Il y a des jours où je me demande comment j’en suis arrivée là. Assise à un immense bureau en acajou, un stylo entre les doigts, je fais mine d’écouter l’un des directeurs du conseil d’administration tandis qu’il me parle de chiffres, d’investissements et d’objectifs à long terme. Derrière moi, la baie vitrée offre une vue imprenable sur la ville, ses lumières scintillantes et son agitation perpétuelle. Mais moi, je n’ai qu’une seule pensée en tête : je ne suis pas censée être ici. Je suis capitaine, pas PDG. Je suis faite pour donner des ordres sur un terrain militaire, pas pour négocier des contrats avec des requins en costume. Mais la vie a un drôle de sens de l’humour, et aujourd’hui, je suis Sébastien Moreau. Du moins, c’est ce que tout le monde croit. L’héritage d’une disparition Mon vrai nom, c’est Elena Moreau. Je suis la dernière-née de ma famille, la benjamine, celle que personne n’a jamais envisagé comme héritière de l’empire familial. Ce rôle devait revenir à m
Dès que je suis sortie de la salle de réunion, je me suis autorisée un soupir. Ce type, Alexandre Duval peu importe son nom – il va falloir que je me le grave dans le crâne, bordel – était un problème. Un problème à surveiller de près. J’ai traversé le couloir d’un pas rapide, croisant plusieurs employés qui me saluaient d’un respect mêlé d’appréhension. Il faut dire que j’avais vite imposé mon style : Sébastien était connu pour être charismatique, moi j’avais rajouté une touche… plus piquante. En d’autres termes, j’étais un PDG qui pouvait t’ignorer royalement ou te sortir une punchline bien sentie si tu me saoulais. Une fois dans mon bureau, j’ai refermé la porte et me suis laissée tomber dans mon fauteuil. Réfléchir. Il n’allait pas me lâcher, ce mec. Il allait vouloir me tester, me poser d’autres questions, creuser. Et ça, c’était le genre de chose qui pouvait faire exploser toute ma couverture. J’ai roulé des épaules pour évacuer la tension, puis j’ai attrapé mon télé
Parce que oui, maintenant, il en était presque sûr. Il n’avait pas encore toutes les preuves, mais son instinct ne le trompait jamais. Et si ce qu’il soupçonnait était vrai… alors ce jeu devenait encore plus intéressant. Et puis… Il y avait ce quelque chose d’étrange, cette féminité subtile qui transparaissait parfois. Ça m’intrigue Un léger mouvement de poignet, une posture, une façon de croiser les jambes… Rien d’assez flagrant pour être immédiatement perçu, mais suffisant pour éveiller ses soupçons. Pourquoi ? Un accident ? Une blessure qui aurait changé son comportement ? Une dissimulation volontaire ? Ou pire encore… Une usurpation ? L’idée le frappa avec la force d’un coup de poing. Si ce “Sébastien” était une façade ? Une illusion soigneusement construite ? Mais pourquoi diable quelqu’un irait-il aussi loin pour ça ? Il poussa un long soupir et s’arrêta dans un couloir désert, se frottant les tempes. Il avait besoin d’en savoir plus. Et pour cela
Alexandre rit doucement, mais il n’avait pas l’air de vouloir lâcher l’affaire. — Tu es différent. Pas seulement dans la manière dont tu parles, mais… Il inclina légèrement la tête, comme s’il l’examinait. Dans la manière dont tu réagis. Elena roula des yeux, cherchant un moyen de détourner la conversation avant qu’il ne pousse trop loin son observation. — Ce qui est surtout différent, c’est ta soudaine obsession pour mon comportement. Franchement, tu veux un carnet pour prendre des notes aussi ? — Tentant. Elle leva les yeux au ciel. — Tsk. Tu es insupportable. — Et pourtant, c’est toi qui es venu me demander de l’aide, fit-il remarquer avec un sourire carnassier. Il la fixa encore un instant avant de se redresser, croisant les bras. — Je peux peut-être te trouver ces informations, mais… — Mais ? — Je veux quelque chose en échange. Elena haussa un sourcil, suspicieuse. — Si c’est mon âme, désolé, mais elle est déjà vendue au diable. — Tentant, mais non.
Ce n’était pas flagrant, rien de criant. Mais parfois, dans un mouvement, un regard, une réaction, il percevait quelque chose de troublant. Une douceur furtive. Une élégance dissimulée sous le masque de l’arrogance. Alexandre passa une main sur son visage, exaspéré. Putain, qu’est-ce que je suis en train de penser ? Il ne pouvait pas être attiré par Sébastien. Ce n’était pas logique. Ce n’était pas son genre. Et pourtant… Un sourire en coin se dessina sur ses lèvres. Et si je testais une théorie ? Il avait besoin d’une confirmation. Il devait voir Sébastien hors de son cadre habituel, le pousser dans une situation inconfortable, observer ses réactions. Un endroit où tout masque tomberait. Son regard s’assombrit alors qu’une idée germait dans son esprit. Un club. Un club de strip-tease, très privé, très exclusif. Un lieu où la sensualité et l’ambiance tamisée faisaient tomber les défenses des plus endurcis. Si Sébastien est bien celui qu’il prétend être, il n’y ve
Rodrigo releva un regard inquiet vers lui. — Boss, si ces types sont capables de ça, est-ce qu’on ne devrait pas lâcher l’affaire ? Alexandre eut un sourire froid. — Et leur laisser le champ libre ? Certainement pas. Elena arqua un sourcil. Donc il n’est pas avec eux… C’était une information précieuse. Apparemment, Alexandre menait lui aussi son enquête sur cette organisation. Mais pourquoi ? Il s’accroupit devant l’une des caisses et passa un doigt sur le symbole de l’aigle noir. — Qui que tu sois, dit-il en relevant la tête, j’imagine que tu es toujours là, à m’écouter. Elena sentit une montée d’adrénaline, mais ne bougea pas d’un millimètre. Alexandre se redressa et haussa légèrement la voix, comme s’il parlait à une présence invisible. — Tu es doué, je te l’accorde. Mais si tu cherches des réponses… il va falloir faire mieux que te cacher dans l’ombre. Il laissa planer un silence, puis soupira et rangea son téléphone dans sa poche. — J’ai hâte de voir qui t
Le lendemain soir, après avoir couvert ses arrières, elle se posta discrètement près de cet immeuble, observant les allées et venues. Il y avait peu d’activité, mais au bout de quelques heures, Alexandra arriva, vêtu simplement, mais avec son éternelle assurance. Elle le regarda entrer, puis attendit une dizaine de minutes avant de se faufiler derrière lui. Elle trouva une porte dérobée et parvint à l’ouvrir sans déclencher d’alarme. L’intérieur était sombre, silencieux. Elle avançait prudemment, cherchant des indices. Puis elle entendit des voix. Elle se cacha derrière un mur et tendit l’oreille. — Rodrigo s’est fait neutraliser. La voix d’Alexandre. — Par qui ? — Je ne sais pas encore. Mais cette personne est entraînée, c’est certain. Elena plissa les yeux. Il ne savait pas que c’était elle… mais il était sur ses traces. — Tu crois que c’est lié à Sébastien ? Elle retint son souffle. — Impossible à dire. Elle fronça les sourcils. Pourquoi mentionner Sébas
La femme – Ruchi, si elle avait bien entendu – eut un petit rire surpris, mais elle se laissa faire, glissant une main sur la veste d’Elena. — Vous êtes audacieux, monsieur… Elena haussa un sourcil, amusée. — Oh, tu n’as encore rien vu. Elle jeta un coup d’œil à Alexandre, un sourire provocateur aux lèvres. — Quoi, tu es jaloux ? Alexandre arqua un sourcil, mais son sourire ne disparut pas. — Amusant… Tu n’étais pas aussi joueur avant. Elena haussa légèrement les épaules, caressant nonchalamment la taille de Ruchi du bout des doigts. — Peut-être que j’ai simplement appris à m’amuser autrement. Ruchi, elle, semblait prendre plaisir à cette petite scène. — Dois-je rester, monsieur ? Elena pencha la tête d’un air faussement pensif. — Hm… Tentant, mais je suis ici pour parler affaires. Une autre fois, peut-être. Elle laissa ses doigts glisser lentement sur la hanche de la danseuse avant de la relâcher. Ruchi se leva avec un sourire, lançant un regard aguicheu
C’est à ce moment-là qu’Adam fit son entrée dans la pièce. Contrairement à ce qu’Alexandre imaginait d’un médecin réputé, il était vêtu de façon étonnamment décontractée : un pull en laine gris et un pantalon en toile sombre. Il s’approcha avec une démarche tranquille, un sourire poli sur les lèvres. — Ah, Alexandre Duval, enfin nous nous rencontrons, dit-il en tendant la main. Alexandre se leva pour lui serrer la main, jaugeant rapidement l’homme devant lui. — Docteur Moreau, enchanté. Adam esquissa un sourire en coin. — Adam, tout simplement. On va éviter les formalités aujourd’hui. Il s’installa à son tour dans un fauteuil, attrapant une tasse de thé qu’il porta à ses lèvres. Il semblait détendu, presque nonchalant, mais un observateur attentif aurait remarqué l’ombre de vigilance dans son regard. — J’espère que mon grand frère ne vous a pas trop accaparé avec ses discours sur l’entreprise, plaisanta Adam en lançant un regard complice à son père. — Il sait être conv
— À ton avis, abruti ? Je suis venue te chercher. On doit aller voir ma sœur, ou tu comptais l’oublier ? Il consulta rapidement l’heure sur son téléphone avant de soupirer. — J’avais encore cinq minutes. Elle lui jeta un regard en coin, puis reporta son attention sur l’hôtel. — Dommage, j’aurais pu voir si elle te faisait un petit au revoir avec un baiser langoureux. Alexandre expira lentement, comme s’il luttait pour garder son calme. — Tu es jaloux ? Helena éclata de rire avant de tapoter le volant du bout des doigts. — Moi ? Jaloux de toi ? Pitié, Duval, redescends. Elle fit mine d’applaudir. — Mais, félicitations pour ta vie amoureuse, hein. Un homme aussi coincé que toi qui sort d’un hôtel avec une bombe pareille, c’est rafraîchissant. — Tu n’as rien de mieux à faire que de me provoquer ? — Je prends mon rôle de chauffeur très à cœur. Et puis, fallait bien que je vérifie si t’étais encore en état de marcher après ta nuit passionnée. Alexandre ferma les y
À sa grande surprise, sa tante ne broncha pas. — Très bien, je comprends… Mais dans ce cas, j’ai une petite condition supplémentaire. Elena sentit une sueur froide lui parcourir le dos. — Tata… qu’est-ce que tu mijotes ? Sa tante afficha un sourire malicieux avant de prendre une gorgée de thé. — Un simple arrangement, ma chérie. Tu accepteras des rendez-vous arrangés pendant un mois avec un jeune homme que je vais te présenter. Un silence pesant s’installa. Puis— — QUOI ?! s’écria Elena, manquant de faire tomber sa tasse. Adam, qui était assis à côté d’elle, s’étouffa littéralement de rire. — Tata, tu plaisantes, hein ?! — Absolument pas. Elena lança un regard assassin à son frère, qui riait à gorge déployée. Mais Tata Sophie n’en avait pas fini. Elle se tourna soudainement vers Adam, les yeux plissés. — Et toi, mon cher neveu, puisque tu trouves ça si drôle, tu viendras aussi à notre dîner ce week-end. Je te présenterai une charmante demoiselle. Cette fo
— Bonne chance pour trouver ça, franchement. — Pourquoi pas toi ? tenta-t-elle, un brin d’espoir dans la voix. Adam la fixa avec un air profondément blasé. — T’es sérieuse ?! — Bah quoi ? On a le même visage, avec une bonne perruque, du maquillage et des lentilles, ça pourrait passer ! — Ah ouais, et mes épaules plus larges, mon torse et mes bras plus musclés, on en fait quoi ?! — Un bon pull ample et une posture plus féminine et ça passe ! Adam la regarda comme si elle avait perdu la tête. — Alors là, c’est hors de question. — Tu pourrais au moins essayer ! — Non ! Et puis, je refuse catégoriquement de porter une perruque ou de me faire un faux tatouage. Elena roula des yeux. — T’es vraiment pas joueur… — Et toi, t’es vraiment désespérée. Elle soupira et tapota ses doigts contre le canapé, réfléchissant toujours. — Il doit bien y avoir quelqu’un qui peut m’aider… Adam secoua la tête. — Honnêtement, la meilleure option, c’est tata. — NON ! Il écla
Elle ouvrit la porte d’un geste brusque et traversa le hall à grandes enjambées, montant directement à l’étage. — Elena ! cria-t-elle en entrant dans son bureau sans frapper. Son frère, vêtu d’un simple t-shirt et d’un pantalon de jogging, releva la tête de son écran. En voyant son air paniqué, il fronça les sourcils. — Qu’est-ce que t’as encore fait ? demanda-t-il d’un ton las. Elena prit une profonde inspiration avant de lâcher d’un trait : — J’ai invité Alexandre Duval à déjeuner ici demain. Un silence glacé tomba sur la pièce. Adam la fixa, comme s’il espérait avoir mal entendu. — Tu as fait QUOI ?! Il se leva d’un bond, envoyant sa chaise rouler en arrière. — T’es complètement cinglée ! s’écria-t-il en passant une main sur son visage. Tu fonces tête baissée avant même de réfléchir ! Triple idiote ! — Oh ça va ! rétorqua Elena, agacée. J’ai improvisé, c’est pas la fin du monde ! Adam écarquilla les yeux, incrédule. — Pas la fin du monde ?! Tu réalises au
Alexandre était un homme méthodique, toujours en contrôle de lui-même et des situations qu’il gérait. Mais face à Sébastien ou plutôt Elena , quelque chose lui échappait. L’invitation était trop soudaine, trop calculée. Si c’était vraiment Sébastien, pourquoi insister autant pour qu’il vienne ? Et si ce n’était pas lui… alors qui était vraiment la personne en face de lui ? Il fit tourner lentement son verre entre ses doigts, réfléchissant à toute vitesse. Accepter, c’était entrer dans le jeu de Moreau. Refuser, c’était éveiller encore plus de soupçons. — Tu hésites, Duval ? La voix moqueuse d’Elena le tira de ses pensées. Elle s’était légèrement rapprochée, un sourire joueur aux lèvres, ses yeux brillant d’une lueur provocante. — Tu serais pas en train d’avoir peur, quand même ? Il posa son verre avec calme. — J’ai juste l’habitude d’évaluer mes options avant d’agir. — Ohh, bien sûr… Elle s’appuya contre la table, posant son menton dans sa main. C’est vrai que dire “ou
Le Silver Club Elena était déjà installée à une table près du bar, son verre de whisky à la main, l’air aussi détendu qu’une reine sur son trône. Pourtant, derrière son sourire amusé, elle était en alerte. Alexandre Duval n’était pas un homme à sous-estimer. Il arriva, impeccable comme toujours, et prit place en face d’elle avec un calme étudié. — Pile à l’heure. Elle haussa un sourcil, taquine. Vous avez peur que je m’ennuie sans vous ? — Je préfère éviter de vous laisser trop de temps pour mijoter un nouveau mensonge. Elena éclata de rire et leva son verre. — Oh, vous me flattez ! Alors dites-moi, quelle théorie farfelue avez-vous encore pondu sur moi cette fois ? Alexandre ne mordit pas à l’hameçon. Il posa tranquillement son téléphone sur la table et fit défiler quelques documents. — Elena Moreau, brillante militaire, rentre au pays en convalescence il y a quelques semaines. Aucun déplacement, aucune apparition publique. Il leva les yeux vers elle. Et pile à ce mo
Adam lui lança un regard blasé. — Je ne pensais pas à un plan aussi foireux, mais… — Trop tard, j’adore l’idée ! Avant qu’il ne puisse protester, Elena attrapa son téléphone et composa le numéro d’Alexandre. Après quelques sonneries, une voix grave et posée résonna dans l’écouteur. — Duval. Elena s’éclaircit la gorge, un sourire malicieux aux lèvres. — M. Duval, c’est Sébastien. Un silence. Puis une réponse prudente : — Que puis-je faire pour vous ? — On devrait discuter, vous et moi. Ce serait dommage de rester sur des malentendus. — Je suis d’accord, mais j’ai du mal à croire que vous soyez du genre à vouloir “discuter”. Elena laissa échapper un léger rire. Clever boy. — Touché. Mais disons que je vous offre une trêve. Ce soir, au Silver Club. Vous aimez le whisky ? — J’apprécie le bon whisky, mais… le Silver Club n’est-il pas un peu trop extravagant pour une simple discussion ? Elle sourit. — Justement, ce sera plus intéressant. À moins que vous ayez p
La femme – Ruchi, si elle avait bien entendu – eut un petit rire surpris, mais elle se laissa faire, glissant une main sur la veste d’Elena. — Vous êtes audacieux, monsieur… Elena haussa un sourcil, amusée. — Oh, tu n’as encore rien vu. Elle jeta un coup d’œil à Alexandre, un sourire provocateur aux lèvres. — Quoi, tu es jaloux ? Alexandre arqua un sourcil, mais son sourire ne disparut pas. — Amusant… Tu n’étais pas aussi joueur avant. Elena haussa légèrement les épaules, caressant nonchalamment la taille de Ruchi du bout des doigts. — Peut-être que j’ai simplement appris à m’amuser autrement. Ruchi, elle, semblait prendre plaisir à cette petite scène. — Dois-je rester, monsieur ? Elena pencha la tête d’un air faussement pensif. — Hm… Tentant, mais je suis ici pour parler affaires. Une autre fois, peut-être. Elle laissa ses doigts glisser lentement sur la hanche de la danseuse avant de la relâcher. Ruchi se leva avec un sourire, lançant un regard aguicheu