Léo MorganJ’ai l’impression de m’enfoncer chaque jour un peu plus dans un abîme sans fin. Chaque bruit, chaque geste, chaque regard dans cette prison semble me ramener à ma place. Un homme sans valeur, un criminel, un hors-la-loi, pris au piège dans un monde de béton, de métal et de mépris. Mais rien, absolument rien, ne me prépare à ce qui m'attend aujourd'hui.Je suis conduit vers un nouveau quartier de la prison, un endroit où les regards sont plus cruels, plus durs. Les gardiennes me regardent comme si je n'étais rien de plus qu'un parasite, une vermine qu'il faut étouffer avant qu’elle ne devienne une menace. Leur hostilité est palpable, une présence oppressante dans l’air. Elles ne disent rien, mais leur attitude me crève les yeux. Elles m’accompagnent dans un couloir étroit, leurs bottes résonnant sur le sol froid, claquant comme une menace.Je sens les yeux des détenues peser sur moi, leur présence invisible mais lourdement palpable. Elles sont là, derrière les barreaux, dans
Léo MorganJe suis assis là, dans ce coin sombre de la cellule, les bras croisés, les yeux fixés sur les barreaux. Les heures passent, lentes, implacables. Les bruits qui m’entourent ne cessent de me rappeler la réalité : ici, je ne suis rien d'autre qu'une cible. Ce n’est plus qu'une question de temps avant qu’on me teste, avant qu’on cherche à me briser. Et je le sais. Ce ne sont pas juste les gardiennes, les détenues qui me scrutent. Ce sont les gangs internes, ces factions qui se battent pour le contrôle, pour leur territoire.Il y a une tension palpable dans l’air, comme si tout allait éclater d’un instant à l’autre. Chaque détenue a son propre rôle à jouer, ses propres alliances, ses propres ennemis. Ces femmes, qui d’habitude se tiennent à l’écart les unes des autres, se regardent d’un œil méfiant, à l’affût de la moindre opportunité pour prendre le dessus. Et moi, au milieu de tout ça, je suis une proie fragile, un nouveau venu, un homme sans amis dans un monde où l’amitié n’a
Léo MorganLes jours s’étirent dans une lenteur oppressante. Chaque minute me semble une éternité, chaque souffle un fardeau. L'ombre des gangs, des alliances, des luttes internes, pèse lourdement sur mes épaules. Mais dans ce monde de silence et de violence, je commence à comprendre que la clé de ma survie ne réside pas uniquement dans la force physique ou l'intelligence stratégique. Non, elle réside dans les liens que l’on tisse avec les bonnes personnes, celles qui peuvent vous protéger, ou du moins vous permettre de naviguer dans ce chaos sans y perdre trop de plumes.C’est dans cette pensée que je croise le regard d’Elena, une détenue aux traits marqués par la souffrance et les années passées derrière ces murs. Elle n’a pas l’air d’être une alliée quelconque, mais quelque chose dans son regard, un mélange de défi et de compréhension silencieuse, me pousse à l’observer plus attentivement. Elle est différente des autres femmes de cette prison. Contrairement aux autres qui se batten
Léo MorganLa routine reprend lentement ses droits sur moi. Chaque jour dans cette prison semble une répétition du précédent, un enchaînement mécanique où l’espoir se dissipe petit à petit, remplacé par une accoutumance à la violence, au silence et à l’indifférence. Pourtant, une petite flamme persiste en moi, une étincelle allumée par des mots, des regards, des rencontres inattendues. Elena est désormais une présence régulière dans ma vie. Pas encore une alliée au sens classique du terme, mais elle est là, dans l’ombre, m’observant de loin, parfois me provoquant dans ses gestes, dans sa façon de s’exprimer. Elle semble avoir compris que je ne suis pas juste un autre détenu. Mais elle a aussi sa propre bataille à mener, et cela se voit dans chaque mouvement qu’elle fait.Depuis notre dernière conversation, je l’observe davantage, essayant de lire entre les lignes, de saisir le sens caché dans ses silences et ses rares paroles. Elle ne parle pas beaucoup, mais il y a quelque chose dans
Léo MorganLa tension est palpable. L’altercation qui s’est nouée dans la cour n’est pas encore dissipée, et pourtant, la soirée se poursuit dans une atmosphère lourde de menace. Elena et moi nous trouvons désormais dans cette salle de recueillement, là où certains détenus viennent se recueillir, méditer ou simplement se détacher des lourdeurs de la vie carcérale. La lumière tamisée, l’air vicié, tout ici semble fait pour étouffer, pour écraser toute tentative de liberté. Mais Elena est là, à mes côtés, aussi déterminée que moi, et il est difficile de ne pas voir à quel point notre dynamique a changé depuis cette altercation.Elle ne parle pas, mais je la sens prête à exploser. Le regard qu’elle me lance ne laisse aucune place au doute : elle n’a pas peur de la violence. Pas plus que je ne l’ai jamais été. Il suffit d’un geste, d’une étincelle, et le chaos pourrait reprendre. Pourtant, elle reste calme, ses traits durcis par des années de souffrance et de renoncements.— Tu aurais dû
Éva Je me tiens là, à la porte du bureau du procureur, le cœur battant à tout rompre, mes mains serrées sur mon sac à main. L’air ici est glacial, comme si même la température de cette pièce avait été choisie pour renforcer l’impression de défaite. Il est déjà difficile de prendre ce genre de décision dans un endroit comme celui-ci, mais aujourd’hui, la pression est plus forte que jamais. Léo est derrière les barreaux, et malgré tous mes efforts, je suis toujours incapable de le sortir de là.Je jette un coup d’œil à l'horloge au mur : il est presque midi. L’heure de mon rendez-vous approche. Chaque seconde semble s’étirer, me laissant de plus en plus de temps pour me convaincre que tout ce que je tente est vain.Léo. Ce nom résonne dans ma tête comme un mantra. Depuis qu'il a été arrêté, je n’ai cessé de me battre pour lui. Des avocats, des contacts, des connexions. J’ai épuisé toutes les pistes, mais rien ne semble avancer. Rien ne brise les chaînes qui l’entravent.Soudain, la por
Eva---Je quitte le bureau du procureur avec un poids sur les épaules, plus lourd encore que celui qui m’écrasait avant d’y entrer. Je suis arrivée ici avec l’espoir d’obtenir une libération temporaire pour Léo, mais tout ce que j’ai récolté, c’est une défaite de plus. Les preuves dont j'avais besoin, tout ce que j’avais collecté, ont disparu. Le pire, c’est que je ne sais même pas comment ni pourquoi. Peut-être que je suis simplement trop naïve pour voir ce qui se passe réellement sous mes yeux.Je m'arrête dans la rue, les rues bruyantes et agitées de la ville qui m’entourent comme un tourbillon. Je ferme les yeux quelques secondes, essayant de reprendre mes esprits. Une seule pensée me hante maintenant : Comment prouver qu’il a été piégé ?Je serre les poings, refusant de m’avouer vaincue. Je n’ai pas le droit de le faire. Pas pour Léo, pas après tout ce que nous avons traversé. Je dois trouver quelque chose, n'importe quoi, qui puisse démontrer son innocence. Je me souviens des i
Léo Je me tiens dans la cour de la prison, les yeux fixés devant moi, respirant calmement malgré le tumulte qui m’entoure. Les bruits sont incessants : des cris, des chaînes qui s’entrechoquent, des murmures ici et là. Mais aujourd’hui, l’air est différent. La tension est palpable. Je le sens dans chaque regard, dans chaque mouvement. Mira, la plus redoutée de toutes les détenues, me fixe depuis plusieurs jours. Je sais que la confrontation est inévitable.Mira. Son nom résonne dans l’air comme une menace. C’est une femme puissante, violente, une brute. Elle règne sur cette cour, imposant sa loi par la force, l’intimidation. Et elle semble avoir décidé que j’étais son prochain défi.Aujourd’hui, ça y est. Elle s’avance vers moi, ses pas lourds résonnent sur le sol poussiéreux de la cour. Je la vois, je la sens avant même qu’elle ne m’adresse la parole. Elle s’arrête juste devant moi, les bras croisés, son regard perçant scrutant chaque détail de mon visage. Ses yeux me défient, me pr
ÉvaIl y a des moments où le monde semble ralentir, où chaque seconde devient un reflet d’un autre temps, d’une autre vie. Pourtant, ici et maintenant, dans cette pièce baignée par la lumière dorée de l’après-midi, tout se passe à une vitesse fulgurante. Les bruits de la rue s’estompent derrière les fenêtres, la vie continue à l’extérieur, mais ici, dans notre monde à nous, chaque mouvement, chaque pensée est calculée, précise. L’adrénaline de nos vies passées semble se dissiper, mais l’intensité, elle, demeure. Cette intensité silencieuse, palpable, qui flotte entre nous, une force qui nous pousse à avancer, encore et encore. Nous avons survécu à la tempête, à la rage des éléments, à la douleur. Mais ce n’est pas la fin. Non, c’est le début d’autre chose. D’une ère nouvelle.À mes côtés, Léo, toujours aussi calme et concentré, semble avoir trouvé sa place dans ce monde que j’ai reconstruit. Un monde que j’ai voulu solide, implacable, mais aussi, d’une certaine manière, plus doux. Il
ÉvaLes heures se sont glissées dans le silence, dissimulées dans l’ombre de ce que nous avons traversé. Le passé semble si lointain maintenant, presque irréel, et je m’étonne de voir à quel point il peut se dissiper lorsqu’on laisse place à l’instant présent. La ville autour de nous est silencieuse, comme si elle retenait son souffle, comme si elle savait que ce que nous vivons ici est plus grand que tout. Le vent léger de l’aube entre par la fenêtre, caressant ma peau. L’air est frais et pur, mais dans mon cœur, il n’y a plus que la chaleur de ce qui nous lie. Le monde tout entier semble avoir disparu, et il ne reste que lui et moi, dans cet espace intime, où le temps n’a plus d’emprise.Léo est là, adossé contre le mur, ses yeux rivés sur moi. La lumière douce de l’aube se joue de ses traits, éclairant chaque détail de son visage, chaque nuance de son expression. Dans ses yeux, il y a une calme certitude, comme s’il savait que tout ce qui comptait à cet instant n’était pas tout ce
ÉvaLes lumières de la ville brillent au loin, comme des étoiles égarées.Le vent de la nuit fait frissonner les rideaux.Il est tard, trop tard.Mais il n’y a plus de retour possible.Je regarde Léo, assis près de la fenêtre, les yeux perdus dans l’obscurité.Il est là, près de moi, mais tout semble si lointain.Nous avons traversé un océan de sang et de mensonges, et maintenant, l’eau est calme, trop calme.Un silence lourd comme un secret non dit.Tout est terminé, et pourtant, il reste quelque chose, un écho, un murmure d’un autre temps, une promesse que nous avons échangée.Je m’approche de lui, pose une main sur son épaule.Il sursaute à peine, mais je vois la guerre dans ses yeux.La guerre qui ne cesse jamais vraiment.Même quand les coups sont partis, même quand tout est fini.Éva – doucement« Léo, est-ce que tu penses qu’on peut réellement repartir de zéro ?Ou est-ce que tout ce qu’on a fait n’a été qu’un chemin vers un nouveau commencement ? »Il tourne son regard vers mo
LéoLa nuit est tombée en silence, comme une promesse de calme avant l’explosion.Dans le vieux bureau, les papiers sont éparpillés partout.Les dossiers sont maintenant prêts, les preuves rassemblées.L’odeur de l’encre, du vieux papier, et de l’adrénaline flotte dans l’air, imprégnant chaque recoin du lieu comme une alerte avant le départ.Éva n’a pas dit un mot depuis que nous avons commencé à rassembler les morceaux de l’empire.Mais je vois la tension dans ses gestes.Ses doigts effleurent parfois un document, puis se figent.Elle ne me le dit pas, mais je sais.Elle a la même peur que moi : que tout cela n’ait été qu’un rêve.Je m’arrête un instant, le regard plongé dans l’écran de l’ordinateur.Les premières informations sensibles sont en train d’être envoyées à l’adresse codée.Bientôt, le monde saura.Et à cet instant, tout ce que nous avons, tout ce que nous avons bâti – ou détruit – sera exposé à la lumière.Éva – voix calme mais sûre« Qu’est-ce qui nous attend, Léo ?Tu s
ÉvaIl y a quelque chose d’intime, de précieux, dans ce silence entre nous.Pas celui de l’évitement.Non.Un silence qui apaise, qui dit que l’on peut exister l’un à côté de l’autre sans crainte.Quand il se retourne enfin, il s’approche, prend une miette sur ma lèvre avec le pouce.Geste simple. Presque dérisoire.Mais je sens le poids des choses non dites dans son regard.Léo – bas, presque honteux« J’ai peur, tu sais. »Je ne bouge pas.Je ne réponds pas tout de suite.Je laisse son aveu suspendu dans l’air, comme une note fragile qui ne demande qu’à vibrer plus fort.Éva – doucement« Moi aussi. »Nos regards se croisent.Il y a de la peur, oui. Mais aussi une détermination nouvelle.On a déjà trop perdu.On a déjà trop brûlé.Alors maintenant, il ne reste que ce choix : avancer, ensemble.---LéoJe m’assieds en face d’elle, mes coudes sur la table, les mains jointes.Elle me regarde toujours.Pas avec pitié.Pas avec crainte.Mais avec cette lucidité brûlante qui m’a toujours
ÉvaLe soleil n’a pas encore franchi l’horizon.Pourtant, une clarté douce et chaude baigne déjà la chambre.Non celle du jour, mais la sienne.Sa chaleur, son souffle régulier dans mon cou, sa main qui repose encore sur ma hanche.Il dort.Et pour la première fois depuis si longtemps, son visage s’est détendu.Ses traits d’ordinaire tendus par la douleur ou l’inquiétude sont apaisés, presque juvéniles.Je me retourne lentement, veillant à ne pas rompre cette quiétude fragile.Je le contemple.Léo.Mon tumulte. Mon refuge.Ses cils frémissent, effleurent sa joue.Un soupir glisse de ses lèvres. Peut-être rêve-t-il.Peut-être de nous. Peut-être de rien.Je tends la main, effleure sa joue du bout des doigts.Il ouvre les yeux. Ils sont encore lourds de sommeil, mais leur éclat me frappe comme une évidence.Léo – voix rauque, veloutée par la nuit« Tu es encore là. »Je hoche la tête.Je ne réponds pas.Ce silence contient plus d’engagement que n’importe quelle promesse formulée à voix h
LéoJe croyais que j’aurais plus de temps.Mais à peine deux jours se sont écoulés que déjà, les ombres de mon monde remontent à la surface.Le téléphone vibre. Trois fois. Toujours le même numéro.Celui de mon père.Je n’ai pas décroché.Pas encore.Mais je sens que ça approche. Que le moment vient.Éva est dans la pièce d’à côté.Elle trie des papiers, fait semblant de ranger.Depuis qu’on s’est retrouvés, tout est fragile.Chaque mot pèse. Chaque geste est une promesse silencieuse qu’on n’ose pas encore prononcer à voix haute.Et pourtant, elle est là.Présente.Belle dans ses silences.Je m’approche. Je pose ma main sur sa nuque.Léo – bas« Je dois lui parler. »Elle ne se retourne pas.Éva – calme« Je sais. »---ÉvaJe le sens reculer.Même quand il s’avance vers moi.Il pense que je vais le retenir.Mais ce n’est pas ce qu’il me faut.Je ne veux pas d’un homme qui fuit.Je veux quelqu’un qui reste debout. Même quand tout vacille.Alors je me tourne.Je l’embrasse doucement su
LéoLe train file à travers la campagne.Le paysage défile si vite que j’en ai mal à la tête.Mais je ne détourne pas les yeux.J’ai quitté le manoir cette nuit.Pas un mot. Pas un bruit.Je n’ai pris que l’essentiel : la lettre de ma mère, les documents, et la bague qu’Éva a oubliée sur ma table de chevet un matin où elle était pressée.Elle croyait que je ne l’avais pas vue.Mais je l’ai gardée.Parce qu’elle sentait encore sa peau.Je ne sais pas ce qui m’attend.Mais je sais ce que je laisse derrière.Et je n’ai aucun regret.J’ai tout dit au journaliste.Tout.Les noms. Les comptes. Les morts qu’on a voulu faire taire.Il a promis de publier. De tout dévoiler.Moi, je n’ai rien demandé.Pas de reconnaissance. Pas de pardon.Seulement… que ça s’arrête.Que le silence cesse de couvrir les hurlements.Je pense à elle.À Éva.À la façon dont elle me regardait quand je pensais ne plus rien valoir.À sa patience. Sa colère. Son absence de jugement.Je me suis brûlé à son amour.Mais c’
ÉvaDeux jours.Quarante-huit heures à regarder les aiguilles tourner, à guetter les messages qui ne viennent pas, à remplir les silences avec des souvenirs qui font plus mal qu’ils ne réconfortent.Je fais semblant d’avoir une vie. Je vais au travail, je ris aux blagues de collègues dont je n’entends pas les mots, je rentre chez moi comme si c’était normal.Mais je ne suis plus là. Je suis ailleurs.Là où il est.Ou là où il n’est plus.Le café n’a plus de goût.La musique m’agace.Je n’écoute que les battements irréguliers de mon propre cœur, comme s’il me rappelait chaque minute que Léo me manque. Que tout en moi le réclame.Je dors mal. Les nuits sont pleines de rêves troués.Je me réveille en sursaut, persuadée de l’avoir entendu frapper à la porte.Mais il n’y a que le vent. Et le vide.Le mot qu’il a laissé… je l’ai relu cent fois.Je le garde plié dans mon livre préféré, au creux d’un chapitre sur les départs.Ça me semble ironique. Cruel, même.Et puis ce matin, la lettre.Gl