– Je m’appelle Inaya.
Il me faut une seconde pour comprendre ce qu’elle me dit et indiquer à mon cerveau de répondre.
– Mason.
Ma voix est mécanique, respectueuse, mais sèche. Mon esprit se ferme à toute tentative de sociabilité avec cette fille, aussi intrigante soit-elle. Je déglutis, hoche brièvement la tête et décide de battre en retraite. Je sens de lourds regards peser sur moi lorsque j’accélère le pas, mais il faut que je m’éloigne d’ici au plus vite.
Que je m’éloigne d’elle.
Comment une inconnue peut réveiller de telles choses en moi ? Comment peut-elle exercer un tel pouvoir sur mon corps alors même que je ne connais que son prénom ?
Je file à toute vitesse vers la forêt qui borde le village, et je m’y enfonce jusqu’à atteindre le pied de la colline qui surplombe les environs. Je grimpe la pente raide en m’aidant à peine des arbres et des quelques rochers disséminés çà et là.
Avec la bande, nous avons trouvé refuge ici pour la première fois, un soir, alors que nous n’avions que 14 ans. Nous nous étions mis d’accord pour faire le mur en pleine nuit et monter au sommet de la colline pour prendre notre première cuite sans que personne ne soit au courant. Évidemment, nos parents l’ont tout de suite compris en nous voyant revenir le lendemain, dans un état lamentable, mais jamais ils ne se sont aventurés ici. C’était notre endroit, et ils ont toujours respecté ça.
Les troncs couchés sur la petite plaine qui s’étend au sommet, et qui nous servent habituellement de bancs, apparaissent dans mon champ de vision. Alors que j’attrape une branche pour franchir plus confortablement le dernier mètre qui me sépare de notre QG, une horrible brûlure au creux de ma main – celle que j’ai tendue à Inaya – me paralyse.
Bon sang, non… Faites que ça ne soit pas réel…
J’avance sur la colline et me laisse tomber au sol juste devant les restes de notre dernier feu de camp. Je m’adosse finalement à un des énormes cylindres de bois avant de jeter un regard soucieux à ma main brûlante. Une marque rosée en forme de croissant de lune se dessine sur presque toute la largeur de ma paume, recouvrant les lignes de ma main comme pour remettre en question l’intégralité de mon existence.
Ligne de vie. Ligne de cœur. Ligne du destin.
L’esprit embrumé par ce que cette marque implique, je réalise, comme un coup à l’âme, que rien ne sera plus pareil à partir d’aujourd’hui. Comment pourrait-il en être autrement, alors que mon destin vient de prendre un virage à quatre-vingt-dix degrés, et de m’imposer un lien dont je ne veux pas ?
Une marque. Une Révélation. Une âme sœur.
La nature est contre mon couple avec Carole depuis le début. C’est vrai, après tout, elle est humaine tandis que je suis à moitié loup. Elle est douce, là où je suis impétueux. Même avec la meilleure volonté du monde, elle ne pourra jamais comprendre nos croyances, nos traditions. Et elle n’aura jamais aucune idée de la force du tournant que ma vie vient de prendre et qui m’éloigne radicalement de l’avenir que j’envisageais pour nous deux. Quant à moi… La pièce du puzzle qu’il me manquait, celle qui nourrissait le mauvais pressentiment que j’avais quant à ma relation actuelle… La voilà. C’est elle.
C’est Inaya.
Je le sens déjà, ce besoin viscéral de la retrouver, ne serait-ce que pour ressentir à nouveau cette chaleur vivifiante circuler en moi au contact de sa peau.
Et merde…
J’observe le village de là où je suis. De loin, je vois la meute du Texas qui semble se familiariser avec mes proches, se sociabiliser avec les membres de notre meute qui leur proposent de l’aide pour s’installer ou pour les guider en cas de besoin. Je crois apercevoir Carole en bas, en train de discuter avec Ella. Mon alpha… Qui a été très claire avec moi sur le fait qu’elle m’anéantirait si je brisais le cœur de sa meilleure amie. Lui faire du mal n’est pas mon intention, ça ne l’a jamais été et ne le sera jamais, mais je ne suis pas assez naïf pour croire que ma Révélation ne changera rien à notre relation. Elle va en souffrir, je vais en souffrir, et à la fin, qu’adviendra-t-il de nous ? Parce que je l’aime, et je sais qu’elle m’aime aussi.
Soudain, un craquement résonne dans mon dos et le bruissement des feuilles sous les pas de l’intrus m’indique qu’il s’approche jusqu’à s’arrêter derrière moi. Sa voix rompt le silence paisible de l’après-midi.
– Je t’ai vu t’enfuir dans la forêt… Est-ce que ça va ?
– Je ne me suis pas enfui. Pas vraiment.
Sans me préoccuper de sa présence, je frotte la marque à l’aide de mon pouce opposé, comme pour lutter contre. Comme pour la faire disparaître. L’effacer.
Jenny enjambe le tronc couché de l’arbre contre lequel je suis adossé et s’installe à mes côtés. Cette fille est l’une des personnes les plus bienveillantes que je connaisse. Derrière ses bavardages incessants se cache une personne douce et aimante, à l’écoute de ceux qui l’entourent. Je ne suis pas tellement étonné qu’elle m’ait suivi jusqu’ici.
Je me souviens à l’école primaire, quand j’étais encore un gamin qui ne jugeait que par ce qu’il voyait sans chercher à creuser, Jenny m’agaçait profondément. Puis, le temps passant, elle est devenue l’une des personnes les plus importantes de ma vie. Elle est de ceux à qui je confierais ma vie sans hésiter s’il le fallait, et c’est cette confiance absolue qui me pousse à me confier à elle. Parce que tout ça est beaucoup trop lourd à porter tout seul. C’est arrivé il y a seulement un instant, et je suis déjà complètement dépassé.
– C’est la merde, Jenny.
La copine d’Aiden laisse tomber sa tête sur mon épaule. Un geste d’affection qui me réconforte plus que je ne l’aurais imaginé.
– Qu’est-ce qu’il s’est passé, là-bas ? demande-t-elle d’une voix douce.
Sans effort, je lui fournis une réponse honnête en lui tendant ma main marquée, paume vers le ciel. La seconde suivante, elle se redresse, les yeux écarquillés et le corps en tension. Elle replie ses jambes en tailleur pour se stabiliser tandis que ses doigts tremblants s’approchent du croissant de lune jusqu’à l’effleurer. La sensation est étrange. Un frisson me parcourt et soudain je sursaute face à la décharge électrique qui me traverse de part en part, comme pour me punir de l’avoir laissée le toucher. C’est si violent que j’en laisserais presque échapper un gémissement.
– C’est bien ce que je crois ?
– C’est bien ce que je crois ?Sa voix n’est plus qu’un murmure, à la fois choqué et curieux. Pas un instant, son regard ne quitte la marque de ma Révélation. Elle l’observe sous tous les angles, attrapant ma main pour la tourner d’un côté, puis de l’autre, comme si les rayons du soleil allaient se refléter dessus. Mais elle ne la touche plus.– J’aime Carole, tu sais… me sens-je presque obligé de préciser.– Bien sûr que je le sais !Jenny n’est pas du genre à juger les autres. Elle est plutôt du style à défendre ses amis bec et ongles envers et contre tout. De toute façon, nous savons depuis notre plus tendre enfance que le lien qui unit deux âmes sœurs défie toutes les lois de la volonté. C’est spirituel. Naturel. Intime. Si rare que jamais je n’aurais cru trouver la mienne un jour. Au fond, c’est peut-être moi qui souhaiterais que quelqu’un me le reproche, juste pour donner un peu plus de légitimité à ma culpabilité.– Qu’est-ce que tu comptes faire ? finit-elle par demander.– Fr
Il n’y en aura jamais.– Qu’est-ce qu’il y a ? demande-t-il en retournant quelques merguez sur le grill.Un moment, j’hésite entre mentir ou lui avouer ce que j’ai au fond de moi. Puis, je me souviens de la dernière fois que j’ai évoqué nos différences et supposé qu’elles pourraient être un frein dans l’épanouissement de notre relation. Il s’était mis en colère et le ton était monté plus que jamais auparavant. Je n’ai pas envie que cela se reproduise… Mais en y réfléchissant bien, ce soir, nous sommes entourés de gens qui ont tout perdu. Et qui n’ont peut-être pas eu le temps de dire à leurs proches ce qu’ils ressentaient. La vie semble ne tenir qu’à un fil, et je n’ai pas envie qu’il y ait plus de non-dits, qu’il y en a déjà, entre Mason et moi. Finalement, c’est peut-être le moment ou jamais d’en parler.– Je pense à nous.Il cesse tout mouvement et plante son regard dans le mien. Ses yeux sont indéchiffrables. Je n’arrive pas à me défaire du sentiment étrange qui coule dans mes vei
Cette vision me fait mal à la poitrine. Elle me déchire le cœur, le brise en morceaux et altère jusqu’à ma respiration. De là où je suis, les joues d’Inaya me paraissent humides. Ses dents sont tellement serrées que je me demande s’il ne lui reste pas un torrent de larmes à verser. Soudain, un poids accablant pèse sur mes épaules, comme si je portais sa peine avec elle. Comme si, inconsciemment, elle la partageait avec moi. La nausée me gagne et mon estomac se tord sous sa douleur que j’ai l’impression de ressentir sans filtre.Quand elle recule enfin, elle se frotte le visage de ses manches en une piètre tentative pour cacher ses émotions aux autres. De là où je me trouve, je ne parviens pas à déchiffrer ce qu’elle a écrit. Deux loups sont déjà en train d’entasser des branches autour de la sculpture et me cachent la vue. Lorenzo confie alors un flambeau à Dwayne pour qu’il accomplisse lui-même le rituel en hommage à ses victimes en allumant le feu.En quelques minutes à peine, le boi
InayaJe marche. J’avance. Je m’enfonce dans les bois, encore et encore. Je commence à ne plus voir grand-chose à cause des arbres de plus en plus rapprochés. J’ignore combien de temps dure cette balade quelque peu salvatrice. Le problème, c’est que je ne suis pas sûre de pouvoir retrouver mon chemin jusqu’au village. Je ne suis même pas sûre d’en avoir envie, en fait. C’est tellement… étrange.Tout s’est passé si vite depuis l’incendie que je ne parviens plus à décrypter mes émotions. Depuis que les flammes ont englouti jusqu’à la dernière parcelle de bonheur qui égayait ma vie, je me sens amorphe. Incapable de ressentir quoi que ce soit. Le choc m’a englouti. Et l’enchaînement d’événements, qui a suivi la destruction de mon village, n’arrange rien. Notre départ du Texas, notre arrivée ici, l’apparition de cette marque sur ma paume…Mon estomac se tord et mes larmes s’amoncellent au coin de mes yeux. Comment est-ce que ça a pu se produire ? Je ne suis pas prête à me lier à quelqu’un,
La marque. Un croissant de lune un peu plus foncé que son épiderme, gravé sur sa peau comme au fer rouge. La même que moi.Machinalement, j’attrape son poignet, ignorant le frisson qui me parcourt l’échine. Malgré la fébrilité de mes jambes, je me relève pour être à son niveau, puis tourne ma main droite près de la sienne pour comparer le symbole qui y est apparu. Aucune distinction n’est visible, elles sont identiques. Deux croissants de lune orientés l’un vers l’autre comme pour former un cercle en dépit de l’espace qui réside entre les deux. Une symétrie parfaite.– Qu’est-ce qui nous arrive ? demandé-je naïvement, dans l’espoir qu’il infirme l’idée qui me trotte dans la tête et me vrille le cerveau.Mais sa réponse n’est pas tout à fait ce à quoi je m’attendais. C’est même tout le contraire.– Tu le sais déjà, autrement tu ne me poserais pas la question. Tu sais même très bien ce que représente cette marque.Un lien indivisible entre deux âmes sœurs. Parce que je suis la sienne, e
À cet instant, je regrette que notre Révélation ne nous confère pas les mêmes capacités que celle d’Ella et Lorenzo. Eux peuvent communiquer par la pensée. De notre côté, j’ai plutôt l’impression que notre lien fait de nous des éponges de nos émotions respectives, comme si nous étions surtout capables de nous transmettre un état d’esprit, des sensations, des ressentis… Mais de ce que j’en sais, une Révélation ne se manifeste jamais de la même façon chez les loups, et elle évolue constamment.Qui sait ce qu’elle nous réservera demain ou dans un an ?Pour l’instant, je me contente de l’écouter lorsqu’elle me pousse doucement du coude.– Allez, vas-y, dit-elle à voix basse.***En arrivant devant le chalet de Carole, je tambourine à sa porte, essoufflé. Je veux qu’elle m’ouvre, qu’elle me dise exactement ce qu’elle a vu ou entendu, ce qu’elle croit avoir surpris dans les bois. Parce que quoi que ce soit, ce n’est pas la réalité.– Carole, ouvre ! crié-je en faisant trembler le battant so
Je ferme les yeux et passe mes doigts dans mes cheveux, tirant légèrement dessus pour empêcher mon cerveau de partir dans toutes sortes de réflexions qui me tiendraient éveillée toute la nuit. Je jette un coup d’œil à mon téléphone. Posé sur la table de chevet, l’écran s’allume dès que je le touche. L’espace d’un instant, je m’imagine dans une autre vie, quelque part loin d’ici, avec Carter en train de dormir dans la pièce d’à côté. Une vie où j’aurais eu une famille aimante et attentionnée. Une vie où j’aurais vu apparaître un message de ma mère me demandant comment s’est passé ma soirée, et je lui aurais raconté que j’ai rencontré un très beau garçon, gentil et attentionné. Alors, elle m’aurait mise en garde sur les peines de cœur, mais seulement après m’avoir laissé lui dire tout ce que cette rencontre m’inspire. Ce que je ne peux ni faire ni ressentir aujourd’hui, car rien de tout ça n’est réel.Depuis que nous sommes en âge de nous gérer tout seuls, ma mère s’est complètement dét
– Tu n’arrives pas à dormir ? demande-t-elle.Elle ne semble pas prête à s’en aller apparemment… Honnêtement, je préférerais être seule et me perdre dans les souvenirs de mon frère pour ne jamais oublier son visage. Mais par respect pour celle qui a offert un abri à ma meute, je fais tout de même l’effort de répondre.– Pas vraiment. Et vous, que faites-vous dehors à une telle heure ?– Rha ! elle s’esclaffe en rejetant la tête en arrière. Pourquoi est-ce que tu me vouvoies ?– Eh bien, parce que vous êtes une alpha et que…– Certainement pas ce soir ! Là, je ne suis qu’une mère qui tente désespérément d’endormir sa fille depuis des heures et qui a fini par l’emmener au grand air comme elle aime pour enfin y parvenir. Alors, tutoie-moi, s’il te plaît.Je lui souris gentiment, le cœur adouci par le visage de sa petite, écrasé sur son épaule, un filet de bave s’échappant de sa bouche entrouverte. Mon attention se reporte sur le feu de camp qui se consume dans le silence paisible de la n
D’un mouvement de la tête, il m’invite à regarder Carole, toujours de l’autre côté du cercle. Jake Miller se dirige vers elle sous ses yeux pétillants. J’ignore si elle a décidé de revenir définitivement dans la meute, mais une chose est sûre : elle est heureuse d’être là, avec ses amis. Sa famille. Je ne suis même pas sûre qu’elle en ait conscience.Elle serre Jake dans ses bras, mais pas comme on le ferait avec un simple ami. Pas comme si Mason avait creusé un trou béant de tristesse et de solitude à cause de son absence. Mais plutôt comme si retrouver Jake lui provoquait un profond soulagement. Et je le sais, car j’ai l’impression de me voir il y a quelques minutes avec Mason.Si Carole et Jake n’en sont pas à s’avouer leurs sentiments naissants, il est tout de même certain qu’ils en ont.– Bien, lance Lorenzo d’une voix puissante qui résonne parmi la foule. Puisque nous sommes tous là, ou presque, commençons.Les chuchotements s’essoufflent au point de plonger le village dans un s
– Mes affaires.– Pourquoi ? demande-t-il avant même que l’écho de mes mots ne se soit essoufflé.– Eh bien… Je me suis dit que ce serait déplacé de rester ici avec Carole à côté… Je ne voudrais pas créer un malaise…Il fronce les sourcils, l’air de réfléchir à ce qui aurait pu me faire penser ça, puis son regard revient percuter mes iris.– Je t’ai dit que tu étais ici chez toi et que tu pouvais rester aussi longtemps que tu le souhaitais.– Mais Carole…– Carole vient de s’installer chez Ella et Lorenzo. Elle laisse ainsi sa maison à disposition, en cas de besoin. Tout est clair désormais entre elle et moi.J’ouvre la bouche pour répondre quelque chose qui me donnerait moins l’air désespéré, mais rien n’en sort. La situation est si perturbante qu’une vague de soulagement me fait vaciller lorsque Mason m’adresse un sourire sincère en esquissant un pas vers moi.– Tu m’as manqué, murmure-t-il.Il avance encore, jusqu’à s’arrêter à quelques centimètres. Son souffle s’échoue sur mes jou
Ses épaules se détendent imperceptiblement et un sourire éclaire son visage lorsque nous passons entre les premiers arbres qui marquent la lisière de la forêt.– Tu as toujours vécu ici ? demande-t-elle.– Oui ! C’est le cas de la plupart des membres de la meute.Je lui prends la main pour l’aider à escalader quelques rochers avant de reprendre notre avancée tranquillement. Ce n’est que quelques mètres plus tard que je prends conscience de ne pas l’avoir lâchée.Nous évoluons sur le terrain escarpé en comparant ma vie recluse au village et la sienne, pleine de possibilités, dans une ville où le tourisme est particulièrement actif. Je lui avoue n’avoir jamais imaginé ma vie ailleurs que dans ce coin paumé au cœur de la Louisiane.Finalement, nous atteignons le sommet de la colline où nous avons l’habitude de nous retrouver avec le groupe. C’est un peu notre endroit à nous, notre refuge, où rien ni personne ne pourra jamais nous atteindre.– Waouh… lâche-t-elle dans un soupir en découvr
MasonEn sortant de la douche pour rejoindre la solitude de ma chambre d’hôtel, les cheveux encore dégoulinants, je repense à ma conversation avec Carole.Ces dernières semaines, bien qu’on se disputait souvent, je l’aimais, et ça fait du bien d’apprendre qu’elle aussi, même si nos sentiments avaient déjà pris une autre voie. Ils s’étaient transformés en quelque chose de moins passionnel, et sûrement de plus amical au fond. Ce que je ressens pour Inaya n’a pas d’égal. C’est tellement plus… profond. Indescriptible. Et si une part de moi sera toujours attachée à Carole, je dois faire mon chemin de mon côté et lui laisser une chance d’en faire de même, y compris si c’est avec Jake.La sonnerie de mon téléphone m’interrompt dans mes pensées alors que j’enfile un bas de survêtement. Le nom de Lorenzo s’affiche sur l’écran. Je fronce les sourcils, étonné. Il sait où je suis et ce que je suis venu faire là, il n’est pas du genre à se manifester dans ce type de situations. Je repense à ce qu’
– Laisse-la digérer l’information. Tu la retrouveras plus tard.Je fronce les sourcils, à la fois intriguée par le départ d’Ella et perplexe face à ce qui se joue sous mes yeux. Je ne comprends plus rien. En quoi la sœur de l’ancien alpha pourrait être mêlée à cette affaire ? Pourquoi était-elle en prison ? Et surtout, comment a-t-elle réussi à s’en échapper ?C’est Brice qui attire mon attention en soupirant bruyamment. Puis il entreprend de me raconter.– Nicole a toujours été de nature très jalouse. C’est presque maladif chez elle. Je suis l’aîné de la fratrie, alors j’ai repris la direction de la meute après mon père. Elle ne l’a jamais supporté. Je suppose que tout est vraiment parti de là. Puis, elle a épousé l’alpha Miller…– Miller comme… Jake et Gregor ? l’interrompé-je de plus en plus étonnée.– C’est leur père, oui. Nicole est leur belle-mère. Mais cette union ne lui a pas suffi. Elle voulait diriger et elle n’était pas en position de le faire, du moins pas toute seule. C’e
Inaya– C’est le deuxième incendie en à peine quelques semaines. Comme dans le village de Dwayne, personne n’a rien vu avant les premières flammes. Il y a bien eu un bruit d’explosion, mais ça a été rapidement mis de côté face à la fureur du feu qui s’est propagé. Ce n’est que plus tard que la thèse de l’incendie criminel a été confirmée. Heureusement, il n’y a eu aucun blessé, mais il faut faire quelque chose pour que ça ne se reproduise plus, récapitule Lorenzo en s’asseyant autour de la table du Conseil, juste à côté d’Ella.Je n’arrête pas de passer en revue les maigres informations dont nous disposons à ce sujet, dans l’espoir d’y trouver une explication. J’ai un mauvais pressentiment. Une sombre impression que quelque chose de beaucoup plus grave, qu’on ne se l’imagine, se prépare dans notre dos. Et en attendant, on perd notre temps à discuter…Sur le chemin vers la salle du Conseil, Ella m’a informée des dernières nouvelles pour que je ne sois pas perdue. Il y a quelques jours,
Mason :Je ne sais pas trop, en fait.C’est la fin d’une période dema vie, pendant laquelle j’aigrandi et aimé, comme jamaisavant de te rencontrer.L’espace d’un instant, je crois bien que je cesse de respirer. J’ignore s’il a volontairement sous-entendu qu’il m’aimait ou s’il a dit ça juste comme ça, parce que nous sommes des âmes sœurs et que le lien qui nous unit est particulièrement inexplicable, mais le fait est qu’il l’a dit. Et mon cœur l’a compris.Je relève les yeux de mon écran pour méditer sur cette déclaration cachée et je tombe sur une photo d’Ella et Lorenzo, le jour de leur mariage. Leurs yeux jaunes pétillants de bonheur et l’aura qu’ils dégagent me font réaliser que c’est en moi que je dois puiser la force et la volonté de vivre une belle histoire avec Mason. Une histoire qui nous ressemblera, nous, et personne d’autre.Je reprends mon souffle en inspirant profondément. Je concentre mon attention sur l’appareil et je le serre si fort dans mes mains que mes phalange
– Un nouvel incendie. Dans la meute des parents d’Ella, cette fois. On a des raisons de croire que Nicole sait quelque chose. Brice cherche des infos de ce côté-là.– Est-ce qu’on peut faire quelque chose pour aider ?– On ? m’étonné-je, irrité.Il y a à peine cinq minutes, elle m’a fait comprendre qu’elle ne faisait pas partie de la meute, qu’elle ne s’y sentait pas chez elle après y avoir vécu pendant cinq ans, et maintenant, elle voudrait intervenir ? Je trouve ça tellement paradoxal que mon cerveau n’arrive plus à suivre. J’ignore si je devrais me concentrer sur sa solidarité ou sur le trou béant qu’elle a creusé dans ma poitrine, comme si je n’avais pas suffi à la rendre heureuse au village, que l’amour que je lui portais ne valait rien.– Écoute, Mason… Je suis désolée. Tu n’as pas tous les torts. Si je suis honnête, je dirais même que tu n’en as aucun. J’ai bien vu que tu ne pouvais pas lutter contre l’attirance que tu ressens pour Inaya, et je ne t’en veux pas, mais tu ne peux
16MasonPerché sur le bureau de Carole, les pieds sur sa chaise, je l’observe, détaillant chaque trait de son visage, chaque parcelle de sa silhouette, mais je ne ressens rien d’autre que de la culpabilité. Il n’y a plus cet amour qui crépitait entre nous et nous animait. Je sais qu’elle le ressent aussi. Notre relation n’allait déjà plus très bien avant l’arrivée d’Inaya, mais on tenait le coup. Peut-être par habitude ? Quoi qu’il en soit, je ne veux pas continuer de cette manière, et je ne pense pas qu’elle en ait envie non plus.Assise sur le bord de son lit, à quelques mètres de moi, elle se tient droite, ignorant l’attention que je lui porte. Son téléphone vibre à côté d’elle, l’écran s’allume pour lui indiquer l’arrivée d’un nouveau message, mais elle n’y jette qu’un bref coup d’œil avant de retourner l’appareil face contre le matelas.Voilà presque dix minutes que personne ne parle, même si je devrais probablement me lancer puisque venir ici était mon idée. Mais maintenant que