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Chapitre 1 - L’ombre dans la forêt   

Le vent glacial sifflait à travers les arbres, portant avec lui l’odeur de la pluie et des feuilles humides. Elena Carter resserra son manteau autour d’elle, accélérant le pas sur le sentier boueux qui menait à son petit appartement en périphérie de Ravenwood, une ville aussi paisible en apparence qu’inquiétante en profondeur.  

Ce soir-là, elle aurait préféré éviter de rentrer seule, mais son service au diner s’était éternisé. Le patron, un homme bourru et avare, lui avait demandé de fermer, comme toujours. Elle n’avait pas eu le choix. Elle n’avait jamais le choix.  

Le claquement de ses bottes sur les flaques d’eau était le seul bruit qu’elle entendait, jusqu’à ce qu’un craquement sourd résonne derrière elle. Un bruit distinct, comme une branche brisée sous un pas lourd. 

Son cœur rata un battement.  

Elle s’arrêta net, tendant l’oreille. Rien. Juste le silence oppressant de la forêt bordant la route. Pourtant, une sensation glaciale s’insinua dans son dos, comme un avertissement.  

Elle reprit sa marche, plus vite cette fois.  

Une ombre bougea à la lisière des arbres. Elena la vit du coin de l’œil et sentit son souffle se bloquer. Quelqu’un ou quelque chose  l’observait.

Elle accéléra encore, ses doigts tremblant sur la lanière de son sac.  

Puis, tout bascula.  

Un grondement sourd s’éleva de la forêt, profond et primal, vibrant dans l’air comme un avertissement. Avant qu’elle ne puisse réagir, une silhouette massive jaillit des ombres, un éclair de fourrure sombre et de muscles tendus.  

Un loup, immense, aux yeux dorés perçants, se dressait à quelques mètres d'elles.

Elena sentit son cœur se déchirer.

Le monstre se tenait là, dans la pénombre, son souffle chaud soulevant de légers nuages de vapeur sous l’air glacé. Son pelage noir comme la nuit absorbait la lumière blafarde des réverbères distants, ne laissant briller que ses yeux dorés, perçants, inhumains.  

Elena ne savait pas quoi faire. Fuir ? Hurler ? Son corps était figé, incapable de réagir. Son esprit lui criait de courir, mais ses jambes refusaient d’obéir.  

Puis, le loup fit un pas vers elle.  

Ses griffes raclèrent le sol humide, et un grondement sourd résonna dans la nuit. Pas un grognement de simple animal. Il y avait quelque chose d’étrangement intelligent dans cette façon de la fixer.  

Une voix, rauque et pressante, surgit dans son esprit. Ne bouge pas.

Ce n’était pas sa propre pensée.  

Elena sentit son sang se glacer.  

Elle chancela légèrement, cherchant à s’éloigner sans faire de gestes brusques.  

"Tout va bien" murmura-t-elle pour elle-même, comme si cela pouvait rendre la situation moins terrifiante.  

Le loup inclina légèrement la tête, comme s’il l’avait entendue.  

Puis, un bruit surgit derrière elle.  

Un craquement violent, suivi d’un souffle rapide. Elena n’eut pas le temps de réagir qu’une autre créature jaillit de la forêt, bien plus agressive. Un deuxième loup.

Celui-ci était plus mince, plus effilé, avec des yeux d’un rouge brûlant. Son pelage était strié de cicatrices, et sa mâchoire était entrouverte, laissant apparaître des crocs menaçants.  

Elena se recula instinctivement, son pied glissant dans la boue. Son cœur battait à tout rompre.  

L’air s’emplit d’un autre grondement cette fois, celui du premier loup.  

Un affrontement éclata sous ses yeux.  

Le loup noir, celui aux yeux dorés, bondit en avant avec une rapidité fulgurante, percutant l’autre de plein fouet. Les deux créatures roulèrent dans la boue, grognant, griffes et crocs s’entrechoquant dans un chaos de rage et de puissance.  

Elena recula encore, cherchant un moyen de fuir. Son souffle était erratique, ses pensées brouillées.  

Pourquoi ces monstres se battaient-ils devant elle ? 

Puis, le combat s’arrêta aussi soudainement qu’il avait commencé.  

Le loup noir s’imposa au-dessus de l’autre, ses crocs enfoncés dans sa gorge. Il grogna une dernière fois, un son guttural qui résonna comme un avertissement. L’autre loup, battu, émit un jappement de soumission avant de disparaître dans les ombres.  

Le silence retomba.  

Elena sentit ses jambes trembler.  

Le loup noir tourna alors son regard vers elle.  

Son regard brûlait d’une intensité étrange. Pas celui d’un animal. Celui d’un prédateur qui comprenait ce qu’il voyait. 

Elena ouvrit la bouche, mais aucun son n’en sortit.  

Puis, en un clignement d’œil, le loup s’éloigna, disparaissant dans la nuit comme s’il n’avait jamais été là.  

Il ne restait que la forêt sombre et le bruit saccadé de son propre souffle.  

Elena ne savait pas encore que sa vie venait de basculer à jamais.