vendredi 15 mars 2109Deux mois se sont écoulés depuis que Xavier a été désigné général à la place de Martin. Ce dernier a finalement été exécuté par injection létale, tout comme les espions du NGPP figurant sur la liste que Thomas m’a laissée avant de fuir. Oui, j’ai bien dit «exécuté».Ces deux derniers mois ont été plus que mouvementés. Mon frère a repris d’une main de fer le commandement, en commençant par faire le ménage dans les rangs et il a pris des mesures radicales; l’exécution du meurtrier de Jérôme et Alice ainsi que des traîtres, en fait partie. Ces décisions n’ont pas fait l’unanimité, loin de là, et même si moi aussi j’aurais préféré une autre issue, je dois reconnaître que Xavier a su faire le bon choix. Est-ce que le général Kalan aurait approuvé? Est-ce que notre père aurait approuvé? Je ne sais pas. Mais ils l’auraient soutenu, alors je l’ai fait aussi et pas uniquement parce qu’il me l’a demandé, mais parce
mardi 2 avril 2109La portière claque bruyamment. Je salue mes compagnons de route qui ont décidé de passer par l’entrepôt avant de rejoindre leur baraquement. Moi, je n’ai pas envie de suivre la foule. Je cale mon masque sous le bras, tenant d’une main mon fusil d’assaut et de l’autre mon sac à dos. D’un pas las, je m’engage dans les ruelles sinueuses qui vont me mener jusque chez moi.Durant tout le chemin, je n’ai pensé à rien, appréciant seulement le silence. Mais lorsque je lève les yeux sur ce visage brisé par les éclats du miroir de ma salle de bain, je me laisse envahir par un flot d’émotions négatives. J’ai mal partout. Au corps et à l’âme. Je suis en colère. Je suis triste. Je suis dégoûtée. Je suis triste d’être dégoûtée. Je suis en colère d’être triste d’être dégoûtée. Et tout ça ne m’avance à rien, parce que je suis enfermée dans un rôle qui me révulse.Pourtant, aujourd’hui nous avons une grande victoire à célébrer. Même si Xavier n’ava
mercredi 3 avril 2109Cette fois je n’ai pas d’échappatoire. Je n’ai quasiment pas fermé l’œil de la nuit et j’ai passé au moins une heure à camoufler mes cernes et les marques laissées par le combat de la veille. Durant tout ce temps, j’ai cherché une excuse pour ne pas y aller, mais à l’évidence, je ne peux pas me défiler. Comme me l’a si bien rappelé Xavier pas plus tard que ce matin, à l’aube, il ne s’agit ni de Khenzo ni de moi, mais de nous. De nous tous, de notre avenir, qui sera déterminé par la réussite ou l’échec d’un assaut mené contre la capitale où se terrent Macrélois et ses soldats.Je me jette un dernier regard à travers le miroir éclaté, ajuste mon pantalon et mon t-shirt puis sors de la salle de bain pour attraper ma veste que j’avais posée sur une chaise, dans le salon. Dehors, un soleil radieux, contrastant fort avec la grisaille et la pluie de ces derniers jours, me fait cligner des yeux. Je marche d’un pas vif, malgré les courbatures q
«La lumière du jour me fait cligner des yeux. Je tourne la tête vers la fenêtre grande ouverte–dont je n’ai pas pris la peine de fermer les volets la veille–et lâche un grognement peu gracieux. J’ai mal partout. Mon corps est courbaturé et ma tête semble prise dans un étau. Un sourire s’étale néanmoins sur mon visage. Je reprends du poil de la bête et ça, c’est plutôt une bonne nouvelle.Je ne suis pas encore au meilleur de ma forme, mais je vais mieux, en attestent mes performances aux entraînements quotidiens auxquels je dois me plier depuis un mois. Au départ, je n’étais pas capable de faire ne serait-ce qu’un quart du tour de la propriété en courant. Aujourd’hui, je peux enchaîner deux tours à un rythme moyen sans m’écrouler en crachant mes poumons. Au corps à corps, je n’ai pas encore retrouvé toute ma force, ni ma vitesse ni ma souplesse, mais je progresse bien et j’arrive régulièrement à mettre aux tapis les hommes les plus costauds de Tam
dimanche 7 avril 2109Mes mains deviennent moites. Ma respiration, saccadée. De la sueur me coule sur les yeux. Heureusement, je n’ai plus à porter ces foutues lunettes de protection ni ce masque filtrant qui donnent chaud. En revanche, j’ai conservé la combinaison moulante, tout comme mes camarades. Le tissu fin épouse nos formes comme une seconde peau et, truffé de nanotechnologie, il protège du froid en cas de température basse et laisse respirer le corps en cas de forte chaleur. Aujourd’hui il ne fait ni chaud ni froid, mais je transpire déjà.Mes yeux fixent mon fusil d’assaut HK-720 que je tiens sur mes cuisses, le temps de reprendre mes esprits. J’ai déjà vidé deux chargeurs complets. J’en dispose d’encore quatre dans mon sac à dos en plus de ce que je viens d’entamer. Quand j’aurai vidé toutes mes cartouches, il me restera encore mon Wallgon-X et ses trois chargeurs, ainsi que mon Sig Ash 22S et ses quatre chargeurs. Après ça, si je ne me replie pas
jeudi 11 avril 2109Une loque. C’est ce que je suis devenue. Une loque humaine. Un chien qu’on trimbale au bout d’une laisse. Un jouet qu’on agite devant les caméras pour rendre les autres fous. J’ai honte.Les images qui tournent en boucle sur l’écran plat descendant du plafond me donnent la gerbe. Ou alors c’est le produit qu’il a de nouveau injecté dans mes veines. Je ne sais pas. Je ne sais plus. J’ai la tête en vrac, le corps en mille morceaux et le cœur... je crois que je n’en ai plus pour le moment. Ce con est parti en vacances se prélasser sur le sable chaud des Antilles pour fuir le regard torturé de Thomas tandis que moi... Putain, pourquoi je dis ça? Je débloque. Mon cerveau aussi s’est barré de l’autre côté de l’Atlantique. Je l’imagine prendre ses petites jambes à son cou et fuir en hurlant et en agitant ses petits bras gringalets: «Haaa, tout sauf être dans le crâne de cette connasse!!»....
vendredi 12 avril 2109—Hey, ma puce? T’es avec nous?Un sourire étire mes lèvres. Il est là. Je sens ses mains qui emprisonnent la mienne et son souffle chaud qui caresse mes doigts. Il est toujours là. Nous nous sommes retrouvés.Des larmes perlent au coin de mes yeux tandis que sa voix continue de me parler, me sortant lentement du sommeil artificiel dans lequel on m’a plongée. Mes cils se décollent difficilement et un grognement sourd s’échappe de ma gorge. Alors que je reprends conscience, la douleur revient avec plus de virulence et cette fois c’est un gémissement qui sort de ma bouche.—Prends ton temps. Je suis là. Je suis là avec toi.Ses mains effectuent une légère pression sur mes doigts et ses lèvres viennent les embrasser pour me prouver qu’il est bel et bien à mes côtés. Je tourne la tête et croise son regard brillant. Il a les yeux rouges. Les yeux rouges de quelqu’un qui a peu ou pas dormi depuis
«—Ça fait combien de temps que t’es là, déjà? me demande Josh en s’essuyant le front d’un revers de main.Je m’agrippe à la poignée de la portière tandis que le véhicule fait un bond sur un nid de poule.—Six mois.—T’in, ça passe vite.Je garde le silence. Ouais. Six mois que je suis dans ce trou à rat, putain. J’en peux plus. Il faut que je me tire de là. Il faut que je les retrouve. Maintenant que j’ai totalement récupéré, je n’ai plus aucune raison de rester ici.—À quoi tu penses, poupée?Je grince des dents. Pourquoi les mecs se sentent toujours obligés d’affubler les femmes de surnoms ridicules. Est-ce que moi je l’appelle playboy? À cette idée, je me mets à ricaner toute seule sous le regard inquisiteur de Josh.—Qu’est-ce qui te fait marrer?—Toi.—Et puis-je savoir pourquoi, poupée?Et en plus c’est qu’il persiste et signe, le
vendredi 11 novembre 2129vendredi 14 avril 2124Mon Aurore,Si tu lis cette lettre, sache qu’où que je sois, quoi qu’il me soit arrivé, tu es et resteras ma plus grande fierté. J’aurais tellement voulu continuer à contempler ton si joli sourire, à observer tes yeux innocents découvrir le monde et ton visage s’illuminer avec émerveillement. Malheureusement, j’ai été rattrapée par l’appel du devoir, tout comme ton père. C’est avec un déchirement sans pareil que nous avons décidé de te laisser derrière, à l’abri du danger. Nous aurions pu t’emmener, mais quelle vie nous t’aurions offerte? Ici, tu seras toujours plus en sécurité qu’à côté de nous, sur le front.Heureusement, je garde en mémoire les merveilleuses années que j’ai pu passer auprès de toi, et notamment les mois entourant la naissance de ton frère. Tu n’avais que cinq ans alors, peut-être en as-tu gardé quelques souvenirs? Ces longues journées passées au bord de
mercredi 17 avril 2109- Lui -Mes yeux se posent sur le lit. Putain, j’aime cette fille à en crever. Couchée sur le côté, sa chevelure blonde emmêlée forme une auréole autour de sa tête et sur ses épaules. Elle respire profondément et le drap, collé sur son corps, laisse deviner ses formes exquises. Une de ses jambes dépasse et j’aimerais poser ma main sur sa cheville, remonter le long de son mollet et de sa cuisse puis explorer à nouveau chaque parcelle de son corps afin de m’enivrer de sa peau si douce. Mais je ne le ferai pas. Elle a fini par s’endormir et son visage paisible suffit pour l’instant à me combler de bonheur.Notre première rencontre a été houleuse et il s’en est fallu de peu qu’elle ou moi ne sorte son flingue afin d’en finir avec l’autre. Pourtant… elle s’est retenue et moi aussi. Ce que j’ai vu dans son regard ce jour-là… je ne sais pas. L’espace d’une seconde, elle s’est mise à nue devant moi. Ses yeux m’ont
«—Ça fait combien de temps que t’es là, déjà? me demande Josh en s’essuyant le front d’un revers de main.Je m’agrippe à la poignée de la portière tandis que le véhicule fait un bond sur un nid de poule.—Six mois.—T’in, ça passe vite.Je garde le silence. Ouais. Six mois que je suis dans ce trou à rat, putain. J’en peux plus. Il faut que je me tire de là. Il faut que je les retrouve. Maintenant que j’ai totalement récupéré, je n’ai plus aucune raison de rester ici.—À quoi tu penses, poupée?Je grince des dents. Pourquoi les mecs se sentent toujours obligés d’affubler les femmes de surnoms ridicules. Est-ce que moi je l’appelle playboy? À cette idée, je me mets à ricaner toute seule sous le regard inquisiteur de Josh.—Qu’est-ce qui te fait marrer?—Toi.—Et puis-je savoir pourquoi, poupée?Et en plus c’est qu’il persiste et signe, le
vendredi 12 avril 2109—Hey, ma puce? T’es avec nous?Un sourire étire mes lèvres. Il est là. Je sens ses mains qui emprisonnent la mienne et son souffle chaud qui caresse mes doigts. Il est toujours là. Nous nous sommes retrouvés.Des larmes perlent au coin de mes yeux tandis que sa voix continue de me parler, me sortant lentement du sommeil artificiel dans lequel on m’a plongée. Mes cils se décollent difficilement et un grognement sourd s’échappe de ma gorge. Alors que je reprends conscience, la douleur revient avec plus de virulence et cette fois c’est un gémissement qui sort de ma bouche.—Prends ton temps. Je suis là. Je suis là avec toi.Ses mains effectuent une légère pression sur mes doigts et ses lèvres viennent les embrasser pour me prouver qu’il est bel et bien à mes côtés. Je tourne la tête et croise son regard brillant. Il a les yeux rouges. Les yeux rouges de quelqu’un qui a peu ou pas dormi depuis
jeudi 11 avril 2109Une loque. C’est ce que je suis devenue. Une loque humaine. Un chien qu’on trimbale au bout d’une laisse. Un jouet qu’on agite devant les caméras pour rendre les autres fous. J’ai honte.Les images qui tournent en boucle sur l’écran plat descendant du plafond me donnent la gerbe. Ou alors c’est le produit qu’il a de nouveau injecté dans mes veines. Je ne sais pas. Je ne sais plus. J’ai la tête en vrac, le corps en mille morceaux et le cœur... je crois que je n’en ai plus pour le moment. Ce con est parti en vacances se prélasser sur le sable chaud des Antilles pour fuir le regard torturé de Thomas tandis que moi... Putain, pourquoi je dis ça? Je débloque. Mon cerveau aussi s’est barré de l’autre côté de l’Atlantique. Je l’imagine prendre ses petites jambes à son cou et fuir en hurlant et en agitant ses petits bras gringalets: «Haaa, tout sauf être dans le crâne de cette connasse!!»....
dimanche 7 avril 2109Mes mains deviennent moites. Ma respiration, saccadée. De la sueur me coule sur les yeux. Heureusement, je n’ai plus à porter ces foutues lunettes de protection ni ce masque filtrant qui donnent chaud. En revanche, j’ai conservé la combinaison moulante, tout comme mes camarades. Le tissu fin épouse nos formes comme une seconde peau et, truffé de nanotechnologie, il protège du froid en cas de température basse et laisse respirer le corps en cas de forte chaleur. Aujourd’hui il ne fait ni chaud ni froid, mais je transpire déjà.Mes yeux fixent mon fusil d’assaut HK-720 que je tiens sur mes cuisses, le temps de reprendre mes esprits. J’ai déjà vidé deux chargeurs complets. J’en dispose d’encore quatre dans mon sac à dos en plus de ce que je viens d’entamer. Quand j’aurai vidé toutes mes cartouches, il me restera encore mon Wallgon-X et ses trois chargeurs, ainsi que mon Sig Ash 22S et ses quatre chargeurs. Après ça, si je ne me replie pas
«La lumière du jour me fait cligner des yeux. Je tourne la tête vers la fenêtre grande ouverte–dont je n’ai pas pris la peine de fermer les volets la veille–et lâche un grognement peu gracieux. J’ai mal partout. Mon corps est courbaturé et ma tête semble prise dans un étau. Un sourire s’étale néanmoins sur mon visage. Je reprends du poil de la bête et ça, c’est plutôt une bonne nouvelle.Je ne suis pas encore au meilleur de ma forme, mais je vais mieux, en attestent mes performances aux entraînements quotidiens auxquels je dois me plier depuis un mois. Au départ, je n’étais pas capable de faire ne serait-ce qu’un quart du tour de la propriété en courant. Aujourd’hui, je peux enchaîner deux tours à un rythme moyen sans m’écrouler en crachant mes poumons. Au corps à corps, je n’ai pas encore retrouvé toute ma force, ni ma vitesse ni ma souplesse, mais je progresse bien et j’arrive régulièrement à mettre aux tapis les hommes les plus costauds de Tam
mercredi 3 avril 2109Cette fois je n’ai pas d’échappatoire. Je n’ai quasiment pas fermé l’œil de la nuit et j’ai passé au moins une heure à camoufler mes cernes et les marques laissées par le combat de la veille. Durant tout ce temps, j’ai cherché une excuse pour ne pas y aller, mais à l’évidence, je ne peux pas me défiler. Comme me l’a si bien rappelé Xavier pas plus tard que ce matin, à l’aube, il ne s’agit ni de Khenzo ni de moi, mais de nous. De nous tous, de notre avenir, qui sera déterminé par la réussite ou l’échec d’un assaut mené contre la capitale où se terrent Macrélois et ses soldats.Je me jette un dernier regard à travers le miroir éclaté, ajuste mon pantalon et mon t-shirt puis sors de la salle de bain pour attraper ma veste que j’avais posée sur une chaise, dans le salon. Dehors, un soleil radieux, contrastant fort avec la grisaille et la pluie de ces derniers jours, me fait cligner des yeux. Je marche d’un pas vif, malgré les courbatures q
mardi 2 avril 2109La portière claque bruyamment. Je salue mes compagnons de route qui ont décidé de passer par l’entrepôt avant de rejoindre leur baraquement. Moi, je n’ai pas envie de suivre la foule. Je cale mon masque sous le bras, tenant d’une main mon fusil d’assaut et de l’autre mon sac à dos. D’un pas las, je m’engage dans les ruelles sinueuses qui vont me mener jusque chez moi.Durant tout le chemin, je n’ai pensé à rien, appréciant seulement le silence. Mais lorsque je lève les yeux sur ce visage brisé par les éclats du miroir de ma salle de bain, je me laisse envahir par un flot d’émotions négatives. J’ai mal partout. Au corps et à l’âme. Je suis en colère. Je suis triste. Je suis dégoûtée. Je suis triste d’être dégoûtée. Je suis en colère d’être triste d’être dégoûtée. Et tout ça ne m’avance à rien, parce que je suis enfermée dans un rôle qui me révulse.Pourtant, aujourd’hui nous avons une grande victoire à célébrer. Même si Xavier n’ava