LAURIEOn descend du jet, l’air frais de la campagne française me frappant le visage comme une gifle bienvenue. Une voiture noire nous attend, la même berline rutilante qu’à l’aller, et je m’installe à l’arrière sans un mot. Alexander monte à côté de moi, et le chauffeur démarre, direction Paris. La route est longue, presque une heure, et le silence entre nous s’épaissit, lourd comme une couverture de plomb. Je fixe la vitre, les champs qui défilent sous un ciel gris, et je me force à penser au boulot. Hargrove doit signer aujourd’hui, dans l’après-midi. C’est tout ce qui compte. Le reste – lui, moi, l’orphelinat – c’est du bruit, comme il l’a dit.Mais alors qu’on approche de La Défense, il brise le silence, sa voix grave résonnant dans l’habitacle.— On a rendez-vous avec Hargrove à 14h, dit-il, sans me regarder, les yeux fixés sur son téléphone. Tout est prêt de ton côté ?Je hoche la tête, crispée, et réponds d’un ton neutre.— Oui. Les projections budgétaires sont à jour, les sli
laurieJe quitte la tour une heure plus tard, après avoir mis mes notes au propre. Dehors, Paris est gris, humide, un vent frais balayant les rues de La Défense. Les gratte-ciels se dressent autour de moi, leurs façades de verre reflétant le ciel morose. Je marche d'un pas décidé jusqu'à un banc près d'une fontaine, m'assieds, et sors mon téléphone pour appeler Carter. Il décroche presque tout de suite, sa voix enjouée me tirant un sourire malgré moi.— Alors, princesse de New York, t’es rentrée ? dit-il, taquin.— Ouais, soupiré-je. Contrat signé, mission accomplie.— Et avec ton cher Alex ? Toujours en guerre froide ?Je ris, un son amer, et passe une main dans mes cheveux. Le vent les ébouriffe légèrement, et je resserre mon écharpe autour de mon cou.— On va dire ça. Il m’a félicitée, quand même. Mais ça change rien. Il est toujours… lui. Froid, distant, comme si hier avait jamais eu lieu.— Et toi, t’es toujours toi, Laurie, réplique Carter. Têtue, forte, et bien trop gentille pou
AlexanderLe bureau est trop calme ce matin, un silence qui me met les nerfs à vif. Je suis planté devant les écrans de mon QG au dernier étage, un café noir à la main, les yeux rivés sur les flux de données qui défilent – chiffres, codes, rapports. Le projet Hargrove est lancé depuis la réunion d’équipe d’hier, et tout roule, en apparence. Les ingénieurs sont dans les clous, les délais tiennent, et Laurie a pondu un planning tellement carré qu’on pourrait construire un empire dessus. Elle était là, à 9h tapantes, dans son tailleur gris, les cheveux tirés en arrière, la voix tranchante comme une lame quand elle a déroulé ses slides. Pas un faux pas, pas un regard en trop. Juste une efficacité froide, presque insolente. Et ça me fout en rogne, même si je devrais m’en réjouir.Je pose la tasse, le liquide tiède depuis trop longtemps, et je fixe la vue sur Paris. La tour Eiffel émerge du brouillard, un repère stable dans cette tempête que je sens monter. Parce que quelque chose cloche. H
Alexander— Amadeus, hein ? dit-elle, la voix basse mais acérée. Ton père qui refait surface. Ça te suit partout, on dirait.— Ça te concerne pas, répliqué-je, tranchant, en me levant. Retourne à ton bureau, fais ton boulot. Je gère.Elle croise les bras, plantant ses talons dans le sol, et je retrouve la gamine têtue de l’orphelinat, celle qui me défiait pour un bout de pain.— Si ça touche le projet, ça me concerne, Alexander. Je suis pas juste une potiche dans ton équipe. Si quelqu’un veut tout faire foirer, j’ai le droit de savoir.Je fais un pas vers elle, la dominant de toute ma hauteur, et je sens la colère monter, familière, brûlante.— T’es dans l’équipe, ouais, mais t’es pas dans mes affaires, Laurie. C’est mon problème, pas le tien. Fais ce que je te dis, point.Elle me fusille du regard, les lèvres pincées, puis tourne les talons et sort, la porte claquant derrière elle. Je reste là, le souffle court, les nerfs en boule. Amadeus. Ce vieux renard est censé être à la retrait
AlexanderLa salle de réunion est une cage de verre au dernier étage de Knight Enterprises, et ce soir, elle me semble plus étroite que jamais. Il est 21h passées, les néons bourdonnent au-dessus de nos têtes, et l’équipe est encore là, penchée sur des plans, des chiffres, des projections pour le projet Hargrove. Laurie est à ma droite, son ordinateur ouvert, tapant des notes avec une précision qui frôle l’obsession. Elle a pas levé les yeux vers moi depuis des heures, pas depuis l’attaque d’hier, pas depuis que je l’ai ramenée chez elle et que j’ai posé ma main sur la sienne comme un con. Elle est froide, distante, un mur de glace entre nous, et je devrais m’en foutre. Mais ça me ronge, cette façon qu’elle a de m’ignorer, comme si j’étais juste son boss, rien de plus.La réunion traîne, les ingénieurs débattent d’un ajustement technique, et je sens la fatigue peser sur mes épaules, un poids qui s’ajoute à la tension qui me noue les tripes depuis hier. L’image de cette moto, de ce fli
Alexander— T’avais mieux, peut-être ? Rester plantée là-bas à te noyer ?Elle me fusille du regard, ses yeux bleus brillants sous la lumière tremblante d’un lampadaire, et je vois l’eau perler sur ses cils, glisser sur ses joues. Elle est trempée, son tailleur collant à sa silhouette, et je détourne les yeux, vite, parce que je veux pas voir ça – pas comme ça, pas maintenant. Mais elle bouge pas, reste là, à quelques centimètres, et le silence s’installe, lourd, chargé d’une tension que je peux pas ignorer.Je lève les yeux vers le ciel, la pluie qui martèle le toit au-dessus de nous, et je grogne un juron à mi-voix. On est coincés, le temps que ça se calme, et je sens son regard sur moi, discret mais insistant, comme à New York dans ce couloir d’hôtel. Ça me fout les nerfs, cette façon qu’elle a de me scruter, de chercher quelque chose que je veux pas lui donner. Mais ce soir, je suis fatigué – de Stahl, d’Amadeus, de cette journée interminable – et je sens mes défenses craquer, jus
AlexanderLa salle de réunion est une cage de verre au dernier étage de Knight Enterprises, et ce soir, elle me semble plus étroite que jamais. Il est 21h passées, les néons bourdonnent au-dessus de nos têtes, et l’équipe est encore là, penchée sur des plans, des chiffres, des projections pour le projet Hargrove. Laurie est à ma droite, son ordinateur ouvert, tapant des notes avec une précision qui frôle l’obsession. Elle a pas levé les yeux vers moi depuis des heures, pas depuis l’attaque d’hier, pas depuis que je l’ai ramenée chez elle et que j’ai posé ma main sur la sienne comme un con. Elle est froide, distante, un mur de glace entre nous, et je devrais m’en foutre. Mais ça me ronge, cette façon qu’elle a de m’ignorer, comme si j’étais juste son boss, rien de plus.La réunion traîne, les ingénieurs débattent d’un ajustement technique, et je sens la fatigue peser sur mes épaules, un poids qui s’ajoute à la tension qui me noue les tripes depuis hier. L’image de cette moto, de ce flin
Alexander— T’avais mieux, peut-être ? Rester plantée là-bas à te noyer ?Elle me fusille du regard, ses yeux bleus brillants sous la lumière tremblante d’un lampadaire, et je vois l’eau perler sur ses cils, glisser sur ses joues. Elle est trempée, son tailleur collant à sa silhouette, et je détourne les yeux, vite, parce que je veux pas voir ça – pas comme ça, pas maintenant. Mais elle bouge pas, reste là, à quelques centimètres, et le silence s’installe, lourd, chargé d’une tension que je peux pas ignorer.Je lève les yeux vers le ciel, la pluie qui martèle le toit au-dessus de nous, et je grogne un juron à mi-voix. On est coincés, le temps que ça se calme, et je sens son regard sur moi, discret mais insistant, comme à New York dans ce couloir d’hôtel. Ça me fout les nerfs, cette façon qu’elle a de me scruter, de chercher quelque chose que je veux pas lui donner. Mais ce soir, je suis fatigué – de Stahl, d’Amadeus, de cette journée interminable – et je sens mes défenses craquer, jus
Je serre les poings, la colère montant, chaude, familière. Dommage collatéral. Comme à l’orphelinat, quand j’étais juste une gamine qu’on pouvait laisser derrière. Alexander intervient, sa voix basse mais ferme.— On a besoin des détails, Amadeus. Les dossiers, les noms, tout ce qui peut le coincer. Il est hors de question qu’il s’en prenne à elle encore une fois.Amadeus hoche la tête, se lève avec sa canne, et disparaît dans un couloir, nous laissant seuls. Le silence retombe, et je sens le regard d’Alexander sur moi, lourd, insistant. Je me lève, incapable de rester assise, et je marche vers les étagères, feignant d’examiner les livres, mais mes mains tremblent.— Tu pouvais pas te taire, hein ? dit-il enfin, la voix tendue.Je pivote, le fusillant du regard.— Me taire ? C’est lui qui a foutu nos vies en l’air, Alexander ! Toi, t’as eu une famille, un avenir. Moi, j’ai eu que dalle à cause de lui. Et maintenant, je suis une cible parce qu’il a merdé avec Stahl ? J’ai le droit de p
LaurieLe manoir d’Amadeus se dresse devant nous comme une ombre du passé, une bâtisse massive en pierre grise perdue dans la campagne normande, entourée de pins tordus par le vent. La route depuis Paris a été longue, presque quatre heures dans la berline d’Alexander, et le silence entre nous a pesé plus lourd que jamais. Il a conduit, concentré, les mains crispées sur le volant, et moi, j’ai fixé la vitre, les champs humides défilant sous un ciel bas, essayant de ne pas repenser à hier soir – à cette pluie, à cet auvent, à ses mots qui m’ont laissée tremblante et furieuse. « J’ai jamais voulu te laisser, Laurie. » Ça tourne en boucle dans ma tête, et je déteste ça, cette façon qu’il a de fissurer mes défenses sans même essayer.On est là pour Stahl, cet enfoiré qui a tenté de me tuer. Alexander a eu une piste – un vieux contrat douteux signé par Amadeus il y a des années, un truc qui lie Stahl à Knight Enterprises. Il a insisté pour qu’on vienne voir son père adoptif en personne, par
Le silence s’installe à nouveau, plus lourd que jamais, comme une chape de plomb qui étouffe les mots que je n’aurais jamais dû laisser échapper. Je me maudis intérieurement, le goût amer du regret me serrant la gorge. Pourquoi ai-je parlé ? Pourquoi ai-je laissé cette brèche s’ouvrir entre nous ? Les pneus de la voiture crissent doucement sur le chemin de gravier, et je garde les yeux fixés sur la route, évitant son regard. Dehors, le monde défile dans une morosité oppressante, les pins sombres dressés comme des sentinelles sous un ciel gris, épais, qui semble prêt à s’effondrer sur nous.On arrive au manoir en fin d’après-midi, l’ombre de la bâtisse se découpant contre l’horizon terni. Les fenêtres hautes, à moitié voilées par des rideaux épais, donnent à l’endroit un air de secret bien gardé. Une tension nouvelle palpite dans l’air, et je la sens au creux de mes os – ce n’est pas juste de la colère, non, c’est autre chose. Quelque chose de plus profond, de plus insidieux, comme une
AlexanderLe lendemain matin, je suis au bureau à 7h30, une tasse de café noir à la main, les nerfs à vif. Marc arrive pile à 8h, avec son air de geek fatigué et un dossier sous le bras.— Stahl a bougé, dit-il sans préambule, s’asseyant en face de moi. On a intercepté un mail – crypté, mais pas assez. Il prépare un coup, probablement sur le projet Hargrove. Et y a un nom qui revient : Amadeus.Je serre la tasse, le liquide brûlant éclaboussant mes doigts.— Ce vieux con, grogné-je. Il m’a juré qu’il était hors du jeu.— Il ment, ou il sait pas tout, réplique Marc. Faut qu’on creuse ses archives perso. Les originaux, pas les copies numériques. S’il a encore des dossiers chez lui, c’est là qu’on trouvera ce qu’il faut pour coincer Stahl.Je hoche la tête, la décision prise avant qu’il finisse.— On y va aujourd’hui. Normandie. Prépare tout.Marc acquiesce et sort, me laissant seul avec cette idée qui me tord les tripes – retourner chez Amadeus, fouiller son passé, et traîner Laurie là-
AlexanderLe moteur de la berline ronronne encore dans mes oreilles, même après que j’ai coupé le contact devant mon appart, un loft froid et trop grand au bord de la Seine. Il est minuit passé, les rues de Paris sont luisantes de pluie, et je suis trempé jusqu’aux os, le costard collant à ma peau comme une seconde peau que je voudrais arracher. Mais c’est pas la pluie qui me fout dans cet état. C’est elle – Laurie, son regard sous cet auvent, ses mots qui m’ont coupé comme une lame : « T’as rien fait pour moi là-bas. » Elle a raison, et ça me tue, parce que je peux pas lui dire la vérité, pas encore, pas comme ça.Je monte chez moi, balance ma mallette sur le comptoir, et vais direct au bar pour me servir un whisky – un double, sec, sans glace. La brûlure de l’alcool me réveille, chasse un peu cette fatigue qui me colle depuis hier, depuis que j’ai vu ce flingue braqué sur elle dans la cour. J’ai pas dormi, pas vraiment, trop occupé à traquer Stahl avec Marc, à creuser les serveurs,
Alexander— T’avais mieux, peut-être ? Rester plantée là-bas à te noyer ?Elle me fusille du regard, ses yeux bleus brillants sous la lumière tremblante d’un lampadaire, et je vois l’eau perler sur ses cils, glisser sur ses joues. Elle est trempée, son tailleur collant à sa silhouette, et je détourne les yeux, vite, parce que je veux pas voir ça – pas comme ça, pas maintenant. Mais elle bouge pas, reste là, à quelques centimètres, et le silence s’installe, lourd, chargé d’une tension que je peux pas ignorer.Je lève les yeux vers le ciel, la pluie qui martèle le toit au-dessus de nous, et je grogne un juron à mi-voix. On est coincés, le temps que ça se calme, et je sens son regard sur moi, discret mais insistant, comme à New York dans ce couloir d’hôtel. Ça me fout les nerfs, cette façon qu’elle a de me scruter, de chercher quelque chose que je veux pas lui donner. Mais ce soir, je suis fatigué – de Stahl, d’Amadeus, de cette journée interminable – et je sens mes défenses craquer, jus
AlexanderLa salle de réunion est une cage de verre au dernier étage de Knight Enterprises, et ce soir, elle me semble plus étroite que jamais. Il est 21h passées, les néons bourdonnent au-dessus de nos têtes, et l’équipe est encore là, penchée sur des plans, des chiffres, des projections pour le projet Hargrove. Laurie est à ma droite, son ordinateur ouvert, tapant des notes avec une précision qui frôle l’obsession. Elle a pas levé les yeux vers moi depuis des heures, pas depuis l’attaque d’hier, pas depuis que je l’ai ramenée chez elle et que j’ai posé ma main sur la sienne comme un con. Elle est froide, distante, un mur de glace entre nous, et je devrais m’en foutre. Mais ça me ronge, cette façon qu’elle a de m’ignorer, comme si j’étais juste son boss, rien de plus.La réunion traîne, les ingénieurs débattent d’un ajustement technique, et je sens la fatigue peser sur mes épaules, un poids qui s’ajoute à la tension qui me noue les tripes depuis hier. L’image de cette moto, de ce flin
Alexander— T’avais mieux, peut-être ? Rester plantée là-bas à te noyer ?Elle me fusille du regard, ses yeux bleus brillants sous la lumière tremblante d’un lampadaire, et je vois l’eau perler sur ses cils, glisser sur ses joues. Elle est trempée, son tailleur collant à sa silhouette, et je détourne les yeux, vite, parce que je veux pas voir ça – pas comme ça, pas maintenant. Mais elle bouge pas, reste là, à quelques centimètres, et le silence s’installe, lourd, chargé d’une tension que je peux pas ignorer.Je lève les yeux vers le ciel, la pluie qui martèle le toit au-dessus de nous, et je grogne un juron à mi-voix. On est coincés, le temps que ça se calme, et je sens son regard sur moi, discret mais insistant, comme à New York dans ce couloir d’hôtel. Ça me fout les nerfs, cette façon qu’elle a de me scruter, de chercher quelque chose que je veux pas lui donner. Mais ce soir, je suis fatigué – de Stahl, d’Amadeus, de cette journée interminable – et je sens mes défenses craquer, jus
AlexanderLa salle de réunion est une cage de verre au dernier étage de Knight Enterprises, et ce soir, elle me semble plus étroite que jamais. Il est 21h passées, les néons bourdonnent au-dessus de nos têtes, et l’équipe est encore là, penchée sur des plans, des chiffres, des projections pour le projet Hargrove. Laurie est à ma droite, son ordinateur ouvert, tapant des notes avec une précision qui frôle l’obsession. Elle a pas levé les yeux vers moi depuis des heures, pas depuis l’attaque d’hier, pas depuis que je l’ai ramenée chez elle et que j’ai posé ma main sur la sienne comme un con. Elle est froide, distante, un mur de glace entre nous, et je devrais m’en foutre. Mais ça me ronge, cette façon qu’elle a de m’ignorer, comme si j’étais juste son boss, rien de plus.La réunion traîne, les ingénieurs débattent d’un ajustement technique, et je sens la fatigue peser sur mes épaules, un poids qui s’ajoute à la tension qui me noue les tripes depuis hier. L’image de cette moto, de ce fli