LénaLes draps sont froissés autour de nous, empreints de la chaleur de nos corps.Alexio est allongé sur le dos, un bras replié sous sa tête, l’autre étendu vers moi.Je devrais être rassasiée, comblée par cette nuit où il n’a appartenu qu’à moi.Mais au fond, une peur sourde me ronge.Parce que je sais.Je sais que je ne suis qu’un répit dans la tempête de son cœur.Un sursis.Et quand l’illusion se dissipera… que restera-t-il ?Alexio bouge légèrement, ses doigts effleurant ma peau dans un geste absent.Il ne dort jamais profondément.— Tu penses trop.Sa voix, encore voilée par le sommeil, m’arrache un frisson.Je détourne les yeux, le cœur serré.— Et toi, tu ne penses pas assez.Il soupire, se redresse, son regard accrochant le mien.— Je pense à toi.Un éclat amer traverse ma poitrine.— Et à elle aussi.Silence.Il ne nie pas.Bien sûr qu’il ne nie pas.Je ris sans joie, secouée par l’ironie de ma propre situation.— Tu sais ce qui est le pire ? Je souffle, la gorge serrée. Je
AlexioJe la regarde, assise sur le bord de mon bureau, le regard perdu dans la nuit à travers la fenêtre.— Qu’est-ce que tu veux, Cassandra ?Elle tourne la tête vers moi, et un sourire énigmatique étire ses lèvres.— La même chose que les autres.— Et si je ne peux pas vous choisir toutes les trois ?Elle se lève lentement, s’approche de moi jusqu’à ce que son souffle frôle ma peau.— Alors assure-toi de faire le bon choix.Les lèvres de Léna sont douces, mais son baiser est tout sauf tendre. Il a un goût amer, celui d’un ultimatum.Elle m’embrasse comme si c’était la dernière fois.Et peut-être que ça l’est.Je ne recule pas. Je ne la repousse pas.Mais je ne l’attire pas non plus contre moi.Parce que je sais que ce qu’elle cherche dans ce baiser, ce n’est pas la passion.C’est une réponse.Et je suis incapable de lui en donner une.Quand elle se détache de moi, son regard est brûlant d’émotion contenue.— Tu ne peux pas continuer comme ça, Alexio.— Comme quoi ?— À jouer avec n
AlexioLe silence s’écrase sur moi comme une chape de plomb.Eby est là, tenue fermement par deux hommes qui la regardent comme un animal capturé.Je sens son souffle court, la tension dans ses muscles. Elle ne veut pas montrer qu’elle a mal.Mais son sang a déjà parlé pour elle.— Lâchez-la.Ma voix est calme, mais tranchante. Un ordre, pas une demande.L’un des chasseurs sourit, amusé. Il ne recule pas.— On pensait que tu serais plus… reconnaissant.— Pour quoi ?— T’apporter ton jouet de compagnie.Ma mâchoire se contracte.Eby se débat, son regard me brûle. Elle ne veut pas être sauvée. Pas comme ça.Je le sais.Je les tuerai.Mais pas tout de suite.Pas ici, pas maintenant.Je fais un pas en avant, et les chasseurs resserrent leur prise sur elle.— Relâchez-la, et je ferai preuve de clémence.Un rire.— La clémence d’un vampire ? On connaît la chanson.Je m’arrête.Je pourrais les massacrer sur place. Je pourrais briser chacun de leurs os avant même qu’ils ne réalisent leur erre
EbyLe silence s’étire après le départ de Cassandra.Alexio ne bouge pas, son regard toujours fixé sur l’endroit où elle a disparu. Je l’observe du coin de l’œil, essayant de deviner ce qu’il pense. Mais comme toujours, son visage reste impénétrable, un masque d’indifférence teinté d’une colère sourde.Je soupire, croisant les bras.— Tu comptes rester là à rêvasser, ou on bouge ?Alexio tourne lentement la tête vers moi, un éclat glacé dans le regard.— Tu es jalouse, Eby ?Je roule des yeux, exaspérée.— Je suis fatiguée, Alexio. Fatiguée de vos jeux.— Lesquels ? demande-t-il en haussant un sourcil, faussement innocent.Je serre les dents.— Tous. Tes manipulations, ton contrôle, ta façon de nous enfermer dans tes décisions…Il penche légèrement la tête sur le côté, comme un prédateur jaugeant sa proie.— Et pourtant, tu es encore là.Ma mâchoire se contracte. J’aimerais lui répondre, lui balancer une réplique cinglante, mais un frisson me traverse soudainement l’échine.L’air chan
AlexioJe les regarde. Lucian, inflexible. Eby, incertaine. Et moi, au centre de cette tempête, à devoir lui faire entendre raison.Le nom de Dante brûle encore dans mon esprit.Ils n’avaient jamais envoyé un traqueur de son envergure contre lui. Pas même lorsqu’il avait défié ouvertement l’autorité du Conseil. Alors pourquoi maintenant ?Je soupire, fatigué.— Il y a une option.Lucian se tend.— Dis-moi.J’avance lentement, pesant chacun de mes mots.— Mais tu ne l’aimeras pas.Son regard se fait dur.— Quoi ?— Tu disparais. Tu effaces ton nom, tes attaches. Tu laisses tout derrière toi. Eby, Cassandra, le moindre vestige de ton pouvoir. Et tu deviens une ombre.Je ne détourne pas les yeux.— C’est le seul moyen d’échapper à Dante.Un rire amer s’échappe de ses lèvres.— Te rends-tu compte de ce que tu demandes, Alexio ? Moi, Lucian, disparaître ? Renier qui je suis ?Je reste impassible.— Tu es déjà mort aux yeux du Conseil. Ce choix, c’est tout ce qu’il te reste.Eby nous fixe,
AlexioLa nuit se plie sous mes pas. L’air est chargé d’un mélange d’adrénaline et de tension brute.Lucian marche à mes côtés, silencieux, l’ombre de la guerre planant sur nous comme une promesse inévitable.Le manoir Halloway.Dante a choisi son terrain, mais je refuse de jouer selon ses règles.Je jette un regard à Lucian.— Tu es prêt ?Il ricane.— Tu poses encore la question ?Un sourire effleure mes lèvres.Nous avançons.Les portes du manoir grincent sous notre passage.À l’intérieur, tout est silencieux. Trop silencieux.Je sens la présence de Dante avant même de le voir.Il est là, quelque part.L’ombre d’un chasseur qui attend son heure.Lucian et moi échangeons un regard. Nous savons.La guerre a déjà commencé.Un bruissement dans l’air.Je pivote juste à temps.Une lame fuse, tranchant l’espace où je me trouvais une seconde plus tôt.Dante apparaît devant moi, sa silhouette découpée par la lumière pâle de la lune.— Alexio.Sa voix est un murmure.Un murmure qui résonne c
AlexioDante m’ignore.— Alors, mesdemoiselles ? Qui veut s’offrir pour sauver ce cher Alexio ?Eby crache à ses pieds.— Va en enfer.Dante sourit.Il se tourne vers Cassandra.— Et toi, ma belle ?Elle lève le menton.— Tu rêves.Un éclair de frustration passe dans ses yeux.Puis, il se tourne vers Lysandre.Elle est pâle. Silencieuse.Dante s’accroupit devant elle.— Lysandre… Je sais que tu es plus raisonnable.Elle ne dit rien.Mais je vois son regard glisser vers moi.Sa gorge se serre.— Ne l’écoute pas, Lysandre.Dante pose une main sur son menton, le relevant doucement.— C’est ta décision.Le silence est insupportable.Puis, dans un souffle, elle murmure :— Je…Non.Pas ça.Mon corps se tend.Si elle cède, je suis perdu.Elles sont toutes perdues.Dante sourit, sentant sa victoire proche.Mais Lysandre lève soudain les yeux vers lui.Et dans son regard, il n’y a plus de peur.Juste une rage froide.— Crève.Et elle lui crache au visage.Un silence brutal s’abat sur la pièce
LysandreLe manoir est silencieux lorsque nous y arrivons.Trop silencieux.J’ai appris à me méfier du silence. Il cache toujours quelque chose.Alexio pousse la porte, entre le premier.Rien ne semble déplacé. Tout est exactement comme nous l’avons laissé. Pourtant, un frisson me parcourt l’échine.Cassandra et Eby entrent à leur tour.Puis Alexio ferme la porte derrière nous.Le claquement résonne étrangement dans le hall vide.— Quelque chose ne va pas, murmure Eby en fronçant les sourcils.Je le ressens aussi.Alexio ne dit rien, mais il avance lentement, scrutant chaque recoin.Le silence est pesant.Et puis…Un bruit.Infime.Un souffle à peine perceptible.Je me fige.Alexio aussi.Puis tout bascule.---AlexioL’odeur du sang envahit mes narines. Ma main se referme sur la garde de mon épée, mes muscles tendus comme des fils prêts à rompre.Néon m’observe avec amusement, savourant chaque seconde de cette confrontation. Derrière moi, Eby se redresse en haletant, Cassandra et Lys
AlexioL’odeur du sang est partout.Elle imprègne l’air, s’accroche à notre peau, glisse entre nos lèvres.Mais ce n’est pas ce qui me trouble.C’est Léna.Elle se tient immobile, le corps raide, les yeux rivés sur le vide.Ses doigts, encore souillés du cœur qu’elle vient d’écraser, tremblent imperceptiblement.Je connais ce regard.Je sais ce qui l’envahit.Le pacte.Il gronde en elle, réclame plus.C’est une faim qui ne se contente jamais, qui consume tout sur son passage.Et je sens que ce soir, elle a franchi un seuil.Je m’approche lentement, mes mouvements mesurés.— Léna…Elle ne réagit pas immédiatement.Puis, d’un battement de cils, elle revient à moi.Son regard s’ancre au mien, vacillant entre lucidité et ténèbres.— On doit partir, murmure-t-elle finalement.Elle a raison.Nous sommes trop exposés ici.Mais avant que nous puissions bouger, une autre présence surgit.---LénaUne silhouette se détache de l’ombre.Grande. Élégante.Ses pas sont lents, presque paresseux, com
AlexioLa nuit est lourde. Chargée d’électricité.Chaque ombre semble nous observer, chaque souffle du vent murmure un avertissement.Léna marche à mes côtés, mais je ressens sa fébrilité. Elle lutte contre le pacte. Contre ce feu dévorant qui pulse entre nous.Et moi aussi.Nous avons quitté Joran sans un mot de plus. Son sourire narquois nous hante encore, ses paroles résonnant dans mon esprit."Un pacte de sang doit être nourri, sinon il vous dévorera."Je n’arrive pas à m’en défaire.Parce que je ressens déjà cette faim.Un besoin primitif, viscéral.Pas seulement de sang.Pas seulement de pouvoir.Mais d’elle.Et c’est ce qui me terrifie le plus.— On doit trouver un endroit sûr, murmure Léna.Je hoche la tête, les mâchoires serrées.Nous avançons dans les ruelles sombres, nos pas silencieux sur les pavés humides. La ville dort, inconsciente de la tempête qui gronde dans nos veines.Léna vacille légèrement.Je la rattrape avant qu’elle ne tombe.Son corps est brûlant sous mes doi
LénaLes flammes des bougies vacillent, projetant des ombres mouvantes sur les murs délabrés du manoir.Tout mon corps tremble sous l’intensité du lien.C’est comme si chaque cellule de mon être s’ouvrait à lui. Comme si je percevais ses pensées, ses émotions, ses désirs avec une acuité terrifiante.Et ce que je ressens en ce moment…C’est vertigineux.Alexio est une tempête sous contrôle, un prédateur aux abois. Il lutte contre lui-même, contre moi, contre cette chose qui nous lie désormais.Joran s’écarte légèrement, nous laissant seuls dans le cercle d’incantation.— Il va falloir que vous alliez au bout du processus.Sa voix est basse, presque amusée.— Ou alors, tout ça n’aura servi à rien.Je l’ignore.Mon regard est rivé sur Alexio.Il est tendu. Son torse se soulève rapidement, ses prunelles sont noires d’un désir qu’il s’efforce de contenir.Et pourtant, je ne ressens aucune peur.Seulement cette attraction dévorante qui pulse entre nous.— Léna… Sa voix est rauque, comme un
AlexioL’air à l’intérieur du manoir est épais, chargé de poussière et d’un silence inquiétant. Les murs sont tapissés de vieilles bibliothèques, les meubles recouverts de draps jaunis. Le temps semble s’être figé ici, comme si aucun souffle de vie n’avait traversé ces pièces depuis des siècles.Joran referme la porte derrière nous.Un verrou claque.Léna sursaute légèrement, et son regard se pose sur moi. Elle attend. Mais moi, je scrute l’homme devant nous. Joran n’a pas changé. Toujours cette même posture décontractée, cette même lueur cynique dans les yeux. Pourtant, quelque chose est différent. Une tension sous-jacente.— Tu es plus imprudent que dans mes souvenirs, Alexio.Il se laisse tomber dans un fauteuil de velours élimé et croise les jambes.— Ramener une humaine ici… c’est suicidaire.Léna serre les poings, mais je l’arrête d’un regard.— J’ai besoin de ton aide.Joran ricane.— Je me doutais bien que tu n’étais pas venu pour le plaisir de revoir un vieil ami.— On nous t
AlexioLa porte explose dans un fracas assourdissant.Une rafale d’air glacial envahit la pièce.Ils sont trois.Trois vampires aux yeux d’un rouge incandescent.Le premier est grand, élancé, un sourire carnassier aux lèvres.Le second est plus massif, son visage marqué par des cicatrices anciennes.Le troisième…Je me fige.Le troisième, je le connais.— Raphaël.Son sourire s’élargit.— Alexio. Ça faisait longtemps.Léna frissonne contre moi.Raphaël…L’un des plus anciens vampires que j’aie jamais connus.Un monstre parmi les monstres.Et il est ici pour elle.— Tu as fait une erreur, Alexio. Son ton est presque affectueux. Tu sais ce que ça signifie, n’est-ce pas ?Je serre les dents.— Laisse-la partir.Raphaël éclate de rire.— Partir ? Oh, mais non. Il s’approche, lentement. Tu l’as réclamée. Nous venons voir si elle en vaut la peine.Je m’interpose immédiatement entre lui et Léna.— Elle n’est pas un jouet.— Non. Mais elle est à toi. Et ça, mon frère, c’est bien pire.Il fait
AlexioJe la contemple, immobile, le goût de son sang encore brûlant sur ma langue.Léna ne bouge pas.Elle ne fuit pas.Elle me regarde comme si rien n’avait changé.Mais tout a changé.Son souffle est plus court, son cœur bat un peu plus vite. Elle est à moi, maintenant. Ce lien, je ne peux plus le briser.Et elle ne le pourra jamais.— Tu ne devrais pas être si calme.Elle passe ses doigts sur la morsure encore fraîche à sa gorge.— Je savais ce que je faisais.Je serre les poings.— Non, Léna. Tu crois comprendre, mais tu es loin du compte.Elle fronce les sourcils, défiante.— Alors explique-moi.Je me lève brusquement, l’obscurité de la pièce me paraissant soudain trop lourde, trop étouffante.— Tu sens ? Je ferme les yeux, inspirant profondément. Ton sang pulse en moi. Je ressens chaque battement de ton cœur comme si c’était le mien. Tu as franchi une limite qu’aucun humain ne devrait franchir.Elle ne détourne pas le regard.— Et qu’est-ce que ça change, Alexio ?Je ricane, am
AlexioLa nuit est tombée depuis longtemps, mais je ne ressens pas la fatigue. Seule la faim demeure.Pas celle du sang.Pas celle qui me déchire habituellement le ventre, celle qui me pousse à traquer, à tuer.Celle-ci est différente. Plus sourde, plus insidieuse.C’est la faim d’elle.De Léna.De sa peau brûlante sous mes doigts.De ses lèvres contre les miennes.De ce qu’elle m’offre sans même s’en rendre compte : une place dans sa lumière.Mais cette lumière, je vais l’éteindre si je la garde près de moi.— Tu ne devrais pas rester ici.Ma voix est rauque, plus dure que je ne l’aurais voulu.Elle ne recule pas.Ses yeux s’accrochent aux miens, brûlants d’une détermination que je connais trop bien.— Et si je décide de rester ?Son souffle effleure ma peau. Une tentation.Un supplice.Je ferme les yeux une seconde.Me battre contre elle, c’est comme tenter de résister à l’appel du sang après des siècles de famine.C’est inutile.C’est douloureux.— Léna…Je tends la main, frôle son
LénaJe ne peux plus bouger.Je le regarde, les yeux écarquillés, incapable d’inspirer, incapable d’accepter ce que je vois.Alexio, couvert de sang, immobile devant moi.Le vampire qu’il vient de tuer gît sur le sol, le corps brisé.Il n’y a plus rien d’humain en lui.Il n’a pas juste combattu.Il l’a détruit.Et maintenant, il se tourne vers moi.Ses prunelles sont encore sombres, sauvages, habitées par cette rage qu’il n’a pas complètement éteinte.Un frisson glacé me traverse.Il tend une main vers moi.— Léna…Ma respiration se bloque.Je devrais fuir.Je devrais m’éloigner de lui.Mais mes jambes ne répondent plus.Je me sens piégée, acculée entre lui et ce monde dont je ne fais pas partie.Et pourtant, quand il fait un pas de plus, quand son regard s’adoucit malgré la violence qui l’habite encore…Je vacille.— Tu as peur de moi.Ce n’est pas une question.C’est une évidence.Une douleur invisible traverse son regard, aussi brève qu’un éclair.Je le vois.Mais je ne peux pas lu
AlexioJe suis à un fil de la rupture.Mon cœur, ma raison, mon désir…Tout se fracasse en elle.Elle ne bouge pas.Elle me défie du regard, refusant de fuir.Mais elle ne comprend pas.Je ne suis pas un homme.Je suis un vampire.Et elle est trop proche de la seule chose qui peut me faire basculer.Je grogne.Je recule, me forçant à mettre de la distance entre nous.Mais elle me suit.Son courage est aussi admirable que suicidaire.— Je ne partirai pas.Son murmure est une promesse.Une menace.Mon souffle s’accélère.Puis, sans prévenir, je disparais dans la nuit.Avant de faire ce que je regretterais à jamais.---LénaIl est parti.Me laissant seule, bouleversée, et avec mille questions brûlant en moi.Mais une seule chose m’obsède :Il lutte pour me protéger.Mais combien de temps avant qu’il ne cède ?LénaL’obscurité l’a englouti.Il a disparu dans la nuit, me laissant seule avec mon souffle court, mes pensées éparpillées et cette brûlure encore présente sur mes lèvres.Alexio.