L’air du désert était plus frais à l’aube, une brise légère soufflant sur les dunes infinies. La lumière dorée du soleil naissant peignait le sable d’une lueur douce et irréelle. Malik et Aïcha marchaient en silence, leurs pas s’enfonçant légèrement à chaque avancée.La rencontre avec le gardien avait bouleversé Aïcha. Son esprit était en ébullition, tiraillé entre la peur et la certitude qu’elle devait continuer. Nemtaba. Ce nom résonnait dans sa tête comme une incantation, une promesse de réponses et de vérités enfouies.Elle jetait des coups d’œil réguliers à Malik, qui, fidèle à lui-même, gardait son regard rivé sur l’horizon, méfiant, toujours aux aguets. Il ne posait pas de questions inutiles, mais elle sentait qu’il cogitait.Après un long moment, il finit par parler.— Tu réalises dans quoi tu t’embarques, n’est-ce pas ?Aïcha esquissa un sourire fatigué.— Je crois que je commence à comprendre, oui.Il la regarda, son regard sombre et intense.— Ce n’est pas juste une quête a
Le désert s’étendait devant eux comme une mer de sable sans fin. Le vent nocturne sifflait doucement à leurs oreilles, soulevant des grains dorés qui scintillaient sous la lumière de la lune. Aïcha et Malik avançaient en silence, leurs pas crissant à peine dans le sol meuble.Aïcha était fatiguée. Chaque muscle de son corps la suppliait d’arrêter, mais une force intérieure plus puissante la poussait à continuer.Elle savait qu’ils étaient proches.Elle le sentait.Le masque, attaché à sa ceinture dans son sac, émettait une présence qu’elle ne pouvait ignorer. Il semblait résonner avec l’air autour d’eux, vibrer faiblement, comme s’il était excité par l’idée d’atteindre enfin sa destination.Malik, lui, jetait régulièrement des regards derrière eux.Il savait qu’ils étaient suivis.— On va bientôt devoir faire face à eux, murmura-t-il.Aïcha hocha lentement la tête.— Je sais.— Ils ne nous laisseront pas atteindre Nemtaba sans nous arrêter.Elle prit une profonde inspiration.— Alors
Le silence dans la salle souterraine était oppressant. Seule la lumière bleutée émanant des symboles gravés sur la porte et du masque d’ivoire illuminait les lieux.Aïcha serrait le masque contre sa poitrine, son cœur battant à tout rompre.D’un côté, le chef de la Confrérie lui ordonnait de ne pas ouvrir la porte, évoquant un danger ancestral qu’ils avaient scellé depuis des siècles.De l’autre, Malik, qui l’avait protégée jusqu’ici, persuadé que la Confrérie ne voulait qu’une chose : garder ce secret pour eux.Aïcha sentit la sueur perler sur sa tempe. Elle devait choisir.Elle leva lentement les yeux vers la porte.Elle la fascinait autant qu’elle l’effrayait.Elle savait que ce n’était pas une simple entrée vers un tombeau oublié.C’était quelque chose de bien plus grand.Le chef de la Confrérie fit un pas de plus vers elle, ses yeux brûlant d’intensité.— Tu ne comprends pas ce que tu t’apprêtes à faire. Ce n’est pas un secret que nous protégeons, c’est une malédiction que nous a
Tout était noir.Aïcha se sentait flotter dans un vide infini, suspendue entre le passé et le présent, la vie et quelque chose d’autre.Des voix murmurantes l’entouraient, en écho dans un gouffre sans fond.Elle ne voyait plus la salle du tombeau.Elle ne voyait plus Malik.Seulement des images qui défilaient dans son esprit, brutales et puissantes.Elle vit une cité majestueuse, autrefois resplendissante, des tours dorées s’élevant vers le ciel. Des rues pavées d’onyx et de marbre blanc, des hommes et des femmes parés de bijoux aussi scintillants que les étoiles.Puis… le chaos.Des flammes, des cris.Des soldats vêtus d’or, massacrant tout sur leur passage.Au sommet d’un palais, un homme en armure étincelante levait les bras, et l’univers semblait trembler à sa volonté.C’était lui.Le roi qu’elle avait réveillé.Le dernier souverain de Nemtaba.Un être d’une puissance inimaginable.Un dieu vivant, adoré et craint.Puis, dans un dernier instant, elle vit quelque chose d’encore pire
Une lumière aveuglante.Une chaleur enveloppante, ni brûlante ni douloureuse, mais puissante , comme si son corps flottait dans un océan d'énergie pure.Aïcha tenta de crier, mais aucun son ne sortit de sa bouche. Elle tombe… ou bien elle s'élève. Impossible de savoir.Son cœur battait à une vitesse effrayante.Puis, soudain, tout s'arrête.Elle ouvre les yeux.Et elle n'était plus dans le tombeau.Autour d'elle, un palais immense , baigné d'une lumière dorée, se dressait sous un ciel aux teintes irréelles, oscillant entre le bleu profond et le pourpre mystique.Les murs étaient ornés de fresques animées, comme si elles racontaient une histoire vivante. , des images mouvantes illustrant des batailles, des cérémonies, des rituels oubliés.Des colonnes gigantesques s'élevaient jusqu'à un plafond scintillant de milliers d'étoiles en suspension, comme un fragment du cosmos enfermé dans une pièce.Elle inspire profondément, mais l'air ici était différent. Plus dense, plus chargé.Elle revi
Le sol vibra sous leurs pieds, voyant une onde de choc à travers la vaste salle du tombeau. Des fissures couraient le long des murs , des pierres massives se détachaient du plafond, tombant lourdement dans un fracas assourdissant.Aïcha, encore à genoux, tentait de reprendre ses esprits. Son corps tout entier était secoué par une force inconnue qui pulsait en elle. Elle n'était plus la même.Elle leva les yeux vers le roi, toujours assis sur son trône d'or, mais quelque chose avait changé . Il la regardait différemment. Comme si… il le savait.Malik la saisit brusquement par l'épaule.— Aïcha, on doit partir, maintenant !Le chef de la Confrérie, toujours agenouillé près d'eux, se relève, son visage décomposé par la stupeur.— Elle a été marquée, murmura-t-il, presque terrifié.Aïcha fixa ses mains, ses doigts tremblants. Elle le sentait.Quelqu'un a choisi en elle avait changé.Son regard revint vers le roi.— Qu'est-ce que vous m'avez fait ?Il esquissa un sourire serein.— Je t'ai
Le désert s’étendait devant eux, une mer infinie de sable et de silence. Mais derrière eux, l’obscurité se mouvait, chargée de torches vacillantes et de voix grondantes.Aïcha ne pouvait pas détourner le regard.Ils arrivaient.Des dizaines de silhouettes avançaient lentement à travers les dunes, comme une ombre ancienne réveillée par son erreur.Elle ne pouvait plus bouger. Son cœur tambourinait dans sa poitrine, son souffle se bloquait. L’armée qui approchait savait.Ils savaient ce qu’elle avait fait.Ils savaient qu’elle portait en elle une part du roi.Malik l’attrapa violemment par le bras, la forçant à détourner les yeux.— On bouge. Maintenant.Le ton de sa voix ne laissait aucune place à la discussion.Le chef de la Confrérie, toujours couvert de poussière et de sueur, regardait l’horizon avec un mélange de résignation et de crainte.— Ils ne s’arrêteront pas. Pas tant qu’ils ne t’auront pas entre leurs mains.Aïcha sentait son estomac se tordre.— Qui sont-ils ? demanda-t-el
La porte s’ouvrit dans un grondement sourd, soulevant un vent chaud qui s’échappa des profondeurs. Aïcha sentit immédiatement une onde d’énergie la traverser, son corps vibrant d’une force qu’elle ne comprenait pas encore.Derrière elle, Malik et le chef de la Confrérie restaient figés, tiraillés entre la peur et la fascination.Aïcha, elle, était incapable de détourner les yeux.Elle connaissait cet endroit.Elle l’avait vu dans ses visions.Elle savait ce qui l’attendait de l’autre côté.Mais elle savait aussi qu’une fois entrée, il n’y aurait plus de retour en arrière.Malik posa une main sur son épaule.— Tu es sûre de vouloir faire ça ?Elle inspira profondément, fixant le gouffre sombre qui s’étendait devant elle.— Non.Puis elle fit un pas en avant.L’intérieur du temple souterrain était immense, un espace sculpté à même la roche, préservé du temps et du regard des hommes.D’immenses piliers soutenaient la structure, ornés de symboles anciens et de fresques illustrant l’histoi
Ils avaient quitté la forêt au petit matin.Le soleil filtrait à travers un ciel de nuages éclatés, comme des morceaux de rêves qui tardaient à s'effacer.Le sol sous leurs pieds était doux.Souple.Recouvert d’une herbe fine et dorée qui semblait chuchoter à chaque pas.Ils marchaient sans urgence.Comme si le temps, désormais, n'était plus une menace.Seulement une respiration.Un battement de cœur.Un rythme doux dans lequel ils s’accordaient sans y penser.Très vite, ils ressentirent une présence.Pas lourde.Pas imposante.Une présence ancienne.Stable.Comme un rocher silencieux dans le courant d'une rivière.Ils avancèrent, attentifs.Et ils le virent.Assis au centre d'une clairière minuscule.Un vieil homme.Tout simplement là.Comme s'il avait toujours été là.Comme s'il avait attendu leur venue depuis toujours.Il était petit.Courbé.Sa peau était sillonnée de rides profondes, comme les strates d’un tronc séculaire.Ses yeux brillaient d’une lumière douce, ni moqueuse, ni
Le chemin de verre s’effaça doucement derrière eux, comme un rêve rendu à la mer.Devant eux, la terre devint plus sombre.Plus riche.Chaque pas soulevait une odeur d’humus, de racines profondes, de souvenirs anciens.Le vent avait changé de voix.Il ne portait plus seulement des chants.Il murmurait.Bas.Continu.Comme un chœur discret, né du sol même.Ils avancèrent, le cœur lent, les yeux grands ouverts.Ils savaient.Ils sentaient.Ils étaient entrés dans la Forêt des Mémoires.Les arbres étaient immenses.Leurs troncs larges comme des murailles.Leurs branches tissées en voûtes naturelles.Chaque feuille semblait porter une lumière intérieure.Un éclat discret.Pas éclatant.Pas aveuglant.Chaleureux.Ils marchaient, fascinés.Les troncs, les branches, les racines semblaient vibrer doucement sous leurs pas.Et sur chaque tronc… des traces.Des empreintes.Des signes.Parfois une main gravée.Parfois un mot.Parfois juste une forme imprécise.Des marques d’âmes passées.Ils comp
La plaine disparut derrière eux dans un dernier frémissement de vent tiède.Leurs pas, désormais, ne cherchaient plus à fuir.Ils avançaient par désir d'être.Par curiosité douce.Par appel intérieur.Le chemin devant eux n’était plus une fuite en avant, ni une quête désespérée.Il était rencontre.Rencontre avec eux-mêmes.Avec ce qu’ils étaient devenus.Et avec ce qu’ils allaient encore devenir.Très vite, ils sentirent le changement.L'air, d'abord, devint plus dense.Plus frais.Le sol sous leurs pieds semblait vibrer légèrement.Et devant eux…Une lueur.Étrange.Irréelle.Un miroitement qui semblait respirer.Ils accélérèrent.Le cœur battant.Et la virent.La mer.Mais pas une mer d’eau.Une mer de verre.Immobile.Cristalline.Étendue à perte de vue.Chaque vague figée en plein mouvement.Chaque crête scintillante sous la lumière douce du ciel.Ils s’approchèrent du rivage.Et s'aperçurent que le verre n'était pas opaque.Qu'en se penchant au-dessus, on pouvait voir à travers.
Le matin fut long à venir.Quand ils ouvrirent les yeux, la grotte étoilée s'était évanouie comme un rêve heureux.Le monde qui les attendait dehors semblait plus vaste.Plus nu.Le vent glissait doucement sur la plaine, soulevant des volutes de poussière pâle.Un vent léger.Presque timide.Ils marchèrent.Droit devant eux.Pas parce qu’ils savaient où ils allaient.Mais parce qu'ils avaient appris à faire confiance à l’appel muet des chemins.Au bout de plusieurs heures, ils sentirent le changement.Pas une frontière.Pas un panneau.Un frisson subtil dans l’air.Une densité nouvelle.Comme si l’espace lui-même leur chuchotait :"Ici, quelque chose vous attend."Devant eux, la plaine s’étendait à perte de vue.Vide.Ou presque.Quand ils plissèrent les yeux, ils virent des formes.Des reflets.Des lignes floues.Et peu à peu, ils comprirent :Des portes.Pas des portes dressées.Pas des portes sculptées.Des portes invisibles.Posées dans l’air.Suspendues.Comme des promesses silen
La nuit tomba plus tôt ce jour-là.Non pas brusquement.Mais comme une caresse.Un drap tiré doucement sur leurs épaules.Ils marchaient depuis des heures déjà, leurs nouveaux trésors serrés dans leurs mains ou nichés contre leur cœur.Et au loin, dans la pénombre, une lumière.Faible.Clignotante.Pas un feu.Pas un village.Quelque chose d’autre.Quelque chose de vivant.Ils échangèrent un regard.Puis accélérèrent le pas.À mesure qu'ils approchaient, la lumière se clarifiait.Elle venait d’une ouverture dans la roche.Une grotte.Large.Béante.Mais douce.Presque accueillante.Comme une bouche ouverte prête à chanter.Devant l’entrée, une stèle de pierre.Simple.Sur laquelle était gravé :> "Chaque souffle que tu offres éclaire une nuit que tu ne vois pas."Ils restèrent un moment devant l’inscription.À la laisser entrer dans leur peau.Dans leur souffle.Puis, sans un mot, ils entrèrent.La grotte était vaste.Froide au premier abord.Mais étrangement réconfortante.Le sol éta
La clairière du tisserand s’évanouit derrière eux comme un rêve dont on garde la chaleur mais dont les détails s’effacent.Leurs pas, légers malgré la fatigue, semblaient désormais habités d’un nouveau rythme.Un rythme intérieur.Non pas dicté par la destination, mais par la justesse du moment.Ils marchaient longtemps.Peut-être des heures.Peut-être des jours.Le temps avait perdu son ancienne forme.Ils étaient devenus autres.Et le monde autour d’eux semblait s’ouvrir en réponse.À l’orée d’une grande plaine, le vent leur apporta quelque chose d’inattendu.Des voix.Des rires.Des appels.Mais pas bruyants.Pas commerciaux.Des voix pleines de douceur, de souvenirs murmurés.— Il y a un marché, souffla Komi, plissant les yeux.— Mais il n’est pas comme les autres, répondit Salimata.Ils avancèrent.Et découvrirent.Une multitude d’étals.Pas de tentes criardes.Pas de cris de vendeurs.Chaque étal était une île de lumière.Et sur chaque table…Pas des objets neufs.Pas des trésor
Ils quittèrent la tour à l’aube.Derrière eux, le paysage semblait avoir changé de lumière.Comme si le monde lui-même avait entendu leurs aveux.Ils marchaient sans parler.Mais leur silence n’avait rien de vide.Il était plein de ce qu’ils étaient devenus.Leurs pas étaient plus ancrés.Leur souffle plus libre.Et dans leurs regards, une reconnaissance nouvelle.Non pas de l’autre.De soi.Ils ne cherchaient plus à arriver quelque part.Ils se laissaient guider.Par ce qu’ils ressentaient.Et par ce que le monde leur murmurait.Le sentier les mena à une clairière.Large.Ouverte.Mais couverte d’une brume douce.Presque vaporeuse.Au centre, une grande toile suspendue entre quatre arbres.Et autour… des vêtements.Suspendus dans l’air.Mais sans corde.Sans cintre.Flottants.Invisibles.Parfois, un pli se dessinait.Une manche.Un col.Une étoffe qui ondulait comme une pensée.Et tout près, un homme.Assis.Silencieux.Il tissait.Pas avec une machine.Avec ses mains.Et son souffl
Ils marchaient depuis deux jours sans croiser âme qui vive.Le paysage avait changé.Les arbres étaient devenus plus rares, plus noueux.Le ciel semblait plus proche.Et l’air, plus dense.Pas étouffant.Chargé.Comme si les pierres, les herbes, la terre elle-même retenaient leur souffle.À chaque pas, le silence s’intensifiait.Non pas vide, mais attentif.Ils sentaient qu’ils s’approchaient de quelque chose.Quelque chose de haut.Et soudain… elle fut là.Une tour.Plantée au centre d’une plaine nue.Ni forêt autour.Ni collines.Juste elle.Étrange.Brute.Presque organique.Elle semblait née de la terre, plutôt que bâtie.Pas de porte visible.Pas d’escaliers.Aucune ouverture.Juste cette masse haute, droite, impossible à ignorer.Et pourtant… étrangement invitante.Ils s’approchèrent.Chaque pas vers elle semblait plus lourd.Comme si la tour pesait sur l’air lui-même.Ou sur leurs épaules.Sur leurs pensées.Et en arrivant à sa base, ils virent une inscription gravée dans la pi
Le matin se leva sans hâte, étirant ses couleurs comme on déploie une couverture sur un corps endormi.Les enfants, encore enveloppés dans les souvenirs vibrants de la montagne d’échos, marchaient d’un pas calme, presque méditatif.Leur silence n’était plus pesant.Il était plein.Plein de ce qu’ils avaient déposé là-haut.Plein de ce qu’ils ne savaient pas encore nommer.Et dans l’air, une douceur.Un parfum de terre, de mousse, de promesse.Ils ne savaient pas où ils allaient, mais ils savaient que quelqu’un les attendait.Et ils avaient appris, désormais, à faire confiance au chant du monde.Au milieu de la journée, ils atteignirent une vallée.Fermée.Paisible.Presque retenue.Comme un lieu qui ne veut pas trop s’offrir.Le sentier descendait doucement, bordé de fleurs pâles, de pierres rondes.Et au fond, une maison.Ou plutôt, une forme.Faite de bois, de tissus, de silence.Elle ne ressemblait à aucune autre.Elle semblait tissée d’absence.Et pourtant, tout en elle disait : e