Ehli ne va pas au travail le jour venu. Dès l’entame de la matinée, Akpénè devrait rentrer avec le nouveau-né, mais il renvoie bizarrement cela sur l’après-midi, et avec exigence, maintenant mère et enfant à l’hôpital. La nouvelle maman a à son chevet, la belle-sœur Mawupemo et sa tante Anti qui a couru aussitôt la nouvelle de l’accouchement apprise à son réveil les rejoindre à la polyclinique.
A l’heure convenue, il va les chercher. Ils arrivent à la maison où les attendent Akossiwa et leur tante maternelle aussi. Stupéfaction d’Akpénè : Ehli a fait décorer le salon magnifiquement, pour accueillir le nouveau-né. « Ah, fo Ehli ! » laisse-t-elle l’échapper à son entrée dans le séjour et en reste baba. Elle n’en revient pas. Pendant ce temps,
Le petit ami de Mawupemo, administrateur dans une structure de la place, bien posé et galant, demande à faire la rencontre de ses parents et officialiser leur relation. Il faut alors à Mawupemo d’aviser les siens. Pour ce faire, elle a demandé une rencontre avec sa tante.Ayaba habite un quartier de Baguida, communément appelé « Anyassa », sur la route de Dévégo. Mawupemo arrive dans cette périphérie ce soir. Le soleil semble mort déjà dans l’horizon. Elle ouvre le portail et entre après de l’antivol mis à sa moto. Elle voit la tante qui vient de cuisiner son dîner, assise sur un tabouret devant sa chambre, s’occuper à laver les quelques ustensiles utilisées.-Evi nyé, woézon (sois la bienvenue, mon enfant), lui souhaite d’un sourire amène et affable Ayaba qui lève le regard pour la v
CHAPITRE44Assise à la terrasse ce soir, les pieds dressés et posés sur un tabouret, frottant de toute aise ses dents avec un cure-dent, Adolé oit les bruits du portail qui s’ouvre. Naturellement, son attention s’est apprêtée pour découvrir qui s’amène. Le portail se referme. C’est Mawupemo ayant franchi le seuil.La première chose qui frappe du coup la jeune femme à cette entrée dans la maison de son père après quatre mois déjà qu’elle l’a désertée est la porte, ouverte, de sa chambre qu’elle a fermée avec ses clefs et emportées. Quelques effets çà et là sur l’élévation de la terrasse témoignent de facto la présence d’un possesseur des lieux. Elle ne s’y trompe pas. Une jeune femme sort de la pièce avec pagne au bust
Cimetière de Bè Kpota. Aux pieds de son papa, devant sa tombe, Mawupemo se tient. Elle médite un instant, laissant aux larmes l’accès sur ses joues et dit : « papa, je suis venue à toi aujourd’hui et je sais que tu m’entends, toi qui es parti tôt me laisser sans même m’avertir. Tu es parti, papa, sans m’avoir préparée auparavant à ton absence cruelle. La douleur a été très atroce dans mon cœur. Elle demeure. Mais, j’ai accepté de faire avec, et je finis par accepter la triste réalité pour avancer autrement comme tu me l’aurais souhaité, comme tu me l’aurais recommandé, si tu avais le choix de ton départ, pour me faire un au revoir et me sermonner. Tu n’avais pas le choix, tu ne t’y attendais pas, tu étais pris au dépourvu précocement et emporté de force, r
En l'espace de quatre années, Akpénè devient une femme d'affaire épanouie avec son commerce. Comme toute chose, le début, pour elle, fut une tâche ardue. Elle ne s'y retrouvait vraiment pas. Mais, elle s'était fait une promesse de tenir quoi qu'il en soit pour ne pas décevoir l'ami ayant mis toute une confiance inébranlable en elle. C'était pour elle une forme de pression qu'elle subissait psychologiquement : réussir à tout prix, et elle s'y investissait avec toutes les convictions. Décevoir Ehli, serait répandre sur soi, une grande honte, se révéler incapable. Cette seule idée la hantait, et ne devrait pour rien être. Alors, à l'abnégation et à la résilience, elle s'est donnée.Ehli était là pour lui apporter toute assistance à tous les coups pour que le défi lui soit relev&eac
Toute cette journée, au bureau, Ehli ne trouve pas de concentration pour vaquer effectivement à son travail. Ses esprits divaguent, envahi par Akpénè. Elle le submerge. Complètement. Toutes ses pensées restent figées sur son amie ; elle le hante. Il n’en revient pas, ne comprend pas. Il ne comprend pas ce qui lui arrive, ce qui se passe avec lui. Et pourquoi c'est envers cette dernière, brusquement. Il languit dans son siège. Rien de bon n'est possible qu'il fasse. «Qu'est-ce qui m'arrive ?» se demande-il. «Suis-je en train d'éprouver quelque sentiment pour toi ou quoi, Akpénè ? Et comment est-ce possible ? Ne suis-je pas en train de perdre la raison maintenant de t'avoir en esprit, toi qui m'es une sœur, une sœur jumelle ? De sentir mon cœur battre pour toi ? Que tu me donnes des frissons et que toute ma chair n’aille à toi, te
La vie d’Amézado devient de jour en jour plus qu’une turbulence. Pas de minute qui passe sans qu’il ne regrette Akpénè et les enfants, sans qu’il ne rêvasse. Ses instants sont hantés par les sourires du passé de sa petite famille. Il revoit leurs amusements, le bonheur dans lequel il vivait entre sa femme et son enfant. Sa maison qui était joyeuse, un simple sourire lui y est interdit aujourd’hui: mélancolique maison devenue. Il appréhende même d’y mettre pieds et les soirs, au sortir du boulot, dans l’alcool il pense trouver refuge, soit, il erre dans la ville pour rentrer tardivement afin de ne pas croiser son pire écœurement et avoir à faire encore à du tournis, à de coups de bec, car Massogblé ne manque point d’occasion de lui mettre la flamme, de le couvrir d’injures, d’invectives... Sa maiso
Presque toute la nuit, Ehli fait du projet d’Akpénè, une méditation. Il tourne et retourne dans ses pensées son idée pour la jauger et percevoir ce qu’elle a en soi réellement d’intéressant en y mettant pas des émotions, et en quoi elle pourrait être concrète, hélas, il n’y trouve rien qui lui fasse effet. En ce projet, il ne se retrouve pas tout à fait enthousiaste quand il le sonde à fond, pour s’y jeter. Toutefois, au terme, il se fait une résolution: Akpénè, puisqu’il croit en elle, en son potentiel, en ses capacités et lui fait confiance, il ne va pas lui refuser son appui et de ne pas l’accompagner, car il le sait si bien, son refus la désenchantera et la démotivera. Il lui causera du dépit, du chagrin et l’abattra. Il va de ce fait porter l’initiative avec elle
Aussitôt le retour d’Amézado à la maison, il va s’enfermer, dépité, le fiel, en possession de toute son âme, dans la chambre de sa fille Sitsopé, laquelle chambre il a faite sienne, en abandonnant aussi, comme c’était le cas d’Akpénè, la chambre conjugale où il ne met guère pieds. Il sonne à peine dix-huit heures. Le soleil ne finit même pas encore de prendre sa forme rouge dans l’horizon, pour achever complètement sa course dans le ciel aux nuages épars en retirant ses derniers rayons. Pas de Massogblé avec leur enfant à la maison à son retour. Cela est d’ailleurs la dernière des choses qui l’importent ; si elle est là ou pas, si elle existe encore ou pas. Et si elle pouvait disparaître, partir où elle voudra, s’évaporer dans la nature et ne point paraître sous ses ye
CHAPITRE 64Retour de l’hôpitalCe soir, le ciel affiche un air beau, jovial et souriant: un croissant de lune est peint sur son visage, donnant un coup de pied enchanteur dans sa monotonie lugubre, lassante, telle une étincelle qui scintille au fond des ténèbres affreuses pour allumer l’espoir. 19 heures sont déjà bien absorbées par les heures suivantes. Ce, est le moment choisi par Amézado pour rentrer chez lui après des semaines à l’hôpital afin que son retour ne soit connu vraiment par le voisinage qu’au lever du jour; un retour nocturnement clandestin programmé.La porte de son séjour s’ouvre. La lumière de la torche creuse du trou dans l’épaisse obscurité qu’y siège céans pour la dissiper. Lorsque le living-room s’éclaire enfin vivement sous le coup de ma
CHAPITRE 65Les larmes d’une épouseEncore une journée qui trouve sa trêve dans une joie effective pour Akpénè et Ehli. Ils sont si fiers d’eux. L’opération des yeux du sieur LIASSIDJI est d’un éclat de succès et les remplit d’enjouement, de satisfaction absolue. L’homme recouvre sa vue et redécouvre de nouveau la lumière qui éblouit la nature et toute la beauté qui jaillit de tout ce qui la compose. Quelle fierté pour ce couple d’avoir offert encore la vue à cet homme et surtout de lui redonner de l’espoir. Comme ils l’ont pris sur eux de lui apporter le leur, ils ont financé intégralement son opération. Aujourd’hui, la bande est enlevée sur les yeux et LIASSIDI a pu poser avec enchantement un visage sur ces bienfaiteurs de nulle part que la fortune lui a envoyés.
CHAPITRE 63Un pari gagnéDepuis le manque d’harmonie et de leur hilarité qui siège chez elle à la maison, Sitsopé n’a plus d’entrain, elle n’a plus de sourire, elle n’a maintenant que ça, et rien que ça: être tristement recroquevillée sur soi tout le temps, cette humeur qui lui colle la peau pour la transporter jusqu’aux cours aussi. Même aux heures de pause, elle ne s’y intéresse pas pour sortir. Camarades et professeurs remarquent bien que des jours déjà, elle n’est plus la même personne, mais elle ne laisse ouverture sur elle a personne.Au fond de sa classe, à la pause de ce midi avant la reprise des cours pour la continuité de cette journée, elle se tient une fois de plus, toujours repliée sur soi, le front posé sur la table.Elle est la seule à y &e
CHAPITRE 62La révoltePour parler à ses enfants de leur père, Akpénè initie avec Ehli ce soir, après le dîner, une partie de jeux, d’histoires drôles et de devinettes.Toute la famille, y compris Selom, est bien réunie sous la houlette divertissante du chef de la maison. Ils se piquent, ils se frappent, ils se taquinent…, et ils rient aux éclats. C’est toute une bonne humeur ce soir dans le salon autour de la table.Enfin, Ehli juge le moment propice de passer à l’action. Discrètement, il va pincer Akpénè. Celle-ci comprenant son geste, d’abord, déglutit puis, son élan ralentit systématiquement. Elle va le regarder dans les yeux et il lui hoche la tête. Elle prend un soupir comme si elle avait peur avant d’aller:-«Euh… ma chérie!&ra
CHAPITRE 61Amézado ouvre les yeux. Un peu de vie semble regagner ses muscles des heures après, un profond sommeil, sous les produits qui lui sont administrés à son arrivée à l’hôpital pour le stabiliser. Il se met à distinguer les choses autour de soi et voit sa sœur assise à ses côtés dans un état angoissé, puis se rend compte être dans une salle d’hôpital. Il perçoit la bouteille du sérum au-dessus de ses pieds à la tige d’accrochage au lit et se rend compte de la perfusion à son bras gauche. Il soupire langoureusement. Et d’une voix faible, il appelle la sœur:«Mawupemo!»Mawupemo s’éveille: «fogan!», s’émeut-elle, «tu es réveillé?».Tell
CHAPITRE 60Un soupçon avéréC’est au week-end de cette semaine, précisément le dimanche, dans la matinée, que le couple Akpénè - Ehli se retrouve au village d’Akpénè pour rattraper leur programme manqué à cause des imprévus et des pas auprès du sieur LIASSIDJI pour l’opération de ses yeux à laquelle ils tiennent fervemment. Ils vont devant la famille d’Akpénè, pour leur annoncer leur relation ainsi que leur projet de se marier. Toute la famille est jovialement présente, les tantes, les oncles, pour les accueillir, sans aucune idée du dessous effectif de cette rencontre. Et ils n’en reviennent pas lorsqu’Ehli ouvre la parole sur le sujet pour les ébahir… Tous en restent médusés dans l’instant et cela leur sonne comme une blague, sauf M
Chapitre 59UNE JOURNEE NOIREPas la moindre concentration qui lui vienne devant sa machine. Son partenariat avec dame EWILO révoqué, Amézado retrouve fadement le chemin de son bureau, pour s’absorber dans le travail afin de ne pas mourir de chagrin en restant chambré chez lui. Mais il ne parvient pas à rassembler ses esprits pour s’attacher à quoi que vaille. Toutes ses pensées font des tours incessants sur Akpénè et sa nouvelle relation. Il n’en revient toujours pas, ça lui sonne du creux. Il sent le besoin de s’évader, partir ailleurs, loin de tout, à essayer d’oublier. Cependant, cela ne pourrait pas être une solution: un changement géographique pour lui opérer une telle magie. Le vide, son vide profond qu’il ressent, est tout au fond de lui, dans son âme, dans ses esprits, pour le suivre partout o&ugr
Chapitre58AssociéesAdidogome. Sur la voix attenante à Rue la Pampa, à quelques pas du carrefour Agbémadon.-Arrête, s’il te plaît, mon amour!La belle bagnole, ne pouvant pas déjà filer même si le conducteur le voulait si bien, ceci, à cause de la voix si redoutable, s’immobilise de côté à la demande brusque de la dame.-Un souci? demande-t-il.-Tu as pu remarquer ce que je viens de frôler de regard, chéri? demande la femme.-Non, mon amour. De quoi s’agit-il?-Regarde derrière!Quinze heures sont dépassées de quelques minutes. La pluie qui a coulé sur Tokoin Novissi est complètement ignorée ici. Le soleil continue de s’imposer dans les cieux. A cette heure. Le couple, dans la voiture immobilisée,
Chapitre 57 Cinq jours après le retour d’Amézado de la clinique. Et son humeur est plus aigre à chaque lever du soleil qui, naturellement, émerveille, éblouit tout ce qui se meut sur la terre. Du fiel règne en autocrate dans son âme. Cinq jours qu’il retourne, acrimonieusement, dans son pauvre cœurpétri : «c’est maintenant que Akpénè s’est engagée dans une nouvelle relation! Akpénè, mon Akpénè! C’est maintenant qu’elle le fait alors qu’elle s’était préservéedepuis tout ce temps! C’est maintenant où, n’en pouvant plus, je me forge enfin ce courage de l’aborder et tenter de recoller nos morceaux, ramper même à ses pieds si c’était nécessaire, que mon Akpénè s’est engagée dans une nouvelle relation! Et elle n’a trouvé personne d’autre que celui qui m’était un frère sang?» Son espoir d’essayer de redevenir soi, est définitivement perdu, au bout de ses turpitudes, pense-t-il, les larmes tenant compa