ÉléonoreLes ténèbres qui avaient enveloppé le monde commencent à se dissiper. Ce ne sont pas seulement les ombres physiques qui se dissolvent, mais aussi celles qui étaient logées dans mon âme, celles qui ont été présentes pendant tant de siècles. Chaque souffle que je prends semble plus léger, plus pur, comme si un poids que je portais depuis des vies entières se levait enfin. L’air est frais, imprégné d’une énergie nouvelle, comme si la terre elle-même respirait à nouveau. Je ferme les yeux, me permettant de savourer ce moment de paix, ce silence qui suit le cataclysme.Andréas se tient à mes côtés, son regard plongé dans l’horizon, où le soleil commence à percer lentement à travers la brume matinale. Le vent fait danser ses cheveux, et je le regarde, m’émerveillant de la force qui émane de lui. C’est un homme changé, un homme qui a affronté l’obscurité et qui en est sorti plus lumineux. Mais ce n’est pas seulement sa transformation qui me touche ; c’est la façon dont il me regarde
ÉléonoreLe soleil est haut dans le ciel maintenant, sa lumière éclatante inondant la clairière où nous nous tenons. Le vent est doux, mais il transporte en lui un parfum d’humidité, comme si la terre, dans sa profonde sagesse, essayait d’aspirer à quelque chose de plus, quelque chose de purifié. Pourtant, malgré cette tranquillité apparente, une tension persiste dans l’air, une subtile inquiétude qui semble flotter autour de moi.Andréas et moi avons marché longtemps, sans dire un mot, mais l’absence de paroles n’a rien d’inconfortable. Parfois, le silence parle plus que tout, surtout quand les deux êtres qui le partagent sont capables de s’écouter sans le besoin de mots. Cependant, ce silence finit par se briser, comme une fine pellicule de glace qui craque sous le poids du temps.— Éléonore, dit-il doucement, ses yeux toujours fixés sur l’horizon. Il n’a pas encore regardé mes yeux, mais j’ai l’impression de pouvoir lire dans son âme, tout comme lui dans la mienne. Est-ce que tu pe
AndréasLa lumière du matin perçait à peine à travers les lourds rideaux de la chambre lorsque je me suis réveillé, un léger malaise dans le ventre, comme un pressentiment que quelque chose d'important allait se produire. Éléonore dormait à mes côtés, son souffle calme et régulier, une expression sereine sur son visage. Depuis que nous avions partagé cette soirée, ces instants de vérité entre nous, j’avais le sentiment que quelque chose s'était enclenché. Une nouvelle phase de notre histoire, où la confiance s'installait et où les secrets du passé n’étaient plus aussi lourds à porter.Mais malgré tout, il restait cette question qui me tourmentait depuis des jours, une vérité enfouie, un souvenir douloureux que je n'avais jamais partagé avec elle. Et je savais que le moment était venu. Pas maintenant, pas tout de suite, mais bientôt. Car je ne pouvais plus avancer avec ce poids sur mes épaules.Je me redressai lentement, veillant à ne pas la réveiller, et je traversai la chambre pour o
ÉléonoreLes heures qui suivirent les révélations d'Andréas passèrent dans un tourbillon d’émotions contradictoires. Le matin s'étira en une lente procession, chaque minute marquée par une intensité nouvelle. Je ne savais plus si j'avais réellement compris ce qu'il venait de me dire ou si, dans un élan de confiance aveugle, j'avais accepté trop rapidement une vérité qui risquait de me briser.Il y avait eu ce moment, entre ses mots et le silence qui suivait, où tout était suspendu, où j’avais dû choisir si j’allais croire en lui ou laisser les ombres du passé nous engloutir. Ses yeux, emplis de culpabilité et de détermination, m’avaient un instant paralysée, comme si l’humanité qu’il avait si longtemps dissimulée avait éclaté d’un coup, exigeant un prix trop lourd.Mais au fond de moi, je savais. S'il y avait bien une personne capable de réparer les erreurs, c’était lui. Et pourtant, chaque fibre de mon être me criait de m'éloigner, de fuir avant que tout cela ne nous engloutisse.Je
AndréasLe temps semblait se dilater autour de nous. La pièce, éclairée par la lueur tamisée du crépuscule qui se faufilait par les fenêtres, s'était transformée en un espace clos, presque suffocant. Chaque mot que nous échangions avait un poids immense, et je savais que, de toute façon, il était trop tard pour reculer. Le destin avait tracé son chemin, et je n'avais d'autre choix que de le suivre.Éléonore semblait plus déterminée que jamais. Je pouvais le voir dans ses yeux, ce feu qui, bien que réticent, était aussi une promesse. Une promesse qu’elle accepterait de marcher à mes côtés dans cette quête qui allait bouleverser nos vies à jamais. Mais elle portait aussi une lourde angoisse. La malédiction, qui nous unissait d'une manière que nous n’avions pas encore pleinement comprise, pesait sur ses épaules. Et moi, en tant que celui qui avait une connaissance fragmentée des événements passés, je n’avais aucune certitude quant à la manière de briser ce lien. Mais je savais qu’il fall
ÉléonoreLa nuit était tombée avant même que nous ne quittions la ville, et une brume épaisse s'était levée, enveloppant les rues de Valmeray dans un voile de mystère. Nous marchions, Andréas et moi, mais nos pas semblaient résonner différemment ce soir. Comme si chaque mouvement nous rapprochait davantage de l’inconnu, d’un destin que nous n'avions pas encore pleinement compris, mais qui nous attendait de l’autre côté de cette brume, là où la lumière peinait à pénétrer.La forêt qui s'étendait devant nous était dense, imprégnée d’un silence presque irréel. L’air était frais, chargé d’humidité, et les arbres, comme des géants anciens, se dressaient autour de nous, leurs branches tordues formant un entrelacs qui nous masquait presque le ciel. Chaque ombre semblait prendre une forme différente, et l’odeur de la terre humide se mêlait à celle de l’acier et de la poussière, comme si le temps lui-même avait laissé des traces indélébiles dans ces lieux.— Nous y sommes, murmura Andréas, sa
AndréasL’air vibrait d'une énergie que je n'avais jamais ressentie auparavant. À cet instant, j'avais l'impression que tout l’univers se concentrait sur cette pièce, sur ce médaillon. Il était comme un catalyseur, activant des forces anciennes et puissantes, que ce soit de la malédiction elle-même ou de ce que nous avions ignoré pendant tout ce temps. Le cri que nous venions d’entendre n’était pas un simple écho, c’était l’appel d’un pouvoir primordial, et il m’indiquait sans ambiguïté qu’il était trop tard pour reculer.Je n’avais pas encore eu le temps de comprendre ce qui se passait avant que les murs ne commencent à vibrer sous la pression. Les fresques, autrefois figées, semblaient prendre vie, leurs visages tourmentés se tordant dans une grimace de douleur. Les yeux des Gardiennes, qui se croyaient invisibles, se fixèrent sur moi, leur regard emplissant la salle d’un poids insupportable. Un frisson me parcourut, non pas de peur, mais de reconnaissance. Je savais, au fond de moi
ÉléonoreLe silence après l’extase lumineuse était assourdissant. C’était comme si l’univers s’était figé dans une attente pleine de menace et d'incertitude. Le médaillon reposait toujours là, sur le piédestal, son éclat affaibli mais toujours aussi hypnotique. Il semblait respirer, pulsant doucement comme un cœur qui bat dans les ténèbres. Et pourtant, je n'avais plus la force de l'approcher, comme si le simple fait de m'en rapprocher était une invitation à la catastrophe.Les échos de la vision qui s'étaient imprégnés dans mon esprit me hantaient encore. Je revivais les images de la femme mystérieuse, cette gardienne du passé, dont les yeux avaient percé les murs du temps pour voir en moi des vérités que je n’étais pas prête à affronter. La chaleur de son regard avait ravivé des souvenirs enfouis, des fragments de ma propre existence que je pensais oubliés.Andréas se tenait derrière moi, sa présence une ancre dans cette mer déchaînée de pensées. Il semblait comprendre, sans même av
ÉléonoreLe monde s’est tu. Plus de cris, plus de bataille, plus de peur. Juste le silence paisible d’un matin naissant, baigné d’une lumière douce et dorée. Je laisse mes yeux dériver sur l’horizon, savourant la quiétude après tant d’épreuves.Mais plus que le paysage, c’est lui que je ressens. Son souffle contre ma peau, son cœur battant sous ma paume, sa chaleur qui m’entoure comme un bouclier invincible.Andréas me serre contre lui, son étreinte forte et apaisante. Son menton repose sur le sommet de ma tête, et je ferme les yeux, laissant mon corps se détendre complètement. Plus besoin de lutter. Plus besoin de fuir. Nous sommes là, ensemble, et c’est tout ce qui compte.— Je n’aurais jamais cru connaître un instant comme celui-ci, murmure-t-il contre mes cheveux.Sa voix est rauque, fatiguée, mais remplie d’une tendresse infinie.Je lève la tête vers lui, ancrant mon regard au sien. Il y a tant de choses que je pourrais dire, mais à quoi bon ? Il sait déjà. Il a toujours su.Je t
ÉléonoreL’aube étire ses premiers rayons sur les ruines encore fumantes du champ de bataille. Le silence n’est plus celui de la fin, mais celui d’un commencement. Les survivants se relèvent, se cherchent, se retrouvent. Et moi, je reste là, ancrée dans le regard d’Andréas.Il ne dit rien. Je ne dis rien non plus. Nos âmes parlent pour nous, dans ce langage silencieux que seuls ceux qui ont traversé l’enfer peuvent comprendre. Ses yeux, d’un bleu profond, me transpercent, cherchant en moi quelque chose que je suis enfin prête à lui donner.Lui.Moi.Nous.Il avance d’un pas. Son souffle se mélange au mien. Ses doigts frôlent ma joue, hésitants, comme s’il craignait encore que tout cela ne soit qu’un mirage, une illusion née du combat et de la douleur. Mais je ne suis pas une illusion. Je suis là. Vivante. Prête.Alors, c’est moi qui brise la distance. Mes mains s’accrochent à lui, à cette présence qui a été mon ancre dans la tempête. Il ne recule pas. Il m’accueille, il me retient. Et
ÉléonoreJe sens les battements précipités de mon cœur résonner contre ma cage thoracique. Mon corps tremble sous le poids de l’épuisement, de l’adrénaline retombée, de la douleur qui commence à s’ancrer dans chaque fibre de mon être.Andréas me tient fermement, comme s’il craignait que je disparaisse à mon tour, emportée par les cendres encore tièdes de ce combat. Son souffle est erratique, et lorsqu’il me serre un peu plus contre lui, je ressens toute la tension qui l’a habité, toute l’angoisse qu’il a contenue.— Tu es là, souffle-t-il, comme pour se convaincre. Tu es vivante.Je hoche faiblement la tête contre son épaule, incapable de formuler une réponse. Une vague de chaleur me traverse, non pas de mon pouvoir, mais de lui. Il est ma certitude, mon ancre, celui qui m’a toujours vue telle que je suis, même lorsque je doutais.Mais tandis que mes yeux se perdent dans le ciel, un frisson parcourt mon échine. La nuit est encore lourde, l’air chargé d’un silence pesant. La victoire a
ÉléonoreLe vent hurle autour de nous, emportant avec lui des volutes de poussière et de cendres.Le ciel, chargé de nuages noirs, semble retenir son souffle.Face à moi, Gauvain se tient droit, son corps frémissant d’énergie obscure.Son regard d’acier croise le mien, et je ressens l’ombre qui palpite autour de lui, prête à fondre sur moi à la moindre ouverture.— Tu crois pouvoir me vaincre, Éléonore ? murmure-t-il, un sourire narquois étirant ses lèvres. Tu n’es qu’une enfant jouant avec un feu qui la consumera.Je ne réponds pas.Les mots ne servent plus à rien.Ce combat est la dernière étape.Celle qui décidera du destin des âmes enchaînées à cette malédiction.Celle qui scellera mon propre sort.Les Ombres DéchaînéesGauvain attaque le premier.D’un geste, il invoque un torrent d’ombres qui s’élève autour de lui, déferlant vers moi comme une vague prête à m’engloutir.Je n’ai pas le temps de réfléchir.J’agis.Mon corps bouge avec une rapidité que je ne me connaissais pas, port
ÉléonoreDerrière moi, Andréas retient son souffle.— Ne le sous-estime pas, Éléonore, murmure-t-il.Comme si c’était possible.Je serre les poings, invoquant la magie qui pulse dans mes veines.Si je dois me battre, alors ce sera sans retenue.Je refuse d’être brisée.Pas par lui. Pas par eux.L’Attaque FoudroyanteGauvain ne me laisse pas le temps d’agir.Il tend la main, et une colonne d’ombre fuse vers moi.Je l’évite de justesse en me jetant sur le côté, sentant l’air vibrer sous l’impact.Le sol se crevasse là où j’étais quelques secondes plus tôt.— Pas mal, murmure-t-il. Mais pas suffisant.Il disparaît.Non, il se fond dans l’ombre.Mon cœur bondit.Je me retourne juste à temps pour voir sa silhouette réapparaître derrière moi.Trop tard.Il me frappe de plein fouet, un choc brutal qui m’envoie rouler sur le sol.La douleur explose dans mon corps.Je me redresse en grimaçant, le goût du sang dans ma bouche.Gauvain m’observe, le regard indéchiffrable.— Tu es lente.Je serre
ÉléonoreNous ne faisons que quelques pas avant que la porte du manoir ne s’ouvre brusquement.Ils sont là.Tous les Anciens.Le Conseil.Le poids de leurs regards me cloue sur place.Léandre s’avance le premier, son visage fermé, plus grave que jamais.— Éléonore Valmeray, annonce-t-il d’une voix qui fait frissonner l’air autour de nous.— Nous devons parler.Je n’ai pas le choix.Je le savais déjà.Un jugement sans appelLa salle est glaciale.Les chandeliers projettent des ombres mouvantes sur les murs de pierre, rendant l’atmosphère encore plus oppressante.Je me tiens droite face à eux, Andréas légèrement en retrait, prêt à intervenir à la moindre menace.Léandre me fixe longuement avant de prendre la parole.— Nous avons ressenti ce qui s’est passé.Un murmure parcourt l’assemblée.— Tu as touché à ce qui n’aurait jamais dû être réveillé.Je ne détourne pas le regard.— Je l’ai fait pour comprendre.Un silence.Puis un rire amer s’élève.— Comprendre ? répète une femme aux cheve
AndréasLa lumière nous engloutit, brûlante et aveuglante.Mon instinct me hurle de courir vers Éléonore, de la protéger, mais la force qui émane d’elle est insondable. Le vent se lève dans la salle du sanctuaire, soulevant la poussière et les cendres des siècles passés. Les symboles gravés sur les murs vibrent d’une lueur surnaturelle, pulsant au rythme du cœur d’Éléonore.Et puis, tout s’arrête.Un silence funèbre.Elle est là, debout, ses cheveux flottant comme s’ils étaient portés par une brise invisible. Ses yeux ont changé. Plus brillants, plus intenses. Une aura dorée danse autour d’elle, entrelacée d’ombres mouvantes.Elle a fait son choix.Mais lequel ?— Éléonore…Je tends la main vers elle, mais un frisson me traverse quand elle pose son regard sur moi.Ce n’est plus tout à fait elle.Ou peut-être est-ce elle, enfin complète.L’Architecte esquisse un sourire.— Impressionnant.Sa voix résonne dans la pièce comme un écho lointain, empli de satisfaction et d’attente.Éléonore
Andréas Je me retourne vivement.Et je le vois.Une silhouette se dessine dans le néant, imposante, drapée dans un manteau sombre.L’Architecte.— Tu es un poison pour elle, Andréas.Sa voix résonne dans l’espace vide.Je serre les poings, prêt à attaquer.— Tu ne sais rien de nous.Un rire moqueur vibre autour de moi.— Vraiment ?Le décor change brusquement.Les ombres s’écartent, dévoilant une vaste salle, aux murs de pierre couverts d’inscriptions anciennes.Et au centre…Éléonore est à genoux.Une lumière crépusculaire l’entoure, et devant elle se tient l’apparition de sa mère.Elle pleure.Jamais je ne l’ai vue ainsi.Mon cœur se serre.— Elle se souvient, murmure l’Architecte.— Se souvient de quoi ?Il ne répond pas.Mais je le vois.Le regard d’Éléonore est perdu dans le passé.Et la silhouette de sa mère s’illumine.Les Larmes du PacteÉléonoreLes souvenirs affluent en moi.Je vois une autre époque, un autre temps.Je vois ma mère, jeune et puissante, défiant les sorciers
ÉléonoreJe lève les yeux vers le ciel nocturne. Les étoiles semblent plus ternes, comme si elles aussi avaient ressenti l’impact de notre lutte.— Il va revenir.La voix d’Andréas est rauque, presque un murmure.Je le sais. L’Architecte ne nous laissera pas en paix. Il a perdu une bataille, mais la guerre ne fait que commencer.— Nous devons partir d’ici, dis-je en me redressant.Autour de nous, les ruines du sanctuaire s’effondrent lentement. Les pierres noircies par la magie maléfique s’effritent, emportées par le vent. Ce lieu n’est plus sûr.Andréas hoche la tête et se lève, bien que son équilibre soit incertain. Je passe un bras autour de sa taille pour le soutenir, et ensemble, nous avançons à travers les décombres.Mais à chaque pas, un poids invisible s’alourdit sur ma poitrine.Quelque chose ne va pas.Je le ressens dans l’air, une présence insidieuse qui s’attarde, cachée dans l’ombre.Nous ne sommes pas seuls.L’Éveil des SpectresAndréasChaque muscle de mon corps est en