Je suis sortie en trombe de la salle d’allemand. J’avais trois minutes chrono avant de devoir me présenter au bureau du psy. Ça me laissait tout juste le temps de passer au petit coin.
Au moment de tourner à l’angle d’un couloir, j’ai percuté quelqu’un, me retrouvant propulsée au sol, mon sac disparaissant de mon champ de vision. Je me suis redressée péniblement en pestant. La personne avec laquelle je venais d’entrer en collision s’est accroupie devant moi.
— Ça va ?
J’ai relevé les yeux et me suis retrouvée nez à nez avec Jim Clayne. Il me regardait d’un air un peu inquiet, comme si comment j’allais lui importait vraiment.
— Euh, on va dire ça.
Il m’a tendu la main en souriant. Je m’en suis emparée et il m’a tirée en avant.
— Je suis désolé, s’est-il excusé en se dirigeant vers mon sac à main, qui s’était envolé à quelques mètres.
— Non, tu n’y es pour rien, ai-je répliqué alors qu’il revenait vers moi.
Il a souri encore une fois en me tendant mon sac. Je ne m’en suis pas tout de suite saisie, un peu choquée. Il ne m’avait jamais souri auparavant. Et c’était d’ailleurs la première fois qu’on s’adressait la parole.
— Tu étais pressée, non ?
— Oui. Il faut que j’y aille, d’ailleurs.
J’allais continuer mon chemin lorsqu’il m’a demandé :
— Tu aimes le baseball ?
Je me suis retournée vers lui, interloquée.
— Disons que je ne déteste pas. Pourquoi ?
— J’ai des billets pour le prochain match des Livers. Je me demandais si ça t’intéresserait.
— Tu les revends ?
Il a secoué la tête en affichant un sourire en coin.
— Non. Je te proposais d’y aller avec moi.
— Tu veux qu’on y aille ensemble ? me suis-je enquise, stupéfaite.
— Oui. Enfin, pas que tous les deux. Il y aurait Vince et oncle Sam, aussi.
C’était une blague ? Je n’allais tout de même pas assister à un match de baseball avec Vince, son cousin et son père psy – psy que je devais rejoindre illico, d’ailleurs !
— Ben, c’est gentil, Jim, mais…
— Écoute, réfléchis-y. C’est ce samedi.
Il m’a adressé un dernier sourire avant de partir en direction de la cafétéria.
J’ai haussé les sourcils, déstabilisée. Mais je n’avais pas le temps de penser à ça. Il fallait que j’aille voir le psy. J’étais déjà en retard. Non que je sois pressée de le revoir, mais il allait sûrement prévenir ma grand-mère si je ne le rejoignais pas. Et vu qu’elle voulait prendre « les décisions qui s’imposaient », il valait mieux ne pas tenter le diable.
Encore une fois, la salle d’attente était vide, comme si j’étais la seule élève parmi tous ceux d’Owen Haims que le psy voulait harceler.
— Bonjour, Roxanne.
Je me suis dirigée vers le bureau, une expression neutre plaquée sur le visage.
— Salut.
Il a souri de mon insolence, quand d’autres m’auraient incendiée.
— Assieds-toi.
Je me suis exécutée avec un soupir. Encore ce foutu canapé !
— As-tu des nouvelles de tes parents ?
Waouh, il y allait franco ! Attaquer avec un sujet que je voulais éviter n’était pas très judicieux de sa part.
— Non, et je n’ai aucune envie d’en avoir.
— Ce sont tes parents.
— Ce sont des salauds.
Il m’a fixée longuement avant de gribouiller quelques mots dans son carnet. Cette pratique commune aux psys m’énervait au plus haut point. J’avais bien envie de savoir ce qu’il griffonnait.
— Ils n’ont pas cherché à te joindre ?
— Parfois, mais je ne leur réponds pas. De toute façon, je sais ce qu’ils me veulent.
— Ah bon ? Et qu’est-ce qu’ils te veulent ?
— Savoir pourquoi mes bulletins sont aussi médiocres. Ils arrivent chez mon père, mais je suppose que pour le coup, il se fait le devoir de parler à ma mère. De toute façon, ce n’est pas étonnant. Ils ont toujours agi comme bon leur semblait.
— Tu fais allusion à leur divorce ?
J’ai soupiré en promenant mon regard dans la pièce. Les tableaux mettaient en scène des fruits, dans diverses situations. L’un représentait un verger, un autre une simple coupelle de fruits, et le dernier une pomme rouge posée sur une main rattachée à une ombre sombre qu’on distinguait à peine.
— Ils ne m’ont pas demandé mon avis. Ils n’ont pas voulu savoir si ça me faisait quelque chose qu’ils divorcent. Ils l’ont juste fait.
— Peut-être que c’était la meilleure solution. Il arrive parfois un moment où un couple n’a plus lieu d’être.
— Je suis sûre qu’ils pouvaient essayer autre chose. D’accord, ils se disputaient tout le temps et l’ambiance à la maison n’était pas toujours top. Mais on porte tous les trois le même nom : Stunley. On est une famille.
— Ta mère a pu garder le nom de ton père ?
— Elle est artiste-peintre, et tout le monde la connaît sous le nom de Lauren Stunley, du coup elle a pu garder le nom.
Il a hoché la tête.
— Bon, si je comprends bien, tu n’as eu aucune conversation avec eux depuis le divorce.
— C’est ça.
— Ça remonte à un an, si je me souviens bien. C’est écrit dans ton dossier.
— Dix mois, oui.
Un petit silence s’est installé pendant qu’il griffonnait dans son carnet. J’ai attendu qu’il daigne reprendre la conversation.
— Il paraît que tu es tout le temps seule. Tu n’as pas d’amis ?
— Qui voudrait être ami avec la rebelle de service ? De toute façon, je suis mieux toute seule. Je suis du genre solitaire.
— C’est ce que tu te dis pour te réconforter ?
— Non, c’est la vérité.
— Mais tu étais contente quand tu avais des amis, non ?
J’ai levé les yeux au ciel. Franchement, ce rendez-vous devenait n’importe quoi. Il fallait abréger.
— Disons que ça ne me dérangeait pas.
— Tout comme ça ne te dérange pas d’être seule. En fait, la seule chose qui ne te laisse pas indifférente est le divorce de tes parents. Et c’est intéressant de voir que tout ce qui te rend indifférente aujourd’hui a été causé par un fait qui ne t’indiffère aucunement.
C’était intéressant, ça ? Il fallait revoir la définition de cet adjectif. Et je parlais du psy, pas de moi.
— Voilà comment nous allons fonctionner, Roxanne : je vais te donner des missions que tu devras accomplir pour le rendez-vous suivant.
Qu’est-ce que c’était encore que ce délire ? Il se prenait pour Jerry des Totally Spies, ma parole !
— Pour le prochain rendez-vous, j’ai deux missions pour toi, Roxanne. La première est d’avoir une véritable conversation avec tes parents. Tu devras leur expliquer ce que tu ressens, en quoi tu as été blessée. Il faut que vous essayiez de trouver une solution. Ta seconde mission est de venir avec Jim, Vince et moi au match des Livers samedi. Il faut que tu te sociabilises à nouveau.
Je l’ai dévisagé, incrédule.
— C’est vous qui avez eu l’idée de cette sortie ?
— Non, c’est Jim. C’est aussi lui qui a voulu t’inviter, d’ailleurs. Je n’y ai pas vu d’inconvénient. Au contraire, c’est une bonne mission.
— Vous savez, votre histoire de missions ne me plaît pas trop. Et puis, les deux que vous venez de me donner me sont impossibles. Je n’ai aucune envie de parler à mes parents ni d’assister à un match de baseball avec trois inconnus.
Il a souri de nouveau, comme si j’avais dit quelque chose de drôle.
Nous n’avions, en plus, pas le même humour ! Décidément, ce psy et moi n’avions rien en commun. Au moins, avec l’ancien, je partageais quelque chose : ni lui ni moi ne supportions Owen Haims.
— C’est encore mieux. C’est encore plus un challenge du fait que tu n’es pas intéressée.
— Attendez, ce n’est pas contraire à l’éthique qu’on se voie en dehors du lycée ?
— Tu viens au match avec Vince et Jim, pas avec moi spécialement. Il n’y a rien de douteux là-dedans. N’essaie pas de te défiler, Roxanne. Il paraît que tu adores les défis.
— Qui vous a raconté ça ?
— Tu l’as dit à ton ancien psychologue. C’est écrit dans ton dossier.
Pff. C’était vraiment ridicule. Mais bon, il me défiait. J’avais ma fierté, je ne pouvais pas reculer.
— Bon, très bien. J’accepte vos missions. Mais qu’est-ce que j’y gagne ?
— Le privilège de me revoir. Lundi, ça ira ?
— Vous rigolez, j’espère ! C’est dans cinq jours. Il me faut plus de temps.
— Il te suffit d’organiser ta réunion de famille dimanche et tout ira bien. On fait comme ça.
Comme toujours dans ma vie, je n’avais pas mon mot à dire.
***
En sortant de la salle de colle après deux heures non-stop d’ennui mortel, je suis tombée nez à nez avec Anya Rovski et sa troupe de cheerleaders. J’ai levé les yeux au ciel. Super ! Je venais de quitter l’enfer pour en rejoindre une succursale… La blonde m’a regardée de haut en bas et s’est mise à pouffer.
— Qu’est-ce qu’il y a, encore ? ai-je marmonné en tenant les anses de mon sac.
Elle a haussé les épaules en tournant la tête vers ses comparses.
— Rien. J’avais juste oublié à quel point ce lycée pouvait avoir des standards ridiculement bas. Beauté, intelligence, ce n’est clairement pas donné à tout le monde. Ça a été, la colle ? Tu t’es bien amusée avec les autres bouseux ?
Elle s’est mise à rire, incitant ses copines à en faire de même. Je n’arrivais pas à comprendre son comportement. Qu’est-ce que cette fille pouvait bien avoir contre moi ? Je ne lui adressais jamais la parole, quand c’était possible, et pourtant, elle venait elle-même chercher des histoires, comme si elle n’avait rien d’autre à faire de sa vie. Ça commençait vraiment à me saouler.
— Ha, ha, tu trouves ça marrant ? Tu n’as rien d’autre à faire, un mercredi après-midi ? Comme t’entraîner à faire des saltos, par exemple ?
Elle a eu un sourire hautain en me regardant de haut en bas une nouvelle fois, son regard hostile et son expression amusée.
— M’entraîner à faire des saltos ? Mais pauvre gourde, on maîtrise toutes les saltos, ici. Il n’y a que toi qui ne sais rien faire de ton corps de dinde. Il paraît que mademoiselle a besoin des conseils du petit nouveau pour sauter sur un trampoline ? Ça va, cool ta vie ? Tu t’es crue où, exactement ? À aller aborder les beaux mecs, comme ça ?
Je l’ai dévisagée. Qui lui avait raconté que Vince m’avait aidée à m’entraîner à faire des figures sur le trampoline ? Oh, mais qu’est-ce qui m’étonnait, après tout ? Ils étaient très forts, à Owen Haims, je l’avais déjà constaté. Et vu que Vince avait attiré l’attention de beaucoup de gens en arrivant, évidemment que ses actions étaient surveillées. Mais que voulait Anya, maintenant ? Que je ne m’approche pas de Vince sous prétexte que c’était un canon ?
— Euh… qu’est-ce que ça peut bien te faire, que je traîne avec un beau mec ? Tu penses avoir le monopole sur tous les mecs un peu canons, ou quoi ?
— Je croyais que tu connaissais clairement ta place dans ce monde, mais je vois que ce n’est pas le cas. Toi, tu es là, a-t-elle fait en levant son pied et en l’écrasant sur le sol. Une fourmi. Une poussière. Un détail. Moi, je suis là. (Elle a levé le doigt vers le plafond). Un soleil. Tout le monde me voit et apprécie de m’avoir dans les parages car si je m’effondre, c’est l’apocalypse. Alors, essaie de te rappeler que tu n’as aucune importance dans ce lycée et que les mecs dans ce style ne s’intéresseront jamais à une fille dans ton genre. Le plus tôt tu enregistreras ça dans ton esprit de débile, le mieux ce sera pour tout le monde.
Elle a fait un signe de la tête à ses accompagnatrices et elles sont parties d’un pas fier.
J’ai longuement soupiré en essayant de retrouver mon calme. Clairement, elles avaient fait monter ma tension.
J’ai repris mon chemin dans le couloir et ai tourné à l’angle pour me diriger vers mon casier. Je me suis arrêtée net en voyant Vince Lewart, assis contre le mur du couloir. Il m’a fallu deux ou trois secondes pour me remettre en mouvement. En m’approchant de lui, je me suis rendu compte qu’il avait les yeux fermés. Est-ce qu’il dormait ? J’ai doucement prononcé son nom, mais il n’a fait aucun geste, confirmant ainsi qu’il dormait bel et bien.
Je me suis assise en face de lui et me suis mise à le fixer. Il était adorable. On avait envie de le prendre dans ses bras et de lui faire des bisous.
Ouh là ! J’avais passé un peu trop de temps en colle à ne rien faire, on dirait ! Et la rencontre avec Anya n’avait rien arrangé. Je perdais un peu la tête.
Tout était calme autour de nous, ce qui ne m’étonnait pas puisque tous les gens sains d’esprit avaient quitté le lycée dès que possible. Les rares fous encore présents faisaient partie de clubs. Mais, à ce que je sache, Vince n’avait rejoint aucun club.
J’ai posé ma main sur sa joue et l’ai gentiment tapotée. Ce geste a eu l’effet escompté, puisqu’il a tout de suite ouvert les yeux. Il a d’abord semblé un peu déboussolé, mais il s’est très vite repris.
— Ah, tu es là, a-t-il soufflé.
J’ai froncé les sourcils en le lâchant. Est-ce qu’il m’attendait ?!
— Qu’est-ce que tu fais là ? Je te pensais parti depuis longtemps.
— J’ai assisté à l’entraînement des footballeurs, et puis je me suis dit que ce serait sympa de venir te faire un coucou.
Il avait pensé à moi ! Ça m’a fait plaisir, parce que j’avais pensé à lui aussi. Enfin, parmi une dizaine d’autres personnes.
— Et tu t’es endormi.
— Apparemment, a-t-il admis en souriant. Tout est si calme que je n’ai pas réussi à tenir.
J’ai hoché la tête en ajoutant :
— J’ai failli m’endormir, en colle, mais le surveillant ne m’a pas lâchée. Du coup, j’ai trop sommeil.
Il a ricané quelques secondes, avant de se taire et me fixer longuement. Son regard a d’abord plongé dans le mien, avant de remonter sur mes cheveux, redescendre sur mon nez, puis mes lèvres, puis…
J’ai détourné les yeux, troublée par les deux beaux lapis perçants et leur trajectoire incendiaire.
Avant de reprendre la parole, je me suis raclé la gorge. Il faisait chaud, tout à coup.
— Qu’est-ce que tu comptes faire, maintenant que tu es réveillé ?
— Je n’en sais rien. Je vais peut-être attendre Jim.
J’ai hoché la tête en me levant. Il fallait de toute façon que je rentre.
— O.K. Je dois y aller, moi. À demain, alors.
Me dirigeant vers la sortie, j’ai senti son regard posé sur moi. Sur quelle partie de mon corps, telle était la question. Est-ce que mon jean derrière-de-rêve faisait son effet ?
Tss, n’importe quoi… Vince, en sa qualité de demi-dieu, côtoyait les plus belles filles des environs. Des derrières de rêve, il devait en connaître pas mal. Et le mien ne faisait sûrement pas partie de cette catégorie.
— Attends, Roxanne ! m’a-t-il soudain hélée.
Je me suis retournée, espérant afficher une expression neutre. Il s’est levé et a ramassé son sac. En quelques pas, il a couvert la distance qui nous séparait.
— Qu’est-ce que tu vas faire, toi ?
— Rentrer.
— Mais encore ?
— Je n’en sais rien, peut-être regarder un film.
Il a hoché la tête, me scrutant en silence. Sur la défensive, je lui ai demandé ce qu’il y avait.
— Tu n’aspires pas à mieux qu’à regarder un film toute seule chez toi ?
— Qu’est-ce que tu veux dire ?
— On n’a qu’à aller au cinéma.
Je l’ai dévisagé. Il était sérieux ? Il me proposait vraiment d’aller au cinéma avec lui ? Je n’y croyais qu’à moitié.
— Très drôle.
— Je ne rigole pas. Ce serait sympa, tu ne crois pas ?
Sympa ? Être assise à côté du sexy Vince Lewart dans le noir ? Ce n’était pas exactement la définition que je me faisais de « sympa ». Par contre, des adjectifs « dangereux », « stupide » et « inconscient », si.
— Franchement, Vince, je ne crois pas.
— Pourquoi ?
— Je ne suis pas trop d’humeur.
Et puis, je ne voyais pas très bien pourquoi il voulait qu’on aille au ciné ensemble. Si c’était encore pour que je me prenne les foudres d’Anya Rovski et de sa clique, non merci.
— Allez, Roxanne ! Ce sera marrant. C’est quand la dernière fois que tu es allée au ciné ?
— L’année dernière. Quand j’avais encore un intérêt à y aller.
— Tu en as de nouveau un : t’amuser. Passer du temps avec quelqu’un.
— Sache que je m’amuse déjà chez moi, à passer du temps avec quelqu’un : ma grand-mère.
L’air incrédule, il m’a considérée longuement.
— Ta grand-mère.
— Oui.
— Roxanne, ta grand-mère n’a plus dix-sept ans depuis longtemps… (Il s’est tu un instant, avant de reprendre :) Bon, je ne te laisse pas le choix. Tu viens avec moi.
Je me suis mise à protester, mais ma voix s’est éteinte quand sa main s’est emparée fermement de mon bras. J’ai senti comme des étincelles courir tout le long de mon corps et je n’ai donc plus été douée de parole pendant un certain temps.
Nous avons marché en silence jusqu’à ce que je lui demande :
— Tu sais où est le ciné, au moins ?
— Non, mais tu vas me le dire.
— Et pourquoi je ferais ça ? lui ai-je demandé en ricanant.
— Tout simplement parce que je te le demande.
Je me suis arrêtée de marcher pour lui lancer un regard noir. Il avait l’air très sérieux.
— Ah, et je vais t’écouter aveuglément ? Mais tu es un gros macho, ma parole !
— Si tu commences comme ça, on n’y arrivera jamais. Ce n’est pas la peine de te mettre sur la défensive, tu sais. Je ne suis pas là pour t’agresser. Je veux juste passer un peu de temps avec toi et apprendre à te connaître.
Vraiment ? Apprendre à me connaître ? Personne ne voulait ça. Qu’est-ce qui n’allait pas chez Vince ?
— Alors ? Tu vas me laisser une chance de mieux te connaître ?
— Dis-moi ce que ça t’apporte. Tu as passé un pari, ou quoi ? Le petit nouveau doit se rapprocher de la paria de service pour être accepté, c’est ça ?
— Mais qu’est-ce que tu racontes ? s’est-il étonné.
— Laisse tomber, j’y vais.
Je suis partie en trombe, furax. Furieuse, oui, mais malheureusement pas étonnée…
***
— Oui, dimanche.
— Ma chérie, ce serait avec plaisir.
— Vers midi ?
— D’accord.
J’ai raccroché avec soulagement. Je n’avais pas dit à ma mère que mon père venait lui aussi, et vice-versa. Ce n’était franchement pas la peine, sinon j’allais rater ma mission et faire ricaner le psy Lewart. Hors de question de tomber si bas.
— Je trouve excellent le fait que tu veuilles à nouveau voir tes parents, Roxanne. C’est important.
J’ai offert un sourire à ma grand-mère. Il valait mieux que je ne lui dise pas ce qu’il en était vraiment – que ce n’était qu’une mission parmi tant d’autres. Sinon, elle serait déçue.
Je me souvenais encore des repas de famille que l’on avait passés tous ensemble. En règle générale, même si mes parents étaient occupés, surtout mon père, on essayait quand même d’en organiser au minimum un par mois. Tous ensemble, avec mes grands-parents maternels et mes parents, on rigolait bien et l’ambiance était toujours au beau fixe. Mon père s’était toujours entendu avec mes grands-parents. Du moins, une fois que la pilule de leur couple était passée – vers la Terminale. Les rires autour de la grande table, les moments de joie partagés dans le jardin autour du barbecue, tout ça me manquait beaucoup.
— Au fait, ma chérie, madame Sinke m’a appris qu’elle t’avait vue à plusieurs reprises avec un jeune homme. Est-ce que c’est vrai ?
Elle avait l’air super excitée. La pauvre, je ne pouvais décemment pas briser le mythe de la Roxanne de nouveau sociable.
— Oui. Il s’appelle Vince.
— Oh, mais c’est fantastique ! Tu le connaissais déjà ?
— Il est nouveau. Il est arrivé il y a deux jours avec son père.
— Je suis si fière de toi, Roxanne ! Tu l’inviteras un de ces jours, d’accord ?
J’ai hoché la tête, même si je ne risquais certainement pas de l’inviter. Si ça faisait plaisir à ma grand-mère de croire que je m’étais fait un nouvel ami, qui étais-je pour la faire redescendre de son nuage ?
D’ailleurs, on voyait bien qu’elle s’était adoucie depuis l’adolescence de ma mère ! Elle n’avait clairement aucun problème avec le fait que sa petite-fille de moins de dix-huit ans traîne avec un mec – dont elle n’avait jamais entendu parler, pour couronner le tout.
— Que vas-tu faire, cet après-midi ?
— Je pensais rester avec toi. On pourrait regarder un film ou jouer aux échecs.
Elle a souri avec indulgence, puis m’a assuré que ce ne serait pas possible.
— Nous sommes mercredi, Roxanne. Je dois aller à l’association.
Super. J’avais complètement oublié ça ! Du coup, j’allais vraiment rester seule… Enfin ! C’était une habitude. Mais en comparant cette option avec celle de la salle-toute-noire-avec-le-bon-sang-de-sexy-Vince-Lewart, c’était plus un cauchemar qu’autre chose.
Je me suis assise prudemment à côté de Vince, sans un mot. Il ne m’a même pas regardée, trop occupé qu’il était à discuter avec la fille de la table de devant. Franchement, il n’avait pas mis beaucoup de temps à s’intégrer. En trois jours, c’était fait! Qu’il me donne son secret! J’ai sorti mon cahier et l’ai balancé sur la table. Il est allé tout droit se loger contre l’avant-bras de Vince. Celui-ci m’a jeté un rapide coup d’œil, avant de reprendre sa conversation avec Mercy Capes. Une fille avec un prénom pareil, je vous jure… Aucune pitié. — Tu n’as pas l’intention de t’inscrire au foot? Mais pourquoi? — Franchement, le foot, ce n’est pas mon truc. — Arrête. Et ces gros muscles, alors, tu les as eus comment? J’ai suivi la main de Mercy, qui est venue entourer les biceps saillants de Vince. Waouh, moi qui pensais que cette fille était timide! Elle était, en fait, tout le contraire. Sa timidité en cours n’é
Le regard d’Anya est tombé sur moi et je n’ai eu qu’une envie: déguerpir. Mes journées n’étaient déjà pas géniales quand j’avais une interaction avec elle une fois, alors deux… Jim, quant à lui, nous a adressé un sourire. C’était apparemment devenu son habitude de relever mon existence. — Salut, vous deux! On était justement en train de parler de toi, Vince. Tu vas venir nous voir nous entraîner, ou pas? Tu es la bienvenue aussi, Roxanne. J’ai levé les yeux vers Vince, qui me regardait aussi. Il avait l’air d’hésiter. — Je ne sais pas trop. On a eu un contrôle de physique tout à l’heure, on est un peu crevés. Je ne sais pas si c’est pareil pour toi, Roxanne? — Oui, carrément, ai-je répondu en m’étirant machinalement le cou. Il est à quelle heure, votre entraînement? — On commence dans une heure, et les cheerleaders, quinze minutes après. C’était si dur que ça, ce contrôle? Vince a so
Je me suis approchée de Vince en silence. Il discutait avec des gars de l’équipe de foot. Il m’a repérée au moment où j’arrivais derrière un de ses potes et il a esquissé un grand sourire. J’ai senti mon cœur battre plus vite devant un sourire aussi lumineux. Il avait vraiment un beau sourire. Ce n’était pas facile de continuer à marcher normalement couvée par un tel regard chaleureux. Les autres ont suivi le regard de Vince et m’ont dévisagée. Quand je suis arrivée à leur niveau, ils ont prétexté avoir un pote à voir et sont partis. Restés seuls, Vince et moi nous sommes observés en silence. L’océan de ses yeux me happait dans ses profondeurs et je n’arrivais pas à remonter à la surface. — Salut, a-t-il finalement soufflé. — Salut, ai-je répondu doucement. Ça va? — Ça va très bien, oui. Et toi? Tu as passé un bon week-end? — Oui, ça a été. Je n’avais pas besoin de lui expliquer que mes parents m’exaspéraient au plus haut poi
Je me suis dirigée vers le club de journalisme à la récréation. Il ne fallait pas que Kentin croie que j’avais lâché l’affaire. Cette fois-ci, c’est Aurélien qui m’a ouvert. Il a plissé les yeux en me voyant. Cependant, il n’avait pas l’air surpris. Son meilleur ami lui avait donc transmis le message. — Salut. Kentin est là? Le concerné est arrivé, un petit sourire affiché sur le visage. D’autres membres étaient présents et me dévisageaient d’un air bizarre. — Allons dans le bureau. Je les ai suivis jusqu’au bureau du président et du vice-président. Tout était bien rangé, strict, ce qui ne m’étonnait pas. Ces deux-là étaient comme ça. — Kentin m’a appris que tu voulais intégrer le club. Je ne comprends pas tes motivations. Ah ouais? Je croyais pourtant qu’il était monsieur-je-sais-et-comprends-tout! Mais bon, je me suis retenue de lui lancer ça à la figure, parce qu’il allait influer d’une manière ou d’une autre sur m
— Alors, Roxanne, qu’est-ce que tu as pensé du film? m’a interrogée Jim en sortant du cinéma. — C’était super. Certains passages étaient vraiment hilarants. — Je pense la même chose. Je n’ai pas été déçu. Je me suis tournée vers Vince, qui regardait sa montre d’un œil distrait. Je n’ai même pas eu le temps de lui adresser la parole que déjà Anya Rovski se joignait à nous, prenant simultanément le bras des deux cousins. — Jamie et Vicky n’ont pas pu venir, elles ont été retenues par Terrence. Il a invité toute l’équipe, ils sont tous là-bas. On y va, Jim, Vince? Ils nous attendent. Clairement mise à l’écart par cette invitation, j’ai tenté un regard vers Vince. Il était en train de regarder Anya d’un air préoccupé. — Roxanne et moi avions prévu… — Je suis sûre qu’elle peut comprendre qu’il y a d’autres urgences. Pas vrai? Ça te dérange que Vince rejoigne l’équipepour le reste de l’aprèm? Son
Je suis arrivée devant le portail en avance, ce qui était rare. Devant lui se tenait Vince Lewart, appuyé au grillage. J’ai eu, l’espace d’un instant, envie de passer à côté de lui sans rien dire, mais je ne pouvais pas, car ce n’était pas correct. — Salut, Vince. Il m’a regardée, puis s’est penché vers moi. Qu’est-ce qu’il voulait? Ah, oui, me faire la bise. — Salut. Ça va mieux, depuis hier? — Oui. Je voulais d’ailleurs m’excuser d’avoir craqué. — D’avoir pleuré, tu veux dire? — Ouais. C’était n’importe quoi. Tu as dû me prendre pour une folle, avec ma tête à faire peur. Il a ri. RI! C’était donc si drôle que ça? — Ravie de voir que ça te fait rire. — Ça me fait rire parce que c’est complètement faux. Et c’est un peu marrant, aussi. — Rien de drôle à être moche. J’ai regretté d’avoir dit ça dès que les paroles m’ont échappé. Il n’avait pas besoin de savoir ce que j
Une heure. Ça faisait une heure qu’on était au Stunnis. Ça commençait à faire long… Vince, lui, semblait s’amuser comme un petit fou. Il était à fond dans le tennis, et cet endroit était son paradis. Tout comme il était celui de mon père. Je ne savais pas ce qui était le pire. — Ce club est vraiment génial! Il a dû vous coûter une fortune! — Oh, ça! Il est évident que j’y ai mis le prix. Mais je suis très fier du Stunnis et ne regrette aucun investissement. Il faisait un très bon chiffre d’affaires, et ce depuis des années. Tous les investissements avaient été rentabilisés, et mon père faisait toujours des bénéfices. Il ne pouvait que ne pas regretter. — Au fait, monsieur, pourquoi ce nom, pourquoi le Stunnis? — C’est un jeu de mots entre «stunning», qui veut dire «stupéfiant», «tennis», et «Stunley». J’ai toujours été très fier de ma trouvaille.
J’ai offert mon plus beau sourire à ma mère en espérant la mettre à l’aise. Elle a simplement esquissé un rictus bizarre. — Ça ne va pas? — Si, si, ma chérie, ne t’en fais pas. Tout va très bien. Et je peux enfin passer une après-midi avec toi, comme au bon vieux temps. Je n’ai vraiment pas à me plaindre! J’ai esquissé un petit sourire. Elle mentait, elle n’allait pas bien. Je ne l’avais que très peu vue depuis dix mois, mais je connaissais encore ma mère. — Ça te dit d’acheter des cookies? lui ai-je proposé en montrant une boulangerie du doigt. — Non, pas pour moi. Enfin, je veux bien t’en prendre. — Mais comment ça? Tu adores les cookies. — Oui, enfin, il est clair que j’aime beaucoup trop de choses. Je dois arrêter. Comme tu as pu le remarquer, j’ai pris quelques kilos. Je l’ai dévisagée sans trop savoir que dire. Je ne m’attendais pas à ça. — Mais maman, tu es superbe! Tu es l’u
— Je n’arrive pas à croire que tu sois venue. Je me suis tournée à temps pour intercepter la main d’Anya Rovski. Cette folle était sur le point de me tirer les cheveux! — Mais qu’est-ce que tu me veux, Anya?! lui ai-je demandé en m’écartant. J’étais sortie dans le jardin pour m’aérer un peu, mais je n’avais pas prévu qu’une peste à moitié folle viendrait m’y rejoindre. J’avais besoin de respirer, et ce n’était pas en sa présence que ça allait être le cas. — Qu’est-ce que tu fais là? Voilà ce que j’aimerais savoir. — J’ai été invitée par Jim. C’est l’anniversaire de Vince, pas le tien. Tu n’as aucun droit de regard sur la liste d’invités. Elle a soupiré en croisant les bras. — Je vois que tu ne comprends pas quand on te parle. — Oui, je sais ce que tu vas me dire. Que je n’ai pas à m’approcher de Jim ni de Vince, que je suis une moins que rien. Je t’ai assez écoutée me rabaisser, c’est bon. C’est termin
J’ai sonné à la porte des Clayne en soufflant un bon coup. C’est Jim qui est venu m’ouvrir. Il m’a souri gaiement en me faisant signe d’entrer. Mon grand-père est parti quand je lui ai fait un signe de la main. — Tu as pu trouver facilement? — Oui, sans problème. Est-ce qu’il y a déjà du monde? lui ai-je demandé pendant qu’il me prenait mon manteau. — Il y a déjà une vingtaine de personnes, oui. Mais oncle Sam et Vince ne sont pas encore là. Je vais poser ce cadeau dans le salon. Suis-moi. Je me suis exécutée en souriant. La maison de Jim était très jolie et accueillante. Il y avait beaucoup de fleurs, de tableaux, de décorations en tout genre. Les invités qui étaient arrivés avant moi étaient déjà en train de grignoter et de danser. J’ai repéré Mélina, Mercy et Anya. Les autres étaient des Sportifs et des pom-pom girls que je ne connaissais pas. Enfin, je les avais déjà vus, mais je ne connaissais que leurs prénoms, tout au plus.
Au sortir de l’histoire de l’art, j’ai décidé de me rendre en ville pour trouver un cadeau à Vince. Je ne savais pas trop ce qu’il aimait, ce n’était donc pas une mince affaire. Mais bon, je n’allais pas débarquer à la fête d’anniversaire les mains vides. J’avais un peu d’argent dans un petit porte-monnaie que je gardais toujours avec moi depuis que j’avais pris l’habitude de manger ailleurs qu’à la cafète. Vu que je remangeais à la cafétéria, j’avais quelques économies. Je pouvais acheter quelque chose de bien. Dire que pendant que je partais à la recherche d’un cadeau pour lui, Vince passait du bon temps avec une autre! Qu’est-ce qu’il pouvait bien trouver à Mercy Capes, d’ailleurs? Bon, il fallait avouer qu’elle était canon et qu’elle n’était pas mauvaise niveau notes. Mais elle n’était pas sérieuse. Elle était frivole, elle nous l’avait bien montré. J’avais toujours pensé que c’était une fille timide, sérieuse, qui faisait passer ses études av
En rentrant chez moi après le cours d’allemand que j’avais passé à pleurer intérieurement, j’ai vu ma mère, assise autour de la table avec ma grand-mère. — Coucou, maman. — Bonjour, ma chérie. — Qu’est-ce que tu fais là? me suis-je enquise en lui faisant la bise. J’ai fait un bisou à ma mima avant de m’asseoir à côté d’elle, face à ma mère. — Je suis venue discuter avec ma maman. — C’est à propos de papa? (Elle a hoché la tête.) Ça a avancé, entre vous? Elle a souri en prenant une gorgée de jus d’orange. Elle avait l’air d’aller mieux. Elle avait repris des couleurs et avait l’air moins triste qu’avant. — Ça avance, oui, mais on y va doucement. On s’apprivoise de nouveau, peu à peu. Ça fait plus d’un an que nous n’avons pas fait quelque chose tous les deux pour le plaisir. Alors lundi soir, nous avons dîné au restaurant. C’était une soirée très agréable. Hier, nous sommes allés au cinéma. (Elle a ri.)
Je me suis assise dans les gradins en attendant que Jim finisse son entraînement. Il était temps d’amorcer la mission. Franchement, ça ne me faisait pas plaisir. Je ne voulais pas sortir avec Jim juste à cause d’une mission. Ça ne se faisait pas. Mais il fallait surtout s’en prendre à l’oncle Samuel. Je n’étais qu’une exécutante. J’ai bâillé en posant ma tête sur mon sac. J’avais vraiment sommeil. Je n’avais dormi que trois ou quatre heures, encore une fois. Ça devenait de plus en plus problématique. J’en avais marre de ne pas réussir à dormir. Mais ce que Vince m’avait dit me tracassait trop. En plus, je ne savais pas vraiment ce qu’il ressentait pour moi. Il m’avait seulement affirmé qu’il voulait me faire «sienne». O.K., c’était assez fort comme propos, mais qu’est-ce que ça voulait dire, au final? Il me voulait, ouais, mais pourquoi? Pour faire ce qu’il avait fait avec Mercy Capes? Hors de question. Ce n’était pas sur ma liste de pri
Je suis entrée dans la salle d’anglais avec la boule au ventre. J’avais vraiment super peur de revoir Vince. On pourrait croire que le week-end m’avait porté conseil, mais en fait, pas du tout. Tout ce que j’avais fait, c’était espérer que tout roule pour mes parents et que leur dernière chance soit la bonne. Et j’avais fait mes devoirs, bien sûr. Et j’avais pensé à Vince, c’est vrai. Même à Jim, d’ailleurs. Mais je n’étais pas encore préparée moralement à les revoir, ni l’un ni l’autre. Enfin, l’un encore moins que l’autre. Il était assis sur la table, en train de discuter avec un gars et une fille d’une autre classe. Quand son regard s’est posé sur moi tandis que je m’approchais, mon cœur s’est mis à battre plus vite. Il était franchement beau, n’empêche. C’était comme si le week-end l’avait encore embelli. Mais ce n’était pas possible, pas vrai? Ouais… on ne devient pas plus beau en deux jours. — Salut, Roxanne, m’a saluée le mec de l’autre classe pendant qu
J’ai souri à mon père quand il est entré dans la maison. Ouf, il n’avait pas amené sa blonde! Il s’en était tenu à ce qu’il m’avait promis. Ma mère s’est levée du canapé en voyant mon père entrer dans le salon. Elle a lissé sa jupe avant de s’avancer vers lui en silence. Ce n’est qu’une fois arrivée devant lui qu’elle l’a salué et lui a fait la bise. J’ai remarqué que mon père a été assez déstabilisé par ce geste, ce que je pouvais comprendre. Ça faisait au moins plus de vingt ans qu’ils ne s’étaient pas fait la bise. Il y avait donc de quoi être interpellé. De plus, depuis le divorce, ils ne se saluaient jamais quand ils se voyaient. — C’est super que vous ayez tous les deux accepté de venir. — Pourquoi nous avoir demandé de passer une après-midi ensemble, Roxanne? Qui t’a donné cette idée? s’est enquis mon père. Cette fois, je pouvais le leur avouer. — C’est mon psy. Il veut que je passe plus de temps avec vous. Pou
Jim m’a souri pendant que je ramassais mon manuel d’allemand, et je lui ai rendu son sourire, quand même toujours déstabilisée qu’il me sourie comme ça, sans aucune raison. — Roxanne, a-t-il fait en s’approchant, nous sommes amis, n’est-ce pas? Je me suis figée. Sans blague? On était amis, lui et moi? Je n’avais jamais vu les choses comme ça. J’avais même prévu de dire au psy Lewart que j’avais raté sa mission. Mais… Jim était mon ami. — Euh… oui. — Bon. J’aurais un conseil à te demander. À ton avis, comment est-ce que je pourrais confesser mes sentiments à une fille sans lui faire peur? O.K., que plus personne ne bouge! Jim Clayne était en train de me demander à moi, Roxanne «Paria» Stunley, des conseils pour pouvoir avouer son amour à une fille? Ce n’était pas possible. — Euh, franchement, je pense que tu t’adresses
J’ai offert mon plus beau sourire à ma mère en espérant la mettre à l’aise. Elle a simplement esquissé un rictus bizarre. — Ça ne va pas? — Si, si, ma chérie, ne t’en fais pas. Tout va très bien. Et je peux enfin passer une après-midi avec toi, comme au bon vieux temps. Je n’ai vraiment pas à me plaindre! J’ai esquissé un petit sourire. Elle mentait, elle n’allait pas bien. Je ne l’avais que très peu vue depuis dix mois, mais je connaissais encore ma mère. — Ça te dit d’acheter des cookies? lui ai-je proposé en montrant une boulangerie du doigt. — Non, pas pour moi. Enfin, je veux bien t’en prendre. — Mais comment ça? Tu adores les cookies. — Oui, enfin, il est clair que j’aime beaucoup trop de choses. Je dois arrêter. Comme tu as pu le remarquer, j’ai pris quelques kilos. Je l’ai dévisagée sans trop savoir que dire. Je ne m’attendais pas à ça. — Mais maman, tu es superbe! Tu es l’u