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Chapitre 0004

Auteur: Becca Lou
Point de vue d'Angèle

Je me réveille au son du rire cristallin de Rebel. Je sors du lit en baillant et en m'étirant.

En baissant les yeux, je grogne et remets mon sein à l'abri sous mon débardeur.

Je me frotte les yeux en titubant dans le couloir jusqu'à sa chambre.

Je suis fatiguée, la nuit a été courte, trop courte. Chaque fois que je fermais les yeux, son visage me revenait en pleine tête.

Quand j'ouvre la porte, Rebel est assise au milieu de ses blocs colorés, concentrée.

« Rebel. » chantonne-je d'une voix douce.

Elle relève aussitôt la tête, ses cheveux en bataille lui donnant un air de petit hérisson, un peu comme les miens d'ailleurs.

Je ris doucement en m'approchant. Elle court jusqu'à la barrière pour bébé, et je me penche pour la prendre dans mes bras, l'inondant de bisous sur le visage.

Rebel est un bébé joyeux. Elle l'a toujours été. Mais quand elle se met en colère… c'est un cataclysme. Un ouragan à elle seule. Heureusement, ce matin, elle semble de bonne humeur.

« Tu as faim, mon cœur ? »

Je passe une main sur sa tête, essayant d'aplatir sa tignasse décoiffée. Elle hoche la tête et enfouit son visage contre mon cou. Je souris et lui tapote doucement les fesses en descendant les escaliers.

Dans le salon, Boomer lève la tête depuis son panier et remue frénétiquement son moignon de queue avant de se lever d'un bond. Je lui ouvre la porte de derrière pour qu'il aille faire ses besoins, puis fais un détour par la salle de bain pour changer Rebel. Une fois ses petites fesses au sec, je me lave les mains et la porte jusqu'à sa chaise haute.

Je lui tends un livre en carton qu'elle attrape aussitôt, le tapant avec enthousiasme contre son plateau.

« Alors, jeune demoiselle, qu'est-ce que tu veux pour le petit-déjeuner ? »

J'allume la bouilloire et commence à préparer mon café. Il va m'en falloir une dose conséquente pour émerger ce matin.

« Œufs… pain. »

Je souris. Œufs à la coque et mouillettes, donc. Elle apprend encore à prononcer certains mots, mais elle s'en sort bien.

Je mets l'eau à chauffer, allume la télé sur une chaîne pour enfants et découpe des tranches de pain en fines lamelles pour qu'elle puisse les tremper dans le jaune d'œuf.

Assise à côté d'elle, je l'observe savourer son repas. Rebel attrape une mouillette, la plonge délicatement dans le jaune d'œuf et se met à se trémousser sur son siège, très ravie. Un rire m'échappe.

Et là, la sonnette retentit.

Je soupire et attrape mon téléphone pour jeter un œil à la caméra.

Mon estomac se serre.

Génial. Il n'a pas mis longtemps.

Je décide de l'ignorer, espérant qu'il se lassera.

Mais non, il se met à tambouriner contre la porte.

Boomer gronde, abandonne sa gamelle et se poste devant la fenêtre, le poil hérissé.

« Angèle, je sais que tu es là. Ouvre la porte, je veux juste parler. »

Boomer aboie, un aboiement puissant, protecteur. Rebel sursaute, et mon cœur se serre.

Jamais un endroit de répit… ?

« Chut, ma chérie, tout va bien. Continue de manger, maman revient tout de suite. »

Heureusement, elle a presque fini. Il ne lui reste plus qu'un morceau de pain beurré.

Je me penche pour déposer un baiser sur son crâne avant de me diriger vers la porte. Boomer se place devant moi, prêt à en découdre. Je saisis son collier et prends une longue inspiration.

Puis j'ouvre.

« Qu'est-ce que tu veux, Savage ? » Il me regarde, surpris, avant qu'un sourire en coin n'étire ses lèvres.

Merde. Tant pis, inutile de faire semblant maintenant.

« Juste te parler, Angèle, s'il te plaît. »

Je lève les yeux au ciel tandis que Boomer grogne et que je le retiens.

« On n'a plus rien à se dire, Savage. Tu as déjà tout dit il y a trois ans. Maintenant, j'ai une vie nouvelle, et je suis un peu occupée. »

J'essaie de refermer la porte, mais il bloque la porte d'un coup de botte.

« Je veux voir mon enfant, Angèle. Tu ne peux pas m'en empêcher. »

Mon cœur rate un battement.

Comment il sait ?

Qui lui a dit ?

« On devrait peut-être discuter, tu ne crois pas ? » lâche-t-il en souriant.

Je serre les mâchoires. Je n'ai plus rien à voir avec cet homme, mais dans ce cas, on doit parler. Il faut que je sache d'où il tient cette information.

« D'accord. Treize heures. Au bar. »

Un sourire s'étire sur ses lèvres, creusant ces foutues fossettes qui m'avaient fait chavirer autrefois. Il recule enfin. Je claque la porte et m'y adosse, le front contre le bois.

Quelques secondes plus tard, j'entends le vrombissement de sa moto s'éloigner.

Un cri de joie retentit derrière moi, suivi du bruit d'un morceau de pain qui tombe au sol.

Je soupire et me redresse tandis que Boomer s'empresse de nettoyer les miettes.

« Toi, ma belle, tu as bien besoin d'un bain. »

Un rire m'échappe en voyant le visage barbouillé de Rebel. De l'œuf dans les cheveux, du beurre sur les joues… Une vraie tornade, ma Rebel.

Le bain – ou plutôt l'inondation générale de la salle de bain – terminé, je l'habille d'un petit jean et d'un t-shirt rose orné d'une licorne pailletée.

Je coiffe ses cheveux en deux petits chignons sur le haut de sa tête, et elle enfile ses petites Converse roses.

« Voilà ma petite tornade prête à affronter la journée. »

Je jette un coup d'œil à l'horloge : déjà midi trente. Je lui prépare un en-cas qu'elle avale en un rien de temps, puis je récupère les clés et appelle Boomer.

J'ai envisagé de garder Rebel à l'écart, mais c'est inutile maintenant. Il sait qu'elle existe.

Au moment où je sors de la maison, Scar arrive en sens inverse dans l'allée.

« Tu vas où comme ça ? » demande-t-elle.

Je jurerais qu'elle a un sixième sens.

« Savage est venu ce matin. Il sait pour Rebel, alors j'ai accepté de lui parler au bar. »

Elle hoche la tête sans surprise.

« Très bien, dans ce cas, on va faire un petit tour au parc. »

« Pas la peine. Autant arracher le pansement d'un coup et lui présenter. »

Scar esquisse un sourire, mi-amusé, mi-compatissant.

« Tu fais ce qu'il faut, Angie. Et s'il tente quoi que ce soit, appelle-moi. Je me ferai une joie de lui remettre les idées en place. »

Elle agite son poing en l'air et je ne peux m'empêcher de rire.

Scar me rappelle maman. Forte, directe, inébranlable, et terriblement protectrice.

« Je retiens l'offre. Allez, on y va. »

J'installe Rebel dans son siège et Boomer saute à l'arrière à côté d'elle. Puis je prends la route du bar.

En arrivant, je repère sa moto garée devant. Mon estomac se tord sous l'effet de l'angoisse. Je me gare juste à côté, en prenant bien soin de ne pas l'abîmer.

Dommage, un petit accrochage n'aurait pas été une si mauvaise idée… Je souris à cette pensée mesquine.

Non, Angèle, tu n'es plus une gamine.

Je sors de la voiture, détache Rebel et la pose au sol. Boomer bondit hors du véhicule et marche à mes côtés.

C'est l'heure.

J'ouvre la porte du bar.

Coral est derrière le comptoir. Je l'aperçois en train de faire les yeux doux à Savage.

Je lève les yeux au ciel. Typique.

« Salut, Angie. »

Je réponds par un sourire rapide, mais une sensation étrange me traverse.

Un regard pesant.

Je me tourne…

Il ne me regarde pas.

Non.

Il regarde sa fille.
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