LorenzoJe l’observe, Camille. Sa silhouette se dessine dans l'ombre, sa posture droite et déterminée malgré le chaos qui se cache dans ses yeux. Elle pense qu’elle est prête. Elle croit qu’elle peut tout affronter. Mais le monde dans lequel elle s’engage n’est pas fait pour les âmes faibles. Il est fait pour ceux qui savent exactement ce qu’ils sont prêts à sacrifier pour le pouvoir.Il y a un moment, une fraction de seconde où je me suis demandé si j’avais fait une erreur en la laissant entrer dans ce monde. Mais je sais que ce n’est pas le cas. Camille a une force en elle, une ténacité que je reconnais, une rage qui ne demande qu’à exploser. Elle est exactement ce que j’attendais. Elle me fera avancer, me propulsera dans des endroits où je n’aurais jamais cru aller. Mais il y a aussi cette peur, cette peur que j'ai commencée à ressentir quand elle m'a défié. Que tout ce que j'ai construit, tout ce que j'ai sacrifié, puisse un jour être renversé par elle.Elle veut connaître la véri
CamilleLes mots de Lorenzo résonnent dans ma tête comme un écho constant. "Chaque action, chaque choix, chaque sacrifice laisse une marque." C’est ça, la réalité du pouvoir. C’est ça que je vais devoir accepter si je veux avancer, si je veux comprendre. Mais est-ce que je suis prête à tout sacrifier ? À tout changer pour ce monde de violence, de manipulation, où tout le monde est coupable jusqu’à preuve du contraire ? La question me hante, mais je ne peux pas la fuir. Pas maintenant.Lorenzo me guide vers une autre pièce, une pièce discrète mais pleine de tension, de secrets et de promesses non tenues. Il y a un air lourd, comme si chaque meuble, chaque objet, portait le poids des décisions prises à cet endroit. Je le suis sans poser de questions. Mon esprit est encore trop occupé à analyser ses derniers mots.— "Ici, Camille, tu vas commencer à comprendre que tout ce que tu vois n’est qu’une illusion."Je le fixe, les mains légèrement crispées, prête à entendre ce qu’il a à dire, bi
CamilleLa pièce est silencieuse, trop silencieuse. Le bruit de mes respirations s’échappe dans l’air lourd de tension. Mes doigts frôlent la surface du dossier devant moi, et tout à coup, je me sens étrangère dans cet environnement que j’ai pourtant choisi de pénétrer. Une étrange forme de malaise s’empare de moi. Le poids des décisions, des choix irréversibles qui pèsent dans l’air. Il n’y a pas de retour en arrière. J’ai accepté cette route, un peu comme on accepte une morsure, sachant qu’elle marque à jamais.Lorenzo, face à moi, semble être dans son élément. Il n’a pas bougé, il ne m’a même pas adressé un regard en plus. Peut-être attend-il que je réagisse, que je brise ce silence qui me ronge. Mais la vérité est que je ne sais plus quoi penser.— "C’est ça, le vrai prix ?" Ma voix brise le silence, basse, presque un murmure, mais pleine de ce questionnement qui me tourmente. "Tout ça, juste pour comprendre ? Pour avoir un aperçu de ce que c’est ?"Lorenzo ne réagit pas tout de s
CamilleLe vent fait voler mes cheveux alors que je me tiens sur le balcon de l'appartement de Lorenzo. La ville s'étend devant moi, ses lumières scintillant comme des étoiles mortes. Je devrais me sentir libre ici, à cet instant précis. Mais au contraire, je sens l'étau se resserrer. Le choix que j'ai fait est là, palpable, suspendu dans l'air comme une menace.Lorenzo n'est pas encore revenu, mais je sais qu'il sera là, bientôt. Il attendra que je sois prête à affronter les conséquences de mes actes. C’est un homme de patience, d’intensité, et il comprend plus que quiconque que la décision que j’ai prise va changer le cours de ma vie à jamais. Mais ce n’est pas ça qui me hante. C’est l’idée de ce que je suis en train de devenir.Je ferme les yeux, me laissant envahir par les bruits de la ville, le bourdonnement lointain des voitures, les éclats de voix et les sons étouffés des rues. Puis, un frisson glacial me parcourt. Ce monde m’attire, me consume à la fois. Les limites entre ce q
LorenzoLa pièce est plongée dans une semi-pénombre, l’unique source de lumière provenant des réverbères qui filtraient à travers les rideaux tirés. Camille est là, silencieuse, presque invisible dans l’ombre. Je la fixe, me demandant ce qu’elle ressent, mais je sais qu’elle n’en dira rien. Elle n’a jamais été du genre à se livrer facilement. Pourtant, chaque geste qu’elle fait, chaque regard qu’elle me lance, en dit long.Elle est là, dans ce monde que j’ai bâti, et elle est en train de le comprendre. Peut-être même l’accepter, bien que ses pensées lui échappent à chaque seconde. Je connais Camille mieux qu’elle ne se connaît elle-même, mais je sais aussi qu’il y a des zones d’ombre en elle. Des recoins qu’elle ne veut pas explorer. Des parties d’elle-même qu’elle ignore encore. Mais moi, je les vois. Et c’est ce qui me fascine. Ce qui me lie à elle d’une manière irréversible.Je fais quelques pas vers elle, l’observant, chaque mouvement délibéré, chaque souffle contrôlé. Je suis un
CamilleLes jours qui ont suivi ont été un tourbillon de silence et de non-dits. Chaque rencontre avec Lorenzo devient plus intense, plus insupportable. Il m’observe sans cesse, attentif à chaque détail, chaque réaction. Il attend, je le sais. Mais il me regarde aussi d’une manière étrange, presque possessive, comme si j’étais déjà sa propriété. Et je déteste cela. Mais, en même temps, il y a quelque chose en lui, quelque chose que je ne peux ignorer. Une puissance brute qui me dépasse.Je me rends compte que je le recherche. Pas seulement physiquement. Il y a quelque chose dans son regard, dans cette présence accablante, qui m’envahit. Il a ce pouvoir étrange de me rendre faible, de briser mes défenses sans même en avoir l’air. Chaque conversation avec lui me laisse avec un goût amer dans la bouche. Il sait comment me déstabiliser, comment me pousser dans mes derniers retranchements, jusqu’à ce que je sois à bout de souffle.Aujourd’hui, il m’a conviée à une réunion dans son bureau.
LorenzoJe savais qu'elle réagirait ainsi. C’est ce qui rend tout cela si fascinant. Camille est une femme de principes, de règles. Elle a grandi dans un monde où la justice, la moralité, étaient des concepts bien définis, presque parfaits. Mais ici, dans ce monde de pouvoir et de manipulation, ces mêmes principes se brisent un à un. Et moi, je suis celui qui les brise.Je la regarde maintenant, figée, ses yeux cherchant une réponse qu’elle ne veut pas entendre. La tension entre nous est presque palpable, chaque respiration, chaque battement de cœur résonne dans la pièce.— "Tu ne peux pas fuir, Camille," je dis d'une voix basse, mes yeux ne la quittant pas. "Pas cette fois."Elle serre les poings, tentant de contenir l’angoisse qui monte en elle. Elle veut savoir si elle a encore du contrôle. Elle se ment à elle-même, pensant que tout est sous sa maîtrise. Mais je connais la vérité. Son corps trahit ses pensées.— "Je n’ai jamais fui." Sa voix est plus tremblante qu'elle ne l’aurait
Camille— "Bien," murmure-t-il, comme une promesse, comme une validation. "C'est fait."Un frisson me parcourt la colonne vertébrale. J'ai signé mon propre destin, et il est désormais irrémédiablement lié à lui. Je le regarde, espérant un moment de clarté, un instant où tout cela aura un sens, mais il n'y a rien d'autre que cette étendue d'incertitude qui se déploie devant moi.— "Et maintenant ?" je demande, ma voix se brisant à peine. "Que se passe-t-il maintenant ?"Il ne répond pas immédiatement, prenant une grande inspiration comme pour savourer l’instant, comme si cette scène était exactement celle qu’il attendait. Et il n’a pas tort. C’est tout à fait ce qu’il voulait.Lorenzo s’approche de moi lentement, l’air plus sombre encore, mais l’intensité qui émane de lui me fait frissonner. Il se place juste devant moi, si près que je peux sentir la chaleur de son corps contre le mien, cette chaleur qui n’a rien de réconfortant. Il n’est pas là pour me rassurer. Il est là pour me fair
CamilleJe sens encore ses mains sur moi. La morsure de ses doigts. Le feu dans mes entrailles. Mon corps entier résonne de sa présence, comme une cloche fêlée qu’il a frappée trop fort. Trop juste. Chaque parcelle de ma peau se souvient. De la violence. De l’abandon. De la chute. De la montée. De cette déflagration qui m’a réduite en cendres… pour mieux me faire renaître.Et pourtant, dans ce silence qui nous enveloppe après le chaos, c’est mon esprit qui hurle.Je ne bouge pas. Je suis blottie contre lui, nue, salie, glorifiée. Brûlante et glacée à la fois. Comme si tout ce qui me tenait debout avait été arraché et remplacé par autre chose. Quelque chose de plus brut. De plus vrai. Quelque chose de lui.Ses bras sont autour de moi. Lourds. Protecteurs. Possessifs. Et pourtant, je me sens libre. Libre comme je ne l’ai jamais été. Parce qu’il n’a pas cherché à me posséder. Il m’a laissée devenir. Il m’a regardée me déchirer, m’abandonner, m’effondrer pour me redresser plus forte, plus
LorenzoElle est là, ses yeux brûlants d'une intensité que je connais, d’une faim que je reconnais. Ses lèvres sont entrouvertes, et sa respiration saccadée résonne comme un signal, un appel à l'extase, à la destruction. J’attrape ses poignets, la forçant à s’abandonner dans le tourbillon que j’ai lancé. Tout en elle me crie que cette nuit, il n’y a pas de place pour la douceur. Pas de place pour les hésitations. Ce qui nous lie, ce n’est pas l’amour, ni le désir, mais quelque chose de plus primal, d’indomptable. Un cri, une rage, un besoin de brûler ensemble, jusqu'à n'être plus que des cendres.Je la soulève sans un mot. Elle s'accroche à moi comme si sa vie en dépendait. Ses mains se posent sur mon torse, ses doigts frémissent, s’enfoncent dans ma peau. Je la sens trembler, pas de peur, mais d'excitation. C’est elle qui m’attire, qui me pousse dans cette folie. Chaque fibre de son corps hurle, réclame, désire tout à la fois.Je la dépose sur le lit d’un geste impétueux. Ses yeux ne
LorenzoLe vent de la mer souffle froid, frais contre ma peau. Le bruit des vagues est comme une mélodie ancienne, une chanson que je n’ai jamais entendue avant, mais qui résonne en moi comme si elle m’avait toujours appartenu. Ce matin, il y a une douceur dans l’air, presque irréelle. Comme une promesse, mais une promesse qu’on sait qu’on ne pourra pas tenir.Je suis là, sur ce balcon, seul. Le regard plongé dans l’horizon. Camille n’est pas loin, mais elle m’a laissé ce moment. Ce moment où il n’y a plus de nous, juste moi et le vide du monde. Le vide qu’on essaie tous de fuir, mais qui revient toujours. Parce qu’il n’y a pas de fuite. Il n’y a que l’acceptation.J’ai l’impression de l’avoir cherchée toute ma vie, et quand je l’ai enfin trouvée, je l’ai laissée s’échapper à travers mes doigts, inaperçue, comme une illusion trop fragile. Camille a été ma quête, mon erreur et ma rédemption. Chaque partie d’elle, chaque mouvement, chaque geste que j’ai cru posséder, m’a échappé. Et pou
LorenzoL'aube se glisse silencieusement par les fenêtres, ses rayons effleurant notre peau encore brûlante des fragments de la nuit. L’air est frais, mais il porte encore l’odeur de la chair, de l’intimité. L’odeur de nous. Il y a dans cette lumière douce quelque chose de déconcertant, comme une promesse et une trahison, une invitation à se lever mais aussi à rester, à ne jamais bouger.Je suis allongé sur le dos, mon bras autour de son corps. Elle est là, contre moi, profondément endormie, son souffle encore irrégulier, mais apaisé. Je la regarde, fascinée par la paix qui l’habite, un calme que je ne lui connaissais pas, que je n’ai jamais cru possible.Elle est belle, fragile, humaine. Chaque imperfection, chaque fissure sur son corps est une victoire silencieuse. Une victoire sur tout ce que la vie lui a pris, sur ce que j’ai pris. Et je reste là, figé dans cette vision, comme si l’instant avait une fin, comme si demain était déjà une promesse qu’on ne pourrait pas tenir.Je cares
LorenzoLe silence après l’extase. Il est là. Dense. Chargé. Pas vide — jamais vide avec elle — mais habité de tout ce qui ne s’est pas dit.Je suis encore en elle. Ma joue contre sa tempe. Nos souffles lents, décalés. Elle ne parle pas. Elle ne me repousse pas non plus. Son bras reste enroulé autour de mon dos, ses doigts effleurent distraitement ma peau. Comme si elle essayait de dessiner un mot secret sur mes omoplates.Je me redresse un peu. Je glisse mes lèvres contre sa mâchoire, puis sa bouche. Elle m’embrasse doucement. Ce n’est plus un baiser de désir. C’est un baiser d’après. De ceux qui disent : je suis encore là. Je ne suis pas partie.— Tu pleures ? je demande, sans bouger.Elle secoue imperceptiblement la tête. Mais une larme, pourtant, trace une ligne humide sur sa joue.— Non… Je respire, c’est tout.Je fronce les sourcils. J’effleure sa tempe du bout du nez.— Ça faisait combien de temps que t’avais arrêté ?Elle esquisse un sourire. Triste. Vrai.— Assez pour ne plus
LorenzoElle ne dit rien. Elle ne m’enlace pas, ne me guide pas. Mais elle reste là. Sa main dans la mienne. Et c’est le seul consentement dont j’ai besoin ce soir.Je me relève lentement, comme on sort d’un rêve ou d’un deuil. Chaque mouvement semble soupesé par la peur de réveiller la douleur. Mon corps est lourd, mais quelque chose en moi redevient vivant. Un battement. Un souffle. Une certitude ténue.Son regard ne lâche pas le mien. Pas une seconde. Il est noir de souvenirs, de douleurs, de tempêtes. Mais il est là. Présent. Brûlant. Et dans cette intensité muette, je lis quelque chose d’infiniment fragile. Comme si elle me disait : essaie encore. Mais fais-le bien, cette fois.Je n’ai pas l’habitude qu’on me laisse aimer. J’ai toujours cru qu’aimer, c’était prendre. Enfermer. Posséder. Ce qu’on m’a appris, c’est l’obsession, le contrôle, la peur de perdre. Pas la tendresse. Pas la patience.Mais ce soir, j’ai peur de la casser si je la touche trop vite.Alors je tends la main. D
LorenzoJe n’ai pas dormi. Je ne dors plus vraiment, depuis un moment.Pas depuis que tout a commencé à se fissurer. Pas depuis que Camille a cessé de me craindre.Parce qu’au fond, c’est ça qui m’a toujours tenu debout : le pouvoir. Le contrôle. L’idée que je pouvais contenir le monde dans ma poigne. Mais elle... elle n’a jamais plié. Elle a vacillé, oui. Mais elle est restée là. Même quand je l’ai repoussée. Même quand je l’ai trahie. Même quand j’ai tenté de la briser, pensant que ça la ferait m’aimer davantage, à ma façon. À ma manière tordue et terrifiée.Et maintenant, je suis là. Devant cette porte. Cette frontière entre le chaos que je traîne et la paix que je n’ai jamais su préserver. Je frappe deux fois. Pourquoi deux ? Peut-être pour ne pas paraître désespéré. Peut-être pour ne pas trop espérer.Je n’ai pas de plan. Pas de discours. Pas de mensonge prêt à se poser sur ma langue. Juste une peur sourde. Celle qui prend racine dans les entrailles, et qui murmure : Et si c’étai
CamilleLa nuit est tombée plus tôt que prévu.Ou peut-être que c’est moi qui me suis perdue dans le temps.Dans cette attente sans attente, ce moment suspendu entre deux battements de cœur.Entre ce message et ce qu’il signifie.Entre Lorenzo et ce qu’il est prêt à devenir.Je suis rentrée.Pas chez moi. Chez nous. Enfin, ce qu’il en reste. Ce qu’il pourrait en être, s’il ose.Les murs sont les mêmes, mais ils ne résonnent plus pareil.Ils ont gardé l’écho de nos silences, de nos cris étouffés, de nos regards qui disaient tout ce que nos bouches refusaient d’admettre.Je les effleure du bout des doigts, comme pour m’assurer qu’ils sont encore là, solides, tangibles — alors que tout en moi vacille.J’ai retiré mes chaussures, déposé mon manteau, et je me suis laissée tomber au sol, dos au mur, dans la pénombre du salon.Je n’ai pas allumé. Pas besoin. L’obscurité est douce ce soir. Elle me couvre. Elle m’écoute. Elle ne juge pas.Je sens que tout est en train de basculer.Pas comme un
Lorenzo17h approche.Je suis déjà là.Seul, comme demandé. Mais armé. Pas physiquement. Ce serait grotesque. Ce genre de rencontre, ça ne se règle pas avec un canon sur la tempe. Ça se règle avec les nerfs. Avec ce qui reste d’âme après l’érosion.Julien pense encore que tout ça est un jeu d’échec. Qu’il y a une victoire à obtenir. Une case finale à conquérir.Il croit que j’ai quelque chose à prouver.Il se trompe.J’ai déjà choisi. Ce matin. Quand j’ai brûlé les pages du carnet. Pas toutes. Juste celles qui comptaient. Les noms barrés. Les décisions prises. Ce qu’on ne peut pas dire à voix haute. Ce qu’on confie aux flammes parce qu’elles comprennent mieux que les hommes.J’ai regardé les cendres danser, et j’ai compris.Je ne reviendrai pas en arrière.Pas cette fois.Le parking est vide. Un étage souterrain. Brut, froid, comme les souvenirs qu’on range dans les sous-sols de la mémoire. L’endroit parfait pour une fin. Ou un recommencement.Julien est là. Dos à moi. Comme s’il cont