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Chapitre 3

Auteur: Lakhita
last update Dernière mise à jour: 2021-08-16 19:58:00

Pendant une seconde, je n'étais plus dans la cabine. Du moins pas mentalement. J'étais dans une forêt. Sûrement celle dont Agatha m'a parlée. Je n'ai pas eu le temps de regarder l'endroit en détail. J'ai à peine eu le temps de voir les arbres que j'étais de retour dans mon corps. Je m'accrochais à mon siège perturbée par ce à quoi je venais d'assister. Je ne savais pas ce qui venait de se passer. Je n'avais jamais rien vécu de tel auparavant. Agatha me regarda inquiète. 

« Ça va Laula ? Tu es très pâle.

-Non, je vais bien. Ne t'inquiète pas.

-Tu es sûre ? On peut aller prendre l'air si tu veux.

-Ne t'inquiète pas pour moi. Merci. » 

Agatha me sourit doucement. Son âme avait repris des couleurs et je la regardai perplexe. C'était étrange. Comme si elle pouvait me voir et qu’elle réagissait à ma présence... C'était trop bizarre ! Comment tu as fait ? Vous avez établi une connexion ! Une connexion ? Oui. Tu as jeté ton âme contre celle d'Agatha et tu as vu ce qu'elle revivait. J'avais vraiment fait ça ? Je fronçais les sourcils. Ce n'était pas possible. Je n'avais jamais été capable de faire ce genre de chose auparavant. Qu'est-ce qui avait changé ? Je ne sais pas mais j'ai senti ton âme quitter ton corps puis être à nouveau aspirée. C'était... troublant. Du coup j’avais beaucoup plus de place. Tu devrais le faire plus souvent.

J'aurais jeté mon âme hors de mon corps ? Je ne savais pas que j'en étais capable. Quoi qu'il en soit maintenant que j'y pensais, cela avait du sens pour moi. Ah bon ? On m'en avait parlé en classe. Lorsqu'un démon hantait un corps et faisait taire une âme, cette dernière devenait folle d'autant plus qu'elle se taisait. Puisque deux âmes étaient dans le même corps, les possédés pouvaient projeter leurs âmes puis les rappeler. Leur corps ne mourrait pas parce que le démon les habitait aussi. Les possédés pouvaient tuer des humains s'ils projetaient leur âme suffisamment fort pour pousser l'âme de leur victime hors de leur corps. 

Mais bien sûr, ce n'est qu'en théorie. Et comme je suis là... Il me semble donc logique que je puisse projeter mon âme. Mon corps ne meurt pas. Tu pourrais me remercier, je te garde en vie. Oui, mais ma vie aurait été plus facile sans toi. ... Désolé, ce n'était pas ce que je voulais dire. Je tiens à toi. Tu es dans ma tête depuis toujours. Je ne pourrais pas m'imaginer sans toi. C'est juste que... Mes parents ne m'auraient pas détestée... Mon père n'aurait pas eu de ressentiments envers ma mère... Nous aurions peut-être été heureux. C’est ce que tu aurais voulu ? Je ne savais vraiment pas. Je savais que je devais arrêter de me blâmer pour mes parents mais je ne pouvais m'empêcher de me demander comment cela aurait été si je n'étais pas né comme ça. Je ne le prends pas mal. Je sais ce que tu voulais dire. La voix dans ma tête se tut quelques instants avant de continuer. D'ailleurs, je sais que je ne l'ai jamais dit mais... Désolé. Sans moi, tu aurais pu être heureuse. Je souris. À quel prix ? Même sans toi, je n'aurais pas été acceptée par ce village j’en étais sûre. Je suis né dans la mauvaise famille pour ça. Et si être acceptée par eux pouvait me rendre heureuse, alors je préférerais être triste. Je suis meilleure qu'eux. Bien dit !

Pendant que je discutais avec Prizak, Agatha avait posé sa tête contre la fenêtre et s'était endormie. Je mis ma veste sur ses épaules avant de m'asseoir à ma place. Je ne pouvais pas voir les âmes tout le temps. Ils étaient vifs lorsque les gens étaient en proie à des émotions fortes. Mais je pouvais les sentir continuellement. Quand une personne dormait, c'était le moment où elle était la plus vulnérable. A ces moments, leurs murs électriques étaient toujours présents mais étaient plus faibles que lorsque la personne était éveillée. Cela expliquait pourquoi certaines personnes mouraient dans leur sommeil. Ils perdaient leur âme.

Je fixais l'âme d'Agatha. Cette dernière devait être en proie à une forte émotion car son âme était très claire et très opaque du fait qu'elle dormait. J'étais curieuse. Je voulais me reconnecter. J'ai dû faire quelque chose que je n'avais jamais fait avant mais quoi ? Tu ne m'as pas remercié de t'avoir donné des pouvoirs. Je roulais des yeux amusé.

« Merci Prizak. Maintenant, aidez-moi à le refaire. » 

Que veux-tu que je fasse ? C'était toi pas moi. 

« Mais dis-moi comment j'ai fait. »  

Qu'est-ce que j’en sais ? Ton âme s’est barrée puis est revenue. C'est tout. 

« Tu ne m'es pas d'une grande aide... » 

Je m’étais contentée de regarder l'âme d'Agatha quand soudain je me suis retrouvée dans son corps. Cela avait été si bref qu'elle ne s'en était même pas rendue compte. J'avais déjà vu des âmes. Des milliers de fois. Pourtant, je ne m'étais jamais retrouvée dans l'esprit de qui que ce soit. J'ai regardé l'âme d'Agatha avec insistance mais rien ne s'est passé. Tu devrais voir la tête que tu fais. 

« Tu ne peux pas voir mon visage. Tu es dedans. »  

Oui mais je l'imagine très bien. Cela ne te va pas de réfléchir.

 « Agréable...

- Ouais je sais merci. » 

Je sursautais. J'étais tellement concentrée que je n'avais pas entendu la porte de la cabine s'ouvrir. De toute évidence, c'était Estevan. Décidément, je le croisais tout le temps. J'aurais cru qu'il me suivait, mais j'avais l'impression qu'il était arrivé ici par hasard. Il n'avait jamais été du genre à rester au même endroit sans bouger. Au village, il passait ses journées à arpenter les rues. Cela faisait trembler les habitants. Estevan s'assit devant moi.

« Est-ce que tu te parles souvent toute seule ? »

Je lui fis signe de parler moins fort pour ne pas réveiller Agatha. Estevan lui lança un regard hautain déterminé à ne pas être dérangé. 

« Je savais que tu étais folle mais parler toute seule... C'est plus que je n’aurais pensé. » 

Je roulais des yeux. 

« Ce que tu penses savoir sur moi ne m'intéresse pas vraiment. » 

Pourquoi restes-tu froide et distante avec lui si tu dis qu'il mérite une seconde chance et des amis ? Cela ne voulait pas dire que j'allais le laisser être impoli sans rien dire. Je ne comprends toujours pas mais qu'importe. 

« Tu ferais mieux de descendre de tes grands chevaux. Ce n'est pas parce que nous sommes tous les deux des apprentis gardiens que tu es mon égale.

- Laisse tomber ces phrases vides de sens. Tu sais très bien que c'est faux. » 

Estevan éclata de rire.

 « Tu as l’air bien confiante. Tu crois me connaitre à ce point ?

-En effet. » 

Le jeune homme se pencha vers moi, les yeux brillants de malice. 

« Alors dis-moi. Que penses-tu savoir ?

-Pourquoi veux-tu savoir ?

-Pour te montrer que tu as tort.

-Et pourquoi voudrais-tu faire ça ? Si j’ai tord alors tant pis, et si j’ai raison je ne vois pas en quoi ça te dérange. Nous n’avons jamais parlé jusqu’à maintenant. Ce n’est pas obligé de changer.

-Je dois avouer que tu m'amuses. Personne ne m'a jamais tenu tête dans le village. Cela devenait ennuyeux. »  

Au moins, il est honnête. 

« Ça m'amuse de te voir te mettre en colère. »

Je roulais des yeux. 

« En es-tu sûr ? Tu ne fais pas ça pour créer un lien ? » 

Estevan se redressa et fronça les sourcils. 

« Un lien ? Tu penses que je veux sortir avec toi ou quoi ? Désolé mais tu te surestimes. »  

Aïe. 

« Ce n'est pas ce que je voulais dire. Je parlais d'amitié. C'est aussi un lien. Et plus intéressant d’ailleurs. » 

Estevan eut un rire méprisant. 

« Je n'ai pas besoin d'amis. Je suis très bien seul. » 

Je me penchai et m'appuyai sur ses épaules pour le forcer à se détendre. Estevan me regarda indigné que j'aie osé le toucher. 

« Tu deviens de plus en plus tendu quand tu mens. » 

Au fur et à mesure que la conversation avançait, l'âme d'Estevan devenait plus nette et plus claire. Je ressentais quelque chose de bizarre. Quelque chose de mal au fond de moi. Comme si je pouvais sentir sa tristesse. J'ai décidé de continuer à le pousser à parler. Je devais approfondir ce sentiment. Je devais me projeter à nouveau. Je voulais réussir. Mes parents m'ont coupé du monde et n'ont pas passé beaucoup de temps à discuter avec moi. Savaient-ils que cela arriverait si j'interagissais avec d'autres âmes ? Peut-être que je n'aurais pas dû partir si vite. J'aurais peut-être dû leur poser des questions. Que pouvaient-ils bien savoir ? 

Ils avaient l'air extrêmement confus à la vue de tes yeux. Ils ne savaient pas ce que c'était mais savaient ce que cela signifiait. Je ne savais pas si je voulais me souvenir d'autant de choses que Prizak ou si j'étais reconnaissante d'être trop jeune pour m'en souvenir. 

« Tu es vraiment bizarre. » 

Je penchais la tête sur le côté. Estevan fit de même hypnotisé. Je souris. 

« Tu n'as pas à combler le silence. Je te comprends. » 

Estevan devenait de plus en plus frustré et cela le mettait en colère. 

« Comment une personne comme toi pourrait-elle me comprendre ?

-Parce que je suis justement une personne. Tu n'êtes pas si difficile à comprendre. Il suffit de savoir regarder derrière cette couche superficielle. » 

Estevan souffla d'irritation mais ne partit pas.

« Si ça te dérange tellement que quelqu'un te dise tout ça, alors pourquoi ne pars-tu pas ? » 

Estevan haussa un sourcil. Je savais très bien ce qu'il allait me répondre mais je ne lui ai pas laissé le temps de le faire. 

« Parce que ça t'intrigue. Personne n'a jamais essayé de te comprendre. Pas même tes parents. Tu t'es forgé un masque qui te protégeait de tes sentiments. Tu préfères inspirer la terreur que la pitié. Mais tu restes avec moi parce que tu ne peux plus le supporter. Au fond de toi, tu as juste besoin de quelqu'un sur qui tu peux compter. Et je suis la première personne sur ce navire à qui tu as parlé. Tu ne te l'ais pas encore avoué mais je peux le voir. » 

Estevan pâlit alors que son âme s'assombrissait. Je l'ai senti. Je disais la vérité. Je pouvais le sentir dans son âme. J'étais sur le point d'établir une connexion, mais Estevan est intervenu. Il n'était peut-être pas prêt à entendre la vérité. Son âme redevint soudain translucide et j'eus du mal à la discerner. Je remonter les yeux vers lui déçue. 

« Que t'est-il arrivé ? Tu ne parles pas pendant dix-huit ans puis d’un coup tu deviens une madame je sais tout. » 

J'ai détourné le regard. A quoi tu t’attendais ? Tu n'avais pas à remuer son passé. Vous n'êtes pas amis après tout. 

« Évidemment quand il s'agit d’elle, madame n'est pas si bavarde. » 

Je me forçai à le regarder dans les yeux. Je devais admettre que son regard était assez intimidant, mais je n'ai pas baissé les yeux. 

« Je viens de te dire ce que je pensais. Je ne t'ai pas demandé de me parler de ton passé. Donc je n'ai pas à te parler du mien.

-D'accord alors je vais essayer de le deviner aussi. » 

Un sourire narquois s'étala sur mes lèvres. Bonne chance.

« On t’a dit toute ta vie que ta famille était indigne. Alors tu as passé toutes ces années à te faire tout petit par peur d'être remarquée et critiquée. Tu avais très peu confiance en toi alors tu t’es cachée du monde. Tu as exclu le monde de ta vie et tu t’es même crue supérieure aux autres au fond. Ensuite tu as eu la possibilité de tout recommencer donc tu as foncé la tête baissée. Ici tu n'es personne donc tu es déterminé à devenir quelqu'un et ça te donne confiance. » 

Estevan croisa les bras sur sa poitrine, satisfait de son hypothèse. Il a oublié ton œil et ta malédiction mais sinon ce n’est pas si mal. Il n'est pas si stupide. Je l'aime de plus en plus. Je hochais la tête. 

« Tu n'es pas très loin. Je me sens supérieure à toutes ces personnes restées au village mais au fond je n’ai que je n’ai aucune raison de me sentir ainsi. Après tout où étais-je quand tu les persécutais ? Ce n'est cependant pas vraiment moi qui ai choisi d'exclure le monde de ma vie. Je ne veux pas à être plainte. Je n'en ai pas besoin. Je n'ai juste pas eu le courage de m'y opposer. On s'est tous les deux fait un masque mais ce n'est pas nous. J'ai l'intention de commencer une nouvelle vie et je crois que toi aussi tu as le droit de changer. » 

Estevan pinça les lèvres. Il n'était toujours pas très heureux de m'entendre parler en son nom mais je sentais qu'il voulait rester avec moi.

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