer.Un stylo pour vingt-deux individus, la cause d'un tumulte. Étant donné que la majorité ne souhaite pas faire le ménage, ils sautent sur l'occasion pour vaquer à d'autres
Après avoir fait leurs achats, les jeunes gens reprennent la route pour rejoindre les autres et c'est à ce moment que Dominique demande à son accompagnatrice ce qu'elle porterait le lendemain soir.« À vrai dire, je ne sais pas encore. À la base, je ne voulais même pas y participer. »« Pourquoi ça ? Tu n'aimes pas les fêtes ? »« Disons que je n'aime pas être entourée de plusieurs personnes, surtout si je ne les connais pas. »« Pourquoi avoir changé d'avis ? »« Ma cousine va m'accompagner. Elle est stagiaire chez RENO Transit. »Il hoche la tête en guise de réponse puis se reconcentre sur le chemin. Ils arrivent à l'ESSET et rejoignent les autres dans le jardin. C'est un beau picnic et pendant un instant, on oublie qu'ils n'appartiennent pas tous au même département. Le bonheur se lit dans le visage de tout le monde. Et pendant que certains ne regrettent plus leur choix de groupe, d'autres se disent qu'il vont devoir ranger juste après.Une bonne heure passe et les coursiers rentre
Le soleil se lève, Véronique fait sa petite prière avant d'aller se doucher et faire sa toilette. Blévie de son côté aussi s'éveille mais reste allongée sur son lit ; elle est plutôt rêveuse et ne compte pas se lever de si tôt. La nuit leur ayant porté conseil, les deux cousines pensent que nul est le besoin de rester fâchée l'une contre l'autre. Seulement aucune d'elles n'est prête à faire le premier pas. Ainsi des heures passent et la matinée touche bientôt à sa fin.Il est 11 heures et l'ambiance dans le studio reste toujours aussi froide. Personne ne parle, chacune est dans son coin et attend juste un mot de la part de l'autre. Finalement, Véronique lâche l'affaire. Le mobile de son geste réside dans la conversation qu'elles ont eu il y a deux jours. Elle sait combien sa cousine a besoin de saisir l'occasion de participer à ce gala et surtout que celle-ci ne pourra y aller toute seule. La jeune femme se dit qu'elle ne devrait pas l'empêcher d'y aller à cause d'une divergence d'op
~ BLÉVIE ~ Ayant passé quasiment toute ma vie au village, je me suis promise une fois en ville que je saisirais toutes les opportunités favorables qui pourraient se présenter devant moi pour pouvoir réaliser tous mes rêves. Même si la vie en ville s'est avérée difficile, même si j'ai été tentée de baisser les bras, jamais je n'ai renoncé. C'est surtout grâce à Véro qui, en arrivant à son tour, m'a soutenu et même fini par abandonner ses études — comme moi avant elle — pour subvenir à nos besoins à toutes les deux à l'aide d'un travail. J'ai beaucoup d'estime pour elle et la considère comme ma sœur. J'apprécie le fait qu'elle ait accepté de m'accompagner à cette fête malgré son aversion pour ce genre d'événement. Je peux sentir son stress mais il est pour moi hors de question de me laisser contaminer. Au contraire, j'essaie de la faire rire, de lui raconter des ragots pour qu'elle oublie un peu les gens qui l'entourent. Je croyais qu'en prenant place auprès de ses collègues elle sera
Dominique a du mal à dormir et son agitation réveille Valérie qui est à ses côtés. Celle-ci semble exaspérée mais aussi inquiète. Après une longue journée de travail, elle a besoin de se recharger par un très long sommeil réparateur.« Dis, ça te dérangerais de me laisser dormir tranquillement ? »« Excuse-moi. »Sur-ce, il quitte le lit conjugal.~ DOMINIQUE ~Je vais m'asseoir sur le sofa et au moment où j'attrape la télécommande que je sens Valérie près de moi.« Je ne voulais pas... »« T'inquiète. Allez, va te coucher ! »« Je peux rester là, avec toi ? »« N-non ! J'imagine que tu as beaucoup travaillé. Va dormir, allez ! "« D'accord. »Là-dessus, elle retourne dans le lit. De mon côté, j'allume la télé avant de mettre un animé pioché au hasard. Mon attention est cependant loin de se concentrer sur l'écran. Je me mords la lèvre en repensant pour la énième fois à ce que j'ai failli faire avec Véronique. Je me passe nerveusement les mains sur le visage en réalisant à quel point j
~ VÉRONIQUE ~"Demande-moi de mendier ou d'aller coucher avec lui tant que t'y es !" : c'est exactement ce que je lui avais dit à la maison. Et même en y repensant, ça n'avait pas vraiment de rapport avec le sujet principal.Bref, le temps était passé vite et je ressentais le besoin de rentrer et lui demander pardon. Comme elle occupe une grande place dans mon cœur, il m'était impossible d'attendre demain. Ce qui me faisait le plus mal n'était pas la façon dont je lui avais parlé mais son silence et son regard. Il y avait beaucoup de peine mais je ne sais pas comment j'ai pu y être insensible.J'ai demandé à Dominique de me raccompagner à la maison sous prétexte que j'étais fatiguée en vue d'écourter notre balade. Et en bon gentleman, il a accepté. Nous avons parcouru les 500-600 mètres qui nous séparaient de sa voiture en discutant, en se disant qu'on se manquait déjà. De mon côté, j'avoue que plus nos pas se rapprochaient du parking, moins j'avais envie de le quitter. Mais il fallai
Noël approche et comme à l'accoutumé, l'ESSET se prépare pour une journée portes ouvertes organisée en son sein dans le but de guider des étudiants désireux de côtoyer des professionnels mais aussi d'apprendre et voir ce que le monde du travail leur réserve au bout de leur cursus universitaire. Lorsque Véronique l'apprend, ses sentiments pour son cher PDG s'accroissent considérablement. Et elle est sûre d'avoir fait le bon choix en l'acceptant dans sa vie. Cet homme est, comme le dit-elle si bien, une bonne personne, c'est un sucre ! À son retour à la maison, elle trouve sa cousine révisant des cours de marketing. Des minutes après, Blévie range son fascicule et va s'allonger dans son lit auprès de Véronique qui manipule son téléphone. Les filles échangent quelques banalités et Blévie est très vite agacée par les réponses lentes de sa cousine ainsi que ses suspensions de phrases. Mais comment l'en vouloir si elle est en train de discuter avec son chéri. Il est bientôt quinze he
~ VÉRONIQUE ~Je me réveille en sursaut à cause d'un cauchemar. Sur l'horloge, il est huit heures et je suis assez révoltée puisque mon service ne commencera pas avant six heures. Alors à quoi bon réveiller aussi tôt ! Tout ça à cause de ce maudit rêve ! J'aimerais au moins me souvenir de ce que j'ai vu mais peine beaucoup. Au final, je fais une brève prière avant de rejoindre Blévie qui est à l'extérieur.Nous vivons dans un studio et partageons la cour avec sept voisins de trois maisons différentes. L'espace est tapissé de pavés et orné de fleurs. Les douche et toilette se trouvent hors des maisons et la cour représente d'un côté — pour nous autres qui utilisons le charbon — une très vaste cuisine ; et d'un autre, notre lieu de rencontre entre voisins pendant les temps de coupure d'électricité, lorsque la chaleur nous écrase dans nos maisons respectives. Bref, levée à l'encadrement de notre porte, j'observe ma cousine assise sur sa chaise en lianes en train de préparer le petit déj
Les deux hommes sortent à peine du bureau que Christophe confronte son cousin.« C'était quoi ça ? » dit-il.« Je ne vois pas de quoi tu parles. »« Qu'est-ce qui se passe entre cette fille et toi ? » « Ben, il se passe ce qui se passe. » rétorque Dominique en accélérant ses pas vers l'ascenseur.« Et Valérie ? »« Lâche-moi un peu, tu veux ? »Il ne veut rien entendre et Christophe déclare forfait. Malgré cela, celui-ci reste tout de même préoccupée par cette relation. Serait-ce une relation extra-conjugale ? Pourquoi appeler cette technicienne de surface sa confidente, si non ? Ils sortent de l'ascenseur et se séparent à la sortie de l'ESSET, chacun ayant une destination différente.*****Du côté de Blévie, la peine s'estompe progressivement et elle décide enfin de se lever de son lit. Les yeux rougis et bouffis, le corps lourd, la migraine plein la tête, elle reprend courage et sort s'acheter de quoi manger. Elle se fiche de ce que les gens penseront ; sa seule préoccupation rés
C'est à 17 heures que Véronique rentre chez elle, accompagnée par Dominique. Un sourire illumine son visage et ce n'est sûrement pas à cause son paquet plein de viennoiseries. Le couple se dit au-revoir dans une petite étreinte. Véronique passe le portail et se dépêche d'aller vers sa maison. Les chaussures de sa cousine se trouvant à l'entrée, elle devine que celle-ci est déjà de retour. Elle a hâte de lui annoncer ce qui s'est passé. Hélas, une fois à l'intérieur, la tension se fait assez lourde. Devant Blévie qui semble anéantie, elle ne peut exprimer sa joie. Sa cousine est assise sur le sol carrelé, dos contre le lit. Elle est vêtue de sa tenue de travail — un t-shirt sur lequel est marqué : Reno Transit —, il y a d'un côté sa perruque ébouriffée et de l'autre, son sac à main. Elle a une jambe tendue et l'autre pliée. Son regard vide laisse entrevoir une grande détresse. Elle reste muette et immobile. Ses yeux témoignent qu'elle s'est vidée de toutes ses larmes.Véronique la re
Trois semaines se sont écoulées depuis le gala, semaines au cours desquelles Véronique n'a plus revu Dominique ni même le jour suivant la fête lors des travaux de ménage. La jeune femme est déprimée mais continue à garder espoir. Avec les conseils avisés, parfois crus de sa cousine, elle a pu comprendre les sentiments qu'elle éprouve réellement pour Dominique. Même si elle refuse de l'admettre à haute voix, elle sait qu'elle est complètement éprise de son PDG. Alors qu'elle est en train de nettoyer le sol du troisième niveau, sa superviseure l'appelle sur son téléphone. Elle lui dit qu'elle est convoquée dans le bureau du DRH. Véronique s'inquiète, elle a peur de recevoir une notification de licenciement. Nerveusement, elle range son matériel avant de se rendre au dixième étage. Elle emprunte un ascenseur et ses pensées retombent sur Dominique. Elle se remémore très bien son premier jour de travail, au moment où ils avaient pris ensemble l'escalator, la façon dont elle s'était ac
~ VÉRONIQUE ~« Je t'aime, Chouchou. »À cet instant précis, j'ai l'impression que le temps s'est arrêté. Je ne sais pas s'il s'agit juste de mon imagination ou de la réalité. Il a toujours sa tête posé sur le volant et je préfère garder le silence. Seulement, il n'en a pas terminé.« Tu ne dis rien ? » ajoute-t-il en guettant ma réaction.Comment veut-il que je réagisse, lui aussi ? Je suis surprise. Tellement que je sens mon visage se froisser légèrement.« C'est comme ça que tu réagis à un "je t'aime" ? » Bah oui tonton. C'est surtout évident à cause du grand fossé entre nous et que nous n'avons pas vraiment créé de liens. Je choisis cependant de lui dire qu'il faudrait que je retourne dans le jardin car ma cousine doit sûrement me chercher partout.« Pas de soucis. »Et il me laisse m'en aller. J'aurais préféré qu'il me retienne quand même !*****22 heures :Blévie quitte ses nouvelles connaissances pour enfin rejoindre sa cousine qui est restée assise seule dans son coin penda
~ BLÉVIE ~ Ayant passé quasiment toute ma vie au village, je me suis promise une fois en ville que je saisirais toutes les opportunités favorables qui pourraient se présenter devant moi pour pouvoir réaliser tous mes rêves. Même si la vie en ville s'est avérée difficile, même si j'ai été tentée de baisser les bras, jamais je n'ai renoncé. C'est surtout grâce à Véro qui, en arrivant à son tour, m'a soutenu et même fini par abandonner ses études — comme moi avant elle — pour subvenir à nos besoins à toutes les deux à l'aide d'un travail. J'ai beaucoup d'estime pour elle et la considère comme ma sœur. J'apprécie le fait qu'elle ait accepté de m'accompagner à cette fête malgré son aversion pour ce genre d'événement. Je peux sentir son stress mais il est pour moi hors de question de me laisser contaminer. Au contraire, j'essaie de la faire rire, de lui raconter des ragots pour qu'elle oublie un peu les gens qui l'entourent. Je croyais qu'en prenant place auprès de ses collègues elle sera