Chapitre 4
La lourde responsabilité pour laquelle je m'étais engagée n'a pas plû à Gérard. Certes, il n'a rien laissé paraître de son mécontentement. Mais tout de suite, je l'ai
deviné.— Ce n'est rien bébé, me suis-je alors sentie obligée de me justifier. Ce n'est rien qu'un service que je rends à ce pauvre monsieur.
Assis à mes côtés sur son canapé, Gérard qui me tenait serré dans ses bras s'est enquit incrédule :
— Vraiment Ella ?
— Vraiment ! lui ai-je certifié. Il s'agira juste de garder un œil sur le petit le temps que son père passe le chercher à la sortie de l'école. En somme, je ne ferais rien d'exceptionnel que ce en quoi mon travail consiste déjà.
Plus ou moins rassuré, j'ai senti Gérard se décrisper.
— Si ce n'est que ça alors d'accord, a t-il finalement marmonné. Tu as un si grand cœur ma chérie.Tout ce que j'espère c'est que cet homme n'en profite pas.
A cet instant là, je n'ai pas voulu prêter la moindre importance aux craintes de mon compagnon. Et pourtant, j'aurais dû. Comment Gérard a t-il su lire aussi clairement dans l'avenir ? Car bien sûr, il avait vu juste. Si les deux premiers jours, Ivan s'est montré ponctuelle pour récupérer son fils. Les jours suivants ont été tout autre. Le jeune médecin a commencé effectivement à abuser de la situation. A la sortie de l'école, il n'est passé que très rarement à l'heure prendre son fils. Plus d'une fois, j'ai dû l'attendre. Pendant des minutes voir des heures, je suis restée coincée à l'école avec le petit Joël. Pour justifier ses retards, Ivan avait toujours une bonne excuse.
—Désolé, j'ai été retenu toute la journée au bloc opératoire, m'a t-il déclaré la première fois. Une urgence.
Qu'est-ce que j'étais sensée répliquer après un tel argument ?
Tenant le petit corps de Joël somnolant dans mes bras, j'ai laissé mon regard parcourir chaque trait de son visage. Pour la première fois, j'ai alors remarqué à quel point il était attirant. La fatigue qui l'accumulait, elle aussi ne m'a pas échappé.
—J e comprends ne vous en faites pas, ai-je balbutié quelque peu troublée. J'avais des devoirs à corriger de toutes les façons.
Il n'en a pas fallu pas plus à Ivan pour ne plus paraître embarrassé de m'avoir fait attendre. Moi, comme une collégienne, je n'ai pas cessé de le scruter. Grand et athlétique, Ivan malgré son allure de paumé était séduisant. C'était à n'en point douter un bel homme. A l'idée qu'en plus d'être doté d'un physique pareil, il passait ses journées à sauver des vies, je n'en finissais pas de le dévisager avec admiration. Est-ce là, à cet instant précis que mon bourreau a décidé de faire de moi sa victime ? Ivan a t-il su rien qu'à l'intensité de mon regard qu'il pourrait faire tout ce qu'il voudrait de moi ? Jusqu'à présent, je dois l'admettre, je n'en ai aucune certitude.
Ce soir là pourtant, dans cette cour d'école déserte, Ivan un bref instant a laissé son regard de prédateur s'accrocher au mien. Reprenant soudain ses esprits, il a fait mine de s'éclaircir la voix pour se donner à nouveau de la contenance. Moins froidement que lors de nos échanges précédents, il m'a ensuite demandé:
— Je vous raccompagne ? Où habitez-vous ?
Une question simple qui m'a pourtant donné à réfléchir. Ce soir là, comme tous les autres soirs de la semaine, je devais en principe retrouver Gérard chez lui. Pour notre petit tête à tête quotidien, j'étais déjà sacrément en retard. Toutefois, j'ai refusé l'idée qu'Ivan me dépose au domicile de ce dernier.
—Heu...j'habite à quelques kilomètres, m'étais-je alors entendue lui répondre. J'habite dans les quartiers nord non loin de la station de métro. Vous connaissez ?
En face de moi, j'ai vu Ivan grimacé. Certainement regrettait-il la proposition qu'il a eu à me faire. Il faut le dire, la circulation qui menait aux quartiers nord n'était pas agréable. C'était d'ailleurs l'une des plus mauvaises de la ville. D'abord, il y avait ces nombreux barrages de police sur la route. Ensuite, il y avait les célèbres bouchons. Pour la mauvaise conduite des chauffeurs routiers on n'en parlait même pas. Pour ne pas me raccompagner à mon domicile, Ivan avait donc toutes les bonnes raisons. Malgré cela, il ne s'est pas défilé.
— Vous déposer m'obligera à faire un sacré détour avant de regagner les quartiers Ouest mais venez.
Déjà, il se détournait. Vers sa Ford garée sur le parking devant l'école, il s'est dirigé à grand pas. Derrière lui, avec le petit Joël dans les bras, je n'ai plus eu qu'à le suivre. Cependant, je restais gênée. Alors aussitôt installée dans la luxueuse voiture, je n'ai pas pu m'empêcher de déclarer :
— Si ça vous dérange de me raccompagner...
Un seul regard impérieux d'Ivan m'a contrainte à oublier le reste de ma phrase. Comme muselée par une main invisible, je me suis tue. Sur le siège avant, je me suis sagement tassée.
Dans l'auto qui se frayait difficilement un chemin dans les embouteillages qui bloquaient la circulation sur le boulevard, Ivan et moi avons tous les deux gardé le silence. Le regard vide, l'homme étrange n'a pas trouvé utile de me faire la conversation. Je n'ai pas osé essayer non plus. J'étais trop occupée pour ça. Le téléphone collé à l'oreille, je m'efforçais d'expliquer à Gérard les raisons de mon retard. Mon compagnon n'était pas content. Il se plaignait. Du mieux que je le pouvais, je n'ai eu de cesse de le rassurer. Ivan qui a écouté toute la discussion sans rien laissé paraître jusque-là, s'est enquit une fois que j'ai raccroché:
— C'était votre mari au téléphone ?
Surprise par la question, j'ai levé deux yeux hagards vers lui.
—Non, lui ai-je répondu. Il s'agit de mon petit ami. Je ne suis pas encore une femme mariée.
De devoir lui rappeler ce détail me sidérait. Combien de fois encore devais-je lui signifier mon situation matrimoniale ? Obstinément, Ivan persistait à occulter cette information. Comme si ma personne en elle-même et tout ce qui s'y rapportait le laissaient totalement de marbre.
— Si ce n'est que votre copain, il n'a pas le droit de se foutre en rogne comme ça, a tranquillement déclaré Ivan. De toutes les façons on est presqu'arrivé.
En effet, c'était exacte. Pour le lui signifier, j'ai envoyé rapidement un message à Gérard. Ce message est resté sans réponse. Gérard boudait. Moi je m'inquiétais. Je redoutais la réaction de mon compagnon. Lorsqu'enfin, je suis arrivée à destination, je n'ai donc pas perdu de temps. J'ai sauté de la voiture et j'ai foncé chez moi. Renonçant à l'idée de le rejoindre vu l'heure tardive, j'ai décidé plutôt de l'appeler. Au téléphone, mon chéri a mâché très peu ses mots. Lui qui d'ordinaire restait toujours dans la contenance, ne s'est pas gêné pour me dire le fond de sa pensée.— C'est inconcevable, s'est-il indigné. Bon sang Ella qu'est-ce qui t'arrive ? Comment est-ce que tu as put tolérer une foutaise pareille ?
— Ce n'est pas de la foutaise, lui ai-je alors rétorqué. Je te l'ai dit, il a eu une urgence chirurgicale.
A l'autre bout du fil, j'ai entendu Gérard jurer entre ses dents. Mais il n'a plus bronché.
— Ne t'en fais pas chéri, ai-je alors ajouté la voix doucereuse. Ce genre de situation n'est qu'une exception qui ne se reproduira plus à l'avenir.
— Qu'est-ce que tu en sais ? s'est enquit Gérard dubitatif.
— Je le sais parce que lui-même me l'a dit, me suis-je entendue mentir. Le père du petit Joël me l'a certifié de vive voix.
Honteuse après ce flagrant mensonge, j'ai été soulagé lorsque Gérard a parut y croire.
— J'espère pour lui qu'il tiendra sa parole, a t-il alors lâché. Je ne veux plus avoir à passer la soirée tout seul comme aujourd'hui.
—Ne t'en fais pas, lui ai-je alors assurée un sourire coquin aux lèvres. Demain, je te promets que nous rattraperons le temps perdu.
Comme vous pouvez le deviner le lendemain, rien ne s'est passé comme je l'ai promis.
Chapitre 5Dominer les gens, pouvoir en faire ce qu'il voulait, voilà ce qu' Ivan Clotaire aimait. Le fait que je contrecarre ses projets la seconde fois qu'il s'est pointé en retard ne lui a que très moyennement plû.— Vous m'avez encore fait attendre docteur, me suis-je permise de lui signifier la main du petit Joël dans la mienne.Somnolant, le pauvre enfant se tenait accroché à moi comme un naufragé à une bouée de sauvetage. Ignorant la présence de son fils, Ivan s'est plutôt évertué à me déshabiller du regard.— Cette tenue ne vous va pas du tout, a t-il lâché sans gêne.Surprise, j'ai froncé les sourcils.— Je vous demande pardon ?Intriguée, j'ai tout de suite jeté un coup d'œil à mes vêtements. Pour la journée qui
Le jour où j'étais sensée tenir la promesse faite à Gérard a été celui de ma déchéance. C'était un mercredi. Je m'en souviens encore. Comme si c'était hier. Au cours de la matinée, tout avait semblé se dérouler normalement. Avec les enfants dans ma salle de classe, on a travaillé. J'ai continué la leçon qui consistait à leur apprendre à compter jusqu'à dix.Vous auriez dû voir mes petits bouts de chou. Ils étaient motivés comme jamais. Les doigts levés, ils participaient tous. Tous sauf un. Joël bien-sûr. Comme à son habitude, le petit garçon étrange se tenait à l'écart. Mais cette fois-ci, j'ai eu vite fait de remarquer que quelque chose n'allait pas. Recoquevillé sur lui-même, Joël grelottait. Une main posée sur so
Cette première fois dans le bureau d'Ivan reste à jamais gravée dans mon esprit. C'était quelque chose vraiment ! Du jamais vu pour moi. Comme tout bon sadique qui se respecte, Ivan avait une manière bien à lui de faire l'amour. D'ailleurs, ce qu'il faisait ce n'était pas l'amour. Il baisait. Ni plus ni moins. Je me demande aujourd'hui comment j'avais fait pour lui permettre de me faire tout ça. Plusieurs fois de suite, il m'avait secoué. Deux fois d'abord dans son bureau, le reste dans sa chambre de garde où je l'avais laissé m'entraîner. Les mains solidement agrippées au rebord du lit, j'avais courageusement enduré ses assauts. Ivan ne m'avait pas menagé. Il m'avait prise avec fougue. Il m'avait tiré les cheveux. Il m'avait claqué les fesses. Une vrai brute. Mais malgré la rudesse de ses gestes, la ferm
Chapitre 8Je dormais déjà quand Gérard frappa à ma porte. Dès qu'il me vit, il sû tout de suite que quelque chose n'allait pas.—Tout va bien ? Me demanda t-il une fois entré. Tu dormais ? Je t'ai réveillé ?Le regard fuyant, j'avais détourné la tête. Précipitamment, je m'étais à nouveau dirigée vers ma chambre.—Tu as une clé Gérard, je lui avais rappelé en me glissant dans mon lit. Pourquoi ne t'en sers-tu jamais ?—Donc je t'ai bel et bien dérangé, conclut-il en s'asseyant sur le bord du lit. Comme tu ne répondais pas à mes appels, j'étais inquiet.M'attirant à lui, il m'avait alors serré dans ses bras.—Pardon mon cœur.Malgré moi, je m'étais raidi. Vivement, je l'avais rep
Chapitre 9Cette nuit là, je la passai en compagnie de Gérard. Comme il lui arrivait quelques rares fois, mon petit ami dormit chez moi. Rêvant certainement au joli bébé qu'il espérait m'avoir mis dans le ventre, il ronfla joyeusement. Moi, j'avais bien du mal à trouver le sommeil. Les yeux grands ouverts, je scrutais les ombres dans l'obscurité. La tête posée sur le torse de mon petit ami, je réfléchissais. Je pensais. Je repensais. Desespérement, j'essayais de me comprendre. Je m'efforçais de me raisonner. Cela me prit toute la nuit. Le lendemain matin, c'est avec une sale tête que je me rendis au travail. Je peux vous l'assurer, enseigner mes petits élèves avec un mal de crâne persistant fût plus que pénible. Heureusement pour moi, la journée passa vite. Bien assez tôt, l'heure de la descente arriva. Enfin ! Press&e
Vous vous en doutez bien, je n'étais pas allée à ce fameux rendez-vous. Je ne pouvais pas. Je ne voulais même pas. J'en mourais d'envie pourtant. Mais il était absolument hors de question que je fasse ça. Que je lui obéisse comme ça. Aussi facilement. Non, je n'étais pas encore assez folle.Bien évidemment, Ivan le prit très mal. Considérant mon refus comme un affront, il choisit de passer à l'offensive. Le soir même, il s'introduisit chez moi, à mon domicile, dans ma chambre. J'étais paisiblement endormie dans mon lit. En l'apercevant, j'avais frôlé la crise cardiaque. Sur le moment, j'avais pensé à crier mais d'une main vite posée sur la bouche, il m'en avait empêché. Les yeux agards, j'avais scruté son visage proche du mien. Intensément. J'avais voulu m'assurer que c'était b
Comme pour Ivan Clotaire quelques mois plus tôt, j'avais reçu la tante de Joël debout devant ma salle de classe. C'était un jour ordinaire. Le soleil dans le ciel était très haut. La journée touchait presqu'à sa fin. L'heure du déjeuner approchait. Assis sur les bancs, mes petits élèves s'impatientaient. Les pauvres commençaient à avoir faim. Moi aussi. Mais ma faim à moi était d'un tout autre genre. Un genre qui se résumait à satisfaire mes plus bas instincts. Si vous voyez un peu ce que je veux dire. Pour combler cette furieuse envie, j'avais justement un rendez-vous à l'hôpital dans pas longtemps. Mon sadique de docteur m'attendait. Comme nous en avions pris l'habitude, je devais le rejoindre dans sa chambre de garde. Ivan ne tolérant que moyennement le retard, il me tardait de le retrouver. Face à
Directement, je rentrai chez moi à Koumassi Prodomo. Pendant tout le trajet en "woro-woro", je gardai les yeux fixés sur mon téléphone portable. J'espérais un appel de mon chéri. J'attendais un signe de sa part. Mais rien ! Pas de coup de fil. Pas le moindre message. Le silence total.J'étais dévastée. J'avais la mort dans l'âme. Mon cœur dans ma poitrine me faisait mal. J'avais mal. J'avais du mal à supporter la situation. Les disputes entre nous étaient tellement rares. Au plus vite, je souhaitais que les choses s'arrangent. Une fois chez moi donc, je finis par craquer. Préférant joindre Gérard par message, je lui écrivis un long texte au travers duquel je lui présentai des excuses et lui exprimai mon désir de nous voir réconcilier. Ensuite, j'attendis. Mais aucune réponse ne vint. Là, je commençai s&eacut
Chapitre 18Le carnage fût découvert par la femme de ménage. Je ne savais même pas qu'Ivan en avait une. Avec toutes les horreurs qu'il trafiquait, c'était vraiment ahurissant. Quoiqu'il en soit, cette idiote hurla en nous apercevant. Épouvantée, elle s'enfuya en trombe.Peu après son départ, ils débarquèrent tous. Les policiers.Comme des fourmis, ils envahirent la pièce. Ils commencèrent à me bombarder de questions. Surtout un d'entre eux en particulier qui se présenta comme étant le commissaire Kuitata. Grassouillet avec deux petits yeux méchants, il vint s'accroupir près de moi.—Hé, m'interpella t-il en me secouant l'épaule. Que s'est-il passé ici ?—..— C'est vous qui avez fait ça ?—...— Quel est votre nom madame ?
Chapitre 17 (partie 2)Il voulait toucher mon ventre. C'était pour cette raison qu'il était venu. Il avait tellement hâte qu'il n'avait même pas pris la peine de se changer avant. Son uniforme scolaire, il le portait toujours. Certainement devait-il revenir directement de l'école. Qui le gardait ? Où était cette junkie de Johanna ? Et Ivan ? Comment le petit garçon avait-il réussi à échapper à sa vigilance et où avait-il trouvé la clé pour entrer ? J'ignorai les réponses à toutes ces questions et je m'en fichais. J'avais là une occasion en or de pouvoir me tirer de cet enfer et je ne me posais pas trente six mille questions.—Apporte moi un couteau, lui ordonnai-je sans perdre de temps.Surpris, Joël fronça les sourcils. Certainement devait-il se demander ce que j'allais en faire de ce couteau. Levant les bras,
Quand la porte s'ouvrit sur Ivan, je ne tournai pas la tête. Je ne levai même pas les yeux. Je ne bougeai pas.A quoi bon ?Les poignets toujours aussi solidement attachés, je restais étendue sur le lit. Le dos tourné. Recroquevillée en boule. Sans réaction ! Sans émotion ! Sans âme ! Comme une morte vivante. Comme Johanna. C'était comme ça que j'étais en train de devenir. J'étais en train de devenir comme cette folle dingue de junkie qui avait bien failli m'éclater la tête. Comme elle, j'avais commencé à me laisser mourir à petit feu. J'étais résignée. J'étais blasée. Je pensais à tort que rien ne pouvait plus m'étonner. Ça, c'était avant d'entendre la voix fluette et enfantine de Joël.—Maitresse ! M'appela t-il.Vivement, je me reto
Evanouie, je vis Gérard. A travers ma vue brouillée, je vis son tendre visage penché au dessus du mien. Si proche. Si réel.—Gérard... l'appelai-je en tentant de me redresser.Un terrible mal parut aussitôt me fendre le crâne. Sous l'effet de la douleur, je grimaçai. Dans un geste instinctif, je voulus porter la main à ma tête. Fermement, Gérard m'obligea à rester couchée. Dans un bourdonnement sourd, le son de sa voix me parvint.—Ne bouge pas, m'ordonna t-il. Reste tranquille.—Alors ? Entendis-je une voix de femme demander d'un air hésitant. Elle va mourir ? Je l'ai tué ?Les yeux mi-clos, je cherchai qui avait parlé. Mais je ne vis rien. Me barrant la vue, Gérard avança la main vers moi. Minutieusement, il m'examina la tête. La caresse de ses doigts dans mes cheveux m'apais
Je décidai de m'échapper. Très tôt. Je n'étais consciente que depuis peu. Pourtant, je me sentais incapable de supporter ma captivité plus longtemps. Je n'en pouvais plus.Attendre jusqu'à la naissance du bébé ! Attendre plusieurs mois jusqu'à la naissance du bébé ! Dans cet enfer ? C'était tout simplement inimaginable.Il fallait m'enfuir. J'avais trop peur de perdre la boule sinon. Être enfermée comme ça, comme un animal dans une cage mettait mes neurones à rude épreuve.Sans rien faire, j'étais la plupart du temps inactive. Convalescente, je restais étendue sur mon lit. Pour m'occuper, je dormais. Quand ce n'était pas le cas, je passais de long moment à fixer le plafond. Je ne disposais d'aucun élément pour me distraire. Je n'avais rien pour me raccrocher au monde extérieur.
Après cette tentative de suicide, la suite des événements reste confus. Je ne me rappelle pas de grand chose. Juste de quelques détails. Par exemple, je me souviens avoir terriblement eu mal au ventre. Je me souviens aussi avoir beaucoup vomi. Après ça, c'est le trou noir.Je crois que j'avais dû perdre connaissance. Par la suite, j'ai le souvenir d'être revenu à moi. Mais là encore tout est flou. Impossible de savoir contrètement ce que je vis et ce que j'entendis. En mémoire, je garde juste cette sorte d'impression, cette sensation étrange d'avoir subit un massage cardiaque et un bouche à bouche. Il y a aussi ce vague souvenir d'un trajet en voiture. C'est tout. A part ça, plus rien.Croyez moi, j'aurais aimé vous raconter un peu plus en détails les faits à ce moment crucial là. Mais c'est impossible.&n
Ce ne fût que très tard dans la nuit que Gérard rentra enfin. Titubant, il puait l'alcool à plein nez. Loin d'être tout fait ivre, il paraissait néanmoins très éméché. Il avait picolé. C'était évident. Certainement, avait-il passé la soirée à vider quelques bouteilles. Vu la situation, une telle alternative pour noyer son chagrin était tout à fait compréhensible. Mais songer un instant que je pouvais être la cause de son état d'ébriété m'accablait. Je me sentais responsable. Responsable et coupable. Plus que jamais, je souhaitais que les choses s'arrangent entre nous. Mais à la tête que fit Gérard en me voyant, je compris que ce n'était pas gagner d'avance. —Qu'est ce que tu fais ici ? M'attaqua t-il dès son entrée. J'espè
—Ho mon Dieu ! Fis-je en rabaissant précipitamment les pans de ma robe pendant qu'Ivan lui, remontait son pantalon en quatrième vitesse. —Merde ! Jura t-il en refermant sa braguette, d'où il sort ce voyeur ? Qui êtes-vous ?—Qui je suis moi ? S'exclama Gérard qui paraissait alluciné. Me demander qui je suis moi ?Entre ses deux mains, mon petit ami se prit la tête.—Ça, c'est le comble ! s'exclama t-il en levant les yeux au ciel.Dépité, il lâcha un rire désabusé. Le pauvre paraissait vraiment bouleversé. Qu'est ce qu'il avait exactement vu au juste ? Depuis combien de temps était-il là ? Depuis combien de temps nous observait-il ? Je l'ignorai. Avec tout le vacarme que nous faisions, ni Ivan ni moi ne l'avions entendu entrer. Certainement, Gérard s'était-il incrust
Directement, je rentrai chez moi à Koumassi Prodomo. Pendant tout le trajet en "woro-woro", je gardai les yeux fixés sur mon téléphone portable. J'espérais un appel de mon chéri. J'attendais un signe de sa part. Mais rien ! Pas de coup de fil. Pas le moindre message. Le silence total.J'étais dévastée. J'avais la mort dans l'âme. Mon cœur dans ma poitrine me faisait mal. J'avais mal. J'avais du mal à supporter la situation. Les disputes entre nous étaient tellement rares. Au plus vite, je souhaitais que les choses s'arrangent. Une fois chez moi donc, je finis par craquer. Préférant joindre Gérard par message, je lui écrivis un long texte au travers duquel je lui présentai des excuses et lui exprimai mon désir de nous voir réconcilier. Ensuite, j'attendis. Mais aucune réponse ne vint. Là, je commençai s&eacut