JulienJe me tiens là, figé dans l'encadrement de la porte. Les mots ne viennent pas. Mes yeux sont rivés sur eux, sur Camille, suspendue dans les bras de cet homme. Cet homme. Lorenzo.Il la serre contre lui, la prend avec une telle assurance, une telle domination que mon cœur s'arrête. Mon corps bouillonne de rage, de frustration, mais je suis paralysé par la scène qui se déroule devant moi. Camille… elle… elle ne bouge pas. Elle ne se débat pas. Elle reste là, comme une marionnette sans vie, simplement observée par ses yeux perçants, cet homme qui a tout pris.Je n'ai jamais ressenti une telle douleur. C'est comme si l'air autour de moi se raréfiait, chaque respiration devenant plus difficile. Je veux la sauver. Je veux la secouer, lui crier de se libérer, de fuir, de me revenir, mais je n'ose pas bouger.LorenzoJe sens sa présence derrière moi avant même qu'il parle. Julien. Mon "concurrent". Il ne dit rien pendant quelques secondes, mais je sais qu’il est là, son regard traversa
LorenzoJulien est là, toujours prêt à se battre. Mais il est trop tard pour lui. Trop tard pour tout le monde. Camille est mienne, même si elle ne l’admet pas encore. Et tant qu’elle ne l’acceptera pas, tout restera dans cet entre-deux, cet équilibre fragile.Je me rapproche d’elle, l'effleurant de mes doigts comme si chaque contact avec elle m’appartenait. "Tu sais ce que je veux, Camille." Ma voix est calme, mais chaque mot porte un poids. "Tu sais ce que je vais faire, quoi que tu dises."Je tourne la tête pour lancer un regard défiant à Julien, dont la colère brille dans ses yeux. "Et toi, Julien… Tu penses vraiment que tu peux tout réparer ? Qu’elle reviendra vers toi comme si rien ne s’était passé ?"Il ne répond pas tout de suite, mais je vois la douleur se refléter dans ses yeux. Ce qui est amusant, c’est qu’il se sent encore capable de me battre, de la récupérer. Mais il est trop faible pour comprendre. Camille a déjà fait son choix, consciemment ou inconsciemment. Et je vai
CamilleTout est figé. Le temps semble suspendu, comme si le monde entier attendait que je fasse un choix. Mais je ne peux pas. C’est plus fort que moi. J’ai l’impression que je suis écrasée par le poids de leur regard, de leurs attentes, et, surtout, de ma propre indécision.Lorenzo se tient là, imposant, sûr de lui. Il n’a jamais douté. Il sait que je suis à lui. Pas seulement à cause de la manière dont il m’a conquise, mais aussi à cause de tout ce que j’ai laissé derrière moi, à cause de ce lien qu’il a tissé entre nous deux. Je le sens dans mes entrailles, dans chaque respiration, chaque battement de mon cœur. Mais je sens aussi le vide qui se creuse en moi, cette douleur lancinante qui me dit que je m’y perds un peu plus chaque jour.Julien, lui, est tout le contraire. Il est là, presque brisé, mais avec une détermination farouche. Il m’aime encore. Et il m’implore silencieusement de revenir vers lui. Mais comment revenir ? Comment retourner à ce que j’étais avant, quand tout a
CamilleLe silence s’étire, lourd, oppressant. Mes mots flottent dans l’air, suspendus entre eux, entre l’espoir et la désillusion. L’ultime aveu, celui qui révèle à la fois ma faiblesse et ma résistance. Je ne sais plus. Je ne sais plus quoi choisir, ni qui je suis. Le regard de Lorenzo me transperce, acéré comme une lame. Il attend, calme, implacable, sûr de sa victoire.Je tourne lentement la tête vers Julien. Lui, il est là, immobile, son regard brûlant de douleur, mais aussi d’une force incroyable. Il ne me lâche pas. Il me regarde comme si je pouvais encore faire quelque chose pour tout changer. Mais qu’est-ce qu’il me reste à offrir ? Qu’est-ce que je peux encore sauver ? Lui, moi, tout ce qu’on était… tout ça n’est plus qu’un souvenir lointain, effacé par des mois de souffrance et de déceptions.Je m’écarte légèrement de Lorenzo, même si mon corps semble contre ma volonté se rapprocher de lui. Je veux lui échapper, mais chaque mouvement vers lui est un pas en avant dans la spi
CamilleMais je sais qu’il n’y a plus de retour possible. Je suis trop loin, trop perdue. J’ai traversé trop de zones d’ombre, et ce que je suis devenue est trop dévasté pour être réparé.Je ferme les yeux une fraction de seconde, essayant d’échapper à cette pression, mais chaque inspiration semble plus lourde, plus douloureuse. Lorenzo est là, à côté de moi, omniprésent, son regard acier fixé sur moi, scrutant chaque parcelle de mon âme. Il sait ce qui se cache en moi. Il connaît cette faiblesse, cette dépendance que je refuse d’admettre."Camille, regarde-moi," murmure-t-il, sa voix basse, chargée de cette promesse silencieuse. "Je te l’ai dit, il est trop tard pour jouer à ce jeu. Tu es mienne, depuis toujours. Et ça ne changera jamais."Ses mots résonnent comme une malédiction. Je les entends, je les sens, mais ils ne me font plus trembler. Pas comme avant. J’ai appris à me défaire de certaines chaînes, à les briser lentement, malgré tout ce qu’il m’a donné, malgré tout ce qu’il a
CamilleLe vent froid frappe ma peau alors que je me précipite dans les rues sombres, mon cœur battant à un rythme frénétique. L'adrénaline coule dans mes veines, me rendant à la fois vive et insensible à tout ce qui m'entoure. Je cours, encore et encore, mes pas résonnant dans la nuit silencieuse. Je dois m'échapper. Je ne peux plus rester, plus respirer sous ce poids. Sous l'ombre de Lorenzo, sous les chaînes invisibles de ce que j'ai cru être l'amour.Il n'a pas réagi quand j'ai prononcé ces mots. Il n'a rien dit, rien fait, comme si cette réponse ne le touchait pas. Mais je le connais, je sais que son silence cache une fureur prête à exploser, une violence qui le consume. Il va me poursuivre. Je le sais. Il ne me laissera pas partir aussi facilement.Mes mains tremblent tandis que je cherche mon téléphone dans ma poche. Mes doigts glissent sur l'écran, cherchant Julien, cherchant un moyen de m'enfuir définitivement, mais je n'ai même pas le temps d’appeler. Une silhouette s’impose
CamilleLe silence après la tempête. Il est presque plus violent que les cris, plus brutal que les coups. Il s’abat comme une chape sur mes épaules, tandis que l’air froid fouette mes joues brûlantes. Mes jambes tremblent, pas de fatigue, pas de peur, mais de cette certitude étrange : quelque chose vient de mourir ce soir. Peut-être un mensonge. Peut-être une part de moi.Ils sont là, toujours là. Deux silences, deux hommes, deux abîmes. Julien, dont les yeux brillent d’une tristesse douce, d’un amour patient. Et Lorenzo, dont le regard fixe me brûle la peau, me marque encore. Toujours.Mais je ne suis plus cette Camille-là. Je ne veux plus l’être.Camille(d’une voix tremblante, mais résolue)« Arrêtez. Tous les deux. »Le vent siffle entre nous, comme pour souligner la portée de mes mots.Camille« Ce n’est pas à vous de me sauver. Ce n’est pas à vous de décider ce que je vaux, ce que je ressens, ce que je deviens. Je suis fatiguée de vivre à genoux. »Je sens mes larmes couler, mai
Camille, Lorenzo, JulienCamilleJe n’ai pas fait cent mètres que j’entends des pas derrière moi. Rapides. Différents. L’un rageur. L’autre hésitant.Je me retourne.Ils sont là.Julien, les yeux fendus d’une inquiétude silencieuse.Lorenzo, le regard noir, possédé.Je recule, encore. Mes jambes voudraient courir, mais je reste figée. Parce que je sais. Je sais ce qui arrive quand deux mondes s’effondrent en même temps.Julien(d’une voix basse)« Camille, s’il te plaît… Reviens avec moi. Je ne te demande rien. Juste… reviens. »Il tend la main. Douce, tremblante. L’image d’un possible. D’une paix.Lorenzo(coupant, tranchant)« Elle vient avec moi. »Camille(non)« Je ne veux pas choisir. Je ne veux plus choisir. »Mais Lorenzo avance.Et quelque chose, en moi, s’écrase. Une vieille peur, un écho.Il attrape mon poignet. Pas violemment. Pas brutalement. Mais avec cette autorité glaciale qu’il porte comme une seconde peau.Lorenzo« Tu ne peux pas rester seule. Pas maintenant. Ce n’e
CamilleJe sens encore ses mains sur moi. La morsure de ses doigts. Le feu dans mes entrailles. Mon corps entier résonne de sa présence, comme une cloche fêlée qu’il a frappée trop fort. Trop juste. Chaque parcelle de ma peau se souvient. De la violence. De l’abandon. De la chute. De la montée. De cette déflagration qui m’a réduite en cendres… pour mieux me faire renaître.Et pourtant, dans ce silence qui nous enveloppe après le chaos, c’est mon esprit qui hurle.Je ne bouge pas. Je suis blottie contre lui, nue, salie, glorifiée. Brûlante et glacée à la fois. Comme si tout ce qui me tenait debout avait été arraché et remplacé par autre chose. Quelque chose de plus brut. De plus vrai. Quelque chose de lui.Ses bras sont autour de moi. Lourds. Protecteurs. Possessifs. Et pourtant, je me sens libre. Libre comme je ne l’ai jamais été. Parce qu’il n’a pas cherché à me posséder. Il m’a laissée devenir. Il m’a regardée me déchirer, m’abandonner, m’effondrer pour me redresser plus forte, plus
LorenzoElle est là, ses yeux brûlants d'une intensité que je connais, d’une faim que je reconnais. Ses lèvres sont entrouvertes, et sa respiration saccadée résonne comme un signal, un appel à l'extase, à la destruction. J’attrape ses poignets, la forçant à s’abandonner dans le tourbillon que j’ai lancé. Tout en elle me crie que cette nuit, il n’y a pas de place pour la douceur. Pas de place pour les hésitations. Ce qui nous lie, ce n’est pas l’amour, ni le désir, mais quelque chose de plus primal, d’indomptable. Un cri, une rage, un besoin de brûler ensemble, jusqu'à n'être plus que des cendres.Je la soulève sans un mot. Elle s'accroche à moi comme si sa vie en dépendait. Ses mains se posent sur mon torse, ses doigts frémissent, s’enfoncent dans ma peau. Je la sens trembler, pas de peur, mais d'excitation. C’est elle qui m’attire, qui me pousse dans cette folie. Chaque fibre de son corps hurle, réclame, désire tout à la fois.Je la dépose sur le lit d’un geste impétueux. Ses yeux ne
LorenzoLe vent de la mer souffle froid, frais contre ma peau. Le bruit des vagues est comme une mélodie ancienne, une chanson que je n’ai jamais entendue avant, mais qui résonne en moi comme si elle m’avait toujours appartenu. Ce matin, il y a une douceur dans l’air, presque irréelle. Comme une promesse, mais une promesse qu’on sait qu’on ne pourra pas tenir.Je suis là, sur ce balcon, seul. Le regard plongé dans l’horizon. Camille n’est pas loin, mais elle m’a laissé ce moment. Ce moment où il n’y a plus de nous, juste moi et le vide du monde. Le vide qu’on essaie tous de fuir, mais qui revient toujours. Parce qu’il n’y a pas de fuite. Il n’y a que l’acceptation.J’ai l’impression de l’avoir cherchée toute ma vie, et quand je l’ai enfin trouvée, je l’ai laissée s’échapper à travers mes doigts, inaperçue, comme une illusion trop fragile. Camille a été ma quête, mon erreur et ma rédemption. Chaque partie d’elle, chaque mouvement, chaque geste que j’ai cru posséder, m’a échappé. Et pou
LorenzoL'aube se glisse silencieusement par les fenêtres, ses rayons effleurant notre peau encore brûlante des fragments de la nuit. L’air est frais, mais il porte encore l’odeur de la chair, de l’intimité. L’odeur de nous. Il y a dans cette lumière douce quelque chose de déconcertant, comme une promesse et une trahison, une invitation à se lever mais aussi à rester, à ne jamais bouger.Je suis allongé sur le dos, mon bras autour de son corps. Elle est là, contre moi, profondément endormie, son souffle encore irrégulier, mais apaisé. Je la regarde, fascinée par la paix qui l’habite, un calme que je ne lui connaissais pas, que je n’ai jamais cru possible.Elle est belle, fragile, humaine. Chaque imperfection, chaque fissure sur son corps est une victoire silencieuse. Une victoire sur tout ce que la vie lui a pris, sur ce que j’ai pris. Et je reste là, figé dans cette vision, comme si l’instant avait une fin, comme si demain était déjà une promesse qu’on ne pourrait pas tenir.Je cares
LorenzoLe silence après l’extase. Il est là. Dense. Chargé. Pas vide — jamais vide avec elle — mais habité de tout ce qui ne s’est pas dit.Je suis encore en elle. Ma joue contre sa tempe. Nos souffles lents, décalés. Elle ne parle pas. Elle ne me repousse pas non plus. Son bras reste enroulé autour de mon dos, ses doigts effleurent distraitement ma peau. Comme si elle essayait de dessiner un mot secret sur mes omoplates.Je me redresse un peu. Je glisse mes lèvres contre sa mâchoire, puis sa bouche. Elle m’embrasse doucement. Ce n’est plus un baiser de désir. C’est un baiser d’après. De ceux qui disent : je suis encore là. Je ne suis pas partie.— Tu pleures ? je demande, sans bouger.Elle secoue imperceptiblement la tête. Mais une larme, pourtant, trace une ligne humide sur sa joue.— Non… Je respire, c’est tout.Je fronce les sourcils. J’effleure sa tempe du bout du nez.— Ça faisait combien de temps que t’avais arrêté ?Elle esquisse un sourire. Triste. Vrai.— Assez pour ne plus
LorenzoElle ne dit rien. Elle ne m’enlace pas, ne me guide pas. Mais elle reste là. Sa main dans la mienne. Et c’est le seul consentement dont j’ai besoin ce soir.Je me relève lentement, comme on sort d’un rêve ou d’un deuil. Chaque mouvement semble soupesé par la peur de réveiller la douleur. Mon corps est lourd, mais quelque chose en moi redevient vivant. Un battement. Un souffle. Une certitude ténue.Son regard ne lâche pas le mien. Pas une seconde. Il est noir de souvenirs, de douleurs, de tempêtes. Mais il est là. Présent. Brûlant. Et dans cette intensité muette, je lis quelque chose d’infiniment fragile. Comme si elle me disait : essaie encore. Mais fais-le bien, cette fois.Je n’ai pas l’habitude qu’on me laisse aimer. J’ai toujours cru qu’aimer, c’était prendre. Enfermer. Posséder. Ce qu’on m’a appris, c’est l’obsession, le contrôle, la peur de perdre. Pas la tendresse. Pas la patience.Mais ce soir, j’ai peur de la casser si je la touche trop vite.Alors je tends la main. D
LorenzoJe n’ai pas dormi. Je ne dors plus vraiment, depuis un moment.Pas depuis que tout a commencé à se fissurer. Pas depuis que Camille a cessé de me craindre.Parce qu’au fond, c’est ça qui m’a toujours tenu debout : le pouvoir. Le contrôle. L’idée que je pouvais contenir le monde dans ma poigne. Mais elle... elle n’a jamais plié. Elle a vacillé, oui. Mais elle est restée là. Même quand je l’ai repoussée. Même quand je l’ai trahie. Même quand j’ai tenté de la briser, pensant que ça la ferait m’aimer davantage, à ma façon. À ma manière tordue et terrifiée.Et maintenant, je suis là. Devant cette porte. Cette frontière entre le chaos que je traîne et la paix que je n’ai jamais su préserver. Je frappe deux fois. Pourquoi deux ? Peut-être pour ne pas paraître désespéré. Peut-être pour ne pas trop espérer.Je n’ai pas de plan. Pas de discours. Pas de mensonge prêt à se poser sur ma langue. Juste une peur sourde. Celle qui prend racine dans les entrailles, et qui murmure : Et si c’étai
CamilleLa nuit est tombée plus tôt que prévu.Ou peut-être que c’est moi qui me suis perdue dans le temps.Dans cette attente sans attente, ce moment suspendu entre deux battements de cœur.Entre ce message et ce qu’il signifie.Entre Lorenzo et ce qu’il est prêt à devenir.Je suis rentrée.Pas chez moi. Chez nous. Enfin, ce qu’il en reste. Ce qu’il pourrait en être, s’il ose.Les murs sont les mêmes, mais ils ne résonnent plus pareil.Ils ont gardé l’écho de nos silences, de nos cris étouffés, de nos regards qui disaient tout ce que nos bouches refusaient d’admettre.Je les effleure du bout des doigts, comme pour m’assurer qu’ils sont encore là, solides, tangibles — alors que tout en moi vacille.J’ai retiré mes chaussures, déposé mon manteau, et je me suis laissée tomber au sol, dos au mur, dans la pénombre du salon.Je n’ai pas allumé. Pas besoin. L’obscurité est douce ce soir. Elle me couvre. Elle m’écoute. Elle ne juge pas.Je sens que tout est en train de basculer.Pas comme un
Lorenzo17h approche.Je suis déjà là.Seul, comme demandé. Mais armé. Pas physiquement. Ce serait grotesque. Ce genre de rencontre, ça ne se règle pas avec un canon sur la tempe. Ça se règle avec les nerfs. Avec ce qui reste d’âme après l’érosion.Julien pense encore que tout ça est un jeu d’échec. Qu’il y a une victoire à obtenir. Une case finale à conquérir.Il croit que j’ai quelque chose à prouver.Il se trompe.J’ai déjà choisi. Ce matin. Quand j’ai brûlé les pages du carnet. Pas toutes. Juste celles qui comptaient. Les noms barrés. Les décisions prises. Ce qu’on ne peut pas dire à voix haute. Ce qu’on confie aux flammes parce qu’elles comprennent mieux que les hommes.J’ai regardé les cendres danser, et j’ai compris.Je ne reviendrai pas en arrière.Pas cette fois.Le parking est vide. Un étage souterrain. Brut, froid, comme les souvenirs qu’on range dans les sous-sols de la mémoire. L’endroit parfait pour une fin. Ou un recommencement.Julien est là. Dos à moi. Comme s’il cont