AnibalJe sens la douleur dans mes muscles, mais je la chasse de mon esprit. L’homme blessé marche à mes côtés, son visage déformé par la douleur, mais aussi par la terreur qui émane de lui à chaque pas. Je le soutiens du mieux que je peux, mais chaque mouvement me rappelle à quel point la situation est urgente. Les bruits de Miller et de ses hommes semblent s’estomper, mais la peur, elle, est bien là, tapis dans l’obscurité de mon esprit. Elle ne me lâche pas."On doit avancer plus vite", murmure Claire près de moi, ses yeux rivés sur chaque recoin du tunnel. Je hoche la tête, plus concentré que jamais. "Nous n’avons pas beaucoup de temps. Si Miller est vraiment aussi près qu’il le laisse entendre, il ne nous faudra pas longtemps pour nous retrouver."Claire, toujours aussi déterminée, répond sans hésiter. "On fait vite, mais on ne peut pas laisser cet homme ici. S’il a des informations sur Miller, ce pourrait être notre chance."Je sens une ombre de doute flotter dans l’air quand Lu
AnibalL'odeur de la terre fraîche et de la poussière m'envahit les poumons alors que je m'éloigne de l'entrée du tunnel. Je n'ai pas de plan précis, juste l'instinct de survie qui me guide depuis toujours. La lumière à l'extérieur est faible, mais elle nous offre une chance. Les bruits de poursuite derrière moi se rapprochent, menaçants. Je n'ai pas de temps à perdre. Je dois les semer, mais comment ?Je jette un coup d'œil rapide à la sortie, observant les buissons qui entourent l'ouverture. Nous sommes dans une vallée profonde, un endroit isolé que je connais bien. À moins qu'ils ne connaissent la région aussi bien que moi, Miller et ses hommes risquent de se perdre dans ce terrain accidenté. Mais je ne peux pas parier sur l'ignorance de l'ennemi.Je me glisse hors du tunnel et me couche à plat ventre derrière un tas de rochers. Mon esprit tourne à toute vitesse, analysant les options possibles. Je suis seul ici. Plus que quelques secondes avant que Miller ne surgisse.D'un geste v
AnibalLa brume épaisse qui s'est formée dans la vallée commence à se dissiper, laissant place à une lumière pâle qui rend le paysage encore plus énigmatique. Les bruits des poursuivants sont désormais loin derrière, mais la tension ne s'est pas estompée. Chaque brise semble me murmurer que la menace n'est jamais bien loin. J'ai semé mes ennemis, oui, mais le prix de cette victoire n'est pas encore payé. Pas encore.Je me trouve au sommet d'une crête étroite, au bord d'un sentier escarpé qui serpente à travers les montagnes. De là, je peux observer la vallée sous un autre angle. La forêt dense, qui semble être un abri, est en réalité un labyrinthe. J'en ai bien conscience : Miller et ses hommes connaissent ce terrain presque aussi bien que moi. À chaque moment, je sens que la pression monte. La situation devient plus tendue qu’elle ne l’a jamais été. C'est un jeu dangereux, mais un jeu que je maîtrise.Je balaie l'horizon de mes yeux, cherchant les signes des autres. Claire et Luca. J
AnibalLe cri perce l'air, soudain et perçant, emportant avec lui toute la tension accumulée dans les dernières minutes. Je me fige instantanément, mon regard fixé sur le groupe de mercenaires qui s'avancent sans méfiance. Le bruit provient de la direction opposée, mais je n'ai pas de doute. Quelque chose vient de changer dans l'équilibre de la traque. Les hommes de Miller s'arrêtent, leurs têtes se tournent vers la source du cri.Je me hausse légèrement, cherchant à repérer ce qui se passe. Mais dans la précipitation, je dois me concentrer pour ne pas être vu. Claire, à mes côtés, retient son souffle. Elle sait que l'incident n'est qu'un instant de répit, une distraction temporaire. Rien n'est encore réglé. Miller et ses hommes sont toujours en chasse, et leur vigilance ne faiblira pas si facilement.La distraction vient d'un cri lointain, un cri désespéré, qui a coupé le silence comme un couperet. Peut-être un piège ? Un leurre ? Je n'en sais rien. Je ne peux pas me permettre d'atte
AnibalLa brume est encore là, mais elle se dissipe lentement, comme une menace qui se retire pour mieux nous laisser respirer… mais elle ne fait qu’amplifier ce que je ressens. L’urgence, la peur, l’angoisse qui s’insinuent dans mes entrailles. Le vent frappe ma peau, me fouette, me rappelle que nous ne sommes pas à l'abri. Je garde le rythme, mes pas lourds sur le sentier rocheux, mais je n’ose m’arrêter. Pas encore.Claire est juste devant moi. Elle n’est pas en grande forme, je peux le voir. Ses pas sont plus lents, mais son regard, lui, est toujours aussi déterminé. Elle sait. Elle sait que nous devons continuer. Nous n’avons pas le choix. Derrière nous, Luca scrute l’obscurité, silencieux, toujours vigilant. Il garde son regard perçant sur les ombres, cherchant la moindre silhouette qui pourrait trahir nos poursuivants. Mais je le sais, nous n’avons pas beaucoup d’avance. Je les sens, ces hommes de Miller. Ils sont là, quelque part, prêts à fondre sur nous. Ils ne nous lâcheront
AnibalLes bruits des pas des mercenaires, qui avaient été si proches quelques instants plus tôt, commencent à s’éloigner. Le vent souffle à travers les arbres, brisant la tension qui pesait sur nous. Le silence, bien que lourd et plein de menaces invisibles, semble presque apaisant. Nous nous étions cachés à peine une minute auparavant, et maintenant, alors que l’obscurité tombe lentement sur la vallée, nous nous arrêtons enfin pour reprendre notre souffle. La lumière du jour s’efface peu à peu derrière les cimes des arbres, nous enveloppant d’un voile de calme, bien que temporaire.Je ne me permets pas de relâcher entièrement ma vigilance. Chaque bruit dans la forêt pourrait signifier un danger imminent. Pourtant, pour l'instant, je me permets de fermer les yeux un instant, de reprendre mon souffle, de laisser la fatigue envahir mon corps, sans céder à la panique. Je me tiens toujours prêt à réagir au moindre signe d'alerte, mais dans cet instant précis, je sais que la prudence et l
AnibalLe matin arrive plus tôt que je ne l’aurais souhaité. L’obscurité de la nuit s’est lentement dissipée, laissant place à une lumière grise et tamisée. La grotte est silencieuse, à l’exception du léger bruit de la brise qui souffle à l’extérieur. Je n’ai pas dormi, ou du moins pas plus de quelques minutes à la fois. Mes yeux sont lourds, mais mon esprit est resté vif, toujours en alerte.Luca et Claire dorment encore, épuisés par la journée précédente, leurs corps accablés par les heures passées à fuir, à courir. Je les observe un instant, en silence. Je sais qu’ils ont besoin de ce repos, mais je n’ai pas l’intention de rester ici plus longtemps. Nous ne pouvons pas nous permettre d’être pris au piège dans cette grotte. Nous ne sommes pas encore à l’abri.Je me lève doucement, faisant quelques pas pour étudier l’entrée de la grotte. Tout semble calme, mais mon instinct me dit qu’il ne faut pas se relâcher. Je scrute les alentours avec attention, cherchant la moindre trace qui po
AnibalLes heures semblent s'étirer alors que Claire, Luca et moi poursuivons notre chemin à travers la forêt dense. Le ciel est gris, et un vent frais souffle, ce qui nous soulage de l’humidité qui règne. La marche est épuisante, mais je sais que nous devons continuer à avancer. Le sol sous nos pieds est souvent accidenté, mais nous avons l'habitude, et chacun de nous essaie de garder un rythme constant.Bien que nous ne soyons pas encore hors de danger, chaque pas me rend un peu plus confiant. Je garde toujours un œil attentif sur les alentours, mais la forêt, pour l'instant, nous offre une certaine protection. Nous avançons prudemment, sans précipitation, cherchant à nous éloigner de la zone où nous avons fait une pause ce matin. Il n’y a pas de panique, juste cette nécessité de continuer, sans relâche.« Ça va ? » je demande en me tournant brièvement vers Claire et Luca.Claire hoche la tête. « Oui, mais j’ai l’impression qu’on pourrait s’arrêter un moment. Juste pour reprendre no
AnnibalLa porte claque doucement derrière nous. Pas de cris. Pas de menace. Pas de guerre. Juste… le silence.Je dépose les clés. Claire retire ses bottes en soupirant. Elle ne dit rien. Mais je la sens trembler, même sous ses vêtements. Je me retourne, la fixe.Elle me regarde, fatiguée, les yeux rouges mais clairs.Elle est belle comme ça.Vraie.Brisée, mais vivante.Et mienne — si elle le veut encore.— Ça fait combien de temps qu’on n’a pas été seuls, Claire ?Elle sourit, à peine.— Trop longtemps. J’avais oublié le son de ton silence.Je m’approche. Elle ne recule pas. Je tends la main et touche son visage. Sa joue est froide. Je veux la réchauffer.— On peut s’arrêter ce soir. Juste pour ce soir. Pas de Luca. Pas de monstres. Pas de souvenirs. Juste toi et moi.Elle ferme les yeux, s’approche, pose son front contre le mien.— Tu crois qu’on mérite ça ? Ce genre de paix ?Je pose mes mains sur sa taille, l’attire contre moi.— Je crois qu’on a traversé assez d’enfer pour mérit
---ClaireIl est là.Je le reconnaîtrais entre mille.Même couvert de sang séché, même amaigri, même l’âme en lambeaux…Annibal reste Annibal.Je cours. Je m’effondre contre lui. Il ne dit rien. Mais ses bras me serrent. Fort.Plus fort que je l’aurais cru possible.Comme si me toucher était la seule chose réelle ici.— Tu m’as retrouvée, je souffle.Il ferme les yeux. Sa main dans mes cheveux.— Je t’ai suivie jusqu’en enfer, Claire. Et ce n’est pas fini.---AnnibalLe monde est brisé. Mais Claire est là.Et tant qu’elle respire, j’ai une raison de continuer.Je ne pose pas de questions. Pas encore.Parce que je vois dans ses yeux les réponses que je redoute.Elle est différente.Quelque chose l’a touchée là-bas. Quelque chose l’a marquée.— Luca est avec toi ? je demande.Elle hoche la tête.— Oui. Mais il change. Il rêve d’elle. Il l’entend.Elle ne prononce pas son nom.Mais je sais de qui elle parle.Sali.Celle qui a volé la lumière de Claire. Celle qui a tenté de m’arracher m
LucaLe sol est stable. L’air est lourd, mais réel.On est de retour.Enfin… presque.Claire tient ma main si fort que je sens mes os craquer.Mais je ne dis rien. Parce qu’elle pleure. Et que je n’ai jamais vu Claire pleurer.— On l’a perdue, je dis.Elle secoue la tête.— Non. Elle s’est perdue. Nous, on s’est retrouvés.Et quand je regarde autour de nous, je sais que ce n’est que le début.Parce que le monde ne nous appartient plus.Mais nous savons où frapper.---ClaireCe n’est pas le monde que j’ai quitté.Les rues sont silencieuses. Les lampadaires crépitent comme des néons malades. L’air sent le métal et la pluie.Mais ce n’est pas ça, le pire.Le pire, c’est le regard des gens.Ils ne nous voient pas vraiment. Comme si nous étions flous, transparents à leurs yeux.Ou peut-être qu’ils ont appris à ne plus voir.Peut-être qu’ils savent… que ceux qui reviennent ne sont plus les mêmes.Luca titube à mes côtés. On n’a rien dit depuis l’apparition. Rien depuis le départ de Sali.O
ClaireLe sol n’est plus le même.Depuis que j’ai franchi cette rue — la rue, celle que personne n’ose nommer —, tout semble suspendu. Le vent ne bouge plus les feuilles. Les lampadaires ne font plus d’ombre.Je sens la trace de Luca. Une chaleur qui palpite encore sur le bitume, comme un cœur qui ne veut pas cesser de battre.Je le suis.Mais plus j’avance, plus je me perds.Mes souvenirs deviennent brumeux. Le nom de ma mère m’échappe. La couleur de mes yeux me fuit.Je me raccroche à une seule chose : Sali.Si je la retrouve, je retrouve Luca. Et peut-être… peut-être que je me retrouve moi-même.SaliElle est là.Elle marche dans mon sillage sans même comprendre.Je l’ai rêvée mille fois, Claire. Je l’ai vue tomber, se relever, tomber encore. Toujours humaine. Toujours trop humaine.Mais maintenant, elle est presque prête.Je tends les doigts, à travers la membrane qui sépare nos mondes. Je touche son esprit. Juste un peu.Elle tremble. Elle résiste.Elle est parfaite.Mais elle ne
ClaireTrois jours.Trois jours sans Anibal. Trois jours sans Serge. Trois jours que le bunker est devenu un tombeau muet, sans porte, sans écho. Et pourtant, parfois, la nuit, je crois entendre une voix murmurer mon prénom.Je reste assise sur le seuil du monde. Là où l’herbe recommence à pousser, là où le vent sent encore un peu la vie. Luca dort la plupart du temps. Quand il se réveille, il parle peu. Il a vu quelque chose là-bas, quelque chose qu’il refuse de mettre en mots.Et moi… moi, je tiens. Je veille. Parce que quelqu’un doit le faire.LucaJe ne rêve plus. Ou peut-être que je ne me réveille plus.Depuis que Claire m’a tiré hors de ce trou béant, je flotte entre deux états. Comme si mon corps était resté là-bas, avec Serge. Comme si mon esprit était resté accroché aux derniers mots d’Anibal.Il a murmuré assez. Mais est-ce que ça a compris ce qu’il voulait dire ?Claire me parle parfois. Elle me raconte des souvenirs, de l’avant. Des rires, des nuits étoilées, des bières tr
ClaireQuand je retrouve Anibal, il a le regard vide, les mains tremblantes.— Elles sont là, je dis.Il hoche lentement la tête.— Je sais.On rejoint Luca et Serge dans ce même café où tout avait basculé. Mais cette fois, personne ne fait semblant.Serge a les yeux injectés de sang, Luca tremble comme une feuille. Et moi… j’ai mal. Une douleur sourde au creux du ventre, comme si quelque chose me rongeait de l’intérieur.Anibal prend la parole, froid, déterminé.— On doit retourner là-bas.— Tu es malade, je murmure.— Non. On les a laissées passer. Elles ont franchi la faille. Ce monde… elles veulent le dévorer. Il faut refermer la porte.— Mais on ne sait même pas comment elle s’est ouverte !— Si, dit Serge. C’est nous.Un silence. Puis Claire comprend. Elle se lève lentement, les larmes aux yeux.— On l’a ouverte. En survivant.---LucaOn rentre chez nous cette nuit-là, mais quelque chose a changé. Les murs grincent comme des bêtes blessées. Les ombres bougent quand on ne regard
AnibalIl y a des soirs où tout semble basculer. Où l’air devient trop lourd, trop dense. Où chaque silhouette croisée dans la rue paraît familière, comme un souvenir lointain qui refuserait de mourir. Ce soir est l’un de ces soirs.Je marche seul dans les ruelles du quartier, les mains dans les poches, incapable de rester enfermé plus longtemps. Trop de silences. Trop de souvenirs coincés entre les murs. La pluie s’est remise à tomber, fine, persistante. Elle trace des lignes tremblantes sur le bitume, comme si le monde lui-même était en train de fondre doucement.Depuis notre retour, je ne me reconnais plus. Mes gestes sont mécaniques. Je souris quand il faut sourire. Je parle quand on me parle. Mais à l’intérieur, c’est le chaos. Il y a quelque chose d’inachevé. Comme une porte qu’on aurait refermée trop vite, sans vérifier ce qu’on laissait de l’autre côté.Je m’arrête devant un vieux kiosque fermé, les néons clignotants d’un bar éclairant la vitrine poussiéreuse. Dans le reflet,
AnibalLe retour à la réalité est brutal. Une sensation de vertige me secoue tandis que je sens enfin un sol familier sous mes pieds. L’air est plus dense, plus frais, chargé d’odeurs que je reconnais : celles de la ville, du bitume mouillé, de la vie normale. J’ouvre les yeux avec prudence, craignant un instant d’être encore prisonnier de l’autre monde.Mais non. Nous sommes bien là.Autour de moi, Claire, Luca et Serge reprennent lentement leurs esprits. On est tous sonnés, comme si on venait de vivre un rêve trop réel. Le silence qui nous entoure est presque irréel après tout ce que nous avons traversé. Plus de voix mystérieuses, plus de lieux étranges défiant la logique. Juste le bruit lointain des voitures, le clapotis d’une flaque sous une goutte de pluie, un chien qui aboie au loin.Claire se redresse d’un mouvement raide, ses yeux balayant les environs avec nervosité. "C’est bien… chez nous ?"Je hoche lentement la tête. "Oui. Je crois."Luca se passe une main sur le visage, c
AnibalL’espace autour de nous se tord et se plie sous une force invisible. Nous sommes prisonniers d’un monde qui ne nous appartient pas, un entre-deux où le temps lui-même semble hésitant. Depuis des jours – ou peut-être des semaines – nous errons dans ce royaume de brume et d’ombres, cherchant une issue qui semble toujours se dérober sous nos pas.Nous avons traversé des ruines hantées par des murmures indistincts, franchi des ponts suspendus au-dessus de gouffres sans fond, et marché sous des cieux où flottent des étoiles mortes. Partout où nous allons, ce monde cherche à nous garder en lui, nous séduisant par des visions de puissance et de liberté. Mais nous ne sommes pas dupes. Nous voulons rentrer.Claire est la plus affectée par ces illusions. Parfois, elle s’arrête en plein milieu du chemin, ses yeux vides, fascinée par une scène que nous ne pouvons voir. Des fragments de son passé, ou peut-être du futur. Luca et Serge doivent la secouer pour la ramener à la réalité.Moi, je