Chapitre 5 : L’Ombre du Passé

Élisa ne trouvait pas le sommeil. Allongée dans son lit, les événements des derniers jours tournaient en boucle dans son esprit. La révélation de son identité, la pression du conseil, l’ombre de son père malade… tout cela pesait lourdement sur ses épaules. Mais ce qui l’inquiétait encore plus, c’était cette impression constante d’être observée.

Elle se leva doucement et se dirigea vers la fenêtre. La nuit enveloppait le domaine Lancaster, seulement éclairé par quelques lampadaires dispersés à travers le jardin. Tout semblait calme… trop calme.

Une ombre furtive attira son attention près des grilles. Son cœur manqua un battement. Quelqu’un était là.

Adrian avait pris l’habitude de dormir peu. En tant que garde du corps personnel d’Élisa, il savait que la menace était réelle et constante. Ce soir encore, il veillait, assis dans le salon adjacent à la chambre de la jeune femme.

Lorsqu’il entendit un léger bruit, il se redressa instantanément. En ouvrant la porte, il trouva Élisa debout devant la fenêtre, le regard fixé à l’extérieur.

— Quelque chose ne va pas ? demanda-t-il d’une voix calme.

Elle sursauta avant de se tourner vers lui.

— Il y a quelqu’un dehors, souffla-t-elle.

Adrian s’approcha rapidement, analysant la situation. Il observa attentivement à travers la vitre, mais l’ombre avait disparu.

— Restez ici, ordonna-t-il avant de sortir précipitamment.

Élisa sentit une angoisse grandir en elle. Elle savait qu’elle était en danger, mais elle n’imaginait pas que ce danger puisse se matérialiser si vite.

Adrian se déplaçait avec prudence dans l’obscurité, ses sens en alerte. Il atteignit la grille et inspecta les alentours. Une trace de pas fraîchement imprimée dans la terre attira son attention. L’intrus avait été là, c’était certain.

Il porta la main à son oreillette.

— Sécurisez le périmètre. Quelqu’un rôdait près des grilles.

Une voix répondit immédiatement :

— Reçu. Nous passons en alerte.

Adrian resta quelques instants à observer avant de retourner à l’intérieur. Lorsqu’il retrouva Élisa, elle était toujours devant la fenêtre, l’air préoccupé.

— Rien pour l’instant, mais nous restons vigilants, déclara-t-il.

Elle acquiesça doucement, puis, après une hésitation, elle demanda :

— Qui pourrait vouloir m’atteindre ?

Il croisa les bras, réfléchissant.

— Beaucoup de gens. Vous êtes une menace pour ceux qui veulent le pouvoir. Et tant que vous êtes en vie, ils ne seront jamais tranquilles.

Un frisson la parcourut. C’était bien plus grave qu’elle ne l’avait imaginé.

Le lendemain, Edward Lancaster convoqua Élisa dans son bureau. Affaibli, il était assis dans son fauteuil en cuir, un regard grave posé sur sa fille.

— J’ai été informé de l’incident de cette nuit, dit-il immédiatement.

Élisa hocha la tête.

— Adrian a sécurisé les lieux, mais ça signifie qu’on est vraiment en danger, n’est-ce pas ?

Edward soupira et se massa les tempes.

— C’était inévitable. Certains ne veulent pas que tu prennes ta place. Mais je ne les laisserai pas gagner.

Il marqua une pause avant de poursuivre.

— J’ai organisé une réception demain soir. Beaucoup d’alliés et d’ennemis seront présents. Ce sera ta première apparition publique en tant qu’héritière.

Élisa ouvrit la bouche, choquée.

— Une réception ? Après ce qu’il s’est passé cette nuit ?

Edward planta son regard dans le sien.

— Justement. Ils doivent voir que tu n’as pas peur.

Elle déglutit difficilement. C’était un jeu dangereux, mais il était clair qu’elle n’avait pas le choix.

La soirée du bal arriva plus vite qu’elle ne l’aurait voulu. Élisa se tenait devant le miroir, vêtue d’une somptueuse robe bleu nuit qui épousait ses courbes avec élégance. Henry, le majordome, était venu lui remettre un collier en diamants appartenant à sa mère.

— Votre père souhaite que vous le portiez ce soir, lui dit-il doucement.

Elle prit le bijou entre ses doigts, émue. C’était une part de sa mère qu’elle n’avait jamais connue.

Adrian entra à ce moment-là. Il s’arrêta un instant en la voyant, avant de retrouver son expression impassible.

— Il est temps, déclara-t-il.

Elle inspira profondément et hocha la tête. Elle allait affronter le monde, prête ou non.

Le hall de réception était illuminé par des lustres dorés. Élisa entra au bras de son père, sentant tous les regards se poser sur elle. Des murmures parcoururent la salle. Elle était le centre de l’attention.

Un homme s’avança vers eux. Grand, élancé, avec un sourire calculé.

— Miss Moreau, enfin nous nous rencontrons, dit-il en s’inclinant légèrement.

— Et vous êtes ?

— Richard Sterling. Un… ami des affaires de votre père.

Elle sentit un malaise en croisant son regard. Derrière son sourire poli, elle devinait une menace latente.

— Ravi de vous rencontrer, répondit-elle avec un sourire mesuré.

Adrian s’approcha discrètement et murmura à son oreille.

— Méfiez-vous de lui.

Elle n’eut pas le temps de répondre. Une explosion retentit soudain à l’extérieur du manoir, plongeant la salle dans la panique.

Les gardes se précipitèrent immédiatement vers les issues. Edward attrapa le bras d’Élisa.

— Nous devons partir !

Adrian dégaina son arme, prêt à défendre la jeune femme.

— Suivez-moi ! ordonna-t-il.

Élisa sentit son cœur battre à tout rompre. Cette soirée n’était qu’un début. Et elle comprenait désormais que son héritage venait avec un prix bien plus élevé qu’elle ne l’avait imaginé.