AnnaJe n’ai pas fermé l’œil de la nuit. Allongée sur ce lit trop grand, dans cette villa qui m’étouffe, je compte les heures jusqu’au lever du jour. Mon cœur cogne contre ma poitrine, mes mains tremblent dès que je pense à ce qui m’attend aujourd’hui. Fuir. Mentir à Louis. Risquer ma vie et celle de l’enfant.À l’aube, Clara entre sans bruit dans ma chambre. Son regard croise le mien, elle comprend que je suis prête. Pas besoin de mots. Elle s’approche, me tend une robe simple, discrète, bien loin des tenues coûteuses qu’il m’impose d’ordinaire.— Mets ça. On ne doit pas attirer l’attention.Je hoche la tête et obéis. Elle brosse mes cheveux, noue mes lacets, comme si ce geste banal pouvait calmer mes angoisses. Puis elle murmure, presque inaudible :— Le chauffeur t’attend déjà. J’ai dit que tu voulais aller à la librairie pour tes cours. Louis a donné son accord… mais tu n’as que deux heures, Anna. Pas une minute de plus.Je me raidis.— Il ne vient pas ? Il ne m’accompagne pas ?Cl
AnnaLa nuit s’est installée, pesante, étouffante. Le silence dans la villa est presque oppressant, seulement troublé par le tic-tac de l’horloge accrochée dans le salon. Clara est venue me voir avant d’aller se coucher, son regard lourd de sous-entendus. Elle sait. Elle sait qu’il viendra ce soir, comme à chaque fois, et que je n’aurai pas la force de lui résister.Je reste là, assise au bord du lit, les bras enroulés autour de mes jambes, le regard perdu dans le vide. Fuir. J’y pense sans cesse, mais je sais que je suis incapable de le faire. Pas ce soir. Pas quand il vient me réclamer.La porte d’entrée grince doucement. Je ferme les yeux, retenant mon souffle. Son parfum me parvient presque aussitôt, ce mélange enivrant de luxe et de danger. Mes mains se crispent sur le drap.Il ne tarde pas à apparaître dans l’encadrement de la porte, sa silhouette massive se découpant dans l’ombre. Louis est là, son regard sombre posé sur moi, intense, possessif, dévastateur.— Tu m’attendais ?
AnnaLa journée a été interminable. Chaque minute me ramène à la même pensée : fuir. Quitter cette villa, cet homme, ce cauchemar qui me consume autant qu’il m’enchaîne. Clara m’observe sans rien dire, mais dans ses yeux je vois bien qu’elle a compris. Elle sait. Elle sait que je suis en train de sombrer.Le soleil disparaît lentement à l’horizon, et avec lui, ma maigre détermination s’efface. Je sais qu’il va venir. Comme chaque soir. Je sais que je vais flancher. Comme chaque nuit.Quand la porte s’ouvre, mon souffle se bloque. Louis entre. Sa prestance m’écrase, m’oppresse. Son regard se pose sur moi avec cette possessivité glaciale qui me donne autant envie de hurler que de me jeter dans ses bras.— Je suis rentré.Sa voix grave résonne dans la pièce. Je recule d’un pas, mais il s’approche déjà. Ses doigts glissent sur ma joue, son regard s’assombrit.— T’as pas idée comme tu me manques à chaque putain de seconde où je ne suis pas là, Anna.Je baisse les yeux.— Louis… pas ce soir
AnnaL’aube s’étire lentement sur la villa, baignant les murs d’une lueur froide. Je suis déjà debout, incapable de fermer l’œil de la nuit. Le souffle court, le cœur au bord des lèvres, je fais les cent pas dans la chambre, la valise prête depuis des heures.Clara entre doucement, le visage tendu. Ses yeux se posent sur moi, et sans un mot, elle sait. Elle sait que c’est aujourd’hui.— C’est prêt. La voiture est là, au bout de l’allée. Mais Anna… si on part, y’a pas de retour possible.Je hoche la tête sans hésitation.— Je sais. On y va.Clara me regarde longuement, puis s’approche pour attraper sa propre valise posée près de la porte. Oui, elle vient avec moi. Depuis hier soir, elle a pris sa décision. Elle ne veut pas me laisser seule, pas maintenant, pas dans mon état.— Tu es sûre de toi, Clara ? Tu sais ce que ça implique…Elle esquisse un sourire triste.— Je n’ai plus rien ici. Lui, il ne me laissera jamais tranquille si je reste. Et toi… t’as besoin de quelqu’un. Alors je vi
AnnaJe regarde encore une fois ce téléphone posé sur mes genoux. L’écran noir, mais je sais qu’il ne tardera pas à vibrer de nouveau. Louis n’abandonne jamais. Pas quand il veut quelque chose. Pas quand il s’agit de moi.Je ferme les yeux un instant, la gorge nouée. Son visage s’impose à moi, son regard froid, cette façon qu’il a de me posséder entièrement. Même maintenant, même en fuite, il me tient encore… à travers ce simple objet.— Anna… souffle Clara, qui comprend avant même que je parle.Je serre le téléphone si fort que mes phalanges blanchissent. J’ai envie de pleurer, de crier, de tout abandonner. Mais non. Je dois le faire.Je baisse la vitre de la voiture, le vent froid me gifle le visage. Et sans réfléchir une seconde de plus, je lance ce maudit appareil aussi loin que je peux, droit dans la forêt qui borde la route.Le silence s’abat dans l’habitacle.Clara me regarde, sidérée. Puis un sourire léger se dessine sur ses lèvres.— T’as bien fait.Je retiens un sanglot. C’e
LouisJe suis là, immobile dans mon bureau, les poings crispés sur le bois massif de la table. Mes yeux rivés sur la porte fermée. Une rage sourde me dévore de l’intérieur. Chaque minute qui passe me rend plus fou.Ils arrivent enfin. Deux de mes hommes. Ceux que j’avais personnellement choisis pour la surveiller. Ceux à qui j’avais confié ce que j’ai de plus précieux. Et ils ont échoué.Ils entrent la tête basse, incapables de soutenir mon regard. La peur est déjà visible dans leurs gestes, leurs respirations hachées, leurs yeux fuyants.— Vous… — Ma voix se brise, rauque, chargée d’un venin prêt à exploser — Vous aviez UNE mission. UNE SEULE. Surveiller la villa. Veiller sur elle. Et vous l’avez laissée partir…Silence. Le plus vieux ose enfin balbutier, la voix tremblante :— Patron… on… on a fait de notre mieux… Elle… elle nous a eus…Je claque brutalement le poing sur la table, faisant sursauter toute la pièce.— VOTRE MIEUX ?! Vous croyez que je veux entendre vos putains d’excus
LouisDeux mois plus tard Je suis là, assis dans la voiture, les poings toujours serrés, chaque muscle tendu. L’air est glacial, mais rien ne parvient à calmer cette brûlure qui consume mes entrailles. Ce n’est pas la peur qui me ronge, ni l’angoisse. C’est bien pire. C’est cette rage intérieure, cette furie silencieuse que je ne peux extérioriser. Je dois rester maître de moi. Pas de signes, pas d’indices qui trahissent ce qui se passe en moi.Adrien parle. Je n’écoute que d’une oreille distraite. Ses mots sont des bruits de fond. Il parle d’informations, de recherches, mais tout ça m’importe peu. Il ne voit pas l’étau se resserrer autour de ma poitrine, il ne perçoit pas la chaleur qui s’intensifie sous ma peau. Il ne sait pas que je suis au bord de l’explosion.Je respire profondément, une tentative vaine pour calmer ce feu qui me brûle. C’est elle. Anna. Elle est partie, elle m’a échappé. Elle m’a laissé seul avec ce vide, avec cette absence qui me ronge plus sûrement que n’impor
LouisJe ne dis rien. Je ne bouge pas. Je la laisse se perdre dans ses pensées, dans ses mensonges. Elle se croit encore en contrôle, mais elle est déjà piégée, la vérité ne peut plus lui échapper. Mais Clara… Elle essaie encore de me faire croire qu’elle maîtrise la situation.Elle se crispe, un frisson court sur son dos. Elle essaie de regagner un peu de contenance, mais je vois que ça ne marche pas. La peur l’envahit de plus en plus, et j’aime ça. J’aime cette sensation de pouvoir. J’aime qu’elle sache qu’elle ne peut rien contre moi.Enfin, elle parle, sa voix un chuchotement tremblant :— Je… je ne sais pas où elle est, Louis. Je vous jure… je ne sais rien…Elle me regarde droit dans les yeux, ses lèvres tremblantes. Mais son regard, trop fuyant, trahit son mensonge. Elle sait. Elle sait où Anna se cache. Mais elle croit que je vais la croire. Que je vais lui accorder une chance.Je me rapproche lentement, un pas après l’autre. Elle recule, mais elle est déjà acculée. Il n’y a pl
LouisLe terminal mexicain est tout ce qu’on peut attendre d’un endroit où la chaleur et la poussière semblent se mêler. Mais rien ne m’impressionne. Pas cette chaleur étouffante qui me frappe dès que je mets un pied à l’extérieur. Pas ce bruit incessant de moteurs, de voitures et de marchés qui semblent s’étirer à l’infini autour de moi. Ce n’est pas la ville qui m’importe. C’est ce que je suis venu chercher. Elle.J’ai quitté l’aéroport dans la précipitation, une vague d’impatience et de colère en moi. C’est un autre monde ici, un endroit où les règles sont différentes, mais c’est aussi un endroit où je peux obtenir ce que je veux, peu importe les obstacles.Je prends l’un de mes jets privés. Pas un vol commercial, ni une étape trop lente. Non, cette fois-ci, il n’y a pas de place pour les demi-mesures. Un jet. Directement vers la petite ville où Clara m’a dit qu’Anna se cachait. Rien de plus. La rapidité, la discrétion. Je n’ai pas le temps d’errer dans des hôtels ou des quartiers
LouisJe suis épuisé, mentalement et physiquement. Chaque respiration est lourde, chaque pensée me tire plus profondément dans un abîme sans fin. Rien dans ce foutu casino ne parvient à me distraire. Rien ne parvient à éteindre ce feu brûlant dans ma poitrine. Camille me pèse, l’impossibilité d’échapper à mes responsabilités me hante, et l’absence d’Anna me consume chaque jour un peu plus.Je n’ai plus la force d’être ce que je devrais être, ce que tout le monde attend de moi. L’homme impitoyable. L’homme de fer.Je sors du bureau, je laisse derrière moi la lumière crue, les éclats de voix des employés et les regards inquiets de ceux qui m’observent toujours, un peu trop attentivement. Mes pas résonnent dans le hall désert. La nuit, la vraie, m’enveloppe dès que je franchis la porte.La voiture m’attend, fidèle, silencieuse, prête à m’emporter là où personne ne me connaît. Là où je peux m’oublier, ne serait-ce qu’un instant. Là où je peux fuir cette cage dorée que j’ai construite pour
LouisLa maison est plongée dans un silence lourd, oppressant. Je suis toujours là, dans mon bureau, les yeux rivés sur les écrans, à attendre, à chercher des indices, à analyser chaque détail comme un fauve prêt à bondir. Mais rien ne me fait oublier. Rien ne me fait oublier qu’elle m’a échappé. Anna. La pensée de sa fuite me ronge de l’intérieur, encore et encore.Camille n’est pas encore revenue. Je sens son absence comme une présence, comme une pression qui m’écrase la poitrine. Elle a été distante toute la soirée, plus absente que jamais. Je sais qu’elle s’inquiète. Mais ça m’agace. Ce n’est pas le moment. Pas pour ses questions, ni pour ses tentatives d’approches.Je regarde l’heure. Il est déjà bien après minuit. Le son des clefs dans la serrure me tire de mes pensées. Camille est de retour. Je me redresse, mais je ne bouge pas. J’attends, une tension croissante se formant dans l’air. La porte du bureau s’ouvre doucement. Elle entre, un peu hésitante, comme si elle savait qu’el
LouisJe suis là, dans mon bureau, le regard fixé sur l’écran de mon ordinateur, mais mes pensées ne vont nulle part. La colère bouillonne toujours en moi, un tourbillon incessant qui refuse de s’éteindre. Tout ce que je vois, tout ce que je touche, me rappelle Anna. Elle, sa fuite, son visage… la promesse qu’elle m’a faite et que, dans sa peur, elle a brisée.Je serre les poings, les jointures blanches sous la pression. Chaque clic sur le clavier résonne comme un écho dans ma tête. Le travail est une distraction, mais il n’est qu’une illusion. Mes pensées reviennent sans cesse à elle. Qu'est-ce qu'elle fait ? Où est-elle ? Pourquoi m'a-t-elle échappé ? Pourquoi ai-je échoué ?Je me redresse et regarde la pièce autour de moi. Cette maison, ces murs, cette vie construite sur des fondations qui me semblent désormais fragiles, si fragiles. Camille entre dans le bureau, silencieuse comme toujours, mais ce soir, même sa présence ne m'apaise pas. Elle m’observe d’un air inquiet, les sourcil
AnnaJe me tiens devant le miroir, observant mon reflet avec une étrange sensation. Mes yeux suivent les contours de mon visage, les traits tirés, le regard plus sombre qu'autrefois. Mais c’est mon ventre qui capte toute mon attention.Je touche doucement la légère courbe, cette présence fragile qui commence à s’installer. Je suis enceinte. Je ne pensais pas que cela serait possible, après tout ce que j’ai traversé. Mais il est là, à l’intérieur de moi, un petit être fragile, qui bat et qui grandit sans que je puisse vraiment le comprendre.Ce n’était pas prévu. Au début, la peur m’a envahie. Comment vivre avec ça, dans cette fuite incessante, dans cette vie de mensonges et de secrets ? Mais plus le temps passe, plus je réalise que cet enfant… cet enfant est ma seule lumière. La seule chose vraie dans ce monde de ténèbres.Je me baisse, posant mes mains sur mon ventre, ressentant pour la première fois cette petite pression. Il est là, bien là. Et je le sens. Il vit. Et ça me donne une
Louis Elle pleure, tremblante, et ses yeux cherchent une issue. Mais il n'y en a plus. Pas pour elle.— Je… je sais pas… je… je vous en supplie… je vous le jure…Je lâche un soupir de dégoût, et je donne un autre ordre, ferme. Je ne m’arrêterai pas tant que je n’aurai pas ce que je veux. Tout ce que j’ai perdu. Et tout ce que je dois reprendre.— Alors faites-la parler, peu importe le prix.AnnaJe n’ai jamais été aussi loin de tout ce que j’ai connu. De tout ce que j’ai aimé. De tout ce que j’ai perdu.Il y a des moments où j’aurais voulu que tout cela n’existe pas. Que cette fuite, ce masque, cette vie de mensonges et de secrets ne soient qu’un mauvais rêve dont je pourrais me réveiller. Mais la réalité, elle, est implacable. Elle ne me laisse pas de répit.Je suis maintenant Silvia Warren. Un nom de plus parmi tant d’autres. Une inconnue dans une ville où personne ne me cherche, où tout ce qui me lie à mon passé est enterré sous des couches de poussière et de silence.Les États-Un
LouisJe ne peux pas m’arrêter. Pas maintenant. Pas tant qu’elle est encore en vie, tant qu’elle me défie à chaque seconde où elle me fuit. Clara est une erreur, une obstruction, mais elle n’est pas l’objectif final. Non, elle est juste un obstacle à écraser pour atteindre ce que je veux vraiment. Anna. Mon obsession.Je traverse le hall, mes pas résonnant comme un écho de la promesse que je m’étais faite ce soir-là. Les murs de mon empire sont solides, mais il y a des fissures, et c’est là que je vais frapper. Je n’ai plus de patience. Ni pour Clara, ni pour ses mensonges. Elle connaît la vérité, mais elle choisit de me mentir, de me faire perdre mon temps. Et cela, je ne le tolérerai pas.Je pousse la porte de la salle d’interrogatoire. Elle est là, toujours à genoux, tremblante, mais elle tente de masquer sa peur derrière une dignité qui n’a plus aucun sens. Elle croit encore qu’elle peut sortir de cette pièce indemne. Elle croit qu’elle peut garder son silence et en sortir indemne
LouisJe ne dis rien. Je ne bouge pas. Je la laisse se perdre dans ses pensées, dans ses mensonges. Elle se croit encore en contrôle, mais elle est déjà piégée, la vérité ne peut plus lui échapper. Mais Clara… Elle essaie encore de me faire croire qu’elle maîtrise la situation.Elle se crispe, un frisson court sur son dos. Elle essaie de regagner un peu de contenance, mais je vois que ça ne marche pas. La peur l’envahit de plus en plus, et j’aime ça. J’aime cette sensation de pouvoir. J’aime qu’elle sache qu’elle ne peut rien contre moi.Enfin, elle parle, sa voix un chuchotement tremblant :— Je… je ne sais pas où elle est, Louis. Je vous jure… je ne sais rien…Elle me regarde droit dans les yeux, ses lèvres tremblantes. Mais son regard, trop fuyant, trahit son mensonge. Elle sait. Elle sait où Anna se cache. Mais elle croit que je vais la croire. Que je vais lui accorder une chance.Je me rapproche lentement, un pas après l’autre. Elle recule, mais elle est déjà acculée. Il n’y a pl
LouisDeux mois plus tard Je suis là, assis dans la voiture, les poings toujours serrés, chaque muscle tendu. L’air est glacial, mais rien ne parvient à calmer cette brûlure qui consume mes entrailles. Ce n’est pas la peur qui me ronge, ni l’angoisse. C’est bien pire. C’est cette rage intérieure, cette furie silencieuse que je ne peux extérioriser. Je dois rester maître de moi. Pas de signes, pas d’indices qui trahissent ce qui se passe en moi.Adrien parle. Je n’écoute que d’une oreille distraite. Ses mots sont des bruits de fond. Il parle d’informations, de recherches, mais tout ça m’importe peu. Il ne voit pas l’étau se resserrer autour de ma poitrine, il ne perçoit pas la chaleur qui s’intensifie sous ma peau. Il ne sait pas que je suis au bord de l’explosion.Je respire profondément, une tentative vaine pour calmer ce feu qui me brûle. C’est elle. Anna. Elle est partie, elle m’a échappé. Elle m’a laissé seul avec ce vide, avec cette absence qui me ronge plus sûrement que n’impor