CielSes mots résonnent en moi comme un écho du passé que je ne peux atteindre. Une boucle. Une trahison. Un destin qui nous condamne à revivre la même fin, encore et encore.Non. C’est impossible.Je sens mon souffle se bloquer, une pression invisible s’abattre sur ma poitrine.— Ce n’est pas vrai, dis-je, plus pour moi que pour elle.Lysandra ne détourne pas les yeux. Son regard est grave, presque suppliant.— Alors explique-moi, Ciel. Explique-moi pourquoi j’ai ressenti la brûlure comme si elle était réelle. Pourquoi, quand nos lèvres se sont touchées, quelque chose en moi s’est brisé… ou réveillé.Je serre les poings.Parce que je l’ai senti aussi.Le contact de sa bouche sur la mienne n’était pas juste un baiser. C’était un portail. Une porte s’ouvrant sur quelque chose d’ancien, d’effrayant. Une douleur qui ne m’appartient pas mais qui m’a transpercé de part en part.Je ferme les yeux un instant, tentant d’ignorer cette sensation qui me ronge de l’intérieur.Mais Lysandra me ram
Ciel Elle inspire profondément, comme si elle allait plonger dans une vérité trop lourde à porter.— Cette nuit… c’était plus qu’une simple nuit, pas vrai ?Je serre les mâchoires.— Non, ce n’était pas juste une nuit.Elle passe une main dans ses cheveux, visiblement nerveuse.— Quand on s’est touchés… c’était comme si quelque chose s’était réveillé. Comme si…Elle s’interrompt, secouant la tête.Je pose mes mains sur ses bras, la forçant à me regarder.— Comme si quoi, Lysandra ?— Comme si on avait déjà vécu ça avant, murmure-t-elle.Un frisson glacial me parcourt l’échine.Parce que je ressens exactement la même chose.Mais ce n’est pas possible. Ce genre de chose n’arrive pas.— C’est ridicule, souffle-t-elle en s’éloignant.— Ça ne l’est pas si on y croit tous les deux.Elle croise les bras, sur la défensive.— Et tu crois quoi, toi ?Je l’observe, cette femme qui me hante depuis le premier jour.— Je crois que quoi qu’il nous arrive, on ne pourra plus faire marche arrière.Ell
Ciel Je lâche un juron et me redresse brusquement, titubant vers la salle de bain. J’ouvre le robinet d’eau glacée et plonge mes mains dedans, espérant éteindre ce brasier invisible.Mais rien n’y fait.Mon reflet dans le miroir me fait peur. Mes yeux sont sombres, hantés. Il y a quelque chose en moi qui se réveille, quelque chose qui n’appartient pas à cette vie.Une image me frappe soudainement.Un bûcher.Des flammes qui lèchent le ciel.Et Lysandra.Je recule violemment, heurtant le mur derrière moi, alors que mon souffle se bloque dans ma gorge.— Putain…Ce n’est pas juste un rêve. Ce n’est pas mon imagination.Je me souviens.Je me souviens d’elle, de sa souffrance, de son regard lorsqu’elle a été consumée par les flammes.Je me souviens de la promesse brisée.Et je sais, avec une certitude glaciale, que si nous ne faisons rien…L’histoire va se répéter.LysandraJe referme la porte derrière moi, les jambes tremblantes, le cœur battant encore à un rythme effréné.Fuir.C’est t
LysandraLe froid nocturne s’insinue sous ma peau, mais ce n’est rien comparé au frisson qui me parcourt l’échine.Ciel est là, devant moi, le regard plongé dans le vide.Nous avons vu la même chose.Le feu, la douleur, la peur… et lui, essayant de me sauver.Mais ce qui me terrifie le plus, ce n’est pas la vision.C’est la certitude qui s’ancre en moi.— On doit comprendre, dis-je, brisant le silence oppressant entre nous.Ciel hoche la tête, ses traits tendus par une émotion contenue.— Oui. Et vite.Je prends une inspiration tremblante.— Je connais quelqu’un, murmuré-je. Une femme qui… voit des choses.Il arque un sourcil.— Une voyante ?— Pas exactement. Elle se dit médium, mais elle… elle m’a déjà aidée une fois.Un instant de silence.— Tu lui fais confiance ?Je réfléchis.— Je ne sais pas si c’est une question de confiance, mais elle a un don. Elle pourrait nous donner des réponses.Ciel me scrute, puis acquiesce.— Alors allons la voir.Nous nous arrêtons devant un petit im
LysandraLe silence dans la pièce est oppressant.Je sens encore la chaleur des flammes sur ma peau, l’écho de mes propres hurlements résonnant dans ma tête.Je ne suis pas sûre de pouvoir parler sans que ma voix tremble.Mais je dois savoir.— Qui est-elle ? demandai-je d’une voix rauque.La médium me regarde longuement, avant de murmurer :— Elle a pris plusieurs noms à travers les âges. Mais dans cette vie… elle est plus proche que vous ne le croyez.Mon sang se glace.— Vous voulez dire… qu’elle est ici, maintenant ?Ciel serre ma main, et je sens sa tension, sa rage contenue.— Comment la trouver ? demande-t-il d’un ton dur.La médium soupire, puis se lève. Elle se dirige vers un vieux meuble et en sort un morceau de parchemin qu’elle déplie avec précaution.Sur le papier jauni, une série de symboles étranges sont tracés à l’encre noire.— Cette marque, dit-elle en pointant du doigt un symbole au centre.Je me penche pour l’observer.C’est une forme complexe, un entrelacs de cour
LysandraJe pose ma main sur la sienne.— On n’a pas le choix. On ne peut pas juste ignorer tout ça.Il soupire avant de se lever brusquement.— D’accord. Mais on fait ça à ma façon.Je fronce les sourcils.— C’est-à-dire ?Il ne répond pas immédiatement. Il tend la main et effleure mon épaule, là où la douleur a commencé ce soir.— Laisse-moi chercher.Un frisson me parcourt l’échine. Il s’agenouille devant moi, son regard plongé dans le mien, et fait glisser la bretelle de mon haut, dévoilant ma peau.— Dis-moi si ça devient insupportable, murmure-t-il.Je hoche la tête, le cœur battant plus vite qu’il ne devrait.Ses doigts explorent ma peau avec une douceur infinie. Chaque contact est une brûlure, mais pas de douleur cette fois. Plutôt une chaleur, profonde et troublante.Puis, lorsqu’il atteint l’arrière de mon épaule, je tressaille violemment.— Là ! soufflé-je.Il écarte doucement mes cheveux et je le sens se figer.— Lysandra…Son souffle est saccadé.— Quoi ? Qu’est-ce que tu
Lysandra Je prends une inspiration tremblante.— Il y avait du feu. Partout. Et moi… j’étais attachée. J’entendais des cris, des accusations. Et toi, Ciel… tu te débattais. Tu voulais m’atteindre, mais on t’en empêchait.Sa mâchoire se contracte.— Qui nous a séparés ?— Je ne sais pas… Mais je ressens encore la douleur. Comme si les flammes me léchaient la peau à cet instant.Ma voix se brise.Ciel serre les poings, l’ombre d’une rage ancienne dans son regard.— Quelqu’un nous a condamnés, murmure-t-il.Je frissonne.— Ciel… si tout cela est vrai, si nous avons déjà vécu et que nous sommes morts… alors pourquoi sommes-nous revenus ?Il me fixe un long moment avant de lâcher dans un souffle :— Parce que notre histoire n’est pas terminée.Un silence pesant s’installe entre nous.Puis il tend la main et effleure ma joue, comme s’il avait peur que je disparaisse.— On doit comprendre qui nous étions… et surtout, pourquoi on nous a empêchés d’être ensemble.Je hoche lentement la tête.P
Lysandra Ciel fronce les sourcils.— Tu crois qu’il pourrait nous en dire plus sur cette… malédiction ?— S’il est aussi doué qu’on le dit, alors oui.Il ne dit rien pendant un moment, mais je devine qu’il est en train de peser chaque option.Puis, enfin, il soupire et acquiesce.— Alors on ira le voir. Ensemble.Et pour la première fois, je sens que nous avançons vers des réponses.Mais au fond de moi, une peur sourde murmure que certaines vérités pourraient être plus terribles encore que l’oubli.CielLe nom d’Ezra résonne encore dans mon esprit alors que je conduis en silence, Lysandra à mes côtés. Elle est tendue, le regard fixé sur la route, perdue dans ses pensées.Je n’arrive pas à détourner les yeux de sa main posée sur sa cuisse. Il suffirait que je tende les doigts pour l’effleurer. Pour la sentir, me raccrocher à elle. Mais je me retiens.Depuis cette nuit où nous avons succombé, quelque chose a changé entre nous. Comme si un verrou avait sauté. Et en même temps… une porte
LysandraL’aube se lève lentement, teintant le ciel de nuances douces, trop paisibles pour ce que je ressens à l’intérieur. Mon corps est encore brûlant de sa présence, mes lèvres portent la trace de ses baisers, et pourtant, une peur sourde s’accroche à mes entrailles.Ciel dort, son souffle calme, son bras autour de ma taille comme s’il avait peur que je disparaisse. Mais ce n’est pas moi qui fuis.C’est lui.Et ce matin, je refuse de le laisser partir sans avoir mis des mots sur ce qui nous consume.Je me redresse lentement, le cœur battant plus fort que je ne le voudrais. Il grogne légèrement, ses cils frémissent avant qu’il ne cligne des yeux.— Lys…Sa voix est rauque de sommeil, son bras cherche à m’attirer contre lui, mais je ne bouge pas.— On doit parler.Il se fige. Juste un instant. Puis, il pousse un soupir avant de se redresser, s’appuyant sur un coude.— Ça sonne grave.— Ça l’est.Il passe une main dans ses cheveux, visiblement en train de peser ses mots. Je ne lui lai
LysandraCiel dort. Enfin.Son souffle est irrégulier, comme s’il luttait encore contre quelque chose dans son sommeil. Je pourrais passer la nuit à le regarder, à veiller sur lui, mais la tension dans mon corps est insupportable.Je sors.L’air est froid, tranchant. La mer est calme, mais le silence est trompeur. Tout est toujours sur le fil.Comme nous.Je serre mes bras autour de moi. Je devrais être soulagée. Ciel est là. Il est vivant. Pourtant, une angoisse sourde me ronge. Comme si rien n’était réellement terminé.— Tu comptes rester dehors toute la nuit ?Je sursaute.Ciel est sur le seuil, torse nu, une couverture jetée sur ses épaules. Ses yeux sombres me sondent.— Tu devrais te reposer, dis-je doucement.— Toi aussi.Il s’avance lentement. Son visage est fermé, mais son regard brûle.— Je n’y arrive pas, murmuré-je.Il s’arrête juste devant moi.— Pourquoi ?Je détourne les yeux.— Parce que j’ai peur.— De quoi ?— Que tu disparaisses encore.Il pose une main sur ma nuque
LysandraLes jours passent, mais quelque chose s’est brisé en lui.Je le vois. Je le ressens.Ciel ne parle presque pas. Il est là, physiquement, mais son esprit semble toujours perdu dans cet espace entre la vie et la mort. Il dort peu, et quand il ferme les yeux, c’est pour se réveiller en sursaut, tremblant, le souffle court.Je ne pose pas de questions.Je sais ce que c’est.Je sais ce que c’est d’avoir vu l’autre côté et d’en être revenu avec des cicatrices invisibles.Mais ça me tue de le voir ainsi.Alors, aujourd’hui, j’ose.— Viens avec moi.Il lève un regard fatigué vers moi.— Où ?— Juste… viens.Il hésite, puis hoche la tête.Je l’emmène hors de la chambre, hors de ces murs qui semblent l’étouffer. Je l’emmène là où le vent est frais, là où l’air sent autre chose que l’odeur sterile des draps et du désinfectant.Il marche lentement, comme si son corps ne lui appartenait plus tout à fait.Quand nous atteignons la plage, il s’arrête.Le ciel est gris, l’océan agité, mais mo
LysandraLe silence.Il y a ce silence, lourd, oppressant, entre nous.Ciel dort. Enfin, il s’est assoupi, épuisé par la douleur et les jours d’inconscience. Sa main repose toujours dans la mienne, et je me surprends à en suivre du doigt chaque ligne, chaque relief. Comme pour me convaincre qu’il est là. Vraiment là.La peur ne m’a pas quittée.Elle est là, tapie dans l’ombre, prête à bondir au moindre signe de faiblesse.Parce que je sais.Je sais qu’il revient de loin. Trop loin.Son souffle est calme, mais son visage est marqué. La fièvre l’a quitté, mais son corps porte encore les stigmates de ce combat silencieux.Et moi ?Je suis là, prisonnière de ce moment, incapable de me détacher de lui.La porte s’ouvre doucement derrière moi.Je me retourne et croise le regard d’Isolde.— Il dort enfin ? murmure-t-elle.J’acquiesce, incapable de parler.Elle s’approche, pose une main sur mon épaule.— Tu devrais te reposer aussi.Je secoue la tête.— Je ne peux pas.Pas maintenant. Pas tan
LysandraCiel dort.Son souffle est plus régulier. Sa main repose toujours dans la mienne, et je ne peux pas me résoudre à la lâcher.La pièce est silencieuse, troublée seulement par la respiration lointaine des vagues qui s’échouent contre les rochers.Depuis combien de temps suis-je assise là ?Les heures se sont effilochées dans l’attente, mais mon cœur refuse de se détendre. Chaque battement est un rappel brutal de ce que j’ai failli perdre.Je n’ai jamais eu aussi peur.Pas même lorsque tout a basculé, lorsque j’ai compris que ma vie ne serait plus jamais la même.Parce que cette fois, ce n’était pas moi.C’était lui.Et l’idée de perdre Ciel…Un frisson me parcourt, comme si mon propre corps refusait d’envisager cette pensée.— Tu devrais te reposer.La voix grave me fait sursauter.Je me retourne et trouve Elijah, adossé au mur, les bras croisés. Il a cet air à la fois sévère et soucieux qu’il prend toujours quand il me regarde trop longtemps.Je secoue la tête.— Je ne peux pa
LysandraLe silence après l’orage est toujours plus terrible.Ciel a rouvert les yeux, a murmuré quelques mots, mais son souffle est encore si fragile que je n’ose pas me réjouir. Il oscille entre conscience et inconscience, comme suspendu au bord d’un précipice.Et moi, je suis là, incapable de détourner le regard.Nova et Nash font tout ce qu’ils peuvent. Ils nettoient, suturent, appliquent des compresses imbibées de plantes que je ne connais pas. Je devrais leur faire confiance, mais je n’y arrive pas.— Il va s’en sortir ?Ma voix tremble malgré moi.Nash ne répond pas tout de suite. Il termine de bander la blessure de Ciel, son expression grave.— On a stabilisé l’hémorragie. Mais il a perdu beaucoup trop de sang.— Ça veut dire quoi ?— Que les prochaines heures seront décisives.Un poids s’abat sur ma poitrine.Les prochaines heures.Je les compte déjà. Je m’imagine à chaque minute guetter le moindre changement dans sa respiration, scruter le moindre mouvement de ses paupières.
LysandraL’eau scintille sous les premières lueurs du jour, mais je ne vois rien.Tout ce qui compte, c’est la main glacée que je serre entre les miennes.Le souffle de Ciel est si faible que chaque seconde qui passe me semble être la dernière.Je devrais prier. Supplier. Mais les dieux ont tourné le dos à ceux comme nous depuis longtemps.Alors je me contente de murmurer son prénom, encore et encore.Calloway est en vue.Un port de contrebandiers, un repaire pour ceux que la mer a brisés.— Préparez-vous à accoster ! crie Kael.Je l’entends à peine.Quand le bateau tangue légèrement en s’approchant des quais, je serre les dents. Chaque mouvement me rappelle que le temps nous est compté.Nova est déjà en train d’attraper son sac de soins, mais elle sait autant que moi que ce qu’il lui faut dépasse ce qu’elle peut offrir.— On va devoir le porter, dit-elle.— Je m’en occupe.Ma voix est plus tranchante que je ne l’aurais voulu.Je passe un bras sous ses épaules, un autre sous ses jambe
Lysandra— Non !Mon cri se perd dans le vacarme. Je me précipite vers Ciel, mes jambes brûlantes d’effort, mes poumons en feu. Le sang s’écoule sous lui, tachant les pavés déjà souillés. Une balle logée quelque part dans son torse, trop près du cœur.— Ciel !Je tombe à genoux à ses côtés, mes mains cherchant désespérément la blessure, pressant la plaie pour ralentir l’hémorragie. Son regard se pose sur moi, fiévreux, mais il reste conscient.— Lysandra…— Ne parle pas.Ma voix tremble. Je ne peux pas le perdre. Pas maintenant.— On doit bouger ! crie Kael derrière moi.Les derniers hommes encore debout nous encerclent. J’attrape mon arme d’une main, déterminée à ne laisser personne l’approcher. Nova abat un homme à ma droite, Kael tire sans relâche, couvrant notre retraite.— Lys, il faut qu’on parte !Mais je refuse de lâcher Ciel.Il tressaille sous moi, sa respiration saccadée.— Tuez-les tous, rugit une voix derrière nous.Le chef ennemi.Je lève les yeux. Il s’avance, un sourir
LysandraLe vent marin s’est chargé de cendres et de sang. L’odeur est âcre, poisseuse, et pourtant, elle n’a rien d’inhabituel. Je suis accroupie derrière un amas de débris, mon souffle contrôlé, ma lame encore tiède de la dernière vie que j’ai prise. Mes doigts la serrent plus fort que nécessaire.Le silence après une bataille est toujours le plus étrange. Juste après l’explosion, le chaos, les hurlements, il y a ce vide absolu. Comme si le monde retenait son souffle, comme si la mort elle-même observait, satisfaite.Nova sort de sa cachette le premier, essuyant son front d’un revers de main. Il nous jette un regard rapide, analyse la situation, et murmure :— On doit bouger.Ses mots sont inutiles. On le sait. Ciel, lui, est déjà en mouvement, ses pas légers, ses gestes précis. Kael descend du toit et atterrit souplement, ses yeux fixés sur les corps à terre.— Ils avaient des renforts. Pas loin.Je hoche la tête, mon cœur reprenant un rythme plus violent. On n’a pas le luxe de s’a