Rubis L’église se dresse devant nous, sombre et imposante sous la lueur tamisée des réverbères. Son architecture ancienne donne à la nuit une aura presque mystique, comme si le temps s’était arrêté à cet instant précis. Mon cœur bat à un rythme effréné alors qu’Aziz m’aide à sortir de la voiture, son regard rivé au mien avec une intensité troublante.— Dis-moi que tu as confiance en moi, Rubis.Ses doigts effleurent ma joue, son geste tendre contrastant avec l’urgence de notre situation. Tout en moi crie de me reculer, de ne pas céder à cette folie. Mais une autre partie de moi, plus profonde, plus viscérale, refuse de le repousser.— Pourquoi ici ? Pourquoi maintenant ?Il ne répond pas tout de suite. Il se contente de serrer ma main et de m’entraîner doucement vers l’entrée de l’église.— Parce que je veux que tu sois à moi.Ses mots me percutent de plein fouet.— Et ta femme ? je murmure, ma voix tremblante.Il ferme brièvement les yeux avant de les rouvrir, une ombre passant dans
RubisIl ne fait pas ça uniquement par amour.Il fait ça pour s’assurer que je ne parte pas.Je suis assise sur le balcon, le regard perdu sur la mer à perte de vue. Le vent caresse ma peau, mais au lieu de me sentir libre, j’ai l’impression d’être une illusion au milieu d’un rêve qui ne m’appartient pas.— À quoi penses-tu ?La voix d’Aziz brise le silence. Il s’approche derrière moi et pose ses mains sur mes épaules. Sa chaleur m’enveloppe, et je ressens cet étrange mélange de sécurité et d’oppression qu’il dégage toujours.— À ce que nous faisons ici.Il reste silencieux un instant avant de contourner ma chaise pour s’accroupir face à moi. Ses yeux sombres me sondent avec une intensité troublante.— Nous sommes ici pour nous, Rubis. Pour construire quelque chose.Je détourne le regard.— Construire quoi, Aziz ?Il soupire, puis attrape ma main, la serrant doucement dans la sienne.— Je t’ai dit que je voulais du temps.— Du temps pour quoi ? Je secoue la tête. Pour te séparer d’ell
AzizLa bague brille à son doigt, reflet silencieux du serment que je viens de lui faire. Un serment fragile, bancal, mais sincère. Je la regarde, si belle sous la lumière des cierges, les lèvres tremblantes d’émotion, les yeux troublés. Elle veut croire en moi, je le vois. Elle veut se convaincre que ce mariage, aussi secret soit-il, est réel.Mais moi, je sais.Je sais que le monde dans lequel je vis ne nous laissera jamais être heureux.Rubis ne comprend pas encore à quel point tout est compliqué. Layla n’est pas une simple épouse dont on peut se séparer avec un avocat et quelques papiers signés. Elle est un pilier, une garantie pour des alliances, une dette que je ne peux pas simplement effacer.Et pourtant, ce soir, j’ai tout risqué pour Rubis.Elle me regarde, attendant que je dise quelque chose. Que je lui explique pourquoi, comment, et surtout, ce qui va suivre. Mais je ne peux pas. Parce que je ne sais pas moi-même comment je vais la protéger de ce qui va venir.Nous sortons
RubisLa mer s’étend devant nous, vaste et silencieuse, seulement troublée par le bruit des vagues qui viennent mourir contre les rochers. Depuis la suite luxueuse de cette villa isolée, tout semble irréel, comme un rêve suspendu entre le ciel et l’océan. L’odeur saline se mêle aux effluves de jasmin flottant depuis le balcon, et une brise légère fait onduler les rideaux de soie.Aziz est là, debout près de la baie vitrée, une coupe de champagne à la main. Il est calme, presque trop, comme s’il savourait chaque seconde de ce moment qu’il a façonné de ses propres mains. Le reflet des lumières tamisées caresse les angles parfaits de son visage, rendant ses traits plus durs, plus inaccessibles.Je l’observe en silence, mon cœur battant d’une façon que je ne contrôle plus. Cet homme… Il a pris tout de moi : ma liberté, mes certitudes, mes nuits. Et pourtant, en cet instant, il semble attendre quelque chose de moi, quelque chose qu’il ne peut pas prendre de force.Son regard capte le mien
RubisJe sens son souffle régulier derrière moi, son bras puissant enroulé autour de ma taille, me maintenant contre lui même dans son sommeil.Lentement, je me détache, soulevant délicatement les draps de soie. La fraîcheur de la pièce me frappe instantanément, un contraste violent avec la chaleur de notre étreinte nocturne.Je me lève et marche pieds nus jusqu’au balcon. L’air marin emplit mes poumons tandis que mes doigts effleurent la rambarde froide.Qu’ai-je fait ?Je ferme les yeux, revoyant chaque instant de la veille. Chaque baiser. Chaque frisson. Chaque murmure.Je me suis abandonnée à lui.Je pensais pouvoir me contrôler, garder mes distances. Mais Aziz est un maître dans l’art de posséder. Pas seulement mon corps, mais mon esprit, mon âme.Un frisson me parcourt, mais ce n’est pas le vent. C’est la réalisation brutale que je suis en train de me perdre.— Tu fuis déjà ?Sa voix grave me ramène à la réalité.Je me retourne. Il est là, debout près du lit, le drap enroulé nég
Aziz Je savoure ce moment. L’entendre supplier est une douce vengeance.Je pourrais l’écraser totalement. Lui laisser juste assez d’air pour qu’il suffoque plus lentement.Mais j’ai une autre idée.— Je vais être généreux.Il lève les yeux vers moi, un éclat d’espoir au fond du regard.— Je vais te laisser une place.— Vraiment ?— Oui… sous mes ordres.Son visage se fige.— Tu veux que je travaille pour toi ?— Si tu veux survivre, tu n’as pas d’autre option.Il se tait, lutte intérieurement. Accepter mon offre, c’est renoncer à tout orgueil. Mais refuser, c’est signer son arrêt de mort financier.Enfin, après une longue hésitation, il murmure :— D’accord.Un sourire satisfait étire mes lèvres.— Bonne décision.Je me lève sans attendre, lui laissant le poids de son humiliation.Marius ouvre la porte pour moi. Avant de partir, je me tourne vers lui et ajoute, d’un ton presque distrait :— Et Sébastien… la prochaine fois que tu essaies de me défier, assure-toi d’être prêt à perdre p
RubisL’avion atterrit en douceur sur le tarmac privé de l’aéroport. À travers le hublot, la ville s’étend devant moi, familière et oppressante à la fois. Après des jours passés dans la villa d’Aziz, bercée par le bruit des vagues et une illusion de liberté, revenir ici me donne l’impression d’entrer dans une cage dorée.Aziz est assis à côté de moi, impassible comme toujours. Il ferme son téléphone après un dernier message et me jette un regard en coin.— Tu es prête ?Je hoche la tête sans conviction. Suis-je seulement prête ?Le jet s’arrête et les agents de sécurité se déploient déjà à l’extérieur. Je défais ma ceinture tandis qu’Aziz se lève, me tendant une main que j’ignore. Son sourire amusé trahit qu’il s’y attendait.— Toujours aussi têtue, murmure-t-il en descendant avant moi.Je le suis de près, ajustant mon manteau alors que l’air plus frais de la ville me frappe en plein visage. Mais ce n’est pas la température qui me fait frissonner.C’est lui.Prince.Il est là, au pied
AzizJe l’ai laissée s’éloigner avec Prince, observant la scène de loin. Je n’avais pas besoin d’entendre leurs mots pour comprendre ce qui se passait. Tout était inscrit dans leurs gestes, dans la tension palpable qui vibrait entre eux.Rubis lui a dit.Et Prince l’a mal pris, comme prévu.Il croyait peut-être encore avoir une emprise sur elle, une chance de la récupérer. Quelle naïveté.Quand elle revient vers moi, son visage est fermé, impassible. Mais je vois les ombres dans son regard.— Tu es prête à rentrer ? je demande en l’observant attentivement.Elle hoche la tête, sans un mot.Je déteste ça.Je déteste cette façon qu’elle a de se fermer, de me cacher ce qu’elle ressent.Je passe une main dans son dos, la guidant doucement vers la voiture. Elle ne résiste pas, mais son corps est tendu, comme si elle était ailleurs.Prince l’a troublée.Et ça ne me plaît pas du tout.Alors que nous nous installons à l’arrière du véhicule, je décide de briser le silence.— Tu regrettes déjà ?
RubisLes jours se suivent et se ressemblent, mais chaque matin semble désormais différent. Le monde autour de moi a changé, tout comme ma perception de ce dernier. L’idée que je porte un enfant, notre enfant, semble m’habiter à chaque instant. Cette pensée douce et bouleversante me poursuit à chaque mouvement, à chaque battement de mon cœur. La vie, celle que je vais offrir à ce petit être, semble fragile et précieuse, comme un fil suspendu dans le vide, mais rempli d’un potentiel immense.Le ventre commence à se voir, à se dessiner lentement, et chaque matin, je pose mes mains dessus, comme une promesse silencieuse à cet enfant. Aziz est plus que présent, plus que jamais. Il veille sur moi comme un protecteur, mais aussi comme un homme qui a trouvé sa place. Ses yeux brillent d’une lueur différente, d’une douceur nouvelle, et je vois dans son regard qu’il est déjà tombé amoureux de ce bébé, avant même qu’il ne soit là.Il n’y a pas un jour où il ne m’adresse un sourire plein de tend
RubisLes mois ont passé en un éclair. Chaque jour passé à ses côtés semble être une éternité, mais une éternité douce et pleine de sens. Aziz et moi avons créé notre propre monde, un monde où l’amour et la complicité sont plus forts que tout le reste. Le chaos qui m’entourait avant semble s’éloigner, comme un lointain souvenir que je tente de ne plus revoir. Nous avons trouvé une certaine paix ensemble, une tranquillité fragile, mais sincère.Aujourd’hui, la maison semble plus lumineuse que jamais. Les rayons du soleil filtrent à travers les rideaux, illuminant chaque coin de la pièce, et je me sens… bien. Plus que bien, en réalité. C’est comme si une énergie nouvelle envahissait chaque cellule de mon corps, une chaleur douce et rassurante qui ne fait qu’augmenter au fil des jours. J’ai l’impression de renaître, de trouver une version de moi que j’avais oubliée.Je suis assise sur le canapé, une tasse de thé fumant entre les mains, mes pensées vagabondant. Aziz est dans la cuisine, s
RubisLe matin se lève lentement, apportant une lumière douce et chaude à travers les rideaux. Je me réveille dans le silence de la maison, mais un silence différent de celui de la veille. Ce matin, il n’y a pas ce malaise, cette lourdeur qui pesait sur mes épaules. Non, aujourd'hui il y a cette chaleur, cette douceur étrange qui m'envahit depuis que Aziz est rentré. Ses bras autour de moi, sa présence constante… Il est là, à chaque instant, et chaque seconde passée avec lui est comme une promesse silencieuse, une promesse de réconfort et de passion.Je me tourne lentement vers lui, le voyant allongé à côté de moi, sa respiration calme. Son visage est serein, comme s’il ne se souciait de rien. Il est si différent de tout ce que j’ai connu, et pourtant, il m’attire d’une manière que je ne peux pas expliquer. Tout ce que j’ai fait, tout ce que j’ai traversé, m’a conduite à lui. C’est comme si, dans ce chaos, dans cette guerre secrète, il était le seul à apporter un peu de clarté.J’effl
RubisIl me regarde longtemps, son regard perçant, comme s’il voulait déchiffrer les mystères de mon âme. Mais il se contente de hocher la tête et se tourne vers la télévision. Peut-être qu’il n’a rien vu, ou peut-être qu’il fait semblant. Je ne le sais pas, et je n’ai pas envie de le savoir.Je me sens à la fois perdue et piégée. Tout ce que je voulais, c’était sauver Prince, mais voilà que je suis en train de me perdre moi-même.Le silence dans la maison est assourdissant. Je suis assise dans le salon, fixant le téléphone posé devant moi. La lumière tamisée de la pièce éclaire faiblement mon visage. Les pensées tournent, vides, en boucle. Chaque bruit semble plus intense que le précédent, chaque mouvement plus lourd. Je n’arrive pas à me débarrasser de cette sensation étrange, ce malaise persistant qui me ronge de l’intérieur.Peu après mon arrivée à la maison, Aziz est allé se coucher, et je suis restée là, seule avec mes pensées. Mon esprit ne peut s’empêcher de ressasser tout ce
RubisLe trajet de retour est une épreuve silencieuse. La route défile devant moi, chaque mètre qui me sépare de chez moi me pèse un peu plus. Le silence dans la voiture est lourd, presque oppressant, et je n’arrive pas à calmer l’agitation qui m’envahit. Tout ce que je viens de faire, ce que je viens de risquer, semble me rattraper, mais il n’y a plus de retour en arrière. Le rituel a eu lieu, la poudre a fait son effet, mais tout ce que je ressens, c’est un vertige de culpabilité et de doute. Ai-je fait le bon choix ? Est-ce que cela suffira pour sauver Prince, ou l’ai-je poussé plus loin encore dans la folie ?Je ferme les yeux un instant, cherchant à trouver un peu de calme, mais c'est impossible. Dans ma tête, tout est un tourbillon. La conversation avec le marabout, l’odeur de la poudre, le moment où j’ai vu Prince manger le repas. C’était comme si le monde s'était suspendu, et maintenant que je suis en route vers la maison, tout reprend son cours, mais pas de la façon dont je l
RubisLa nuit tombe doucement sur la ville, et tout autour de moi, le silence s’épaissit, lourd de promesses non dites. J’ai pris une décision, une décision qui scellera peut-être le destin de Prince. Je dois le voir ce soir. Tout ce que je veux, c’est l’aider. Mais l'angoisse se mêle à la détermination. Je n'ai pas le droit à l'erreur. Si cette poudre ne fonctionne pas, si tout cela échoue, alors je risque de perdre Prince à tout jamais. Ou pire encore, je pourrais le pousser plus loin dans la folie.J’ai fixé le rendez-vous dans son ancienne villa, un lieu où il se sentait chez lui, un lieu où il avait encore un semblant de contrôle. Peut-être qu’en retrouvant cet endroit, il se sentira plus calme, plus apaisé. Peut-être que la présence de cet espace familier l’aidera à accepter ce que je vais faire pour lui. Ce soir, tout doit changer.Je suis dans la voiture, les phares éclairant la route déserte, la ville s’éloignant derrière moi. Je me sens nerveuse, mais en même temps, une part
RubisLa tension dans l’air est palpable, un poids lourd qui pèse sur ma poitrine, alors que je me tiens face à Ladji. Les rues autour de moi sont animées, mais tout semble flou, comme si le monde tournait autour de moi et que j’étais piégée dans une bulle, perdue dans mes pensées. Chaque seconde qui passe me rapproche davantage de la décision que je vais devoir prendre, et je sais que c’est désormais une question de vie ou de mort. Prince… si je n’agis pas maintenant, je vais le perdre.Ladji est un homme que j’ai appris à connaître, un homme qui voit des choses que beaucoup d’autres ne perçoivent pas. Sa sagesse m’a souvent guidée, mais aujourd’hui, je suis venue pour une décision qu’il devra prendre, une décision qui ne pourra pas attendre. Je n’ai pas le temps de discuter des subtilités. Ce que je lui demande est risqué, et je sens son regard scrutateur posé sur moi, pesant chacun de mes mots.Je me tiens face à lui, le regard déterminé, mes mains serrées autour de ma veste, comme
RubisLes nouvelles concernant Daniel tourbillonnent dans mon esprit comme des vagues déchaînées, et plus j’y pense, plus l’angoisse m’envahit. J’ai l’impression que le monde autour de moi se fissure lentement. Ce n’était pas qu’une simple coïncidence : Daniel est devenu fou, et il n’était pas le seul. Ce qu’il a vécu en prison a brisé ce qui restait de sa raison, et je sais qu'il y a une part de cela que j’ai contribué à nourrir.La culpabilité me ronge. J’ai observé Daniel se perdre, l’avoir poussé à bout, et je savais au fond de moi que ce n’était pas un simple accident. Nos actions, nos décisions, tout ce qui s'est passé a mené à ce point. Et maintenant, je me dis que si je n’agis pas rapidement, Prince pourrait aussi sombrer dans cette même folie.Je me rappelle que j'ai arrêté de coucher avec Prince, mais est-ce que cela suffit pour le protéger de ce qui pourrait se produire si je ne fais rien ? L'idée qu'il suive le même chemin que Daniel m'envahit et me glace le sang. Je dois
RubisLe ciel est d'un bleu profond, presque irréel, tandis que je regarde la mer depuis le balcon. Le vent est doux aujourd'hui, et pourtant, une étrange tension flotte dans l'air. Aziz est silencieux, absorbé par ses pensées, mais je sens qu'il attend quelque chose. Il ne dit rien, mais je connais assez bien son regard pour savoir qu'il y a quelque chose qu'il ne m'a pas encore dit.Le téléphone de la table vibre soudainement, me tirant de mes pensées. Je le saisis d'un geste lent, le cœur battant plus fort. C'est un message de mon avocat. Un simple texte, mais une sensation glacée me traverse.« Rubis, il faut que vous veniez au bureau. Une nouvelle inquiétante concernant Daniel. »Un frisson parcourt ma colonne vertébrale, et je me tourne immédiatement vers Aziz. Il a remarqué ma réaction, et il se lève précipitamment, ses yeux fixés sur le téléphone dans mes mains.— Qu’est-ce qu’il y a ? demande-t-il d’une voix calme, mais le ton ne masque pas la tension qui y est cachée.Je lis