Chapitre44Au premier étage, la fête bat son plein. Les rires et la clarinette de Sydney Bechet résonnent dans le parc. Les convives ne se rendent pas encore compte du drame qui se joue tout près d’eux et dont ils seront les principales victimes.Devant l’entrée, les adolescents se déchirent. Chacun campe sur ses positions et souhaite faire entendre raison aux autres. Le discours extrême de Marga a fait des émules, et ils sont cinq à se réjouir de la tournure des événements.Ce qui encourage Gustave, Léa, Augusto et leurs semblables, c’est qu’à contrario, leur groupe reste solidaire et campe sur ses positions. Ils ne peuvent pas laisser des humains mourir, quels qu’ils soient, et leur plan doit changer ! Nada se maintient plutôt en retrait, comme si elle ne parvenait pas à trouver sa place.Augusto lance alors:– Vous vous rendez compte que vous avez tout foutu en l’air ? Vous avez fini par leur rendre service !– Quoi ? réagit Stéphane, mais où tu vois qu’on leur ren
Chapitre45Extrait du journal de GabrielaCela fait une éternité que je suis là: des semaines, des mois, le temps n’a plus d’importance. J’ai fini par parler, je n’ai pas pu tenir indéfiniment. Isabel a eu ce qu’elle voulait: sa déclaration m’a anéantie, et quelques jours après sa visite, je lâchai tout: réseau, personnes impliquées... J’ai honte de l’avoir fait, mais j’espère que le laps de temps a été suffisant pour que chacun prenne la fuite et se prémunisse des représailles.Par moments, j’entends la voix d’Isabel résonner dans les couloirs: vient-elle rencontrer d’autres prisonniers qu’elle a elle-même fait arrêter, cette immondice ?En tout cas, elle n’est jamais revenue me voir, je ne l’aurais pas supporté.Mon existence ici n’a pas tellement changé depuis que j’ai donné mes camarades: les temps passés en salle de torture sont moins nombreux, mais je reçois les coups de Klaus et j’ai longtemps subi les viols de Sebastian plu
ÉPILOGUEDernier extrait du journal de Gabriela:Je sens la mort venir... Je la devine. Et c’est d’autant plus difficile maintenant que je sais que la vie va jaillir de mon ventre ! Mon bébé va naître. Mon magnifique bébé. Je veux que cet enfant connaisse une agréable existence, calme et paisible, voire un joli destin. Je ne souhaite pas qu’il soit sali par la fin de mon histoire...J’ai vécu l’enfer ces derniers mois, mais jusque-là ma vie a été belle. J’ai grandi auprès d’un entourage affectueux, j’ai été choyée et encouragée par mes parents et mon cher frère, j’ai eu des amis... J’aurais adoré avoir un amant. Un vrai. Je ne voulais pas être déchirée par un monstre !Mais j’ai peur pour ce bébé qui ne m’aura pas à ses côtés pour s’épanouir dans les meilleures conditions... Je souhaiterais qu’il grandisse dans la joie, que ses futurs parents soient une bonne famille pour lui, qu’ils l’aiment, l’entoure
PROLOGUEL’Ombre prépare sa vengeance. Sa valise est bouclée et l’heure des massacres approche.Il est essentiel de prendre son temps, de profiter, de se délecter du sort à venir de ses victimes. Personne ne devra l’identifier et, avant qu’ils ne comprennent ses intentions, l’Ombre comptera le nombre exact des passages à l’acte nécessaires pour assouvir sa soif de revanche.Cinq personnes devront trouver la mort dans les semaines qui suivent. Cinq personnes qui attisent son courroux et qui subiront les tortures qu’elles méritent.À cette idée, l’Ombre saisit la poignée de son bagage et affiche un rictus menaçant.
Chapitre1Gustave tremble par avance: il est attendu dans SON bureau à quinze heures précises !Il réfléchit au contenu de sa semaine, cherche ce qu’il a fait, si quelque chose a pu déclencher sa colère. Pourtant, il n’a pas fait d’actions exceptionnelles. En même temps et d’aussi loin qu’il se souvienne, il n’a jamais rien accompli de remarquable... Mais il n’y a pas eu de problème non plus. Sa semaine s’est passée comme toutes les autres, dans une monotonie qu’il commence à accepter comme étant la vie réelle.Gustave le sait, certaines personnes brillent naturellement. Lui ? Il est plutôt une lampe à économie d’énergie... Il connaît pas mal de monde, il est sociable, mais des amis... non, on ne peut pas les qualifier ainsi. Des connaissances, voire des copains... Il ne fait pas partie de ceux que l’on invite dans des soirées, ou auprès de qui l’on guette l’approbation... Il est souvent le confident, puisqu’en effet, il sait écouter.Écouter, ça
Chapitre2Tout au long du vol, l’adolescent est perdu dans ses pensées. Il est toujours aussi mal après cet énième monologue qui fait office de relation entre son père et lui… Il s’en veut d’être encore blessé par cet homme, alors qu’il devrait s’y habituer, ne rien attendre de lui. S’il pouvait se forger une carapace qui le mette à l’abri de la colère que son père éprouve pour lui !Si le jeune homme devait noter son estime de lui-même, il ne serait pas loin du zéro. Alors, comment avoir des rêves, comment envisager un ailleurs quand on entend depuis que l’on est petit que l’on gâche tout, que l’on n’est pas à la hauteur de son nom et de ce que l’Autre projette sur lui ? Par moment, il voudrait être invisible, se terrer dans un trou, disparaître…Perdu dans ses pensées obscures, Gustave ne voit pas le temps passer et s’aperçoit qu’il arrive bientôt à destination.En descendant de l’avion, il s’inquiète, incertain de l’endroit où il doit aller et de la
Chapitre3Extrait du journal intime de Gabriela:Aujourd’hui est le premier jour où j’entame l’écriture d’un journal intime. J’ai franchi le cap, car j’ai besoin de vous expliquer qui je suis, d’extérioriser un peu tout le feu qui brûle en moi !Tout d’abord, et pour que vous me compreniez mieux, je parlerai en premier lieu de mon cadre de vie.Si vous saviez comme l’existence pourrait être tellement belle à Buenos Aires !J’aime ma ville. J’aime marcher dans la rue, sentir le vent dans mes cheveux, avoir l’impression d’être irrésistible en entendant le bruit de mes talons sur les pavés et en éprouvant les frôlements de mes boucles brunes qui me tombent jusqu’à la taille. J’adore me sentir libre... je m’appelle Gabriela, et j’ai seize ans. Si je ne me sens pas libre à seize ans, quand le serai-je ?Pourtant, ce n’est pas si simple... Quand j’écoute mes parents, je comprends leur déception et leur mal-être. Mon pays a véc
Chapitre4Augusto est intarissable sur la vie dans ce lycée. Grâce à ses récits d’anecdotes et ses explications, Gustave se sent rapidement à l’aise et il en profite pour détailler son camarade, qui le dépasse d’une tête et paraît un peu engoncé sous son sweat. D’un abord sympathique, il a dix-sept ans lui aussi, et il est rassurant d’être accueilli par quelqu’un comme lui.À la suite de cet examen minutieux, Gustave se demande en retour comment son nouveau camarade le perçoit : s’il devait lui-même se qualifier, il se situerait dans la catégorie des « ni »: ni beau ni moche. Son visage est ovale et sans trop d’acné, mais il est assez pâle. Il n’est ni grand ni petit, un mètre soixante-quinze, une taille passe-partout ! Il n’est ni maigre ni gros, disons assez fluet. Il n’a pas trop de muscles, il faut dire que le sport n’est pas l’une de ses passions. Quant à sa couleur de cheveux, il n’est ni brun ni blond, plutôt châtain foncé, avec des boucles indomptables